02-08-2020, 08:01 AM
Chapitre 113 : Le temps des semailles, deuxième semaine cinquième jour (Un secret bien gardé) (1/4)
« Eldarian »
Comme les matins précédents, le lever pour Eldarian se fit dès l’aube pour sitôt avoir ingurgité une boisson chaude et insipide, se retrouver dans la même position inconfortable que ces derniers jours.
Le maître guerrier s’en accommoderait bien s’il n’y avait pas cette odeur forte venant aussi bien de son corps que de celui de son gardien, qui tout comme lui ne s’est pas lavé depuis le rapt.
Une grimace lui vient alors en se rappelant ce qu’il a dû faire durant la nuit et qui ne lui a pas laissé d’autre alternative que de prendre en bouche l’organe turgescent du mercenaire, faisant fi des odeurs plus que suspectes qui en émanaient.
***/***
Ce n’est que dans l’après-midi alors que le soleil commence à être très bas dans le ciel, qu’il discerne au loin l’immense bâtisse fortifiée, but de leur voyage.
Eldarian hésite dans son rôle à jouer, doit-il toujours laisser penser qu’il est le fameux apprenti magicien qu’attend l’archiprêtre en prenant le risque des conséquences que cela impliquerait, ou prendre de suite le parti de se rebeller en révélant sa véritable identité.
Il pèse les arguments pour ou contre des deux cas de figure, décidant finalement que ce seront les futurs événements qui décideront à sa place.
***/***
« Bureau de l’archiprêtre »
Le miroir lui renvoie l’image d’un vieillard légèrement bedonnant qui ne porte pas encore trop mal ses soixante-deux « doubles lunes » quand Don Artaud l’archiprêtre de l’église du dieu unique se mire devant comme il se plaît à le faire chaque jour qui passe.
Il va bientôt être temps pense-t-il de préparer sa succession, non pas qu’il en ait la réelle envie mais tout simplement parce que sa charge lui pèse chaque « double lune » davantage et que certaines tâches lui deviennent de plus en plus ardues à réaliser.
Don Artaud a beau passer en revue ses principaux collaborateurs, il n’arrive pas à voir dans aucun d’entre eux un éventuel successeur et le seul qui pourrait sans conteste à ses yeux accéder au poste suprême de l’église, n’est personne d’autre que celui qu’il a dû bannir suite à ses idées contraires aux siennes sur le sort à réserver à ceux qui portent les marques honnies de la magie.
L’archiprêtre pousse un profond soupir de contrariété en reprenant sa place assise devant son bureau, posant un regard noir sur la paperasse qu’il lui reste encore à traiter et qu’il reporte déjà depuis bien trop longtemps.
Sa main se pose sur le dossier au-dessus de la pile, quand un son de cor résonne depuis les remparts et lui donne par là-même, l’excuse qu’il désespérait trouver pour ne pas avoir à s’atteler cette fois encore à la tâche fastidieuse à souhait qui lui incombe.
L’archiprêtre se lève donc et va jusqu’à la meurtrière qui donne une vue directe sur le pont surplombant les douves, apercevant au loin les cavaliers qui arrivent à bride abattue en laissant derrière eux un nuage de poussière.
Il ne faut pas longtemps à Don Artaud pour visualiser et comprendre que le fardeau porté en travers de la selle par l’un des hommes n’est rien de moins que le garçon faisant l’objet de leur mission.
C’est donc avec une réelle satisfaction que l’archiprêtre quitte son bureau afin de se rendre à leur rencontre, curieux de voir enfin à qui il a à faire mais surtout d’avoir une fois de plus la satisfaction de le voir souffrir le martyre quand il lui fera porter l’un des anneaux de contre-pouvoir toujours en possession de l’église et forgé du temps du haut mage félon pour aider les hommes à vaincre ses pairs.
***/***
Sitôt arrivé dans l’enceinte de la cathédrale, Eldarian est emmené sans douceur jusqu’au poste de garde où il y est jeté au sol comme un vulgaire ballot de paille.
Il entend les hommes qui l’ont amené jusqu’ici réclamer la prime pour la capture de l’apprenti magicien, la réponse ne semblant pas vraiment être à leur convenance.
- Vous devrez attendre sa seigneurie, elle seule décidera si vous avez bien rempli votre mission !!
Le chef des mercenaires montre Eldarian, en contenant visiblement très mal sa colère.
- Vous en avez vu beaucoup d’autres de cet âge-là avec de telles marques ??
