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Une femme ordinaire (hétéro) - Terminé - jkf - 23-07-2020 UNE FEMME ORDINAIRE (Roman terminé) © 2020, Pascal BERNARD, Bourges Reproduction de tout ou partie interdite sans l'accord de l'auteur. PRÉAMBULE "Diminuée dans ma féminité, meurtrie dans ma chair, je pensais naïvement qu'il n'y avait rien de plus cruel. Je me suis fourvoyée... Alice PARIS." - °° -
CHAPITRE I Deux heures du matin. La chaleur de la journée n’arrive pas à s’enfuir par la porte-fenêtre ouverte. Il n’y a pas un souffle d’air, juste l’odeur des pins secs qui arborent l’avenue de la plage. A cette heure de la nuit, la circulation est comme figée, sans un bruit, sans âme qui vive. La lumière de la lune inonde la chambre telle un luminaire de ville, sans agressivité aucune ; une lumière paisible qui s’amuse de l’ombre portée par les différents objets. La petite statuette inoffensive au demeurant, semble maintenant menaçante. Le bras en l’air, elle manifeste son profond désaccord dans son plus simple appareil. Cette nuit encore elle voulait rester inaperçue et elle se serait bien passée de dévoiler une nouvelle fois son intimité moulée dans un plâtre blanc de bonne facture. Elle est belle, terriblement belle et je ne peux m’empêcher de la regarder, d’apprécier ses courbes, ses seins, ses fesses. J’aime la tendresse de son visage malgré la dureté de la pierre, j’admire son regard que je devine perdu quelque part dans les nymphes de l’infini. J’aime ses seins sans exubérance, ses fesses légèrement généreuses, sans exagération. Un corps offert à tous les regards où le sexe se cache pudiquement dans le croisement de ses jambes si joliment galbées. Tout comme moi, je ne sais rien d’elle si ce n’est qu’elle sourit toujours dans la journée ; un sourire figé qui porte la joie et la bonne humeur et lorsque je suis chagrin son sourire m’emporte. Elle m’a séduite un jour de printemps alors que je passais en coup de vent dans un grand magasin parisien. Son regard plein d’humilité a croisé le mien et je n’ai pas su résister. Le vendeur l’a habillée d’un papier kraft et nous sommes rentrés ensemble à l’appartement. Depuis, elle ne me quitte plus. Et à chaque déménagement, elle trouve toujours une place de choix où elle sait ne pas passer inaperçue. A peine sortie du carton, je l’ai amenée dans ma chambre, sur un petit guéridon d’où elle peut dominer toute la pièce. J’aime sa présence. Elle me rassure dans ma condition d’homme. Elle veille sur moi avec beaucoup d’attention et je suis sûr qu’elle est capable de bouder en situation d’infidélité mais je sais aussi que je peux compter sur son sourire bienveillant lorsque je m’endors à ses côtés. Dehors, une voiture passe rompant ainsi la quiétude nocturne. Le bruit éphémère du moteur se fond dans la chaleur de la nuit avant de disparaître, happé par la lune. A peine la tranquillité a-t’elle le temps de reprendre vie que soudain, dans la nuit, un cri strident fend le silence. Je tends l’oreille. On aurait dit un cri d’enfant. Quelques secondes passent et plus rien. Je décide de me lever et je franchis la porte fenêtre entre-ouverte pour m’appuyer sur la rambarde du balcon. Je scrute les buissons dans la pénombre de la nuit. Rien... Mon regard balaye mon champ visuel accessible de gauche à droite et soudain, j’aperçois deux petites prunelles qui me dévisagent avec surprise. - Bonsoir, vous avez entendu murmurais-je ? - Oui ! Des cris de chats. Il y en a beaucoup ici dit-elle d’une voix mal assurée. Sur ce, elle rentre précipitamment dans son appartement. Décontenancé, je reste planté sur le balcon. Deux secondes, deux phrases, deux prunelles. Impossible de dire si elle était mignonne ni même ce qu’elle portait comme vêtements sans même savoir si elle en portait réellement. Pff !!! Tu deviens lent à la détente pensais-je en souriant. Il fut un temps où en un dixième de seconde tu arrivais à soupeser les seins, caresser les fesses d’un battement de cils, évaluer la forme du pubis avant même de remonter sur le visage pour apprécier l’esthétique féminine dans son ensemble. Et là, … rien. J’allais rentrer moi aussi quand ma voisine réapparaît sur son balcon. Cette fois ci elle porte un paréo léger qui comble de malchance m’empêche de me livrer à mon exercice favori. - Désolé, j’étais en petite tenue. Je pensais que l’appartement était encore libre. Vous venez d’emménager ? dit-elle d’une voix beaucoup plus posée. Malgré la distance des balcons mitoyens, mes yeux plongent dans ses grands yeux que je devine de couleur sombre. Si elle n’est pas très jolie, elle est vraiment loin d’être moche. Il y a un je ne sais quoi qui gomme toute considération esthétique pour ne garder que ce qu’on a réellement envie de voir. Et ce que je vois en l’instant c’est deux prunelles adorables dans lesquelles les rayons de la lune viennent se noyer avec délice. - Oui, j’ai emménagé hier dans l’après-midi et en effet, je n’ai croisé personne. En suivant la direction de son regard, je réalise que moi aussi je suis en sous-vêtement, en boxer plus précisément. Mais qu’importe. D’une part, je ne suis pas trop pudique et d’autre part, c’est plutôt normalement à mon avantage mais en la circonstance, j’ai subitement un gros doute. Pas le temps de s’appesantir que plus bas, deux matous sortent bruyamment des buissons en se coursant l’un l’autre. - Voilà les deux compères qui vous ont réveillés dit-elle amusée. Tout va rentrer dans l’ordre maintenant. Passez une bonne nuit. - Bonne nuit à vous aussi balbutiais-je du coin des lèvres, pris de court par la rapidité de l’échange. Et elle s’éclipse tranquillement. Je regagne mon appartement. Dans la cuisine, je me sers un grand verre d’eau bien fraîche. J’aime la fraîcheur qui coule sur mes lèvres pour envahir la bouche, la langue et descendre lentement au fond de la gorge. Je bois par petites quantités pour profiter au maximum de cette fraîcheur mais mon esprit vagabonde, obnubilé par les deux petites prunelles que j’imagine indociles, ravageuses, désireuses, langoureuses. La nuit va être longue... Je m’en retourne dans ma chambre et je m’arrête devant Camille. - Camille, je crois que je viens de rencontrer ta sœur jumelle. Oui, je sais, ton cœur de pierre peine déjà et si tu pouvais verser une larme, tu le ferais. Je le vois à ton sourire crispé. Ne dit rien ! Regarde-moi. Tu es belle toi aussi. Je t’aime et jamais je ne t’abandonnerai. Tu le sais bien. Allez ! passe une bonne nuit et à demain petite fée. - °° -
Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 23-07-2020 Chapitre II J’ai dormi comme un enfant. Un sommeil lourd, probablement empreint de fantasmes solitaires comme en témoigne mon boxer devenu un peu trop étroit pour la circonstance. Je flâne quelques instants encore sur le drap avant de me décider à me lever. La lumière du jour a envahi la chambre et Camille me fixe sans équivoque. - Camille arrête. Tu es trop coquine ce matin. Tu vas encore me faire rougir ! La cafetière préparée la veille ronronne par saccades. Le café du matin, c’est un rituel incontournable, un moment de détente où mon subconscient s’harmonise avec les vapeurs de la petite tasse pour envisager sereinement la journée qui s’annonce. J’aime le café lorsqu’il est servi dans une tasse de bistro ; petite, c’est important. Les bols ont tendance à m’insupporter. Comme d’habitude, j’engloutis machinalement cinq à six tasses. Je repense à cette nuit, les feulements des chats en chaleur, ma voisine en paréo sur le balcon, ses yeux somptueux. Une apparition éphémère, trop courte qui laisse en mémoire un goût inachevé. Situation un peu cocasse pour une première pensais-je en souriant. Ce matin, rien ne presse. Il me faut vider les cartons et ranger ustensiles et vêtements dans les placards, organiser mon bureau, monter les quelques meubles restants. Si j’ai le temps, j’irais aussi faire un petit tour en ville et profiter pour découvrir la plage. Je ne connais pas la région. Elle est toute aussi animée qu’elle est sauvage. Sur le balcon, la pinède s’étend à perte de vue. Impossible de voir la mer. J’entends à peine le bruissement des vagues sur le sable. Quelques voitures circulent çà et là. Des badauds se dirigent en plusieurs groupes éparses vers la plage avec parfois des enfants hauts en paroles et plutôt enthousiastes à l’idée de profiter du sable chaud. Je file sous la douche pour le deuxième moment incontournable de la journée. Bigre, l’eau est froide. Quel con je n’ai pas pensé à brancher le chauffe-eau. Il va falloir se contenter de l’eau froide et pour être froide, elle est froide. Ma peau est toute émoustillée, les quelques poils blonds sont vent debout devant l’agression cutanée. Je vais à l’essentiel ; cheveux, aisselles, fesses et sexe au savon et pour le reste, on verra demain. Argh !!! Les serviettes ? Carton numéro huit sur la liste. Il est planqué où celui-là ? J’aurai dû numéroter les cartons sur tous les côtés pensais-je moribond. Nu comme un vers, les cheveux mouillés, dégoulinant, me voici à la recherche d’une serviette de bain. Généralement, en pareille circonstance, la chance n’est jamais avec moi et si par malheur je tente de déjouer le processus en inversant la recherche, je reste poursuivi par la malédiction. C’est comme cela depuis ma naissance. Il y en a qui gagnent du premier coup. Moi c’est bien souvent la dernière option qui s’offre à moi en tant que solution ultime. Et les déménageurs qui ont tout empilé dans la même pièce contrairement aux indications que je leurs avais fournis. La sonnette retentit, un coup sec, un second plus appuyé. Panique à bord. Je me précipite dans la chambre, saisis le drap du lit pour m’en revêtir le corps. J’imagine un instant ma voisine sur le palier décidée cette fois ci à faire plus ample connaissance. Je souris en ouvrant la porte. - C’est pour le branchement Internet me dit l’homme qui se présente dans le chambranle de la porte d’entrée. - Ah ! Vous ne deviez pas passer plutôt cette après-midi ? lui rétorquais-je surpris et déçu en même temps. - Le rendez-vous a été avancé. Vous n’avez pas reçu le message ? Vous avez le choix entre ce matin ou prendre un autre rendez-vous. C’est vous qui voyez ajoute-t-il d’un ton péremptoire. Je n’insiste pas. Les fournisseurs d’accès quels qu’ils soient ont une vision étriquée du service rendu et je n’ai pas envie d’attendre dix jours de plus. Je laisse entrer le technicien. Je lui indique l’emplacement de la prise Internet dans le bureau et je m’en retourne à mes cartons. Du coup, c’est beaucoup moins pratique maintenant. Il faut maintenir le drap sur le corps et manipuler en même temps les cartons. Je tombe enfin sur le carton numéro huit. Je m’empare d’une serviette de bain. Camille sourit en cette circonstance. Elle n’a pas perdu une seule miette du spectacle, considérant ma situation d’homme nu équivalente à la sienne sur le plan de l‘égalité Femmes-Hommes qu’elle revendique depuis sa création. J’enfile rapidement mes vêtements de la veille, histoire de ne pas perdre trop de temps dans les cartons. Le technicien a terminé. On effectue un test de fonctionnement et ça marche. Me voici maintenant raccordé au monde entier. Pour mon activité, c’est important. - °° -
