23-01-2021, 05:58 PM
Voici encore une nouvelle suite, je suis comme Pierre, je ne sais pas très bien où tout cela va les mener !!
Je l'ai alors regardé avec une immense tristesse, droit dans les yeux, sans rien ajouter car il n'y avait rien à ajouter hélas, mais j'ai malgré tout perçu dans son regard, je le connais tellement bien mon Pierre, une lueur de désespoir, tout au moins de malaise : il ne fallait pas que je réponde à cette dernière diatribe, plus terrible que toutes les autres, il fallait que je lui laisse cette liberté qu'il revendiquait si violement, si brutalement.
- Moi / C'est bon, fait ce que tu veux, mais ne compte pas sur moi vendredi, moi aussi j'ai besoin de ma liberté, mais pas la même que la tienne.
- Pierre / Tu es certain que tu ne veux pas te joindre à nous vendredi ? Je t'assure…
- Moi / Non, Pierre, n'insiste pas [long silence pendant que Pierre mange et que je le regarde] Tu dois le savoir, je serai toujours là pour toi si tu éprouves le besoin de me voir, pour quelque raison que ce soit, je serai encore là, mais pas pour servir d'alibi à ta débauche !
Les deux-trois jours qui suivirent furent pénibles, surtout pour moi car Pierre n'avait pas l'air véritablement préoccupé par la dispute que nous avions eue entre nous, même si c'était la première fois que cela nous arrivait. Au fond de moi, j'avais l'espoir, insensé je l'admets, que Pierre allait renoncer à son escapade de vendredi avec Gilbert, c'est le prénom du petit vendeur, et que le weekend serait à nouveau serein. Mais en début d'après-midi, alors que je remettais la cuisine en ordre, je vis Pierre sortir de sa chambre avec un sac de voyage
- Pierre / Bon, je pars pour le weekend chez Gilbert, je reviendrai en principe dimanche en fin de journée, éventuellement lundi matin. Antoine, tu veux toujours pas te joindre à nous ?
- Moi / Non merci, c'est gentil mais je ne peux vraiment pas. Puisque tu es loin, je vais aller au Village et à l'institut pour quelques jours, je reviendrai dans le courant de la semaine prochaine
- Pierre / [un peu estomaqué] Non, mais tu reviens au moins dimanche, qu'est-ce que je vais faire seul ici
- Moi / Tu profiteras de ta liberté sans l'empêcheur de danser que je suis devenu. Dépêche-toi, tu vas être en retard
et je partis vers la pièce où je travaillais car, dès le lendemain de notre altercation, j'avais déménagé tous mes vêtements et mes affaires dans deux pièces, l'une me servant de chambre à coucher et l'autre de bureau. Là également, j'avais pris Pierre par surprise, il ne s'attendait pas à cette décision prise très calmement mais je ne voulais plus dormir à ses côtés alors qu'il prenait son plaisir avec un inconnu et, je le pressentais, bientôt avec des inconnus. C'est par ces petites touches que j'espérais, avec le temps, qu'il prenne conscience de ce qu'il perdait. Lorsqu'un quart d'heure plus tard je revins dans le salon, Pierre était parti, sans laisser un mot ni même un numéro de téléphone. Un instant, j'ai envisagé d'aller le chercher dans ce fameux sex-shop mais cela n'aurait servi à rien et, en plus, il était probablement chez ce Gilbert : des images se pressaient devant moi, s'embrassaient-ils, que faisaient leurs mains, avaient-ils encore leurs pantalons ? Je me suis secoué pour chasser ces visions, je pris le téléphone pour voir si l'institut pouvait me loger pour quelques jours, je regardais l'horaire et fis rapidement un sac pour un séjour de quelques jours.
Je venais à peine de descendre du bus
- Mais c'est Antoine ! Qu'est-ce que tu fais ici ?
Je n'avais pas encore qui s'adressait à moi d'une manière si chaleureuse que je fus saisi à bras le corps avec de vigoureuses tapes dans le dos : c'était Hector, ce garçon qui nous avait sauvés, Pierre et moi, sinon d'un viol mais au moins d'une atteinte certaine à notre intimité corporelle. Hector était devenu pour moi un bon camarade avec qui j'aimais passer des moments agréables mais je ne dirais pas qu'il était devenu un ami intime. Le voir m'accueillir de façon si spontanée me fit vraiment chaud au cœur et je lui rendis avec plaisir sa manière de me serrer contre lui.
