30-01-2021, 12:23 PM
La suite fut de peu d’intérêt. Damien se montrait très courtois, et même plutôt gentil. J’en aurais presque été à me demander qui de nous deux était le plus intimidé par la situation. Il m’invita à déjeuner avec lui dans un petit restaurant tout proche où il semblait avoir ses habitudes, un bouchon lyonnais plutôt discret et très gourmand. A mon grand soulagement il ne tenta pas de me prendre la main que ce fût sur la route ou au restaurant. Il avait pris un ton très ouvert et amical, comme si nous étions amis, mais il ne cherchait pas à forcer la chose plus que cela. Visiblement il voulait me laisser un peu de temps pour me faire à la situation. Maintenant que j’y repense, j’aurais pu plus mal tomber.
Le repas fini, et une simple bise pour se dire au revoir avant de prendre le métro faite, je me retrouvai dans les transports bondés de la capitale. Son quartier était assez calme et son appartement donnait sur beaucoup de verdure ; jamais je n’aurais pu vivre dans un appartement d’un immeuble donnant sur un autre, une sorte de cage dans laquelle beaucoup s’entassent faute de choix. Le train m’éloigna de Paris et me ramena vers mes racines. Mon anxiété avait disparue. Je savais où j’allais, je savais à quoi m’en tenir, et rien que cela me permettait de voir les choses avec beaucoup plus de sérénité.
Je descendis en gare de Perros-Guirec, mon gros sac à main sous le bras et regardai alentours pour voir si quelqu’un était venu me chercher. Je fus surprise par une voix familière venant de mon dos.
- Alors la grosse vache, qu’est-ce qu’on rumine encore ?
Je fis volte-face en envoyant un coup de poing dans le ventre de mon frère. Je n’ai jamais été un gros gabarit alors que lui faisait une bonne tête de plus que moi et avait des épaules de rugbyman. Autant dire que j’avais plus de chance de me faire mal que de le faire bouger.
- Espèce de gros beauf !
Je lui sautai dans les bras. Il avait 15 mois de plus que moi, autant dire qu’on était presque jumeaux et qu’on avait jamais été séparés. Il était très taquin, j’aimais bien lui répondre… une fratrie comme tant d’autres en somme.
- Maman m’a prêté la 205. Monte, je te ramène.
- Mais qu’est-ce que tu fais là ? T’es pas sensé être à la scierie ?
- On a un stagiaire qui a réussi à bloquer la machine. Je suis au chômage technique le temps que le réparateur se pointe.
- Toujours aussi vernis, espèce de grosse feignasse. Et maintenant conduit prudemment : n’oublie pas que tu as charge d’âme.
- D’âme ? Depuis quand est-ce que les rousses ont une âme ?
- Tu peux parler, crétin des Alpes !
Et nous repartîmes pour la maison. Ce n’est pas que mon frère conduise vraiment mal. Il est du genre prudent et très à cheval sur le code de la route mais sa maîtrise du véhicule laisse à désirer. On s’y fait avec le temps… Ou du moins on essaie.
L’accueil des parents fût très chaleureux quand ils me retrouvèrent le soir. Je leur décris quelque chose de simple et de propre, des voisins discrets, tout ce que mon imagination pouvait construire de cohérent, d’idéal, mais de crédible. Ce fût une soirée crêpes-cidre pour fêter ça. Oui, je sais, on vit dans le cliché mais de un qui n’aime pas les crêpes ? De deux qui n’aime pas le cidre ? De trois c’est simple, pas cher, et franchement convivial. Oh et puis zut : on est bretons et on vous emmerde !
La fin de la soirée fut arrosée. D’après ce qu’on m’en rapporta, je dansai une bourrée avec mon frère dans un respect très approximatif des pas de danse et du mobilier, et je finis par m’effondrer de façon très peu féminine dans le canapé. Ce fût lui qui me porta jusque sur mon lit et m’y laissa cuver mon cidre.
Le lendemain, la tête un peu dans le cirage, je me levai, fis mes ablutions (indispensable après une cuite au cidre!) et traînai sur internet pour occuper mes derniers jours de vacances. J’allai passer de lycéenne à étudiante, alors je voulais rendre une dernière fois hommage à ma vie précédente en faisant ce que je fais de mieux : buller. Je me rendis cependant compte qu’inconsciemment je revenais toujours sur l’annonce que j’avais enregistrée en favoris. Je finis par me décider, pris mon portable, et envoyai un petit mot.
- Bonjour Damien. Merci beaucoup pour le déjeuner d’hier, c’était très sympa. J’ai hâte d’être à samedi et de venir emménager.