Re : Une femme ordinaire (hétéro) - grostimido - 23-07-2020 Bonjour, Très bon début je plante mon drapeau Re : Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 23-07-2020 (23-07-2020, 02:55 PM)grostimido link a écrit :Très bon début je plante mon drapeauMerci grostimido Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 23-07-2020 CHAPITRE II - (Suite) L’après-midi a passé rapidement. Je suis venu à bout des cartons éventrés. Les meubles ont pris place à leur emplacement définitif et les ordinateurs ont trouvé refuge tantôt sous le plan de travail du bureau, tantôt au-dessus. Je pousse un soupir de satisfaction devant le travail accompli. Tout est maintenant opérationnel. Je prends quelques minutes pour m’allonger sur le canapé, un coussin sous la nuque. Je ferme les yeux pour savourer l’instant présent, envisager ma nouvelle vie dans cette ville côtière où j’ai tout à reconstruire. J’aime la mer. J’aime le sable. J’aime le vent. J’aime la pluie et le soleil, j’aime les femmes. J’aime les charmes originaux qu’offre la nature et ça tombe bien car ici, il y a tout cela mais ça, je ne le sais pas encore. Du Nord, j’ai comme référence « Bienvenue chez les ch’tis ». Certes c’est probablement assez stéréotypé mais ça donne déjà le « la » au moins dans les grandes lignes. Venant du couloir de l’immeuble, j’entends un bruit de serrure étouffé ; une porte qui s’ouvre et se referme puis le silence. Il est 18h00. Je décide de prendre la température dehors, histoire de voir les possibilités qu’offre la station touristique. Dans la rue principale, ça grouille de monde. En pleine pandémie, les masques sont relégués aux oubliettes et la distanciation sociale a bien du mal à marquer le pas. Devant le glacier, ils sont nombreux à attendre leur tour. Les tables des terrasses semblent s’être rapprochées immuablement les unes des autres. Le mètre de référence a dû fondre au soleil, je ne vois pas d’autre alternative. Sur une rue perpendiculaire, à la terrasse du « Bureau », je trouve une table déserte un peu plus écartée des autres. Je m’y installe. - Une Leffe s’il vous plaît. C’est la bière que je préfère, bien fraîche avec un zeste de mousse qui se dépose sur la lèvre supérieure, plaisir suprême annonciateur du liquide ambré si caractéristique. - En bouteille ou en pression ? Me demande la serveuse avec son sourire masqué. - En pression merci, répondis-je. Elle passe un coup de chiffon sur la table et je devine à travers le chemisier entre-ouvert des seins libres de tout mouvement. Elle est jeune. Dix-huit, vingt ans maxi, d’apparence banale ; des fesses qui immuablement vont finir par déborder tôt ou tard mais qui pour l’heure se fondent à la perfection dans le jean noir estampillé par la maison. Je me demande quel regard elle porte sur ses clients. Féline, elle a je suis sûr intercepté mon regard qui tout aussi furtif qu’il soit, s’est posé discrètement sur la générosité de ses formes féminines. De mon côté, il n’y a pas de convoitise, juste le plaisir de percevoir ici la beauté, la grâce, là le petit quelque chose qui fait qu’elle sera différente des autres et qu’elle restera un peu plus longtemps imprimée dans ma mémoire. Libre court d’alimenter par la suite le temps d’une nuit ou d’un songe mes fantasmes nocturnes les plus téméraires, ceux qui vont resurgir de mon subconscient en toute innocence. Mes pensées ou mes rêves sont souvent érotiques, rarement pornographiques bien que parfois, s’agissant de mes rêves, je ne contrôle pas réellement la situation de bout en bout. Intrigué, je suis intrigué par cette femme sur son balcon, seule. Que faisait-elle ? Est-elle aussi seule qu’elle le paraît ? A-t ‘elle été réveillée par le cri des chats tout comme moi je l’ai été ? Pourquoi s’est-elle réfugiée aussi rapidement dans son appartement alors que rien ne pressait ? Je ne sais pas pourquoi mais j’ai adoré ses yeux amusés. Je revois son visage ovale, ses cheveux longs qui disparaissaient derrière ses épaules, son sourire discret lorsqu’elle m’a découvert en boxer comme unique rempart à ma nudité, mais je ne me rappelle plus de la forme de ses lèvres, ni même de l’empreinte de son nez. Elle ne m’a pas semblé bien grande. Un mètre cinquante, un mètre soixante environ, plutôt frêle qu’enrobée mais sous le paréo, impossible de valider. Je m’en veux de cette mémoire qui vacille parfois, incapable de fiabiliser les informations que j’estime essentielles. Deux jeunes filles passent devant ma table, les vêtements aériens, très courts. Elles se tiennent par le bras. Elles discutent et rient toutes les deux tout en déambulant dans la rue en toute désinvolture. Elles sont belles sous leur teint basané. D’ailleurs toutes les têtes masculines les suivent discrètement du regard sous l’œil désapprobateur de leur compagne. C’est toujours rigolo à observer. Je règle ma consommation et je quitte le troquet pour partir en quête d’un lieu de restauration rapide. La journée a été éreintante et demain c’est le week-end. Je vais en profiter pour souffler un peu et visiter les environs. Il est presque vingt-deux heures lorsque j’arrive au pied de mon immeuble. Il fait encore jour même si la lune en phase décroissante est déjà présente dans le ciel. Je prends un peu de recul pour localiser mon appartement. L’immeuble est calme pour la saison. Très peu de lumière dans les appartements et nombreux sont les volets fermés, témoin de l’inoccupation des locaux. Avec le covid-19, il n’y a pas foule, c’est le moins qu’on puisse dire et ce constat contraste fortement avec le nombre de badauds en centre-ville. Deuxième étage, c’est bien lui au centre avec la porte fenêtre que j’ai laissée entre-ouverte. A gauche, la lumière filtre à travers les voilages. A droite les volets sont clos. Dans l’entrée de l’immeuble, je cherche ma boite aux lettres. Je la repère facilement puisqu’elle ne porte pas de nom et la clé que je dispose ouvre la porte. Sur la boite à côté, je peux lire Mme Joy Martine. Je souris sur ce prénom sorti de je ne sais où, plutôt atypique. Joy, ça tourne dans ma tête, ça résonne agréablement. J’aime beaucoup. Mais ce qui me rend encore plus fébrile c’est que devant ce magnifique prénom, il n’y a juste que « Mme ». J’emprunte les escaliers en me raisonnant. Je ne connais cette femme ni d’Adam ni d’Eve même si la nuit dernière .... - °° -
