01-07-2022, 02:55 PM
Je commence un nouveau récit en espérant que vous prendrez du plaisir à le lire et à le suivre. Je lance un vibrant appel pour que vous soyez nombreux à intervenir et à faire part de votre ressenti afin que "Slygame" soit un instrument vivant et un lieu d'échange.
La Bergerie
Vingt-trois ans, 180 cm pour environ soixante-dix kilos, une chevelure brune et des yeux bleu clair, un nez standard et des lèvres parait-il attirantes et, enfin, un pantalon bien rempli de tout ce qui serait nécessaire pour plaire aux femmes et pour attirer, parfois, le regard des garçons, tout au moins de certains d'entre eux. Je me prénomme Antoine donc rien d'excentrique non plus de ce côté-là. Par contre, je suis une grosse tête et j'ai brillamment passé ma maturité, fédérale et non cantonale en raison de longs mois de maladie qui m'ont cloué dans les lits d'hôpitaux. J'ai passé deux masters, en littérature et en sciences sociales. Actuellement j'aborde les recherches pour préparer un doctorat où j'ai l'embarras du choix car deux professeurs souhaiteraient ma collaboration. Mes capacités universitaires n'étant bien sûr pas affichées sur mon visage, je suis un garçon parfaitement neutre, un peu passepartout, ce qui m'arrange tout à fait.
Un garçon parfaitement neutre, cela qualifie parfaitement ce que je suis dans la réalité. Depuis toujours, la seule chose qui m'intéresse ce sont les études : plus elles sont abstraites et difficiles, plus cela me stimule, plus cela me passionne et m'incite à comprendre. Dit simplement, j'aime le travail intellectuel. Je ne suis pas asocial mais il est également vrai que ma conception de la vie n'est pas particulièrement attrayante pour mes amis qui me recherchent de moins en moins.
Par contre j'ai une véritable passion pour la montagne. J'aime la montagne pour la beauté rude de ses paysages, l'élégance des chaînes rocheuses, la majesté des sommets couverts de neige éternelle. J'aime la solitude que j'y trouve, le silence que seul le sifflement du vent et le bruit des chutes de pierres ou de séracs viennent troubler.
Vous me connaîtrez vraiment lorsque vous aurez compris que la sexualité est le cadet de mes soucis, même si la littérature et les livres spécialisés ont contribué à ce que je ne suis pas ignorant de ces questions. Comme tous les garçons, j'ai la gaule matinale, des pollutions nocturnes avec les rêves qui les accompagnent ou les précèdent, des éjaculations dues à des manipulations plus ou moins involontaires. Mais toutes ces manifestations me laissent relativement indifférent. Que voulez-vous, je suis comme je suis et je ne m'en trouve pas plus mal.
Grâce aux progrès de l'informatique et surtout de la numérisation de plus en plus vaste des bibliothèques universitaires dans le monde, je passe l'essentiel de mon temps dans une petite station de montagne où je dispose d'un appartement confortable, suffisamment grand pour que je puisse consacrer une pièce pour y travailler. Au début, j'avais choisi la chambre donnant sur un panorama exceptionnel. Mais je me suis vite rendu compte que cela me distrayait et que je restais parfois de longues minutes à contempler le paysage de sorte que j'ai finalement changé pour l'arrière de mon appartement. À cinquante mètres de la pièce où je travaille, il y a un beau chalet au rez-de-chaussée duquel se trouve un appartement aux grandes baies vitrées d'où les occupants pourraient me surveiller s'ils en avaient envie. Heureusement ils sont discrets et ne viennent que les weekends mais irrégulièrement. Un jeune homme occupe cet appartement en permanence pour dormir et les weekends. La journée, je crois qu'il est surveillant dans un institut alpin pour jeunes gens. Je l'entrevois donc le matin et le soir et il doit occuper la chambre tout à gauche, celle dont le store à lamelles est toujours baissé, probablement pour protéger son intimité puisque l'un comme l'autre nous plongeons dans nos chambres. Sa discrétion m'arrange donc, même si parfois j'ai l'impression que le store bouge, comme si quelqu'un cherchait discrètement à observer ce qui se passe dehors ou même chez moi lorsque je travaille car mon ordinateur est exactement en face de sa chambre. Cela ne me dérange absolument pas, cela m'amuse même.