- Vous a-t-il jeté quelques sorts pour tenter de fuir ??
- Non !! Mais ce n’est qu’un apprenti qui n’a passé que deux semaines avec son Maistre !!
- L’avez vu avec son Maistre ?
- Bien sûr que non !! Croyez-vous qu’il nous aurait laissé nous en emparer sans réagir ?? Nous l’avons trouvé en compagnie des deux fils de sire Childebert accompagnés de seulement trois hommes de troupe, d’une jeune paysanne et d’un autre garçon très certainement paysan lui aussi.
- Que faisaient donc les deux princes en telle compagnie ??
- Qu’est-ce que j’en sais, moi !! Vous croyez quoi ?? Que j’ai pris le temps de faire les présentations peut-être ?? Un bon coup sur la calebasse et basta !! On a filé direct avec l’apprenti sans se poser de questions !!
- Vous avez agressé les deux princes ??
Le mercenaire sort visiblement de ses gonds.
- Mais pas du tout !! On leur a offert des sucreries en leur chantant une berceuse !! Il serait de bon ton que vous sortiez à l’extérieur de temps en temps, histoire de voir que la vie n’est pas faite que de prières !!
Voyant que le sergent de garde va pour protester.
- Ça suffit maintenant !! Ou vous nous versez la prime promise à qui amènera l’apprenti, ou nous le reprenons pour le ramener là où nous l’avons capturé !! Après tout il ne nous a rien fait ce môme !!
Le mercenaire jette un coup d’œil vers celui de ses compagnons qui s’occupait d’Eldarian.
- Je pourrai même avouer qu’il a été plutôt conciliant ! Ha ! Ha !
Chapitre 114 : Le temps des semailles, deuxième semaine cinquième jour (Un secret bien gardé) (2/4)
Le rire gras de l’homme déplaît fortement au sergent, celui-ci observe depuis un moment le jeune damoiseau ligoté qu’ils vont donner en pâture à l’archiprêtre.
Comme ces prédécesseurs avant lui, le haut prélat semble aveuglé par la haine de la magie et ne se rend pas compte des dégâts créés au fil des « doubles lunes » par tous ces meurtres d’enfants en portant la marque et cela au sein même des plus hauts dignitaires de son ordre.
Bien sûr il y eut des périodes moins sanglantes quoique très rares, quand le pouvoir suprême était entre les mains d’un archiprêtre plus juste et humain qui pensait que supprimer complètement la magie sur Penn était une erreur fondamentale qui un jour retomberait sur tous ces habitants quels qu’ils soient.
Ces périodes de tolérance venant de l’église permirent à ce que perdure jusqu’à ce jour la protection des domaines, à présent les enfants portant la marque ont quasiment disparu et Don Artaud maintient son joug à leur égard en sacrifiant les derniers représentants.
Il va de soi dans l’esprit du sergent, que ce n’est pas ce jeune apprenti qui modifiera à lui seul l’hégémonie de l’église sur les domaines et que bien au contraire lui laisser terminer sa formation, permettrait de maintenir le statu quo avec les races hostiles.
Maintenant il n’est qu’un simple sergent, pense-t-il à juste titre et il y a suffisamment de prélats pour avoir cette réflexion qu’ils ont souvent développée en salle de garde, qu’il serait bon pour un temps tout du moins de lâcher du lest afin de permettre le maintien d’une barrière de protection efficace à laquelle les populations sont fortement attachées.
Le chef des mercenaires vitupère toujours en pure perte et finit par s’en rendre compte, suivant alors des yeux le regard du sergent, ses lèvres esquissent alors un sourire de prédateur en pensant avoir saisi le sens de ce regard.
- S’il te plaît tant que ça, profite en vite avant que ton maître ne lui fasse sa fête ! Ha ! Ha !
Le sergent lui lance alors un regard noir en dégainant son épée, ce qui fait reculer de quelques pas le mercenaire ne tenant pas à passer de vie à trépas pour une réflexion qui n’avait pour but que de se venger de cet homme inflexible qui refuse de leur payer leur dû.
- (Le sergent) Quittez immédiatement cette salle si vous ne voulez pas terminer votre journée dans les cachots !! Sa seigneurie vous fera appeler au moment où elle le jugera opportun !!
Sur un geste de la main de leur chef, les mercenaires quittent la salle de garde, en comprenant bien qu’il est inutile d’insister sous peine de se mettre en danger.