Re : Une femme ordinaire (hétéro) - grostimido - 23-07-2020 très sympas cette petite balade en ville Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 24-07-2020 CHAPITRE II - Fin Ce soir, j’ai rodé sur le balcon. Pas âme qui vive. Et comble de malchance, les matous n’avaient pas envie de forniquer, rassasiés par une précédente nuit de luxure. Il faudra que je me penche un peu plus sur la sexualité des chats pensais-je perplexe. Demain, c’est décidé. Je vais à la SPA pour en adopter une bonne dizaine, histoire de mettre un peu plus d’animation dans le quartier. - °° -
Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 24-07-2020 CHAPITRE III Le ciel est plombé ce matin. Pas de chance. Moi qui voulais découvrir la plage et ses environs, c’est raté. De gros nuages noir planent au-dessus de la station. La pluie menace et la prudence me dit qu’il vaudra mieux ne pas être dessous lorsque ça va dégringoler. Ça tombe mal. Mon programme de la journée est à l’eau. Camille sourit de façon insupportable et si elle n’était pas de marbre, la fessée s’imposerait comme un exutoire. Bon rassurons-nous, ce n’est pas dans ma nature et elle le sait très bien. Elle en joue à sa guise la coquine. Tout ce qu’elle voit c’est que je vais rester un peu plus longtemps en sa compagnie et ça, je sais qu’elle aime. Je commence à tourner en rond et même si l’appartement est plutôt spacieux, je me heurte rapidement aux murs. Le balcon, certes généreux lui aussi, ne me suffit pas d’avantage. Instinctivement pour ne pas dire volontairement, je jette un coup d’œil sur celui de ma voisine. Personne ! La température a bien chuté. Il fait frais maintenant et je sens l’humidité transpirer des nuages. L’odeur de la terre remonte. C’est toujours surprenant, ce mélange de terre humide qui se conjugue à celle de la végétation environnante. Je prends un grand bol d’air. - Aller go, j’y vais, me dis-je en parlant tout seul. Je sors sur le couloir feutré de l’immeuble et sur la porte palière de Joy, j’appuie sur la sonnette. Il y a toujours un moment d’appréhension devant l’inconnu même si l’homme que je suis se veut plutôt confiant au demeurant, il y a la douce apparence convaincante et la réalité. Mince ! pas âme qui vive. Elle ne doit pas être chez elle. J’insiste une nouvelle fois sait-on jamais. Une seconde, puis deux, puis trois, puis quatre... Ok ! ce n’est pas mon jour de chance mais ça je le savais déjà. Dépité, je m’apprête à tourner les talons lorsque la porte s’ouvre juste suffisamment pour laisser passer son petit minois que je devine plutôt interrogateur. - Bonjour, je suis votre nouveau voisin. - Bonjour, oui ? - Je voulais venir me présenter et vous inviter à prendre l’apéritif ce midi si vous êtes disponible ! De visage, elle n’est pas jolie. C’est un fait certain. J’ai presque failli regretter de l’avoir invitée. Mais trop tard. Mes paroles ont été plus rapides que ma pensée. Et puis sans vraiment savoir comment, sa frimousse s’est transformée lorsque son sourire est arrivé sur ses yeux. De pas très jolie avec le regard interrogateur et sérieux d’une institutrice en mal d’autorité elle est devenue belle et désirable en quelques secondes. Ce rayonnement presque divin qui efface toute banalité pour produire l’exception, je l’ai pris en pleine figure, sans rien comprendre à ce qui se passait. J’étais là debout dans un couloir d’immeuble avec une femme d’exception, béat en attendant sa réponse. - Ce midi, c’est impossible me dit-elle. Ce soir si vous voulez mais je vais rentrer tard de mon travail ! Je bois ses paroles. Je me laisse enivrer par le timbre de sa voix qui m’électrise les neurones. Sa porte s’est ouverte un peu plus et je la vois maintenant entièrement debout devant moi. La trentaine, elle est toute menue. Avec ses chaussons aux pieds d’un autre âge, elle ne fait pas plus d’un mètre soixante, des épaules dénudées, toutes blanche à peine recouvertes d’un débardeur jaune, un short marron qui ne la met pas vraiment en valeur, des cheveux longs châtain un peu ébouriffés, des seins petits dont les tétons marquent le tissu de leur présence. - Ok, vingt et une heure, ça vous convient ? - Oui très bien me dit-elle avec son sourire ensorceleur. - Alors à ce soir ! Moi, c’est Pascal. - Moi, c’est Alice. J’ai un temps d’arrêt. Je me ressaisi sur le champ. - Passez une bonne journée ... Alice et à ce soir. - Bonne journée Pascal. A tout à l’heure. De retour à mon appartement. Je m’assoie sur le canapé, ébahi. Bon, j’ai encore déconné. Elle ne s’appelle pas Joy mais Alice. L’ordre des boîtes aux lettres interpelle ma logique. Alice c’est mignon aussi. C’est court et tout compte fait je trouve que ça lui va bien. Elle m’intrigue vraiment cette fille. Croisée dans la rue, je l’aurais trouvée ordinaire voire même insignifiante. Et là, sur le palier, elle s’est métamorphosée en petite princesse irrésistible. Elle n’a pas d’accent. Elle ne doit pas être de la région, car le ch’ti saute à l’oreille pour un non initié. Pas de maquillage, que du naturel. Des vêtements tout aussi ordinaires. Elle a dû hésiter avant d’ouvrir. Je le sens. L’orage gronde et la pluie s’abat maintenant en rafales intermittentes. La pinède bouge avec force devant les éléments déchaînés et ce malgré que les pins soient plantés assez prêt les uns des autres. La rue s’est subitement vidée. Une vieille dame semble en difficulté avec son chien qui tire sur sa laisse. Son parapluie n’arrête pas de se retourner. Je la vois chuter sur le trottoir en plein désarroi. Ni d’une ni de deux, je m’élance dans l’escalier pour lui venir en aide malgré le vent et les trombes d’eau. Passé la porte d’entrée de l’immeuble, je me retrouve douché sans transition. L’eau coule sur mon tee short et s’engouffre dans mon bermuda. Pas le temps de tergiverser. Je repère la vieille dame toujours assise sur le trottoir d’en face, battue par la pluie. Je traverse. Je la