"Mens sana in corpore sano", je suis un passionné de randonnées. En été je cours dans les montagnes et en hiver je chausse mes skis pour faire de longues courses, le plus souvent hors des chemins battus car je n'apprécie pas la foule. Un vendredi après-midi, étant en avance sur mon programme, je décide de m'octroyer trois jours de relaxation et de rejoindre la Bergerie malgré un temps exécrable : il fait très froid, la neige tombe de plus en plus fortement et le vent forcit. La plus part des personnes dotées d’un minimum de bon sens resterait chez elles alors que moi cela me stimule, j’aime me confronter avec les éléments, même déchaînés.
Ma Bergerie, c'est en fait un minuscule chalet avec un petit séjour/cuisine doté d'un potager à bois, une pièce avec une couchette et demie, suffisante pour deux personnes si on accepte d'être serré mais ce n'est pas grave car je n'amène jamais personne ici, c'est mon domaine secret. Il y a une grosse bonbonne de gaz pour rapidement réchauffer la pièce avant que le potager répande sa chaleur. Par contre un luxe fabuleux, sous ce minuscule bâtiment il y a une source d'eau dont la température est toute l'année à 10°. Des toilettes sèches accolées à l'une des façades extérieures, à peine plus grandes qu'une petite armoire de sorte qu'il vaut mieux baisser et remonter son pantalon à l'extérieur. Une petite fenêtre éclaire plus ou moins bien mon petit paradis lequel demande malgré tout trois bonnes heures de montée avec les peaux de phoque depuis le petit parking où je laisse la voiture équipée de solides chaînes à neige.
Je prépare mon sac avec de la nourriture fraîche, le reste je l'apporte en été avec un 4/4 que je loue pour la circonstance de sorte que je suis raisonnablement chargé lorsque je monte en hiver. En descendant sortir mes skis, je vois le jeune homme d'en face qui me salue aimablement
- Vous n'allez quand même pas partir avec le temps qu'il fait, cela fait plus de trente heures qu'il neige et cela continue
- Mais bien sûr, si tu savais comme c'est beau avec toute cette neige
- Oh oui ! j'imagine, je vous envie chaque fois que je vous vois vous préparer
- Tu veux venir avec moi ? Si cela te dit, tu as trente minutes pour t'équiper
- Vous êtes sérieux ? Je peux vraiment vous accompagner ?
- Puisque je te le propose, c'est que tu peux dire oui !
Le garçon a les yeux qui brillent de joie. Je lui pose un certain nombre de questions, lui donne quelques instructions sur ce qu'il doit emporter et je lui précise malgré tout que la montée prendra au minimum trois heures et que je pense ne redescendre que dimanche soir ou même lundi matin. Moins d'une heure plus tard, nous sommes en route et rapidement nous arrivons à la fin de la route et, même avec les chaînes, nous passons de justesse. Je ne comprends pas ce qui m'a pris de lui proposer de m'accompagner, je m'en veux mais je ne peux évidemment pas faire marche arrière.
