Chapitre 7 - Week-end japonais (3)
Samedi 8 août 1964, Landiwiese, Zurich
Les Japonais revinrent sur la scène et s’alignèrent de nouveau sur deux rangs, cette fois le dos tourné aux gradins. Kaito expliqua aux spectateurs que c’était pour qu’ils matassent aussi les fesses galbées de ses protégés. Frédéric dit en riant que cela ressemblait à un marché aux esclaves et demanda s’il pourrait en acheter un pour l’emporter. Kaito rétorqua qu’ils étaient totalement libres de leurs mouvements et que ce n’étaient pas des Soviétiques qui faisaient défection lors de tournées en Occident. La discipline quasi militaire servait seulement à atteindre la perfection dans le spectacle. Les places dans sa troupe étaient très recherchées, la sélection était sévère, il examinait personnellement chaque candidat sous toutes les coutures. En particulier celle du scrotum, pensa Koen.
Kaito leur ordonna de faire une vingtaine de pompes au son du tambour, Frédéric se dit que cet exercice manquait à leur gymnastique matinale à l’école de Hinterhoden, il devrait en parler à Franz. Ils se replacèrent ensuite de face. Un assistant leur distribua à chacun un fundoshi rouge qu’ils mirent tous en même temps, toujours en rythme avec le tambour. Koen fut stupéfait de leur rapidité, lui qui avait eu mille peines à mettre le sien après l’exposé d’Hiroshi.
Ils s’entraînèrent ensuite au combat, d’abord à mains nues, puis avec un bâton. Les coups étaient maîtrisés et ils ne frappaient jamais leur adversaire.
Il y eut une pause, l’assistant distribua du thé à tout le monde. Koen en profita pour aller poser des questions aux danseurs au sujet de leurs bites, ce qui détendit l’atmosphère et provoqua une hilarité générale. Certains l’exhibèrent à nouveau pour faire plaisir au pénisologue, le nouveau surnom que donnait Frédéric à son ami.
La répétition continua par le filage du spectacle, sans interruption, avec les lumières et les décors très sommaires, composés essentiellement de plantes artificielles suggérant la nature. Kaito avait expliqué que c’était basé sur des faits historiques, à la manière d’une comédie musicale. Les Européens ne comprirent rien à l’intrigue. Il y avait des scènes parlées, d’autres chantées par des solistes ou en chœur, des combats singuliers improvisés et des combats de groupe chorégraphiés. Les danseurs étaient vêtus d’habits traditionnels au début, ils les ôtèrent progressivement pour se retrouver en fundoshi. Tout à la fin, ils les enlevèrent avec les derniers battements de tambour mais les lumières s’éteignirent pour ne pas choquer le public conservateur qui verrait le spectacle le soir.
Les danseurs revinrent saluer en kimono. Les quatre amis se levèrent spontanément pour les applaudir. Ils prirent ensuite congé du chorégraphe, Hiroshi leur révéla qu’il l’avait invité le lendemain à l’ambassade et qu’ils le reverraient.
Il était bientôt 13 heures lorsqu’ils se retrouvèrent à l’air libre dans le parc, éblouis par le soleil. Il y avait des restaurants temporaires, ils optèrent pour l’American Saloon et commandèrent des hamburgers et des frites, accompagnés de Vivi Kola, imitation suisse de la célèbre boisson. Laertes dit :
— En Amérique, il y a des restaurants qui servent des hamburgers à chaque coin de rue, cela viendra aussi en Europe.
— Tu penses que ça prendra chez nous ? fit Frédéric, nous sommes trop attachés aux cuisines locales.
— Es-tu déjà allé en Amérique ? demanda Koen à Laertes.
— Non, et toi ?
— J’ai prévu d’y aller l’année prochaine avec Frédéric.
— Je pourrais venir avec vous ?
— Et moi aussi ? ajouta Hiroshi.
— Je pourrais bientôt affréter un charter, dit Frédéric en riant, avec tous ceux qui veulent nous accompagner.
— Je paierai ma place, dit Laertes, je gagne mon argent de poche et fais des économies en travaillant pendant les vacances dans l’usine que dirige mon père.
— Et cette usine produit quoi ?
— Des préservatifs, la fameuse marque Enculis.
— C’est ceux que je préfère, dit Koen, ceux qu’on nous donne à l’école.
— Je sais, dit Laertes en souriant, on en a envoyé quelques caisses pour en faire la promotion.
— Tu sais alors comment on les fabrique, dit Frédéric, c’est avec du latex, je crois.