relève. Elle tient toujours son chien en laisse mais son parapluie s’est envolé. Qu’importe, je regagne l’entrée de l’immeuble et j’invite la dame et son chien à se mettre à l’abri. - Vous n’avez rien ? - Non, merci ça va aller monsieur. J’ai juste un peu de difficulté pour me relever avec mon chien qui tirait et le parapluie qui n’arrêtait pas de se retourner, je n’ai pas réussi à tout gérer. Mais ça va, ne vous inquiétez pas. La porte de l’ascenseur s’ouvre et Alice apparaît. - Tout va bien madame Dupont ? Je vous ai vu tomber. - Oui, ça va mademoiselle Alice. Ne vous inquiétez pas. J’ai juste perdu l’équilibre. Il n’y a pas de bobo. - Vous auriez pu vous faire mal. Montrez-moi votre jambe ? - Vous avez pris un petit coup juste là. Ça va se transformer en ecchymose mais ce n’est pas grave. Vous prendrez un peu d’Arnica en rentrant chez vous et ça va passer rapidement. Vous voulez venir vous séchez chez moi ? - Non ça va aller mademoiselle Alice. Je vous assure. Je vais attendre un petit peu ici que ça se calme et je vais rentrer à ma maison. Je ne suis pas très loin. Je vous remercie beaucoup. - Faites attention à vous et si vous avez un souci, n’hésitez pas dit-elle chaudement en se dirigeant vers l’ascenseur. Galamment, je lui ouvre la porte. Dans l’ascenseur je sens son parfum. Un parfum que je connais, agréable et doux. J’apprécie son odeur. Alice s’est changée. Elle porte maintenant un petit chemisier blanc et un jean près du corps qui lui va à ravir mettant en exergue des petites fesses si mignonnes qu’elles en sont presque indécentes. J’adore. Pendant que l’ascenseur gravi rapidement les étages, Alice se tourne vers moi et me regarde, ruisselant. - Bienvenu chez les ch’tis, me lance-t-elle avec des yeux rieurs et un énorme sourire à peine moqueur. - °° -
Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 25-07-2020 CHAPITRE III - Suite L’après-midi a passé très rapidement. Trop rapidement à mon goût. J’ai enfin pu mettre un pied sur la plage puisque le soleil a réussi à chasser les nuages. Le sable encore mouillé colle aux baskets. Il fait bon avec une petite brise légèrement iodée. La mer se dessine à l’horizon. Elle est loin, probablement la marée basse. On distingue nettement la délimitation faite par la marée haute où le sable tassé et lissé par les vagues est jonché de résidus de coquillages de celui de la plage où on s’y enfonce légèrement à chaque pas. Il y a un peu de monde, des enfants, des familles, des couples, des amoureux qui se promènent main dans la main. Je prends le temps de m’arrêter pour apprécier ce cliché estival où il est facile de repérer les premiers vacanciers fraîchement arrivés. Certain ont envahi les cabines de plage multicolores concentrées sous l’esplanade, d’autres se débrouillent avec les moyens du bord. Une jeune femme enveloppée dans une serviette de bain tente de retirer son maillot. Situation toujours un peu cocasse où les mouvements se font gauches, étriqués par l’étau de la serviette qui ne demande qu’à se dérober. Un sein apparaît furtivement très vite recouvert par le tissu coloré. Le stress transpire dans ce mouvement salutaire où la nudité découverte se retrouve exposée l’espace d’un instant. Je regarde ma montre. Dix-huit heures. Encore trois heures. Je repense à Alice, cette femme banale mais oh combien surprenante, cette femme aux allures de gamine réservée, ni aguicheuse, ni sexy, au regard franc et attentif, une femme fragile d’apparence. Je suis surpris par l’ascendant qu’elle a suscité sur moi-même. Ce n’est pas mon type de femme et pourtant elle est omniprésente dans mon esprit. Je suis même excité à l’idée de la recevoir ce soir en tête à tête. Je ne la laisse pas indifférente, j’en suis certain. Elle n’aurait pas accepté l’invitation et la première nuit, sur la terrasse, elle ne serait pas revenue à la charge. Cette nuit-là, dans nos regards respectifs, il y a eu comme un déclic silencieux lorsque nos pupilles se sont croisées. Une envie irrésistible. Mais une envie de quoi ? Rien de sexuel, rien de sexy non plus. Tout comme avec Camille, juste peut-être le fait de savoir qu’elle est là, qu’elle existe, qu’elle est présente dans mon univers. C’est aberrant, c’est même fou. - °° -
Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 27-07-2020 CHAPITRE III - Fin Vingt heures cinquante-sept. L’apéritif dînatoire sur la table basse de la terrasse est prêt. Chips, toasts, panini, petites verrines achetées l'après-midi même en rentrant de la plage avec des saveurs salées et sucrées, gâteaux apéritifs divers, frittes de carottes crues, dés de chou-fleur et un peu d'encornés en persillade le tout accompagné de guacamole et de houmous. J'hésite sur le fond musical, le classique ? Mais je ne suis pas fan, la musique tendance ? Je me demande si c'est son truc, le jazz ? Bof. Au final, j'opte pour quelque-chose de neutre juste pour accommoder la soirée d'une présence musicale. Côté boissons, j’ai un peu de tout ; alcoolisées ou non alcoolisées. Tout devrait bien se passer de ce côté. Sur le plan vestimentaire, je porte un bermuda bleu nuit avec une chemisette blanche, des socquettes blanches également et une paire de baskets. Vingt et une heures... Vingt et une heures dix... J'entends le bruit métallique d’une serrure. Une porte s'ouvre et se referme. Vingt et une heures quinze... Les mêmes bruits venant des communs et la sonnette retentit. - Bonsoir Alice - Bonsoir Pascal. Désolé j'ai été retardée par des travaux sur la route. Ils profitent de la période estivale pour renouveler le revêtement routier. Ça créé des bouchons pas possibles et en plus avec les touristes, ça n’arrange rien. - Pas de soucis Alice. Entrez, je vous en prie. - Je peux ? dit-elle en me montrant le flacon de gel hydro-alcoolique posé sur le guéridon à l'entrée. - Oui évidemment, il est là pour ça. - Merci. Je ferme la porte