Je suis devant et depuis plus d'une heure, j'ouvre le chemin dans une quantité impressionnante de neige fraîche, poudreuse à souhait de sorte que ce n'est pas trop pénible mais malgré tout ! Je lui demande de prendre la tête, le temps que je puisse souffler un peu. Il a l'air un peu inquiet quant à la route à suivre et je le rassure en lui disant d'aller tout droit aussi longtemps que je ne lui dis rien. Soudain, je me mets à rire : ses cheveux et sourcils noirs sont couverts de neige blanche et cela lui donne un petit aspect de fantôme. Je lui demande son nom car je réalise que je ne l'ai pas encore fait Il s'excuse de ne pas s'être présenté : Je m'appelle Jules dit-il. Régulièrement nous faisons un brève halte pour souffler, la neige redouble, l'atmosphère est comme ouatée, les sons sont étouffés, s'en est presque impressionnant, même pour moi. Un bruit m'arrête brusquement, trois chamois se frayent péniblement un chemin, ils s'enfoncent dans la neige et leurs ventres forment comme une traînée dans la neige. Nous restons parfaitement immobiles pour ne pas les effrayer car l'hiver est suffisamment pénible pour ces animaux qui n'ont vraiment pas besoin d'être stressés par les humains alors qu'ils sont chez eux. J'ai repris depuis un moment la tête car trouver la meilleure route dans la forêt n'est pas évident, même pour moi qui connait bien l'endroit. Je sens que mon compagnon commence à fatiguer, je le réconforte en lui disant que dans une petite heure nous serons arrivés ; en fait je sais qu'il nous reste une trentaine de minutes mais il vaut toujours mieux annoncer plus que moins. Sous le couvert de la forêt la lumière commençe à se faire rare et le contraste avec le pâturage dans lequel nous débouchons est saisissant d'autant qu'il neige un peu moins fort. La respiration commence à se faire un peu courte, nous sommes malgré tout à un peu plus de 2'000 mètres, l'abondance de neige fait qu'il y a longtemps que nous ne voyons plus nos skis qui laissent après notre passage une trace de 50 cm de profondeur. La pente s'est encore accentuée depuis que nous avons quitté la forêt ce qui nous contraint à faire de longs zigzags avec chaque fois une conversion ce qui dans la haute neige n'est pas forcément évident : Jules en fait l'expérience par deux fois et la seconde je ne le voyais pratiquement plus, enfoui qu'il était dans la poudreuse ; sans mon aide, il aurait vraiment eu de la peine à se sortir seul de cette situation. C'était cocasse, j'étais mort de rire, lui un peu moins car la neige s'était infiltrée sous ses vêtements et il claquait des dents. Il n'a pas eu de chance car cinq minutes plus tard ma Bergerie émergeait de la neige dont la hauteur atteignait presque le bord inférieur de la fenêtre. Les anciens connaissaient bien le climat et les rigueurs de l'hiver car la porte à deux battants superposés, très agréables en été, n'était pas trop enneigée et en quelques pelletées de pelle à neige nous pouvions entrer après nous être bien secoués de toute la neige que nous avions sur nous, spécialement Jules avec sa chute !
Le thermomètre extérieur indique bravement -12°, à l'intérieur il ne doit guère y avoir que quelques degrés de plus aussi mon tout premier geste est d'allumer le petit chauffage à gaz et, miracle, il démarre du premier coup. La pièce est si petite qu'assez rapidement la température sera agréable, dans la zone positive. Avant d'enlever mon équipement d'hiver, je vais encore dégager l'accès des toilettes. Malgré le froid, je suis en transpiration et il faut rapidement mettre des vêtements secs si on ne veut pas "attraper la mort" comme disait ma grand'mère. En quelques secondes je suis nu, je me sèche le corps avec un linge sec mais glacial et c'est avec délice que je me rhabille et enfile un pullover norvégien en laine brute, un peu râpeux mais si chaud ! Je sais par expérience que rapidement je vais avoir trop chaud et que je me retrouverai en chemise, molletonnée il est vrai. Jules a juste enlevé sa combinaison de ski, il est debout et je le vois qui claque des dents. Il a trop froid pour se déshabiller mais je l'enjoints impérativement de suivre mon exemple ce qu'il fait en ronchonnant. Je le surveille de l'œil car il est vraiment important de se changer et je vois qu'il a conservé slip et caleçon long. Je le sens gêné mais il s'exécute alors que discrètement je lui tourne le dos. Je l'installe à proximité du fourneau à bois qu'entretemps j'ai allumé et où brûle un feu d'enfer. Au bout d'un moment je n'entends plus que le crépitement des bûches alors qu'avant les mâchoires de Jules s'en donnaient à cœur joie ! Ce soir ce sera bolognaise avec une sauce maison que m'avait préparée une amie. J'avais prévu de la salade mais la sauce, que j'ai oublié de mettre près du feu, étant gelée, il a fallu y renoncer. Le vin est beaucoup trop froid mais cela ne l'empêchera pas de nous réchauffer le corps et l'esprit !