— Oui, mais je ne travaille pas à la production, je travaille au département R & D.
— Qu’est-ce que cela veut dire ? demanda Hiroshi.
— Recherche et développement, je suis chargé de tester les nouveaux produits.
— Ça m’intéresse, dit Koen, on fait comment pour les tester ?
— Tu ne sais pas ? On bande et on les déroule sur sa queue, ensuite on se branle. À la fin, on note nos appréciations sur un questionnaire.
— Intéressant, vous cherchez des nouveaux testeurs ?
— Reviens sur terre, dit Frédéric, tu n’habites pas en Angleterre.
La serveuse apporta les hamburgers, ce qui mit fin à leur conversation.
Samedi 8 août 1964, Ambassade du Japon, Berne
Après le repas, le chauffeur les attendait pour les conduire à Berne. Il n’y avait pas encore d’autoroute à cette époque, le trajet leur prit environ deux heures. L’ambassade du Japon était un bâtiment moderne en béton situé près de l’Aar. Le portail était fermé, un garde de de sécurité prit leurs passeports et cartes d’identité avant de l’ouvrir. La voiture se gara devant la porte d’entrée, le concierge sortit leurs bagages du coffre et les déposa sur un chariot.
L’ambassadeur et sa femme sortirent au même moment du bâtiment. Hiroshi leur présenta ses amis qui étaient assez intimidés. L’ambassadeur les mit à l’aise en leur souhaitant la bienvenue, avant de monter dans la voiture qui les emmènerait à Zurich pour le spectacle.
— Voilà, dit ensuite Hiroshi, nous serons seuls ce soir, personne pour nous déranger.
— Ce sera à la bonne franquette, dit Frédéric.
— Quand même pas tout à fait seuls, il y aura une geisha pour nous servir le thé.
— On doit coucher avec ? demanda Koen, tu sais que je ne suis pas trop porté sur les femmes.
— Toujours aussi insortable, dit Frédéric, si tu continues je te donnerai le Guide du Savoir-Vivre pour les demeurés à Noël au lieu de l’Encyclopédie du Pénis en vingt volumes.
— Il y aura aussi le cuisinier, ajouta Hiroshi, la gouvernante et encore Atsushi, le responsable du sentō où nous allons nous rendre dès maintenant.
Samedi 8 août 1964, Landiwiese, Zurich
Les Japonais revinrent sur la scène et s’alignèrent de nouveau sur deux rangs, cette fois le dos tourné aux gradins. Kaito expliqua aux spectateurs que c’était pour qu’ils matassent aussi les fesses galbées de ses protégés. Frédéric dit en riant que cela ressemblait à un marché aux esclaves et demanda s’il pourrait en acheter un pour l’emporter. Kaito rétorqua qu’ils étaient totalement libres de leurs mouvements et que ce n’étaient pas des Soviétiques qui faisaient défection lors de tournées en Occident. La discipline quasi militaire servait seulement à atteindre la perfection dans le spectacle. Les places dans sa troupe étaient très recherchées, la sélection était sévère, il examinait personnellement chaque candidat sous toutes les coutures. En particulier celle du scrotum, pensa Koen.
Kaito leur ordonna de faire une vingtaine de pompes au son du tambour, Frédéric se dit que cet exercice manquait à leur gymnastique matinale à l’école de Hinterhoden, il devrait en parler à Franz. Ils se replacèrent ensuite de face. Un assistant leur distribua à chacun un fundoshi rouge qu’ils mirent tous en même temps, toujours en rythme avec le tambour. Koen fut stupéfait de leur rapidité, lui qui avait eu mille peines à mettre le sien après l’exposé d’Hiroshi.
Ils s’entraînèrent ensuite au combat, d’abord à mains nues, puis avec un bâton. Les coups étaient maîtrisés et ils ne frappaient jamais leur adversaire.
Il y eut une pause, l’assistant distribua du thé à tout le monde. Koen en profita pour aller poser des questions aux danseurs au sujet de leurs bites, ce qui détendit l’atmosphère et provoqua une hilarité générale. Certains l’exhibèrent à nouveau pour faire plaisir au pénisologue, le nouveau surnom que donnait Frédéric à son ami.