***/***
Le sergent reprend un visage plus serein quand ils ont enfin quitté les lieux, il s’approche alors d’Eldarian pour l’aider à se relever en lui déliant pour cela les jambes.
Il l’emmène alors dans une autre pièce pour le faire asseoir devant une table qui servira pour son interrogatoire quand sa seigneurie arrivera, lui laissant en attendant une cruche d’eau et une demi-boule de pain afin qu’il reprenne quelques forces.
- Je suis désolé de ne pas pouvoir en faire plus mon garçon !!
- Que va-t-il m’arriver monsieur ?? Ces hommes m’ont enlevé alors que je ne faisais rien de mal !!
Le sergent sent son cœur se nouer, il préfère ne pas répondre et retourner dans l’autre salle, refermant la porte derrière lui en maudissant ceux qui sont assez cruels pour ôter la vie d’innocents sans défense comme ce garçon.
***/***
« Un quart d’heure plus tard »
Don Artaud accompagné de ses deux bourreaux attitrés, entre à son tour dans le poste de garde.
- Où est-il ?
- Dans la salle d’interrogatoire monseigneur !!
- Très bien !! Laissez-nous !!
Le sergent s’empresse d’obéir la peur au ventre comme à chaque fois qu’il se retrouve en présence du haut prélat, conscient qu’il ne doit marquer aucun sentiment d’humanité envers le garçon sous peine d’avoir à en subir les conséquences.
L’archiprêtre tend la main vers l’un de ses deux acolytes, celui-ci ouvre le petit coffre qu’il a emmené avec lui et contenant l’anneau de contre-pouvoir ainsi qu’un gant de cuir muni de fortes lanières.
Don Artaud s’en empare avec un rictus de cruauté qui ferait très certainement froid dans le dos du sergent s’il était encore présent.
- Bien !! Allons-y !! Finissons-en une bonne fois avec cet apprenti sorcier !!
Il entre alors dans l’autre pièce, suivi de près par ses maîtres tortionnaires qui se régalent à l’avance des hurlements de douleur ainsi que des suppliques sortant de la bouche du garçon avant que n’arrive après de longues heures d’agonie, la seule délivrance possible…la mort !!!
Parfaitement rodés à ce genre d’exercice, ils se précipitent tous deux sur Eldarian les poignets toujours entravés des fortes cordes qui depuis sa capture lui laissent de profondes marques dans ses chairs et l’un d’eux lui prend une main en lui en écartant brutalement les doigts.
L’archiprêtre lui enfile alors l’anneau sur le majeur pour ensuite lui mettre le gant qui une fois bien lacé, l’empêchera de s’en débarrasser.
Une fois chose faite, il se recule de quelques pas, attendant de voir les premières contorsions de douleur qui vont cette fois encore lui amener un spectacle dont il est friand.
Plusieurs minutes se passent sans que le visage ni le corps du prisonnier ne marquent une quelconque réaction, amenant la frustration puis le doute dans l’esprit du prélat.
Chapitre 115 : Le temps des semailles, deuxième semaine cinquième jour (Un secret bien gardé) (3/4)
Eldarian pour sa part le fixe en contrôlant suffisamment ses expressions pour que personne ne s’aperçoive des lames de feu qui lui traversent le corps depuis qu’il a cet anneau au doigt, le maître guerrier comprend difficilement malgré tout l’étonnement du prélat à son manque de réaction.
La douleur qu’il perçoit dans tout son corps n’est finalement pas si terrible une fois qu’il s’y habitue, seul l’effet de surprise des premiers instants a requis de sa part l’effort nécessaire pour qu’il reste impassible.
Eldarian ne ressent plus maintenant cette douleur que comme une forte gêne, gêne que son esprit éduqué au temple finit par ne plus prendre en compte.
Par contre avec les minutes qui passent, il s’interroge sur ce qu’attendait le prélat qui semble de plus en plus surpris par son manque de réactions.
- Qu’attendez-vous de moi ? Pourquoi cet enlèvement alors que je ne faisais qu’accompagner mes amis jusqu’au château où les attend leur père ?
- Tais-toi suppôt de Satan !! Qui es-tu donc ?? Personne à ce jour possédant ne serait-ce qu’une étincelle de sorcellerie dans son corps, n’a su résister à l’anneau de contre-pouvoir !! Il a été façonné pour vaincre les rois dragons eux-mêmes !!