La soirée se déroule très agréablement et nous profitons de faire mieux connaissance car en fait nous ne savons absolument rien de l'autre puisque c'est la première fois que nous nous parlons, à part des formules de politesse. En fait c'est un garçon très seul et c'est l'une des explications qu'il m'a donnée lorsque j'ai évoqué son store qui avait tendance à bouger sans raison : à certains moments, il ressentait le besoin impérieux de voir du monde, de sentir quelqu'un à proximité et que cela lui faisait du bien de me regarder. Il s'est particulièrement excusé lorsqu'il m'a, par inadvertance, avoué qu'il lui était même arrivé de me voir me coucher. Du coup c'est moi qui ait rougi car j'ai l'habitude de dormir à poil, je déteste sentir mon corps limité dans ses mouvements.
La soirée est bien avancée et je remarque que Jules est somnolant ce qui n'a rien de surprenant car la journée a été rude pour lui. Comme d'habitude, en sortant pour aller aux toilettes, je regarde le thermomètre, il indique -19°, il ne neige plus le ciel est constellé d'étoiles comme on peut le voir les seules nuits d'hiver. Jules est rentré après avoir satisfait ses besoins, il grelotte de nouveau, cela doit être la fatigue. Je reste un moment à contempler ce spectacle céleste qui chaque fois me procure une certaine mélancolie devant le mystère insondable de l'univers. Le froid me saisit, je rentre et je trouve mon camarade un peu désemparé car il ne sait pas comment va s'organiser la nuit.
Exceptionnellement je garde mon boxer car j'ai un invité que je ne veux pas heurter. Jules s'apprête à se vêtir d'un maximum de vêtements mais je sais très bien qu'au bout d'un moment il aura beaucoup trop chaud et qu'il devra se dévêtir dans l'obscurité et surtout dans le froid glacial. J'insiste pour qu'il fasse comme moi et ne garde que son sous-vêtement. La lampe à acétylène est éteinte et c'est à la lueur de ma lampe de poche que je m'installe à côté de mon camarade de course. C'est vrai qu'il fait froid, le thermomètre intérieur ne doit guère dépasser 0° et encore. Je l'entends et je le sens qui tremble de froid à moins que ce soit la crainte de dormir à côté d’un presque inconnu. Je lui suggère de se plaquer contre mon dos pour profiter de ma chaleur. Il hésite, je pense qu'il se gêne de cette proximité corporelle qui, personnellement me laisse indifférent. Son désir de se réchauffer est le plus fort et il suit mon conseil. Je réalise alors qu'il n'est pas du tout timide car il se plaque fermement, thorax et bas-ventre, contre mon dos. Juste avant de m'endormir il a passé son bras pardessus mon corps ce qui lui donne un peu plus de place. À plusieurs reprises, j'ai vaguement ouvert un œil, je n'ai pas l'habitude d'avoir quelqu'un à mes côtés. Il m'arrive parfois d'avoir des rêves érotiques se terminant pas une éjaculation que je ne constate qu'au réveil ce qui me laisse mal à l'aise car généralement je ne comprends pas ce qui s'est passé n'ayant gardé aucun souvenir de ces songes : je ne vois que le résultat : un drap souillé par un liquide visqueux, parfois odorant. Je ne suis pas ignorant, je sais que c'est du sperme mais pour moi cela ne peut survenir que si on le provoque manuellement. En pleine nuit, je me réveille en sachant pertinemment que je ne rêve pas, qu'il y a objectivement une barre dans mon dos. Je me rendors.
