CHAPITRE VII (Suite)
Arrivé dans son appartement Alice me fait asseoir sur le canapé. Elle me rejoint, sa main dans la mienne. Elle prend son souffle. Sa voix est calme, presque apaisée.
- Pascal, il va me falloir du courage, beaucoup de courage. Ce que j’ai à dire n’est pas facile. Alors je veux que tu m’écoutes, que tu me laisses parler sans m’interrompre sinon je crains de ne pas trouver la force d’aller au bout.
Elle continue :
- Je ne veux ni ta pitié ni ta compassion. Je ne supporterai pas. Pour moi, tu es quelqu’un de merveilleux, d’attentionné, de formidable. Tu représentes tout ce qu’une femme normalement constituée puisse rêver un jour de rencontrer. Pascal, tu ne le sais pas encore mais je ne suis pas normalement constituée et la femme que je suis a peur de ne pas être en mesure de donner en toute normalité ce que tu peux attendre d’une relation amoureuse. J’ai très peur aussi que tu t’éloignes de moi mais je comprendrais. J’accepterais s’il le faut.
Elle marque un temps d’arrêt puis elle reprend.
- Voilà... il y a deux ans, on m’a diagnostiqué un cancer... Mes deux seins ont été touchés. J’ai suivi un traitement et au final, il a fallu se résigner à enlever les tumeurs. C’est ce qu’on appelle une tumorectomie. Cette opération déforme la plastique de la poitrine. Déformer, le mot est faible. Elle mutile en fait la féminité. Moi qui avais de si jolis seins, je me suis retrouvée après l’opération avec des formes disgracieuses et des volumes différents, inesthétiques au possible. Même s’il existe des techniques de substitution, mon compagnon de l’époque n’a pas supporté ou c’est moi qui n’a pas accepté son regard. Je crois qu’il y avait un peu des deux.
Alice reprend.
- Massacrée dans ma féminité, j’ai relevé la tête mais je n’arrive toujours pas à me convaincre que ce corps, c'est le mien. Je n’ose même pas imaginer un instant le regard des autres. Depuis cette opération, je n’ai plus rencontré personne, jusqu’au jour où tu as débarqué. Là, je ne sais pas pourquoi. Tu m’as plu tout de suite. J’ai craqué devant ta gentillesse, ton charme, ta tendresse, ton humour, ton romantisme, ton amour tout ce qui fait qu’un homme puisse être si attentionné envers une femme. Et lorsque je suis avec toi, j’oublie mon handicap mais j’ai dû veiller à ce que tes mains ne soient pas trop baladeuses. Pour autant, il n’en demeure pas moins que nue, physiquement, je reste une monstruosité. Heureusement, ça ne se voit pas. Je peux dissimuler le peu qu’il me reste sous mes vêtements, parfois sous un soutien-gorge de réparation en attendant mieux. Ça me permet de pouvoir afficher une fausse féminité. Je n’aurai pas pu te cacher encore bien longtemps mon état. Je vois bien que tu me désires et c’est normal puisque moi aussi je meurs d’envie de te faire l’amour. J’ai envie de sentir tes mains sur mon corps mais je me sens incapable de les accepter. Je ne suis pas prête et je ne sais même pas si je le serais un jour. Pourtant, avec toi, je me suis surprise à imaginer que si nous n’étions pas trop pressés, cela pouvait être possible. J’avais besoin de temps mais ... le temps va manquer.
Alice s'arrête un instant, reprend son souffle et continue
- Les derniers examens ne sont pas bons. Je vais devoir passer cette fois-ci par un traitement plus lourd, peut-être une chimiothérapie, puis une chirurgie totale. Le protocole n’est pas encore tout à fait arrêté. Au final, ce n’est peut-être pas plus mal mais cela veut dire aussi que je ne vais plus pouvoir cacher mon état. Je vais perdre mes cheveux, mes cils, mes sourcils. Outre l'apparence physique dégradée, ça signifie encore qu’il va falloir que je consacre toute mon énergie à me battre contre ce qui me ronge de l'intérieur. Et dans ce combat, je ne suis pas certaine que tu puisses ou même que tu veuilles y trouver ta place. Voilà Pascal. Tu sais tout ou presque maintenant. Il était pour moi hors de question que tu t'aperçoives de quelque chose par toi-même. Il fallait que je trouve le courage de t'en parler avant d’aller plus loin dans notre relation. Pour moi, pour toi, pour nous c'est très important.
- Tu as fini ?
- Oui, c’est tout… Non, une dernière chose. Il faut garder en mémoire qu’un combat, ça se gagne mais ça se perd aussi...