Mais qu’est-ce que je racontai ? Ça faisait genre celle qui envoie des signaux. Bon, tout ce que je disais était vrai, et puis j’avais vraiment envie de commencer l’année, mais là c’était obligé, il allait le prendre pour lui. Et alors que je me posais des questions, le message parti par erreur. Voilà qui réglai le problème. J’attendis donc la réponse. Toute la matinée. Et l’après-midi. Le message état bien reçu, et je me demandais pourquoi il ne me répondait pas. Ce ne fut que très tard que je reçu sa réponse :
- C’était avec plaisir. Tu seras la bienvenue, indique-moi juste la veille ton heure d’arrivée. Je te prie d’excuser la latence : je travaille sur un gros dossier. A samedi.221
Le repas fini, et une simple bise pour se dire au revoir avant de prendre le métro faite, je me retrouvai dans les transports bondés de la capitale. Son quartier était assez calme et son appartement donnait sur beaucoup de verdure ; jamais je n’aurais pu vivre dans un appartement d’un immeuble donnant sur un autre, une sorte de cage dans laquelle beaucoup s’entassent faute de choix. Le train m’éloigna de Paris et me ramena vers mes racines. Mon anxiété avait disparue. Je savais où j’allais, je savais à quoi m’en tenir, et rien que cela me permettait de voir les choses avec beaucoup plus de sérénité.
Je descendis en gare de Perros-Guirec, mon gros sac à main sous le bras et regardai alentours pour voir si quelqu’un était venu me chercher. Je fus surprise par une voix familière venant de mon dos.
- Alors la grosse vache, qu’est-ce qu’on rumine encore ?
Je fis volte-face en envoyant un coup de poing dans le ventre de mon frère. Je n’ai jamais été un gros gabarit alors que lui faisait une bonne tête de plus que moi et avait des épaules de rugbyman. Autant dire que j’avais plus de chance de me faire mal que de le faire bouger.
- Espèce de gros beauf !
Je lui sautai dans les bras. Il avait 15 mois de plus que moi, autant dire qu’on était presque jumeaux et qu’on avait jamais été séparés. Il était très taquin, j’aimais bien lui répondre… une fratrie comme tant d’autres en somme.
- Maman m’a prêté la 205. Monte, je te ramène.
- Mais qu’est-ce que tu fais là ? T’es pas sensé être à la scierie ?
- On a un stagiaire qui a réussi à bloquer la machine. Je suis au chômage technique le temps que le réparateur se pointe.
- Toujours aussi vernis, espèce de grosse feignasse. Et maintenant conduit prudemment : n’oublie pas que tu as charge d’âme.
- D’âme ? Depuis quand est-ce que les rousses ont une âme ?
- Tu peux parler, crétin des Alpes !
Et nous repartîmes pour la maison. Ce n’est pas que mon frère conduise vraiment mal. Il est du genre prudent et très à cheval sur le code de la route mais sa maîtrise du véhicule laisse à désirer. On s’y fait avec le temps… Ou du moins on essaie.
L’accueil des parents fût très chaleureux quand ils me retrouvèrent le soir. Je leur décris quelque chose de simple et de propre, des voisins discrets, tout ce que mon imagination pouvait construire de cohérent, d’idéal, mais de crédible. Ce fût une soirée crêpes-cidre pour fêter ça. Oui, je sais, on vit dans le cliché mais de un qui n’aime pas les crêpes ? De deux qui n’aime pas le cidre ? De trois c’est simple, pas cher, et franchement convivial. Oh et puis zut : on est bretons et on vous emmerde !
La fin de la soirée fut arrosée. D’après ce qu’on m’en rapporta, je dansai une bourrée avec mon frère dans un respect très approximatif des pas de danse et du mobilier, et je finis par m’effondrer de façon très peu féminine dans le canapé. Ce fût lui qui me porta jusque sur mon lit et m’y laissa cuver mon cidre.
Le lendemain, la tête un peu dans le cirage, je me levai, fis mes ablutions (indispensable après une cuite au cidre!) et traînai sur internet pour occuper mes derniers jours de vacances. J’allai passer de lycéenne à étudiante, alors je voulais rendre une dernière fois hommage à ma vie précédente en faisant ce que je fais de mieux : buller. Je me rendis cependant compte qu’inconsciemment je revenais toujours sur l’annonce que j’avais enregistrée en favoris. Je finis par me décider, pris mon portable, et envoyai un petit mot.
- Bonjour Damien. Merci beaucoup pour le déjeuner d’hier, c’était très sympa. J’ai hâte d’être à samedi et de venir emménager.
Mais qu’est-ce que je racontai ? Ça faisait genre celle qui envoie des signaux. Bon, tout ce que je disais était vrai, et puis j’avais vraiment envie de commencer l’année, mais là c’était obligé, il allait le prendre pour lui. Et alors que je me posais des questions, le message parti par erreur. Voilà qui réglai le problème. J’attendis donc la réponse. Toute la matinée. Et l’après-midi. Le message état bien reçu, et je me demandais pourquoi il ne me répondait pas. Ce ne fut que très tard que je reçu sa réponse :
- C’était avec plaisir. Tu seras la bienvenue, indique-moi juste la veille ton heure d’arrivée. Je te prie d’excuser la latence : je travaille sur un gros dossier. A samedi.221