- Hector / Mais je n'ai pas vu Antoine, où est-il ?
- Moi / [mon visage se rembrunit] Il est resté à Genève, il n'avait pas envie de venir et je ne tenais…
- Hector / tu ne tenais pas à quoi ?
- Moi / …
- Hector / Eh, qu'est-ce qui se passe, tu me fais peur, tu es tout pâle ?
- Moi / Il est probablement à poil dans les bras d'un garçon qu'il connaît à peine, mais je t'en parlerai plus tard, je veux maintenant être au plaisir d'être ici et de partager ces moments avec toi. Allez. On va à l'institut.
Et il me prit d'office mon petit bagage et me raconta les derniers événements de l'internat et de l'école.
À peine arrivé, je fus accueilli par deux surveillants qui s'étonnèrent de ne pas voir Pierre, mais Hector leur fit signe de ne pas insister. Le directeur entendant du bruit ouvrit sa porte en me faisant entrer et en m'embrassant affectueusement. C'était un fin psychologue et lors de mon téléphone il avait tout de suite sentis que je n'étais pas vraiment dans mon assiette. Il ne s'assit pas à son bureau comme d'habitude mais nous prîmes place dans les fauteuils de la partie moins officielle. Je sentais que cet homme m'aimait, il faut dire que nous avons passé, Pierre et moi, une dizaine d'années dans son établissement et que nous avons été, en tous cas moi, très heureux, Pierre je n'en sais plus rien. Il me regardait attentivement, mais je le sentais préoccupé. Le silence dura un bon moment
- Directeur / [d'une voix très douce et encourageante] Alors, Antoine, qu'est-ce qui se passe ?
- Moi / ….
- Moi / …..
- Directeur / [me voyant éclater en sanglots] Vous avez un problème Pierre et toi ? Raconte-moi tout, cela te fera du bien et cela te permettra de voir après les choses avec plus de réalisme
Je lui racontais tout, d'abord le choc culturel pour moi alors que Pierre s'accommodait beaucoup mieux de ces nouvelles conditions de vie, je lui disais la chance que nous avions d'habiter dans un bel appartement et que j'en étais vraiment très reconnaissant à mes parents. J'évoquais la nostalgie que j'ai très vite éprouvée du Village et de l'institut dont je parlais tout le temps alors que Pierre semblait avoir déjà oublié cette période de notre vie.
- Directeur / Antoine, ce n'est pas ce que tu viens de me dire qui est le problème ; je sens que cela doit être en relation avec Pierre, où est-il et pourquoi n'est-il pas là ?
- Moi / [avec une certaine rage dans la voix] Où est Pierre ? Je pense qu'il est dans les bras d'un garçon qu'il connait à peine, que tous les deux sont nus en train de s'embrasser, de se caresser et de se tripoter. Il me l'a dit, ils ne s'aiment pas, c'est seulement pour le sexe, oui il me l'a dit, il veut baiser, c'est la seule chose qui l'intéresse. Il a voulu m'entraîner et j'ai refusé tout net, il est rentré à je ne sais pas quelle heure de la nuit, le matin il m'a dit des choses horribles, sur moi, sur l'institut, sur nos parents… Oh, je suis tellement malheureux, je n'ai rien vu venir, c'est comme si on avait appuyé sur un bouton et le Pierre que j'aimais, que vous connaissiez était devenu quelqu'un d'autre, un étranger
- Directeur - Jacques / Je suis bouleversé par ce que tu me racontes et j'imagine ce que tu endures car je sais depuis longtemps que vous êtes plus que deux amis très proches, vous vous aimez, vous vous aimez d'un amour qui n'a pas encore véritablement éclaté concrètement mais qui est là, latent. [un petit silence et un sourire rieur] Antoine, tu n'es plus un de mes élèves, appelle-moi Jacques, ce sera plus simple pour toi.
Je te propose qu'on reparle de tout cela demain, j'ai besoin de réfléchir sur ce qu'il faut faire, toi également et même surtout car tu connais Pierre mieux que nous tous. Mais vois-tu, je suis à peu près sûr qu'il reviendra très vite quand il aura réalisé non pas ce qu'il fait mais ce qu'il perd en te laissant.