derrière elle. En s'aspergeant les mains, elle m'inonde de son sourire radieux que je commence à connaître et elle jette un regard rapide sur le séjour qui fait aussi office de salle à manger. Chez moi, les murs sont nus, peints en blanc, un blanc chaud que j'apprécie. Ils mériteraient d'être rafraîchis mais je m'en contenterai. Je n'aime pas les cadres ou les photos accrochés aux murs et les bibelots se comptent sur les doigts d'une main. Comme je déménage somme toute assez souvent, je ne m'encombre pas. Il n'y a là que l'essentiel. - C'est exactement la même configuration d’appartement que le mien si ce n’est qu’il est inversé. Vous devez avoir la cuisine, la salle de bain et les toilettes à gauche et les chambres à droite. - Oui c'est cela, je vais donc pouvoir vous épargner la visite alors ? lui dis-je sur un ton ironique. - En effet, ça ira Pascal. Je devrais arriver à m'y retrouver dit-elle sur le même ton. - Pour l'apéritif, ce sera par là. Venez ! Je l'emmène sur le balcon où elle choisit de s’asseoir sur l'une des deux banquettes type salon de jardin qui jouxtent la table basse. Je m'assois sur celle presque en face d’elle. - On avait dit apéritif et vous avez préparé un véritable festin ! s'exclame t'elle admirative et en même temps pleine de reproches. - Juste un apéritif dînatoire Alice. Je ne vais tout de même pas vous laisser repartir ce soir la faim au ventre ! Elle sourit. Elle a troqué son chemisier contre un débardeur bleu ciel qui masque difficilement les bretelles blanches de son soutien-gorge. Je note au passage qu'elle n'en portait pas en fin de matinée. Elle a le même jean que ce matin, celui qui épouse très bien ses atours et qui masque l’emplacement de son triangle d’or largement dégagé à la naissance de ses jambes, j'adore. Ses cheveux sont remontés en un chignon décontracté, un peu sauvage dévoilant maintenant ses oreilles et accentuant davantage encore la forme de son visage. Ses pommettes et ses lèvres dessinées d'une main de maître se fondent avec harmonie dans cet ensemble qui reste juvénile. Ses yeux couleur noisette - je les voyais plus foncé - rient beaucoup plus que ses lèvres illuminant son visage à chaque sourire. Possible qu'elle joue et abuse de cet outil de séduction puisque comme Camille, ses lèvres sourient très souvent. Mais peut-être est-ce aussi une position défensive ? Je ne sais pas. Elle n'est pas maquillée, juste une petite touche de parfum ajoutée avant de venir, celui qui m'avait déjà enivré en fin de matinée dans l’ascenseur. Le bronzage est vraiment léger à croire que le soleil n’a pas trouvé prise sur son corps. Sa personnalité dégage un altruisme incroyable, une générosité débordante, une bienveillance remarquable, une douceur naturelle. Elle semble fragile mais je devine en arrière-plan une force douce capable de surprendre. Je ne la perçois ni séductrice, ni aguicheuse, juste contente d'être ici et ça se sent, ça se voit. Elle me regarde de ses grands yeux innocents. Mes défenses fondent. Je sens poindre le danger et en même temps j’ai hâte de l’affronter. J'ai l'intime conviction qu'elle vient elle aussi de me passer au crible, cochant les cases de sa check-list à chaque bon point. Je m’habitue à son visage de femme enfant. Elle dégage une pureté naturelle, un côté puéril aussi qui se joue de tous les clichés habituels. Pour une femme ordinaire elle est loin, très loin d’être ordinaire. Alice est à l'aise et j'aime bien. Elle me dit être dans la région depuis une petite dizaine d'années. Elle travaille en tant qu'infirmière dans un hôpital à une vingtaine de kilomètres d'ici. Ses horaires sont décalés et il arrive qu'elle soit sollicitée le week-end, parfois la nuit. Avec le covid-19, elle n'a pas eu beaucoup de répits. C'était presque du travail non-stop. Là elle commence juste à récupérer. Elle est grave et son sourire a disparu lorsqu’elle se confie : - J'ai été confrontée à des situations dramatiques. Même si de par mon métier on est préparé, ce n'est pas toujours évident de voir partir des patients qui nous ont fait confiance et qui ne se sont jamais réveillés. Je l'écoute silencieusement. Ses yeux si pétillants se sont voilés légèrement et lorsqu'ils sont embués, ils sont tout aussi magnifiques que lorsqu'ils rient. J’ai envie de la prendre dans mes bras, de la rassurer, de lui remettre en place la petite mèche rebelle qui s’est échappée de son chignon et qui s’agite sur son front, d’essuyer ses yeux humides, de l’embrasser. Mais mon corps est incapable de bouger. Tous mes muscles sont à l’arrêt, momifiés par cette inconnue qui se dévoile. Elle laisse ses émotions s‘enfuir en courant dans la nuit qui commence à nous envelopper. - On va parler d'autres choses. Je ne voudrais pas gâcher la soirée. Et vous ? Qu'est-ce qui vous a amené ici ? Je lui explique que je gère une agence orientée sur les nouvelles technologies, que j'ai un contrat d'une année pour remettre au goût du jour le système informatique d'un grand équipementier automobile, que mon équipe que j’ai recrutée pour la circonstance, débarquera la semaine prochaine. C’est un travail mais c’est avant tout aussi une passion. - Et puis j'ai trouvé cette petite location et je m'y suis installé. La suite, vous la connaissez ! Le tintamarre des chats, votre présence sur le balcon, l'orage, … Les pommettes d’Alice prennent un peu de couleur. - Vraiment, j’étais persuadée qu’il n’y avait personne et quand il fait chaud comme cette nuit-là, j’apprécie la fraîcheur nocturne. J’avoue ne pas avoir prêté attention à ma tenue. Je suis désolée. J’espère que je ne vous ai pas choqué ? - Oh non Alice. D’une part, je n’ai vu cette nuit-là que vos yeux... Vous savez que vous avez des yeux magnifiques ? Alice rougit de plus belle. Elle ne dit rien. Son regard s’échappe un instant pour revenir soutenir le mien avec une humilité à peine contenue. J’ai