Arrivé dans son appartement Alice me fait asseoir sur le canapé. Elle me rejoint, sa main dans la mienne. Elle prend son souffle. Sa voix est calme, presque apaisée.
- Pascal, il va me falloir du courage, beaucoup de courage. Ce que j’ai à dire n’est pas facile. Alors je veux que tu m’écoutes, que tu me laisses parler sans m’interrompre sinon je crains de ne pas trouver la force d’aller au bout.
Elle continue :
- Je ne veux ni ta pitié ni ta compassion. Je ne supporterai pas. Pour moi, tu es quelqu’un de merveilleux, d’attentionné, de formidable. Tu représentes tout ce qu’une femme normalement constituée puisse rêver un jour de rencontrer. Pascal, tu ne le sais pas encore mais je ne suis pas normalement constituée et la femme que je suis a peur de ne pas être en mesure de donner en toute normalité ce que tu peux attendre d’une relation amoureuse. J’ai très peur aussi que tu t’éloignes de moi mais je comprendrais. J’accepterais s’il le faut.
Elle marque un temps d’arrêt puis elle reprend.
- Voilà... il y a deux ans, on m’a diagnostiqué un cancer... Mes deux seins ont été touchés. J’ai suivi un traitement et au final, il a fallu se résigner à enlever les tumeurs. C’est ce qu’on appelle une tumorectomie. Cette opération déforme la plastique de la poitrine. Déformer, le mot est faible. Elle mutile en fait la féminité. Moi qui avais de si jolis seins, je me suis retrouvée après l’opération avec des formes disgracieuses et des volumes différents, inesthétiques au possible. Même s’il existe des techniques de substitution, mon compagnon de l’époque n’a pas supporté ou c’est moi qui n’a pas accepté son regard. Je crois qu’il y avait un peu des deux.
Alice reprend.
- Massacrée dans ma féminité, j’ai relevé la tête mais je n’arrive toujours pas à me convaincre que ce corps, c'est le mien. Je n’ose même pas imaginer un instant le regard des autres. Depuis cette opération, je n’ai plus rencontré personne, jusqu’au jour où tu as débarqué. Là, je ne sais pas pourquoi. Tu m’as plu tout de suite. J’ai craqué devant ta gentillesse, ton charme, ta tendresse, ton humour, ton romantisme, ton amour tout ce qui fait qu’un homme puisse être si attentionné envers une femme. Et lorsque je suis avec toi, j’oublie mon handicap mais j’ai dû veiller à ce que tes mains ne soient pas trop baladeuses. Pour autant, il n’en demeure pas moins que nue, physiquement, je reste une monstruosité. Heureusement, ça ne se voit pas. Je peux dissimuler le peu qu’il me reste sous mes vêtements, parfois sous un soutien-gorge de réparation en attendant mieux. Ça me permet de pouvoir afficher une fausse féminité. Je n’aurai pas pu te cacher encore bien longtemps mon état. Je vois bien que tu me désires et c’est normal puisque moi aussi je meurs d’envie de te faire l’amour. J’ai envie de sentir tes mains sur mon corps mais je me sens incapable de les accepter. Je ne suis pas prête et je ne sais même pas si je le serais un jour. Pourtant, avec toi, je me suis surprise à imaginer que si nous n’étions pas trop pressés, cela pouvait être possible. J’avais besoin de temps mais ... le temps va manquer.
Alice s'arrête un instant, reprend son souffle et continue
- Les derniers examens ne sont pas bons. Je vais devoir passer cette fois-ci par un traitement plus lourd, peut-être une chimiothérapie, puis une chirurgie totale. Le protocole n’est pas encore tout à fait arrêté. Au final, ce n’est peut-être pas plus mal mais cela veut dire aussi que je ne vais plus pouvoir cacher mon état. Je vais perdre mes cheveux, mes cils, mes sourcils. Outre l'apparence physique dégradée, ça signifie encore qu’il va falloir que je consacre toute mon énergie à me battre contre ce qui me ronge de l'intérieur. Et dans ce combat, je ne suis pas certaine que tu puisses ou même que tu veuilles y trouver ta place. Voilà Pascal. Tu sais tout ou presque maintenant. Il était pour moi hors de question que tu t'aperçoives de quelque chose par toi-même. Il fallait que je trouve le courage de t'en parler avant d’aller plus loin dans notre relation. Pour moi, pour toi, pour nous c'est très important.
- Tu as fini ?
- Oui, c’est tout… Non, une dernière chose. Il faut garder en mémoire qu’un combat, ça se gagne mais ça se perd aussi...
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