La Bergerie
Vingt-trois ans, 180 cm pour environ soixante-dix kilos, une chevelure brune et des yeux bleu clair, un nez standard et des lèvres parait-il attirantes et, enfin, un pantalon bien rempli de tout ce qui serait nécessaire pour plaire aux femmes et pour attirer, parfois, le regard des garçons, tout au moins de certains d'entre eux. Je me prénomme Antoine donc rien d'excentrique non plus de ce côté-là. Par contre, je suis une grosse tête et j'ai brillamment passé ma maturité, fédérale et non cantonale en raison de longs mois de maladie qui m'ont cloué dans les lits d'hôpitaux. J'ai passé deux masters, en littérature et en sciences sociales. Actuellement j'aborde les recherches pour préparer un doctorat où j'ai l'embarras du choix car deux professeurs souhaiteraient ma collaboration. Mes capacités universitaires n'étant bien sûr pas affichées sur mon visage, je suis un garçon parfaitement neutre, un peu passepartout, ce qui m'arrange tout à fait.
Un garçon parfaitement neutre, cela qualifie parfaitement ce que je suis dans la réalité. Depuis toujours, la seule chose qui m'intéresse ce sont les études : plus elles sont abstraites et difficiles, plus cela me stimule, plus cela me passionne et m'incite à comprendre. Dit simplement, j'aime le travail intellectuel. Je ne suis pas asocial mais il est également vrai que ma conception de la vie n'est pas particulièrement attrayante pour mes amis qui me recherchent de moins en moins.
Par contre j'ai une véritable passion pour la montagne. J'aime la montagne pour la beauté rude de ses paysages, l'élégance des chaînes rocheuses, la majesté des sommets couverts de neige éternelle. J'aime la solitude que j'y trouve, le silence que seul le sifflement du vent et le bruit des chutes de pierres ou de séracs viennent troubler.
Vous me connaîtrez vraiment lorsque vous aurez compris que la sexualité est le cadet de mes soucis, même si la littérature et les livres spécialisés ont contribué à ce que je ne suis pas ignorant de ces questions. Comme tous les garçons, j'ai la gaule matinale, des pollutions nocturnes avec les rêves qui les accompagnent ou les précèdent, des éjaculations dues à des manipulations plus ou moins involontaires. Mais toutes ces manifestations me laissent relativement indifférent. Que voulez-vous, je suis comme je suis et je ne m'en trouve pas plus mal.
Grâce aux progrès de l'informatique et surtout de la numérisation de plus en plus vaste des bibliothèques universitaires dans le monde, je passe l'essentiel de mon temps dans une petite station de montagne où je dispose d'un appartement confortable, suffisamment grand pour que je puisse consacrer une pièce pour y travailler. Au début, j'avais choisi la chambre donnant sur un panorama exceptionnel. Mais je me suis vite rendu compte que cela me distrayait et que je restais parfois de longues minutes à contempler le paysage de sorte que j'ai finalement changé pour l'arrière de mon appartement. À cinquante mètres de la pièce où je travaille, il y a un beau chalet au rez-de-chaussée duquel se trouve un appartement aux grandes baies vitrées d'où les occupants pourraient me surveiller s'ils en avaient envie. Heureusement ils sont discrets et ne viennent que les weekends mais irrégulièrement. Un jeune homme occupe cet appartement en permanence pour dormir et les weekends. La journée, je crois qu'il est surveillant dans un institut alpin pour jeunes gens. Je l'entrevois donc le matin et le soir et il doit occuper la chambre tout à gauche, celle dont le store à lamelles est toujours baissé, probablement pour protéger son intimité puisque l'un comme l'autre nous plongeons dans nos chambres. Sa discrétion m'arrange donc, même si parfois j'ai l'impression que le store bouge, comme si quelqu'un cherchait discrètement à observer ce qui se passe dehors ou même chez moi lorsque je travaille car mon ordinateur est exactement en face de sa chambre. Cela ne me dérange absolument pas, cela m'amuse même.