franchi un cap peut-être un peu trop rapidement. Je ne sais pas. Ça m’a échappé. Et puis j’avais envie de lui faire un appel du pied juste pour lui dire qu’elle ne me laisse pas indifférent. - Merci pour le compliment Pascal. Vous allez me faire rougir jusqu’aux oreilles dit-elle avec son petit sourire radieux. Elle change de sujet. - Ah oui les chats ! Ça arrive souvent dit-elle en riant. Vous verrez. C’est la pleine saison des amours alors de temps en temps ça bagarre sévère. Et pour madame Dupont, j’ai pris de ses nouvelles cette après-midi. Elle va bien. Son mari a été intubé au tout début de l’épidémie et heureusement, il s’en est sorti. Il garde encore quelques séquelles mais ça devrait aller mieux. Elle ajoute - En informatique, je ne vous suivrai pas. Je suis nulle. J’arrive à utiliser le traitement de texte, le tableur, ma messagerie et la visioconférence pour garder le contact avec ma famille qui est éloignée, dans le Cantal. Je surfe aussi sur Internet et ça s’arrête là. C’est un de mes collègues qui m’a paramétré mon ordinateur portable. Ceci étant, il n’a jamais trop bien fonctionné. C’est compliqué, je n'y comprends pas grand-chose. - Je regarderais à l’occasion si vous voulez bien Alice. - Je veux bien Pascal. J’avoue que je suis un peu perdue avec ses nouvelles technologies et en la matière, votre aide sera la bienvenue. Elle continue intarissable : - J'aime la station. Elle vit toute l'année et même si je ne sors pas beaucoup, c'est toujours agréable. Je la préfère en dehors de la période estivale. Il y a moins de monde. Je n’aime pas la foule. J’aime me promener le long du fleuve qui se jette dans la mer. De temps en temps on aperçoit des phoques sur les bancs de sable à l’embouchure. J’aime aussi les chevaux. C’est une passion que j’ai depuis que je suis toute gamine. J’aime les longues promenades dans les dunes en traversant la pinède, galoper sur la plage tôt le matin, courir après la brume avant qu’elle ne s’évapore. C’est vrai, qu’on me dit plutôt sauvageonne et lorsque je fais corps avec ma monture, j’oublie tout, j’efface tout pour mieux ressentir l’instant présent. C’est toujours un grand moment d’effusion entre l’animal et moi-même ; un véritable moment de bonheur absolu. Alice s’arrête. Elle prend conscience qu’elle vient de se livrer, peut-être un peu trop, emportée par ses passions. Je la regarde. J’aime cette femme. Je l’aime de plus en plus pour ce qu’elle est, pour ce qu’elle n’est pas. Je n’arrive pas encore à me l’avouer mais, je sais que je suis en train de vaciller. Alice poursuit sur un autre registre. - En revanche dans l'immeuble c'est vraiment très calme. En semaine, il arrive fréquemment que je sois la seule occupante à l'étage. C'est un peu lugubre parfois surtout la nuit, l’hiver, les jours de tempête. Le vent siffle dans les bouches d'aération et c'est surprenant. Vous verrez... Le week-end, c'est différent. Les propriétaires débarquent et ça fait du mouvement. Ils sont sympas mais il y a aussi quelques grincheux. Avec les vacanciers, c’est spécial. Ils sont bruyants, ils disent à peine « bonjour » et ils investissent les lieux sans aucune gêne. Ils ne respectent rien, ni la propreté des communs ni les emplacements de parking réservés. Pour se garer, c’est souvent l’enfer. Ils n’hésitent pas à empiéter sur votre emplacement de parking voir même parfois à le spolier carrément. La cohabitation reste compliquée. En me regardant, elle marque un silence et elle reprend son souffle. - Je suis contente que vous soyez là... vraiment me dit-elle. Il y a une énorme sincérité dans sa voix. Je comprends qu'Alice, ne ment pas ni à elle-même, ni aux autres. C'est une femme entière. Elle ne joue pas ce qu'elle vit. Elle vit simplement une partition qu'elle tricote en marchant. Il n’y a ni calcul, ni arrière-pensée, juste le moment présent. On avale les dernières grignotines en évoquant quelques souvenirs. Alice se lâche. Le ton est jovial, on rit d’un rien. On rit de tout. On nage dans la complicité. Elle est joyeuse, elle est resplendissante. Pour la première fois, je la désire mais ce soir je resterai sage, un peu comme une prémonition. Alice m'aide à débarrasser. J’aime quand dans la cuisine un peu trop exiguë nos corps se frôlent ; je m’imprègne de son odeur et ça m’émoustille davantage. J’aime sa démarche légère et décidée. Je sais que la fin de la soirée est proche. Je me sens bien en sa présence. Je suis redevenu un gamin qui convoite la fille qu’il n’a jamais eu. Debout près de la balustrade, Alice offre son visage au ciel étoilé un peu comme une offrande divine. - Vous aimez observer les étoiles Pascal ? - Oui un peu ! Je connais quelques constellations, les plus courantes. J’ai été initié lorsque j’étais enfant mais je n’ai pas beaucoup pratiqué depuis. Et la voilà partie. La Grande Ourse, l’étoile Polaire, la Petite Ourse, Cassiopée, Orion, la Flèche, le Cygne, ... - Mais vous êtes intarissable Alice, je suis admiratif !!! - Merci Pascal. C’est une autre de mes passions mais il se fait tard maintenant. On aura l'occasion d'en reparler. Je vais rentrer. Demain je commence tôt. Si vous voulez je vous montrerais, j'ai un télescope chez moi. En ce moment, on discerne une comète. Elle a été baptisée « Neowise » Elle est visible jusqu'à la fin du mois dans notre hémisphère. Avec un peu d’expérience, on peut même la repérer à l‘œil nu. C'est fascinant les détails qu'on peut voir. - Avec grand plaisir Alice. Faites-moi signe, je n’habite pas loin. - J'ai passé un très bon moment en votre compagnie. C’était vraiment top mais vous êtes incorrigible. Vous avez mis la barre un peu haut ce soir. Je vous sonne lorsque le ciel sera dégagé. Ici, avec la lune qui décroît il y a encore beaucoup trop de pollution lumineuse. - De rien Alice. Tout le plaisir était pour moi. Merci de votre présence. J’ai énormément apprécié. Son teint a rougi légèrement devant le compliment. - Je vous embrasserais bien avant de partir mais la préséance du moment se veut malheureusement plus restrictive. Alors je vous bise à distance. Elle dépose un baiser sur sa main qu’elle m’envoie d’un geste lent. Je souris en lui retournant le baiser sur un souffle léger, un peu comme deux adolescents immatures. - Bonne nuit Pascal et à bientôt. - Bonne nuit Alice. La porte s’est refermée derrière elle. Je m’aperçois qu’elle me manque déjà. Je sais qu’elle m’a conquise. - °° -