Eldarian ne se démonte pas plus que ça, connaissant ce qu’il est et combien ces gens semblent présomptueux de croire qu’à eux trois ils pourraient le vaincre, ses mains entravées ne le sont encore que parce que sa curiosité le pousse à en connaître davantage avant de se découvrir devant eux.
- Ce qui semblerait à prouver que j’ai raison et que c’est vous qui êtes dans l’erreur !!
- Silence !! Nul ne peut ignorer la marque que tu portes !!
- Pourtant votre… « amulette », ne semble pas détecter en moi la moindre parcelle de magie ou alors c’est que son « pouvoir » s’est dissipé avec le temps !!
Don Artaud va pour le vilipender sévèrement une troisième fois quand les paroles du garçon mettant en doute l’efficacité de l’anneau, commencent à lui amener de l’incertitude à l’esprit.
Ne possédant que deux de ces anneaux forgés ensemble il y a bien longtemps, une peur viscérale le prend alors en pensant soudainement qu’il pourrait en être pareil du second et que dans ce cas sa vie comme toutes celles des serviteurs de l’église seraient en grave danger.
Un doute subsiste néanmoins que le garçon en face de lui ne soit qu’une erreur de plus, le prélat n’en serait pas à sa première et un certain nombre d’enfants portant la marque tout en étant dépourvu du pouvoir, ont fini comme ceux en étant porteur sur le bûcher afin d’effacer toutes traces de leur existence.
Pourtant Ebbon le sorcier l’a bien pris comme apprenti, pourrait-il lui aussi se fourvoyer dans une erreur aussi grossière se demande Don Artaud.
La peur que l’anneau ait bien perdu sa puissance revient alors dans les tripes du prélat.
- Nous allons très rapidement le savoir !!
Il s’adresse alors à ses deux bourreaux.
- Mettez-lui les fers !! Ensuite nous irons rendre visite à notre autre invité, il nous faudra peut-être mettre fin à son tourment en fin de compte !!
Eldarian hésite entre deux solutions, celle de se laisser entraver plus solidement au risque de ne plus pouvoir s’en libérer aussi aisément que des simples cordes actuelles ou bien les laisser agir à leur guise afin de connaître l’identité de « l’autre invité » qui à la façon qu’a réagi le prélat à ces dernières paroles semble quelqu’un de très dangereux, tout du moins pour l’église et ce qu’elle représente.
La curiosité l’emporte sur la raison, aussi le maître guerrier se laisse-t-il enferrer pieds et poings en prenant le risque pour sa vie, sauf qu’une fois chose faite il lui revient brutalement à l’esprit que ce n’est pas de la sienne mais bien de celle de son frère dont il s’agit.
***/***
« Non loin de la cathédrale où se trouve emprisonné Eldarian »
Ils sont tous descendus de cheval depuis que Loup a poussé son premier cri atroce de douleur et qu’ils se sont agenouillés à ses côtés à ne pas savoir comment le soulager, Voldarian essayant de le questionner entre deux spasmes.
- Qu’as-tu ressenti en premier fils ??
Loup n’entend que de très loin les paroles de Voldarian, son cerveau se consume comme dans un incendie en lui ôtant tout pouvoir de volonté à n’être plus qu’une boule de nerfs à vif réclamant la mort en soulagement.
Voldarian tente d’entrer dans l’esprit de Loup afin d’y trouver sa réponse, une vive morsure de feu lui envahit brutalement le cerveau en l’éjectant au sol et c’est sans doute le choc dû à la chute qui le sauve en le déconnectant mentalement d’avec son fils.
Remonte alors en Voldarian le souvenir conté par ses parents de la fin des derniers rois dragons vaincus par la trahison d’un des leurs, le haut mage recherche alors l’élément qui lui échappe encore et qui pourtant expliquerait l’état dans lequel se trouve actuellement Loup, jusqu’à ce qu’enfin cela lui revienne brutalement.
- Les anneaux de contre-pouvoir !!!
Durin, Lorgan et Aerandir se regardent en devenant soudainement livides alors que Conrad ne comprend toujours rien à ce qui leur arrive.
- (Aerandir) Eldarian ne devrait pas le ressentir puisqu’il est dépourvu de toute magie !!
- (Voldarian) Oui mais il est dans le corps de son frère et celui-ci ressent l’effet de l’anneau, nous devons agir au plus vite !!
- (Conrad inquiet) Loup va mourir ??