Pour ces quelques nuits que tu vas passer ici, je te propose de dormir dans la même chambre qu'Hector, c'est un garçon sérieux et charmant, il est très intelligent et sent très vite les choses. D'accord ?
Nous avions discuté longuement et les étudiants en étaient pour les plus lents, ou les plus gourmands, au dessert. En entrant dans la vaste salle à manger, j'aperçus Hector qui me faisait de grands signes : il avait mis de côté nos deux repas sur une plaque chauffante et il m'attendait avec un grand sourire.
Nous avions déjà dormi une fois dans la même chambre, et dans le même lit et nus me rappela-t-il en riant, aussi n'y a-t-il eu aucune gêne entre nous lorsque nous nous sommes déshabillés pour nous coucher. Dans la pénombre de la veilleuse, je lui racontais tout en détail afin qu'il comprenne bien l'entièreté de mon chagrin et de mon inquiétude. Quand j'eus terminé, il y eut un moment de silence, non pas pesant mais riche en sentiment d'amitié, puis je vis une ombre s'asseoir sur le bord de mon lit, il se pencha, m'embrassa et m'entoura de ses bras en murmurant
- Tu verras, il reviendra. Dors bien maintenant.
et il regagna son lit.
Il y a longtemps que je n'avais si bien dormi, est-ce la magie de ce lieu ? Ce n'était en tout cas pas les deux petites fesses d'Hector que je distingue dans la lumière blafarde du petit matin car je n'ai pas rêvé ou, tout au moins je ne m'en souviens pas. Je me tourne, je me rendors, je rêve cette fois à Pierre, le Pierre de l'institut. Quand je commence à émerger, je vois Hector qui rit de bon cœur
- Eh bien, tu avais une sacrée réserve !
- Moi / De quoi tu parles, je ne comprends rien
- Hector / De ce qui est sorti de tes couilles et à voir les spasmes de ton pénis, cela ne devait pas être triste
Je sens que je deviens rouge écarlate, je regarde mon sexe qui n'a pas encore retrouvé son calme et qui laisse même sortir quelques gouttes et je réalise que je nage dans une mer de sperme, enfin, n'exagérons pas, ce n'est peut-être pas vraiment une mer mais c'est vrai que mon drap est largement trempé
- Putain ! J'en ai mis partout, qu'est-ce que tu veux, j'ai rêvé de Pierre
- Hector / Donc tu l'aimes toujours, rien n'est perdu… sauf le sperme que tu…
- Moi / Ta gueule, arrête de te foutre de moi et si j'ai rêvé de lui c'est du Pierre que nous aimons tous, pas du dépravé qu'il semble être devenu
et nous entamons une bataille de coussins interrompue par une imprécation mêlée à un rire
- Hector / Tu pourrais au moins m'envoyer de la munition qui soit sèche !
Nous éclatons de rire, moi également, même si je suis un peu gêné mais ce sentiment disparait bien vite en voyant le rire plein de gentillesse de mon ami. Nous avons tous les deux la gaule lorsque nous allons à la salle de bain.
Durant les quelques jours au Village, j'ai plusieurs discussions avec Jacques dont une avec un de ses amis qui est psychologue. Autant Jacques est confiant car connaissant bien Pierre, autant son ami est beaucoup plus réservé sur l'issue du changement intervenu chez Pierre : il y voit le résultat d'une longue frustration affective malgré ou peut-être à cause de toute l'attention que je lui portais. Il pense, et nous nous rallions à son avis, qu'il ne faut surtout pas le brusquer, le laisser faire et qu'il comprenne que je l'aime toujours, même si lui devait me détester. A la fin de ces entretiens, j'ai posé la question qui me démangeait
- Est-ce que je dois continuer à dormir dans la même pièce que lui, dans le même lit ? Est-ce qu'il peut continuer à habiter chez moi (l'appartement est à mon nom) ? Peut-il amener chez nous des "amis" ?
La réponse fut que cela dépendait des circonstances et de son attitude, qu'il fallait envisager et assumer une véritable rupture en espérant qu'elle ne soit que temporaire, mais que la décision, moi seul pouvait la prendre.