"Mens sana in corpore sano", je suis un passionné de randonnées. En été je cours dans les montagnes et en hiver je chausse mes skis pour faire de longues courses, le plus souvent hors des chemins battus car je n'apprécie pas la foule. Un vendredi après-midi, étant en avance sur mon programme, je décide de m'octroyer trois jours de relaxation et de rejoindre la Bergerie malgré un temps exécrable : il fait très froid, la neige tombe de plus en plus fortement et le vent forcit. La plus part des personnes dotées d’un minimum de bon sens resterait chez elles alors que moi cela me stimule, j’aime me confronter avec les éléments, même déchaînés.
Ma Bergerie, c'est en fait un minuscule chalet avec un petit séjour/cuisine doté d'un potager à bois, une pièce avec une couchette et demie, suffisante pour deux personnes si on accepte d'être serré mais ce n'est pas grave car je n'amène jamais personne ici, c'est mon domaine secret. Il y a une grosse bonbonne de gaz pour rapidement réchauffer la pièce avant que le potager répande sa chaleur. Par contre un luxe fabuleux, sous ce minuscule bâtiment il y a une source d'eau dont la température est toute l'année à 10°. Des toilettes sèches accolées à l'une des façades extérieures, à peine plus grandes qu'une petite armoire de sorte qu'il vaut mieux baisser et remonter son pantalon à l'extérieur. Une petite fenêtre éclaire plus ou moins bien mon petit paradis lequel demande malgré tout trois bonnes heures de montée avec les peaux de phoque depuis le petit parking où je laisse la voiture équipée de solides chaînes à neige.
Je prépare mon sac avec de la nourriture fraîche, le reste je l'apporte en été avec un 4/4 que je loue pour la circonstance de sorte que je suis raisonnablement chargé lorsque je monte en hiver. En descendant sortir mes skis, je vois le jeune homme d'en face qui me salue aimablement
- Vous n'allez quand même pas partir avec le temps qu'il fait, cela fait plus de trente heures qu'il neige et cela continue
- Mais bien sûr, si tu savais comme c'est beau avec toute cette neige
- Oh oui ! j'imagine, je vous envie chaque fois que je vous vois vous préparer
- Tu veux venir avec moi ? Si cela te dit, tu as trente minutes pour t'équiper
- Vous êtes sérieux ? Je peux vraiment vous accompagner ?
- Puisque je te le propose, c'est que tu peux dire oui !
Le garçon a les yeux qui brillent de joie. Je lui pose un certain nombre de questions, lui donne quelques instructions sur ce qu'il doit emporter et je lui précise malgré tout que la montée prendra au minimum trois heures et que je pense ne redescendre que dimanche soir ou même lundi matin. Moins d'une heure plus tard, nous sommes en route et rapidement nous arrivons à la fin de la route et, même avec les chaînes, nous passons de justesse. Je ne comprends pas ce qui m'a pris de lui proposer de m'accompagner, je m'en veux mais je ne peux évidemment pas faire marche arrière.