- (Voldarian) Non…ce n’est pas comme ça que ça fonctionne !! Mais il le souhaiterait sûrement à l’instant où je vous parle !!
« Eldarian »
Comme les matins précédents, le lever pour Eldarian se fit dès l’aube pour sitôt avoir ingurgité une boisson chaude et insipide, se retrouver dans la même position inconfortable que ces derniers jours.
Le maître guerrier s’en accommoderait bien s’il n’y avait pas cette odeur forte venant aussi bien de son corps que de celui de son gardien, qui tout comme lui ne s’est pas lavé depuis le rapt.
Une grimace lui vient alors en se rappelant ce qu’il a dû faire durant la nuit et qui ne lui a pas laissé d’autre alternative que de prendre en bouche l’organe turgescent du mercenaire, faisant fi des odeurs plus que suspectes qui en émanaient.
***/***
Ce n’est que dans l’après-midi alors que le soleil commence à être très bas dans le ciel, qu’il discerne au loin l’immense bâtisse fortifiée, but de leur voyage.
Eldarian hésite dans son rôle à jouer, doit-il toujours laisser penser qu’il est le fameux apprenti magicien qu’attend l’archiprêtre en prenant le risque des conséquences que cela impliquerait, ou prendre de suite le parti de se rebeller en révélant sa véritable identité.
Il pèse les arguments pour ou contre des deux cas de figure, décidant finalement que ce seront les futurs événements qui décideront à sa place.
***/***
« Bureau de l’archiprêtre »
Le miroir lui renvoie l’image d’un vieillard légèrement bedonnant qui ne porte pas encore trop mal ses soixante-deux « doubles lunes » quand Don Artaud l’archiprêtre de l’église du dieu unique se mire devant comme il se plaît à le faire chaque jour qui passe.
Il va bientôt être temps pense-t-il de préparer sa succession, non pas qu’il en ait la réelle envie mais tout simplement parce que sa charge lui pèse chaque « double lune » davantage et que certaines tâches lui deviennent de plus en plus ardues à réaliser.
Don Artaud a beau passer en revue ses principaux collaborateurs, il n’arrive pas à voir dans aucun d’entre eux un éventuel successeur et le seul qui pourrait sans conteste à ses yeux accéder au poste suprême de l’église, n’est personne d’autre que celui qu’il a dû bannir suite à ses idées contraires aux siennes sur le sort à réserver à ceux qui portent les marques honnies de la magie.
L’archiprêtre pousse un profond soupir de contrariété en reprenant sa place assise devant son bureau, posant un regard noir sur la paperasse qu’il lui reste encore à traiter et qu’il reporte déjà depuis bien trop longtemps.
Sa main se pose sur le dossier au-dessus de la pile, quand un son de cor résonne depuis les remparts et lui donne par là-même, l’excuse qu’il désespérait trouver pour ne pas avoir à s’atteler cette fois encore à la tâche fastidieuse à souhait qui lui incombe.
L’archiprêtre se lève donc et va jusqu’à la meurtrière qui donne une vue directe sur le pont surplombant les douves, apercevant au loin les cavaliers qui arrivent à bride abattue en laissant derrière eux un nuage de poussière.
Il ne faut pas longtemps à Don Artaud pour visualiser et comprendre que le fardeau porté en travers de la selle par l’un des hommes n’est rien de moins que le garçon faisant l’objet de leur mission.
C’est donc avec une réelle satisfaction que l’archiprêtre quitte son bureau afin de se rendre à leur rencontre, curieux de voir enfin à qui il a à faire mais surtout d’avoir une fois de plus la satisfaction de le voir souffrir le martyre quand il lui fera porter l’un des anneaux de contre-pouvoir toujours en possession de l’église et forgé du temps du haut mage félon pour aider les hommes à vaincre ses pairs.
***/***
Sitôt arrivé dans l’enceinte de la cathédrale, Eldarian est emmené sans douceur jusqu’au poste de garde où il y est jeté au sol comme un vulgaire ballot de paille.
Il entend les hommes qui l’ont amené jusqu’ici réclamer la prime pour la capture de l’apprenti magicien, la réponse ne semblant pas vraiment être à leur convenance.
- Vous devrez attendre sa seigneurie, elle seule décidera si vous avez bien rempli votre mission !!
Le chef des mercenaires montre Eldarian, en contenant visiblement très mal sa colère.
- Vous en avez vu beaucoup d’autres de cet âge-là avec de telles marques ??
- Vous a-t-il jeté quelques sorts pour tenter de fuir ??