Le mercredi, Jacques me donna une chaleureuse accolade en me disant qu'il était toujours là et que je pouvais venir quand je voulais, même de manière imprévue. Hector m'accompagna jusqu'à l'arrêt du bus, il m'embrassa sur les deux joues et, très brièvement, sur les lèvres en me disant
- Courage Antoine, ne te laisse pas abattre et reste fidèle à toi-même. Je suis avec toi, vraiment
- Merci Hector, moi aussi je t'aime.
Dans le bus, je réalisais que je lui avais dit "moi aussi je t'aime". Les deux premiers mots signifiaient clairement que j'avais compris qu'il m'aimait et la fin de la phrase que moi également je l'aimais. Je suis certain que lui aussi, au même moment, réalisait la signification de cette petite phrase. La seule chose qu'il nous faudrait faire un jour, c'est définir ce que nous entendions tous les deux par le mot "aimer" car il y a trente-six définitions dans ce terme si fréquemment galvauder et pour moi, il n'y avait qu'une personne que j'aimais au-dessus de tout et tous.
C'est tranquillement que j'ouvris la porte de ce qui était encore notre appartement et c'est alors que je vis le désastre. Le sol, dès l'entrée, était jonché de détritus, papiers, cartons de pizzas, restes de nourriture, bris de verres cassés. Sur la table, bouteilles vides ou pleines, un nombre impressionnant de verres, des cendriers débordants de mégots sans parler de la cuisine où je ne savais pas où mettre les pieds. Mais le pire c'était le canapé sur lequel Pierre était vautré, obscène, les jambes écartées, le sexe pendant. À côté de lui, à la hauteur de sa tête, le sexe encore en érection d'un garçon que je reconnus comme étant Gilbert, le jeune vendeur.
Je restais debout, immobile, sidéré par ce que je voyais, sans parler des odeurs, qui témoignait sans que le moindre doute ne soit possible des orgies qui avaient dû se dérouler en mon absence. Honnêtement, je ne pouvais imaginer que tout cela avait été voulu et organisé par Pierre, il avait certainement invité Gilbert et c'est ce dernier qui avait dû manigancer ce véritable bordel, oui bordel car en y regardant de plus près, je vis de nombreuses taches de sperme un peu partout, y-compris sur Pierre, dans ses cheveux, dans sa bouche où je devinais la trace du sperme qui s'en était échappé.
Une rage froide s'était insinuée en moi et ma décision a été rapidement arrêtée : dès qu'ils seraient en état de se tenir debout, j'allais les conduire, nus comme ils étaient, sur le palier. Avant je prendrai quelques photos afin qu'on puisse croire à l'incroyable. Sans tarder, je réunis les habits épars, je vidais l'armoire de Pierre et entassais le tout dans deux grands sacs plastiques, son ordinateur et quelques papiers importants dans un carton. Avec tout ce que j'avais mis sur le palier il n'y avait pratiquement plus de place, il ne manquait plus que Pierre et son complice. Dès qu'ils commencèrent à remuer je ne les lâchais plus des yeux. Charitable, j'emmenais Gilbert aux toilettes mais tenant compte de sa demi-raideur et de son équilibre instable, je lui tenais le sexe afin que le jet aboutisse au bon endroit. Même opération pour Pierre qui fit un peu de résistance
- T'as pas le droit de me toucher, je sais pisser tout seul
Tu parles, heureusement que j'étais là pour le rattraper, je saisis son sexe mais il bougeait tellement qu'il me mit de la pisse plein la main. Non sans peine, je réussis finalement à les avoir les deux hors de l'appartement, il était temps car ils étaient de plus en plus conscients de l'incongruité de leurs tenues et du lieu où ils se trouvaient. Malgré leurs supplications, je suis resté impitoyable, j'ai fermé la porte et ai enclenché la sécurité. Il y avait un système de caméra que j'enclenchais ce qui me permis de suivre leur agitation, leurs sexes qui se balançaient au gré des coups contre la porte. Un peu plus tard, Pierre avait disparu et c'est à ce moment précis que j'ai pris conscience du fait que Pierre, mon ami de toujours, était sorti de ma vie. Je pris le téléphone et j'appelais Hector, je lui décrivis l'état de mon appartement, il ne fit pratiquement aucun commentaire mais il me dit tout simplement
- Ne t'inquiète pas, j'arrive
Je l'ai alors regardé avec une immense tristesse, droit dans les yeux, sans rien ajouter car il n'y avait rien à ajouter hélas, mais j'ai malgré tout perçu dans son regard, je le connais tellement bien mon Pierre, une lueur de désespoir, tout au moins de malaise : il ne fallait pas que je réponde à cette dernière diatribe, plus terrible que toutes les autres, il fallait que je lui laisse cette liberté qu'il revendiquait si violement, si brutalement.