Je suis devant et depuis plus d'une heure, j'ouvre le chemin dans une quantité impressionnante de neige fraîche, poudreuse à souhait de sorte que ce n'est pas trop pénible mais malgré tout ! Je lui demande de prendre la tête, le temps que je puisse souffler un peu. Il a l'air un peu inquiet quant à la route à suivre et je le rassure en lui disant d'aller tout droit aussi longtemps que je ne lui dis rien. Soudain, je me mets à rire : ses cheveux et sourcils noirs sont couverts de neige blanche et cela lui donne un petit aspect de fantôme. Je lui demande son nom car je réalise que je ne l'ai pas encore fait Il s'excuse de ne pas s'être présenté : Je m'appelle Jules dit-il. Régulièrement nous faisons un brève halte pour souffler, la neige redouble, l'atmosphère est comme ouatée, les sons sont étouffés, s'en est presque impressionnant, même pour moi. Un bruit m'arrête brusquement, trois chamois se frayent péniblement un chemin, ils s'enfoncent dans la neige et leurs ventres forment comme une traînée dans la neige. Nous restons parfaitement immobiles pour ne pas les effrayer car l'hiver est suffisamment pénible pour ces animaux qui n'ont vraiment pas besoin d'être stressés par les humains alors qu'ils sont chez eux. J'ai repris depuis un moment la tête car trouver la meilleure route dans la forêt n'est pas évident, même pour moi qui connait bien l'endroit. Je sens que mon compagnon commence à fatiguer, je le réconforte en lui disant que dans une petite heure nous serons arrivés ; en fait je sais qu'il nous reste une trentaine de minutes mais il vaut toujours mieux annoncer plus que moins. Sous le couvert de la forêt la lumière commençe à se faire rare et le contraste avec le pâturage dans lequel nous débouchons est saisissant d'autant qu'il neige un peu moins fort. La respiration commence à se faire un peu courte, nous sommes malgré tout à un peu plus de 2'000 mètres, l'abondance de neige fait qu'il y a longtemps que nous ne voyons plus nos skis qui laissent après notre passage une trace de 50 cm de profondeur. La pente s'est encore accentuée depuis que nous avons quitté la forêt ce qui nous contraint à faire de longs zigzags avec chaque fois une conversion ce qui dans la haute neige n'est pas forcément évident : Jules en fait l'expérience par deux fois et la seconde je ne le voyais pratiquement plus, enfoui qu'il était dans la poudreuse ; sans mon aide, il aurait vraiment eu de la peine à se sortir seul de cette situation. C'était cocasse, j'étais mort de rire, lui un peu moins car la neige s'était infiltrée sous ses vêtements et il claquait des dents. Il n'a pas eu de chance car cinq minutes plus tard ma Bergerie émergeait de la neige dont la hauteur atteignait presque le bord inférieur de la fenêtre. Les anciens connaissaient bien le climat et les rigueurs de l'hiver car la porte à deux battants superposés, très agréables en été, n'était pas trop enneigée et en quelques pelletées de pelle à neige nous pouvions entrer après nous être bien secoués de toute la neige que nous avions sur nous, spécialement Jules avec sa chute !
Le thermomètre extérieur indique bravement -12°, à l'intérieur il ne doit guère y avoir que quelques degrés de plus aussi mon tout premier geste est d'allumer le petit chauffage à gaz et, miracle, il démarre du premier coup. La pièce est si petite qu'assez rapidement la température sera agréable, dans la zone positive. Avant d'enlever mon équipement d'hiver, je vais encore dégager l'accès des toilettes. Malgré le froid, je suis en transpiration et il faut rapidement mettre des vêtements secs si on ne veut pas "attraper la mort" comme disait ma grand'mère. En quelques secondes je suis nu, je me sèche le corps avec un linge sec mais glacial et c'est avec délice que je me rhabille et enfile un pullover norvégien en laine brute, un peu râpeux mais si chaud ! Je sais par expérience que rapidement je vais avoir trop chaud et que je me retrouverai en chemise, molletonnée il est vrai. Jules a juste enlevé sa combinaison de ski, il est debout et je le vois qui claque des dents. Il a trop froid pour se déshabiller mais je l'enjoints impérativement de suivre mon exemple ce qu'il fait en ronchonnant. Je le surveille de l'œil car il est vraiment important de se changer et je vois qu'il a conservé slip et caleçon long. Je le sens gêné mais il s'exécute alors que discrètement je lui tourne le dos. Je l'installe à proximité du fourneau à bois qu'entretemps j'ai allumé et où brûle un feu d'enfer. Au bout d'un moment je n'entends plus que le crépitement des bûches alors qu'avant les mâchoires de Jules s'en donnaient à cœur joie ! Ce soir ce sera bolognaise avec une sauce maison que m'avait préparée une amie. J'avais prévu de la salade mais la sauce, que j'ai oublié de mettre près du feu, étant gelée, il a fallu y renoncer. Le vin est beaucoup trop froid mais cela ne l'empêchera pas de nous réchauffer le corps et l'esprit !