- Non !! Mais ce n’est qu’un apprenti qui n’a passé que deux semaines avec son Maistre !!
- L’avez vu avec son Maistre ?
- Bien sûr que non !! Croyez-vous qu’il nous aurait laissé nous en emparer sans réagir ?? Nous l’avons trouvé en compagnie des deux fils de sire Childebert accompagnés de seulement trois hommes de troupe, d’une jeune paysanne et d’un autre garçon très certainement paysan lui aussi.
- Que faisaient donc les deux princes en telle compagnie ??
- Qu’est-ce que j’en sais, moi !! Vous croyez quoi ?? Que j’ai pris le temps de faire les présentations peut-être ?? Un bon coup sur la calebasse et basta !! On a filé direct avec l’apprenti sans se poser de questions !!
- Vous avez agressé les deux princes ??
Le mercenaire sort visiblement de ses gonds.
- Mais pas du tout !! On leur a offert des sucreries en leur chantant une berceuse !! Il serait de bon ton que vous sortiez à l’extérieur de temps en temps, histoire de voir que la vie n’est pas faite que de prières !!
Voyant que le sergent de garde va pour protester.
- Ça suffit maintenant !! Ou vous nous versez la prime promise à qui amènera l’apprenti, ou nous le reprenons pour le ramener là où nous l’avons capturé !! Après tout il ne nous a rien fait ce môme !!
Le mercenaire jette un coup d’œil vers celui de ses compagnons qui s’occupait d’Eldarian.
- Je pourrai même avouer qu’il a été plutôt conciliant ! Ha ! Ha !
Chapitre 114 : Le temps des semailles, deuxième semaine cinquième jour (Un secret bien gardé) (2/4)
Le rire gras de l’homme déplaît fortement au sergent, celui-ci observe depuis un moment le jeune damoiseau ligoté qu’ils vont donner en pâture à l’archiprêtre.
Comme ces prédécesseurs avant lui, le haut prélat semble aveuglé par la haine de la magie et ne se rend pas compte des dégâts créés au fil des « doubles lunes » par tous ces meurtres d’enfants en portant la marque et cela au sein même des plus hauts dignitaires de son ordre.
Bien sûr il y eut des périodes moins sanglantes quoique très rares, quand le pouvoir suprême était entre les mains d’un archiprêtre plus juste et humain qui pensait que supprimer complètement la magie sur Penn était une erreur fondamentale qui un jour retomberait sur tous ces habitants quels qu’ils soient.
Ces périodes de tolérance venant de l’église permirent à ce que perdure jusqu’à ce jour la protection des domaines, à présent les enfants portant la marque ont quasiment disparu et Don Artaud maintient son joug à leur égard en sacrifiant les derniers représentants.
Il va de soi dans l’esprit du sergent, que ce n’est pas ce jeune apprenti qui modifiera à lui seul l’hégémonie de l’église sur les domaines et que bien au contraire lui laisser terminer sa formation, permettrait de maintenir le statu quo avec les races hostiles.
Maintenant il n’est qu’un simple sergent, pense-t-il à juste titre et il y a suffisamment de prélats pour avoir cette réflexion qu’ils ont souvent développée en salle de garde, qu’il serait bon pour un temps tout du moins de lâcher du lest afin de permettre le maintien d’une barrière de protection efficace à laquelle les populations sont fortement attachées.
Le chef des mercenaires vitupère toujours en pure perte et finit par s’en rendre compte, suivant alors des yeux le regard du sergent, ses lèvres esquissent alors un sourire de prédateur en pensant avoir saisi le sens de ce regard.
- S’il te plaît tant que ça, profite en vite avant que ton maître ne lui fasse sa fête ! Ha ! Ha !
Le sergent lui lance alors un regard noir en dégainant son épée, ce qui fait reculer de quelques pas le mercenaire ne tenant pas à passer de vie à trépas pour une réflexion qui n’avait pour but que de se venger de cet homme inflexible qui refuse de leur payer leur dû.
- (Le sergent) Quittez immédiatement cette salle si vous ne voulez pas terminer votre journée dans les cachots !! Sa seigneurie vous fera appeler au moment où elle le jugera opportun !!
Sur un geste de la main de leur chef, les mercenaires quittent la salle de garde, en comprenant bien qu’il est inutile d’insister sous peine de se mettre en danger.