- Moi / C'est bon, fait ce que tu veux, mais ne compte pas sur moi vendredi, moi aussi j'ai besoin de ma liberté, mais pas la même que la tienne.
- Pierre / Tu es certain que tu ne veux pas te joindre à nous vendredi ? Je t'assure…
- Moi / Non, Pierre, n'insiste pas [long silence pendant que Pierre mange et que je le regarde] Tu dois le savoir, je serai toujours là pour toi si tu éprouves le besoin de me voir, pour quelque raison que ce soit, je serai encore là, mais pas pour servir d'alibi à ta débauche !
Les deux-trois jours qui suivirent furent pénibles, surtout pour moi car Pierre n'avait pas l'air véritablement préoccupé par la dispute que nous avions eue entre nous, même si c'était la première fois que cela nous arrivait. Au fond de moi, j'avais l'espoir, insensé je l'admets, que Pierre allait renoncer à son escapade de vendredi avec Gilbert, c'est le prénom du petit vendeur, et que le weekend serait à nouveau serein. Mais en début d'après-midi, alors que je remettais la cuisine en ordre, je vis Pierre sortir de sa chambre avec un sac de voyage
- Pierre / Bon, je pars pour le weekend chez Gilbert, je reviendrai en principe dimanche en fin de journée, éventuellement lundi matin. Antoine, tu veux toujours pas te joindre à nous ?
- Moi / Non merci, c'est gentil mais je ne peux vraiment pas. Puisque tu es loin, je vais aller au Village et à l'institut pour quelques jours, je reviendrai dans le courant de la semaine prochaine
- Pierre / [un peu estomaqué] Non, mais tu reviens au moins dimanche, qu'est-ce que je vais faire seul ici
- Moi / Tu profiteras de ta liberté sans l'empêcheur de danser que je suis devenu. Dépêche-toi, tu vas être en retard
et je partis vers la pièce où je travaillais car, dès le lendemain de notre altercation, j'avais déménagé tous mes vêtements et mes affaires dans deux pièces, l'une me servant de chambre à coucher et l'autre de bureau. Là également, j'avais pris Pierre par surprise, il ne s'attendait pas à cette décision prise très calmement mais je ne voulais plus dormir à ses côtés alors qu'il prenait son plaisir avec un inconnu et, je le pressentais, bientôt avec des inconnus. C'est par ces petites touches que j'espérais, avec le temps, qu'il prenne conscience de ce qu'il perdait. Lorsqu'un quart d'heure plus tard je revins dans le salon, Pierre était parti, sans laisser un mot ni même un numéro de téléphone. Un instant, j'ai envisagé d'aller le chercher dans ce fameux sex-shop mais cela n'aurait servi à rien et, en plus, il était probablement chez ce Gilbert : des images se pressaient devant moi, s'embrassaient-ils, que faisaient leurs mains, avaient-ils encore leurs pantalons ? Je me suis secoué pour chasser ces visions, je pris le téléphone pour voir si l'institut pouvait me loger pour quelques jours, je regardais l'horaire et fis rapidement un sac pour un séjour de quelques jours.
Je venais à peine de descendre du bus
- Mais c'est Antoine ! Qu'est-ce que tu fais ici ?
Je n'avais pas encore qui s'adressait à moi d'une manière si chaleureuse que je fus saisi à bras le corps avec de vigoureuses tapes dans le dos : c'était Hector, ce garçon qui nous avait sauvés, Pierre et moi, sinon d'un viol mais au moins d'une atteinte certaine à notre intimité corporelle. Hector était devenu pour moi un bon camarade avec qui j'aimais passer des moments agréables mais je ne dirais pas qu'il était devenu un ami intime. Le voir m'accueillir de façon si spontanée me fit vraiment chaud au cœur et je lui rendis avec plaisir sa manière de me serrer contre lui.