La répétition continua par le filage du spectacle, sans interruption, avec les lumières et les décors très sommaires, composés essentiellement de plantes artificielles suggérant la nature. Kaito avait expliqué que c’était basé sur des faits historiques, à la manière d’une comédie musicale. Les Européens ne comprirent rien à l’intrigue. Il y avait des scènes parlées, d’autres chantées par des solistes ou en chœur, des combats singuliers improvisés et des combats de groupe chorégraphiés. Les danseurs étaient vêtus d’habits traditionnels au début, ils les ôtèrent progressivement pour se retrouver en fundoshi. Tout à la fin, ils les enlevèrent avec les derniers battements de tambour mais les lumières s’éteignirent pour ne pas choquer le public conservateur qui verrait le spectacle le soir.
Les danseurs revinrent saluer en kimono. Les quatre amis se levèrent spontanément pour les applaudir. Ils prirent ensuite congé du chorégraphe, Hiroshi leur révéla qu’il l’avait invité le lendemain à l’ambassade et qu’ils le reverraient.
Il était bientôt 13 heures lorsqu’ils se retrouvèrent à l’air libre dans le parc, éblouis par le soleil. Il y avait des restaurants temporaires, ils optèrent pour l’American Saloon et commandèrent des hamburgers et des frites, accompagnés de Vivi Kola, imitation suisse de la célèbre boisson. Laertes dit :
— En Amérique, il y a des restaurants qui servent des hamburgers à chaque coin de rue, cela viendra aussi en Europe.
— Tu penses que ça prendra chez nous ? fit Frédéric, nous sommes trop attachés aux cuisines locales.
— Es-tu déjà allé en Amérique ? demanda Koen à Laertes.
— Non, et toi ?
— J’ai prévu d’y aller l’année prochaine avec Frédéric.
— Je pourrais venir avec vous ?
— Et moi aussi ? ajouta Hiroshi.
— Je pourrais bientôt affréter un charter, dit Frédéric en riant, avec tous ceux qui veulent nous accompagner.
— Je paierai ma place, dit Laertes, je gagne mon argent de poche et fais des économies en travaillant pendant les vacances dans l’usine que dirige mon père.
— Et cette usine produit quoi ?
— Des préservatifs, la fameuse marque Enculis.
— C’est ceux que je préfère, dit Koen, ceux qu’on nous donne à l’école.
— Je sais, dit Laertes en souriant, on en a envoyé quelques caisses pour en faire la promotion.
— Tu sais alors comment on les fabrique, dit Frédéric, c’est avec du latex, je crois.
— Oui, mais je ne travaille pas à la production, je travaille au département R & D.
— Qu’est-ce que cela veut dire ? demanda Hiroshi.
— Recherche et développement, je suis chargé de tester les nouveaux produits.
— Ça m’intéresse, dit Koen, on fait comment pour les tester ?
— Tu ne sais pas ? On bande et on les déroule sur sa queue, ensuite on se branle. À la fin, on note nos appréciations sur un questionnaire.
— Intéressant, vous cherchez des nouveaux testeurs ?
— Reviens sur terre, dit Frédéric, tu n’habites pas en Angleterre.
La serveuse apporta les hamburgers, ce qui mit fin à leur conversation.
Samedi 8 août 1964, Ambassade du Japon, Berne
Après le repas, le chauffeur les attendait pour les conduire à Berne. Il n’y avait pas encore d’autoroute à cette époque, le trajet leur prit environ deux heures. L’ambassade du Japon était un bâtiment moderne en béton situé près de l’Aar. Le portail était fermé, un garde de de sécurité prit leurs passeports et cartes d’identité avant de l’ouvrir. La voiture se gara devant la porte d’entrée, le concierge sortit leurs bagages du coffre et les déposa sur un chariot.
L’ambassadeur et sa femme sortirent au même moment du bâtiment. Hiroshi leur présenta ses amis qui étaient assez intimidés. L’ambassadeur les mit à l’aise en leur souhaitant la bienvenue, avant de monter dans la voiture qui les emmènerait à Zurich pour le spectacle.
— Voilà, dit ensuite Hiroshi, nous serons seuls ce soir, personne pour nous déranger.
— Ce sera à la bonne franquette, dit Frédéric.
— Quand même pas tout à fait seuls, il y aura une geisha pour nous servir le thé.
— On doit coucher avec ? demanda Koen, tu sais que je ne suis pas trop porté sur les femmes.
— Toujours aussi insortable, dit Frédéric, si tu continues je te donnerai le Guide du Savoir-Vivre pour les demeurés à Noël au lieu de l’Encyclopédie du Pénis en vingt volumes.
— Il y aura aussi le cuisinier, ajouta Hiroshi, la gouvernante et encore Atsushi, le responsable du sentō où nous allons nous rendre dès maintenant.
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