***/***
Le sergent reprend un visage plus serein quand ils ont enfin quitté les lieux, il s’approche alors d’Eldarian pour l’aider à se relever en lui déliant pour cela les jambes.
Il l’emmène alors dans une autre pièce pour le faire asseoir devant une table qui servira pour son interrogatoire quand sa seigneurie arrivera, lui laissant en attendant une cruche d’eau et une demi-boule de pain afin qu’il reprenne quelques forces.
- Je suis désolé de ne pas pouvoir en faire plus mon garçon !!
- Que va-t-il m’arriver monsieur ?? Ces hommes m’ont enlevé alors que je ne faisais rien de mal !!
Le sergent sent son cœur se nouer, il préfère ne pas répondre et retourner dans l’autre salle, refermant la porte derrière lui en maudissant ceux qui sont assez cruels pour ôter la vie d’innocents sans défense comme ce garçon.
***/***
« Un quart d’heure plus tard »
Don Artaud accompagné de ses deux bourreaux attitrés, entre à son tour dans le poste de garde.
- Où est-il ?
- Dans la salle d’interrogatoire monseigneur !!
- Très bien !! Laissez-nous !!
Le sergent s’empresse d’obéir la peur au ventre comme à chaque fois qu’il se retrouve en présence du haut prélat, conscient qu’il ne doit marquer aucun sentiment d’humanité envers le garçon sous peine d’avoir à en subir les conséquences.
L’archiprêtre tend la main vers l’un de ses deux acolytes, celui-ci ouvre le petit coffre qu’il a emmené avec lui et contenant l’anneau de contre-pouvoir ainsi qu’un gant de cuir muni de fortes lanières.
Don Artaud s’en empare avec un rictus de cruauté qui ferait très certainement froid dans le dos du sergent s’il était encore présent.
- Bien !! Allons-y !! Finissons-en une bonne fois avec cet apprenti sorcier !!
Il entre alors dans l’autre pièce, suivi de près par ses maîtres tortionnaires qui se régalent à l’avance des hurlements de douleur ainsi que des suppliques sortant de la bouche du garçon avant que n’arrive après de longues heures d’agonie, la seule délivrance possible…la mort !!!
Parfaitement rodés à ce genre d’exercice, ils se précipitent tous deux sur Eldarian les poignets toujours entravés des fortes cordes qui depuis sa capture lui laissent de profondes marques dans ses chairs et l’un d’eux lui prend une main en lui en écartant brutalement les doigts.
L’archiprêtre lui enfile alors l’anneau sur le majeur pour ensuite lui mettre le gant qui une fois bien lacé, l’empêchera de s’en débarrasser.
Une fois chose faite, il se recule de quelques pas, attendant de voir les premières contorsions de douleur qui vont cette fois encore lui amener un spectacle dont il est friand.
Plusieurs minutes se passent sans que le visage ni le corps du prisonnier ne marquent une quelconque réaction, amenant la frustration puis le doute dans l’esprit du prélat.
Chapitre 115 : Le temps des semailles, deuxième semaine cinquième jour (Un secret bien gardé) (3/4)
Eldarian pour sa part le fixe en contrôlant suffisamment ses expressions pour que personne ne s’aperçoive des lames de feu qui lui traversent le corps depuis qu’il a cet anneau au doigt, le maître guerrier comprend difficilement malgré tout l’étonnement du prélat à son manque de réaction.
La douleur qu’il perçoit dans tout son corps n’est finalement pas si terrible une fois qu’il s’y habitue, seul l’effet de surprise des premiers instants a requis de sa part l’effort nécessaire pour qu’il reste impassible.
Eldarian ne ressent plus maintenant cette douleur que comme une forte gêne, gêne que son esprit éduqué au temple finit par ne plus prendre en compte.
Par contre avec les minutes qui passent, il s’interroge sur ce qu’attendait le prélat qui semble de plus en plus surpris par son manque de réactions.
- Qu’attendez-vous de moi ? Pourquoi cet enlèvement alors que je ne faisais qu’accompagner mes amis jusqu’au château où les attend leur père ?
- Tais-toi suppôt de Satan !! Qui es-tu donc ?? Personne à ce jour possédant ne serait-ce qu’une étincelle de sorcellerie dans son corps, n’a su résister à l’anneau de contre-pouvoir !! Il a été façonné pour vaincre les rois dragons eux-mêmes !!