- Hector / Mais je n'ai pas vu Antoine, où est-il ?
- Moi / [mon visage se rembrunit] Il est resté à Genève, il n'avait pas envie de venir et je ne tenais…
- Hector / tu ne tenais pas à quoi ?
- Moi / …
- Hector / Eh, qu'est-ce qui se passe, tu me fais peur, tu es tout pâle ?
- Moi / Il est probablement à poil dans les bras d'un garçon qu'il connaît à peine, mais je t'en parlerai plus tard, je veux maintenant être au plaisir d'être ici et de partager ces moments avec toi. Allez. On va à l'institut.
Et il me prit d'office mon petit bagage et me raconta les derniers événements de l'internat et de l'école.
À peine arrivé, je fus accueilli par deux surveillants qui s'étonnèrent de ne pas voir Pierre, mais Hector leur fit signe de ne pas insister. Le directeur entendant du bruit ouvrit sa porte en me faisant entrer et en m'embrassant affectueusement. C'était un fin psychologue et lors de mon téléphone il avait tout de suite sentis que je n'étais pas vraiment dans mon assiette. Il ne s'assit pas à son bureau comme d'habitude mais nous prîmes place dans les fauteuils de la partie moins officielle. Je sentais que cet homme m'aimait, il faut dire que nous avons passé, Pierre et moi, une dizaine d'années dans son établissement et que nous avons été, en tous cas moi, très heureux, Pierre je n'en sais plus rien. Il me regardait attentivement, mais je le sentais préoccupé. Le silence dura un bon moment
- Directeur / [d'une voix très douce et encourageante] Alors, Antoine, qu'est-ce qui se passe ?
- Moi / ….
- Moi / …..
- Directeur / [me voyant éclater en sanglots] Vous avez un problème Pierre et toi ? Raconte-moi tout, cela te fera du bien et cela te permettra de voir après les choses avec plus de réalisme
Je lui racontais tout, d'abord le choc culturel pour moi alors que Pierre s'accommodait beaucoup mieux de ces nouvelles conditions de vie, je lui disais la chance que nous avions d'habiter dans un bel appartement et que j'en étais vraiment très reconnaissant à mes parents. J'évoquais la nostalgie que j'ai très vite éprouvée du Village et de l'institut dont je parlais tout le temps alors que Pierre semblait avoir déjà oublié cette période de notre vie.
- Directeur / Antoine, ce n'est pas ce que tu viens de me dire qui est le problème ; je sens que cela doit être en relation avec Pierre, où est-il et pourquoi n'est-il pas là ?
- Moi / [avec une certaine rage dans la voix] Où est Pierre ? Je pense qu'il est dans les bras d'un garçon qu'il connait à peine, que tous les deux sont nus en train de s'embrasser, de se caresser et de se tripoter. Il me l'a dit, ils ne s'aiment pas, c'est seulement pour le sexe, oui il me l'a dit, il veut baiser, c'est la seule chose qui l'intéresse. Il a voulu m'entraîner et j'ai refusé tout net, il est rentré à je ne sais pas quelle heure de la nuit, le matin il m'a dit des choses horribles, sur moi, sur l'institut, sur nos parents… Oh, je suis tellement malheureux, je n'ai rien vu venir, c'est comme si on avait appuyé sur un bouton et le Pierre que j'aimais, que vous connaissiez était devenu quelqu'un d'autre, un étranger
- Directeur - Jacques / Je suis bouleversé par ce que tu me racontes et j'imagine ce que tu endures car je sais depuis longtemps que vous êtes plus que deux amis très proches, vous vous aimez, vous vous aimez d'un amour qui n'a pas encore véritablement éclaté concrètement mais qui est là, latent. [un petit silence et un sourire rieur] Antoine, tu n'es plus un de mes élèves, appelle-moi Jacques, ce sera plus simple pour toi.
Je te propose qu'on reparle de tout cela demain, j'ai besoin de réfléchir sur ce qu'il faut faire, toi également et même surtout car tu connais Pierre mieux que nous tous. Mais vois-tu, je suis à peu près sûr qu'il reviendra très vite quand il aura réalisé non pas ce qu'il fait mais ce qu'il perd en te laissant.