La soirée se déroule très agréablement et nous profitons de faire mieux connaissance car en fait nous ne savons absolument rien de l'autre puisque c'est la première fois que nous nous parlons, à part des formules de politesse. En fait c'est un garçon très seul et c'est l'une des explications qu'il m'a donnée lorsque j'ai évoqué son store qui avait tendance à bouger sans raison : à certains moments, il ressentait le besoin impérieux de voir du monde, de sentir quelqu'un à proximité et que cela lui faisait du bien de me regarder. Il s'est particulièrement excusé lorsqu'il m'a, par inadvertance, avoué qu'il lui était même arrivé de me voir me coucher. Du coup c'est moi qui ait rougi car j'ai l'habitude de dormir à poil, je déteste sentir mon corps limité dans ses mouvements.
La soirée est bien avancée et je remarque que Jules est somnolant ce qui n'a rien de surprenant car la journée a été rude pour lui. Comme d'habitude, en sortant pour aller aux toilettes, je regarde le thermomètre, il indique -19°, il ne neige plus le ciel est constellé d'étoiles comme on peut le voir les seules nuits d'hiver. Jules est rentré après avoir satisfait ses besoins, il grelotte de nouveau, cela doit être la fatigue. Je reste un moment à contempler ce spectacle céleste qui chaque fois me procure une certaine mélancolie devant le mystère insondable de l'univers. Le froid me saisit, je rentre et je trouve mon camarade un peu désemparé car il ne sait pas comment va s'organiser la nuit.
Exceptionnellement je garde mon boxer car j'ai un invité que je ne veux pas heurter. Jules s'apprête à se vêtir d'un maximum de vêtements mais je sais très bien qu'au bout d'un moment il aura beaucoup trop chaud et qu'il devra se dévêtir dans l'obscurité et surtout dans le froid glacial. J'insiste pour qu'il fasse comme moi et ne garde que son sous-vêtement. La lampe à acétylène est éteinte et c'est à la lueur de ma lampe de poche que je m'installe à côté de mon camarade de course. C'est vrai qu'il fait froid, le thermomètre intérieur ne doit guère dépasser 0° et encore. Je l'entends et je le sens qui tremble de froid à moins que ce soit la crainte de dormir à côté d’un presque inconnu. Je lui suggère de se plaquer contre mon dos pour profiter de ma chaleur. Il hésite, je pense qu'il se gêne de cette proximité corporelle qui, personnellement me laisse indifférent. Son désir de se réchauffer est le plus fort et il suit mon conseil. Je réalise alors qu'il n'est pas du tout timide car il se plaque fermement, thorax et bas-ventre, contre mon dos. Juste avant de m'endormir il a passé son bras pardessus mon corps ce qui lui donne un peu plus de place. À plusieurs reprises, j'ai vaguement ouvert un œil, je n'ai pas l'habitude d'avoir quelqu'un à mes côtés. Il m'arrive parfois d'avoir des rêves érotiques se terminant pas une éjaculation que je ne constate qu'au réveil ce qui me laisse mal à l'aise car généralement je ne comprends pas ce qui s'est passé n'ayant gardé aucun souvenir de ces songes : je ne vois que le résultat : un drap souillé par un liquide visqueux, parfois odorant. Je ne suis pas ignorant, je sais que c'est du sperme mais pour moi cela ne peut survenir que si on le provoque manuellement. En pleine nuit, je me réveille en sachant pertinemment que je ne rêve pas, qu'il y a objectivement une barre dans mon dos. Je me rendors.