Re : Une femme ordinaire (hétéro) - curieux - 27-07-2020 Magnifique, pudique,léger, ce récit est reposant sensuel et très agréable à lire. Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 28-07-2020 Merci curieux J'apprécie beaucoup ton message. A+ JKF Re : Une femme ordinaire (hétéro) - emmanolife - 28-07-2020 Très sympa ton récit ! Merci jkf ! Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 28-07-2020 Merci Emmanolife. Re : Une femme ordinaire (hétéro) - jkf - 28-07-2020 CHAPITRE IV Trois jours ont passé. Plus aucune nouvelle d’Alice. Le dimanche qui a suivi notre soirée, je suis allé me balader dans l’arrière-pays. La prédominance est plutôt campagnarde. Dans les villages traversés, l’architecture n’a rien de spécifique. Il faut dire aussi que la région a été entièrement rasée lors du débarquement enterrant à jamais les vestiges du passé pour peu qu’ils aient existé. Au début de la semaine, j’ai fait connaissance avec ma nouvelle équipe et j’avoue que je suis plutôt satisfait. Les personnes que j’ai recrutées sur dossier, vidéoconférence à l’appui, me conviennent bien. Ce n’était pas gagné d’avance surtout en pleine période de confinement. Ils sont pour l’instant trois. Marion, une femme d’âge mûr expérimentée, Sarah, une jeune femme un peu moins mature mais très volontaire et Jean, un féru d’informatique. Tous sont du cru local. L’ambiance de travail est sympa. Personne ne se prend la tête. Le week-end prochain, j’ai lancé l’idée d’une sortie cohésion afin de mieux se connaître. J’avais proposé un repas au restaurant mais Marion a de suite renchéri sur une soirée merguez, saucisses et autres chez elle samedi soir. Elle habite un petit pavillon reculé dans la campagne à quelques encablures d’ici avec piscine. Sans difficulté aucune vu les arguments, sa proposition est adoptée à l’unanimité. Chacun amènera un petit quelque chose. - °° -
La journée passe vite. Il est dix-huit heures et si je veux réapprovisionner le frigidaire, il est temps de quitter le bureau. Sur la route, à l’entrée de la station, il y a un petit centre commercial sans envergure mais bien suffisant pour le ravitaillement de la semaine. Muni d’un caddy, je parcours les étalages méthodiquement pour repérer ceux qui correspondent à mes centres d’intérêt. Je m’arrête au rayon journaux en cherchant le programme télé de la semaine prochaine. Au fond de l’allée, j’aperçois une jeune femme qui négocie son virage en se frayant un passage dans l’allée étroite. Même de loin, la silhouette m’est familière. Je ne discerne pas son visage. Elle porte un masque comme tous les clients. Ni d’une ni de deux, j’abandonne le programme télé à ses congénères et je me dirige avec fougue et détermination dans l’allée parallèle où elle pourrait s’être engouffrée. Personne ! Demi-tour, direction la suivante. Elle est là, elle ne m’a pas remarquée. Elle est concentrée sur le rayon café où il est vrai, le choix est tellement vaste qu’on s’y perd un peu. Je m’arrête à l’extrémité de l’allée pour prendre le temps de la regarder dans son quotidien. Elle n’est pas différente et de cela, je n’en doutais pas une seule seconde. Son jean lui donne une silhouette élancée. Elle me semble avoir grandi mais je m’aperçois qu’elle a troqué ses escarpins taille basse contre des chaussures à talon. Elle porte un tee-shirt blanc qui lui va à ravir. Ses cheveux sont libres sur ses épaules, ce qui lui donne un aspect légèrement négligé. J’étais un peu morose et d’un seul coup, me voilà tout ragaillardi. J’attends Alice, planté au milieu de l’allée. Son caddy vient buter sur le mien. Elle lève les yeux. Ses grands yeux couleur café qui s’illuminent. - Pascal ? Ça fait longtemps que vous êtes là ? - Bonjour Alice. Je viens d’arriver. Je vous ai aperçue au détour d’une allée. Je vous ai cherchée et je vous ai trouvée. On continue ensemble ? Elle sourit. Je ne vois que ses yeux mais je devine ses lèvres. Je remarque que ses seins sont libres. Ils sont petits, j’aimerai tant... Sous le tee short, rien ne bouge, juste la pointe des tétons qui expriment leur vélocité à travers le tissu. - Oui avec plaisir me dit-elle. A deux de front dans les allées, c’est compliqué. Les autres clients exigent aussi le passage, pas moyen d’être tranquilles. On adopte le concept de la file indienne. J’emboîte le pas à ma petite amazone, ce qui me permet de profiter de la vue sublime sur son fessier. Je distingue sous la toile du jean les contours d’une culotte traditionnelle, probablement sans fioriture. Un string là-dessus, il y aurait de quoi rendre fou plus d’un regard. Lorsqu’elle s’arrête, je m’arrête aussi. On échange deux ou trois mots. Elle me dit ce qu’elle aime, ce qu’elle déteste. Et j’adore. J’ai le sentiment de rentrer un peu plus dans l’intimité de son quotidien. Je l’écoute. Je la regarde ou plutôt je la dévore. On rit de bon cœur. Je suis bien. J’ai le sentiment qu’elle est bien elle aussi. Passée la caisse, Alice m’attend. La caissière n’est pas dupe de notre complicité et elle nous gratifie d’un large sourire. On se sépare sur le parking. - Je suis garée au fond à gauche et vous Pascal ? - Moi c’est juste là en indiquant l’emplacement en face de nous. - Rendez-vous chez moi, ça vous dit ? - Ok Alice, le temps de ranger mes courses et j’arrive. - °° -
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