Pour ces quelques nuits que tu vas passer ici, je te propose de dormir dans la même chambre qu'Hector, c'est un garçon sérieux et charmant, il est très intelligent et sent très vite les choses. D'accord ?
Nous avions discuté longuement et les étudiants en étaient pour les plus lents, ou les plus gourmands, au dessert. En entrant dans la vaste salle à manger, j'aperçus Hector qui me faisait de grands signes : il avait mis de côté nos deux repas sur une plaque chauffante et il m'attendait avec un grand sourire.
Nous avions déjà dormi une fois dans la même chambre, et dans le même lit et nus me rappela-t-il en riant, aussi n'y a-t-il eu aucune gêne entre nous lorsque nous nous sommes déshabillés pour nous coucher. Dans la pénombre de la veilleuse, je lui racontais tout en détail afin qu'il comprenne bien l'entièreté de mon chagrin et de mon inquiétude. Quand j'eus terminé, il y eut un moment de silence, non pas pesant mais riche en sentiment d'amitié, puis je vis une ombre s'asseoir sur le bord de mon lit, il se pencha, m'embrassa et m'entoura de ses bras en murmurant
- Tu verras, il reviendra. Dors bien maintenant.
et il regagna son lit.
Il y a longtemps que je n'avais si bien dormi, est-ce la magie de ce lieu ? Ce n'était en tout cas pas les deux petites fesses d'Hector que je distingue dans la lumière blafarde du petit matin car je n'ai pas rêvé ou, tout au moins je ne m'en souviens pas. Je me tourne, je me rendors, je rêve cette fois à Pierre, le Pierre de l'institut. Quand je commence à émerger, je vois Hector qui rit de bon cœur
- Eh bien, tu avais une sacrée réserve !
- Moi / De quoi tu parles, je ne comprends rien
- Hector / De ce qui est sorti de tes couilles et à voir les spasmes de ton pénis, cela ne devait pas être triste
Je sens que je deviens rouge écarlate, je regarde mon sexe qui n'a pas encore retrouvé son calme et qui laisse même sortir quelques gouttes et je réalise que je nage dans une mer de sperme, enfin, n'exagérons pas, ce n'est peut-être pas vraiment une mer mais c'est vrai que mon drap est largement trempé
- Putain ! J'en ai mis partout, qu'est-ce que tu veux, j'ai rêvé de Pierre
- Hector / Donc tu l'aimes toujours, rien n'est perdu… sauf le sperme que tu…
- Moi / Ta gueule, arrête de te foutre de moi et si j'ai rêvé de lui c'est du Pierre que nous aimons tous, pas du dépravé qu'il semble être devenu
et nous entamons une bataille de coussins interrompue par une imprécation mêlée à un rire
- Hector / Tu pourrais au moins m'envoyer de la munition qui soit sèche !
Nous éclatons de rire, moi également, même si je suis un peu gêné mais ce sentiment disparait bien vite en voyant le rire plein de gentillesse de mon ami. Nous avons tous les deux la gaule lorsque nous allons à la salle de bain.
Durant les quelques jours au Village, j'ai plusieurs discussions avec Jacques dont une avec un de ses amis qui est psychologue. Autant Jacques est confiant car connaissant bien Pierre, autant son ami est beaucoup plus réservé sur l'issue du changement intervenu chez Pierre : il y voit le résultat d'une longue frustration affective malgré ou peut-être à cause de toute l'attention que je lui portais. Il pense, et nous nous rallions à son avis, qu'il ne faut surtout pas le brusquer, le laisser faire et qu'il comprenne que je l'aime toujours, même si lui devait me détester. A la fin de ces entretiens, j'ai posé la question qui me démangeait
- Est-ce que je dois continuer à dormir dans la même pièce que lui, dans le même lit ? Est-ce qu'il peut continuer à habiter chez moi (l'appartement est à mon nom) ? Peut-il amener chez nous des "amis" ?
La réponse fut que cela dépendait des circonstances et de son attitude, qu'il fallait envisager et assumer une véritable rupture en espérant qu'elle ne soit que temporaire, mais que la décision, moi seul pouvait la prendre.