Eldarian ne se démonte pas plus que ça, connaissant ce qu’il est et combien ces gens semblent présomptueux de croire qu’à eux trois ils pourraient le vaincre, ses mains entravées ne le sont encore que parce que sa curiosité le pousse à en connaître davantage avant de se découvrir devant eux.
- Ce qui semblerait à prouver que j’ai raison et que c’est vous qui êtes dans l’erreur !!
- Silence !! Nul ne peut ignorer la marque que tu portes !!
- Pourtant votre… « amulette », ne semble pas détecter en moi la moindre parcelle de magie ou alors c’est que son « pouvoir » s’est dissipé avec le temps !!
Don Artaud va pour le vilipender sévèrement une troisième fois quand les paroles du garçon mettant en doute l’efficacité de l’anneau, commencent à lui amener de l’incertitude à l’esprit.
Ne possédant que deux de ces anneaux forgés ensemble il y a bien longtemps, une peur viscérale le prend alors en pensant soudainement qu’il pourrait en être pareil du second et que dans ce cas sa vie comme toutes celles des serviteurs de l’église seraient en grave danger.
Un doute subsiste néanmoins que le garçon en face de lui ne soit qu’une erreur de plus, le prélat n’en serait pas à sa première et un certain nombre d’enfants portant la marque tout en étant dépourvu du pouvoir, ont fini comme ceux en étant porteur sur le bûcher afin d’effacer toutes traces de leur existence.
Pourtant Ebbon le sorcier l’a bien pris comme apprenti, pourrait-il lui aussi se fourvoyer dans une erreur aussi grossière se demande Don Artaud.
La peur que l’anneau ait bien perdu sa puissance revient alors dans les tripes du prélat.
- Nous allons très rapidement le savoir !!
Il s’adresse alors à ses deux bourreaux.
- Mettez-lui les fers !! Ensuite nous irons rendre visite à notre autre invité, il nous faudra peut-être mettre fin à son tourment en fin de compte !!
Eldarian hésite entre deux solutions, celle de se laisser entraver plus solidement au risque de ne plus pouvoir s’en libérer aussi aisément que des simples cordes actuelles ou bien les laisser agir à leur guise afin de connaître l’identité de « l’autre invité » qui à la façon qu’a réagi le prélat à ces dernières paroles semble quelqu’un de très dangereux, tout du moins pour l’église et ce qu’elle représente.
La curiosité l’emporte sur la raison, aussi le maître guerrier se laisse-t-il enferrer pieds et poings en prenant le risque pour sa vie, sauf qu’une fois chose faite il lui revient brutalement à l’esprit que ce n’est pas de la sienne mais bien de celle de son frère dont il s’agit.
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« Non loin de la cathédrale où se trouve emprisonné Eldarian »
Ils sont tous descendus de cheval depuis que Loup a poussé son premier cri atroce de douleur et qu’ils se sont agenouillés à ses côtés à ne pas savoir comment le soulager, Voldarian essayant de le questionner entre deux spasmes.
- Qu’as-tu ressenti en premier fils ??
Loup n’entend que de très loin les paroles de Voldarian, son cerveau se consume comme dans un incendie en lui ôtant tout pouvoir de volonté à n’être plus qu’une boule de nerfs à vif réclamant la mort en soulagement.
Voldarian tente d’entrer dans l’esprit de Loup afin d’y trouver sa réponse, une vive morsure de feu lui envahit brutalement le cerveau en l’éjectant au sol et c’est sans doute le choc dû à la chute qui le sauve en le déconnectant mentalement d’avec son fils.
Remonte alors en Voldarian le souvenir conté par ses parents de la fin des derniers rois dragons vaincus par la trahison d’un des leurs, le haut mage recherche alors l’élément qui lui échappe encore et qui pourtant expliquerait l’état dans lequel se trouve actuellement Loup, jusqu’à ce qu’enfin cela lui revienne brutalement.
- Les anneaux de contre-pouvoir !!!
Durin, Lorgan et Aerandir se regardent en devenant soudainement livides alors que Conrad ne comprend toujours rien à ce qui leur arrive.
- (Aerandir) Eldarian ne devrait pas le ressentir puisqu’il est dépourvu de toute magie !!
- (Voldarian) Oui mais il est dans le corps de son frère et celui-ci ressent l’effet de l’anneau, nous devons agir au plus vite !!
- (Conrad inquiet) Loup va mourir ??
- (Voldarian) Non…ce n’est pas comme ça que ça fonctionne !! Mais il le souhaiterait sûrement à l’instant où je vous parle !!
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