Le mercredi, Jacques me donna une chaleureuse accolade en me disant qu'il était toujours là et que je pouvais venir quand je voulais, même de manière imprévue. Hector m'accompagna jusqu'à l'arrêt du bus, il m'embrassa sur les deux joues et, très brièvement, sur les lèvres en me disant
- Courage Antoine, ne te laisse pas abattre et reste fidèle à toi-même. Je suis avec toi, vraiment
- Merci Hector, moi aussi je t'aime.
Dans le bus, je réalisais que je lui avais dit "moi aussi je t'aime". Les deux premiers mots signifiaient clairement que j'avais compris qu'il m'aimait et la fin de la phrase que moi également je l'aimais. Je suis certain que lui aussi, au même moment, réalisait la signification de cette petite phrase. La seule chose qu'il nous faudrait faire un jour, c'est définir ce que nous entendions tous les deux par le mot "aimer" car il y a trente-six définitions dans ce terme si fréquemment galvauder et pour moi, il n'y avait qu'une personne que j'aimais au-dessus de tout et tous.
C'est tranquillement que j'ouvris la porte de ce qui était encore notre appartement et c'est alors que je vis le désastre. Le sol, dès l'entrée, était jonché de détritus, papiers, cartons de pizzas, restes de nourriture, bris de verres cassés. Sur la table, bouteilles vides ou pleines, un nombre impressionnant de verres, des cendriers débordants de mégots sans parler de la cuisine où je ne savais pas où mettre les pieds. Mais le pire c'était le canapé sur lequel Pierre était vautré, obscène, les jambes écartées, le sexe pendant. À côté de lui, à la hauteur de sa tête, le sexe encore en érection d'un garçon que je reconnus comme étant Gilbert, le jeune vendeur.
Je restais debout, immobile, sidéré par ce que je voyais, sans parler des odeurs, qui témoignait sans que le moindre doute ne soit possible des orgies qui avaient dû se dérouler en mon absence. Honnêtement, je ne pouvais imaginer que tout cela avait été voulu et organisé par Pierre, il avait certainement invité Gilbert et c'est ce dernier qui avait dû manigancer ce véritable bordel, oui bordel car en y regardant de plus près, je vis de nombreuses taches de sperme un peu partout, y-compris sur Pierre, dans ses cheveux, dans sa bouche où je devinais la trace du sperme qui s'en était échappé.
Une rage froide s'était insinuée en moi et ma décision a été rapidement arrêtée : dès qu'ils seraient en état de se tenir debout, j'allais les conduire, nus comme ils étaient, sur le palier. Avant je prendrai quelques photos afin qu'on puisse croire à l'incroyable. Sans tarder, je réunis les habits épars, je vidais l'armoire de Pierre et entassais le tout dans deux grands sacs plastiques, son ordinateur et quelques papiers importants dans un carton. Avec tout ce que j'avais mis sur le palier il n'y avait pratiquement plus de place, il ne manquait plus que Pierre et son complice. Dès qu'ils commencèrent à remuer je ne les lâchais plus des yeux. Charitable, j'emmenais Gilbert aux toilettes mais tenant compte de sa demi-raideur et de son équilibre instable, je lui tenais le sexe afin que le jet aboutisse au bon endroit. Même opération pour Pierre qui fit un peu de résistance
- T'as pas le droit de me toucher, je sais pisser tout seul
Tu parles, heureusement que j'étais là pour le rattraper, je saisis son sexe mais il bougeait tellement qu'il me mit de la pisse plein la main. Non sans peine, je réussis finalement à les avoir les deux hors de l'appartement, il était temps car ils étaient de plus en plus conscients de l'incongruité de leurs tenues et du lieu où ils se trouvaient. Malgré leurs supplications, je suis resté impitoyable, j'ai fermé la porte et ai enclenché la sécurité. Il y avait un système de caméra que j'enclenchais ce qui me permis de suivre leur agitation, leurs sexes qui se balançaient au gré des coups contre la porte. Un peu plus tard, Pierre avait disparu et c'est à ce moment précis que j'ai pris conscience du fait que Pierre, mon ami de toujours, était sorti de ma vie. Je pris le téléphone et j'appelais Hector, je lui décrivis l'état de mon appartement, il ne fit pratiquement aucun commentaire mais il me dit tout simplement
- Ne t'inquiète pas, j'arrive