05-10-2020, 03:36 PM
Voici une nouvelle suite, j'espère qu'elle vous plaira mais n'hésitez pas à faire des commentaires, positifs ou critiques. Merci à ceux qui le font déjà, cela m'encourage.
A ce stade du récit de Florentin, il fit un long arrêt durant lequel je comprenais que des tas d'idées entraient en collision les unes avec les autres, qu'il était en plein désarrois : il ne fallait surtout pas que je dise quoique ce soit, je devais le laisser réfléchir et que son silence était en quelque sorte la prolongation de sa cure de solitude. Je comprenais également qu'il allait y avoir de profondes modifications dans notre relation mais que Florentin ne me rejetterait pas comme si j'étais une personne malfaisante.
Je le sentais très malheureux.
Flo/ Lorsque je suis sorti, j'étais comme paralysé de tout ce que j'avais avoué au Père B. et, soudain, je réalisais la portée pour moi, pour toi Benjamin et également pour le Père B. qui a tant fait pour moi, qui a cru et espéré en moi. Je pensais à toi que j'aimais comme jamais je n'avais aimé quelqu'un, et je savais que jamais je ne serais aussi heureux qu'avec toi.
Je ne vais pas te raconter tout le cheminement incohérent et contradictoire de mes pensées, de mes sentiments qui passaient de la tendresse pour toi en même temps que de la colère contre toi qui m'avait entraîné sur cette voie de l'amour ; je regrettais mon innocence et j'étais content d'avoir découvert la réalité de la vie, de ce que j'appelais par moment la vraie vie par opposition à celle que je vivais à D.
J'envisageais, au cour des heures de solitude que m'avait imposé le Père B., même si j'étais libre de partir, trente-six solutions : entrer dans les ordres ou accéder à la prêtrise, changer de ville et de collège et donc mettre de la distance entre nous en partant loin, très loin. Je pouvais également balayer tout ce qui avait contribué à faire ce que j'étais devenu et poursuivre et construire cette vie que nous avions déjà commencé à vivre. J'ai même envisagé, un très bref moment, la solution du suicide : ce n'aurait pas été une solution mais de la lâcheté pure et simple, cela aurait été un coup de poignard pour les deux seules personnes que j'aimais par-dessus tout, toi Benjamin et le Père B.
Aucune de ces solutions n'emportait mon adhésion et finalement je décidais de ne rien décider, de m'en remettre simplement à ce que mon conducteur de conscience jugerait être le mieux pour moi et pour nous deux.
Voilà, Benjamin, ce n'est pas très glorieux je te l'accorde, mais c'est comme ça…
Cela faisait plus de deux heures que Florentin parlait et que je l'écoutais pratiquement sans rien dire et nous avons décidé de faire une pose et de boire quelque chose. Les quelques quinze minutes que durèrent cette interruption furent pour le moins curieuses, aucun de nous deux n'osant vraiment regarder l'autre, je sentais bien que mon ami était nerveux, comme incertain de ce qu'il allait encore me dire alors que curieusement j'étais moi-même étonnement calme, non de résignation mais de la certitude que la décision qui avait été arrêtée était mûrement réfléchie. Alors que j'ouvrais la bouche pour tenter d'en savoir plus
- Non, Benjamin, n'essaie pas de me tirer les vers du nez, il faut que tu entendes dans l'ordre la suite de nos réflexions sinon tu risquerais d'en tirer de fausses conclusions
Nos verres de coca sont vides, je reprends ma place sur le canapé alors que Florentin prend place, cette fois, dans le fauteuil qui me fait face ce qui me laisse perplexe et il le remarque
- Pour cette suite, je veux que tu me voies, que tu puisses suivre la trace de mes sentiments et de mes émotions et moi, que je puisse lire sur ton visage l'acceptation ou le refus de ce que tu vas entendre.
Mais s'il te plaît, laisse-moi parler sans m'interrompre, quelque difficile cela puisse être pour toi mais sache que pour moi cela est encore plus pénible car cette décision, c'est vraiment moi qui ait dû la prendre, seul avec le Père B. en face de moi qui, lui également, attendait de savoir comment je voyais tout ce qu'il m'avait exposé.
- Ben/ D'accord, je comprends, mais… non, il n'y a pas de mais, je t'écoute
- Durant ces 36 heures de solitude, je suis allé une première fois à la messe du soir mais j'étais intérieurement révolté de sorte que ce moment ne m'a rien apporté. Au cours de la deuxième nuit, j'ai ressenti le besoin impérieux d'aller dans la petite chapelle où l'on accède depuis la nef principale. Il y régnait une pénombre relativement claire vu les quelques petites lampes, très discrètes, qui répandaient une lumière indirecte. Je me suis agenouillé sur un prie-Dieu, la tête dans mes mains et, contrairement à la fois précédente, j'étais parfaitement calme et détendu, il faut dire que cette petite chapelle était beaucoup plus intime et accueillante que la grande nef. J'étais calme mais en même temps mon esprit était comme bloqué, j'étais incapable de réfléchir et je ne le souhaitais même pas, je me laissais juste imprégner par l'atmosphère, comme hors du monde, de l'endroit où je me trouvais et où, il y avait que quelques mois seulement, je venais fréquemment et avec beaucoup de plaisir !
Oui, Benjamin, j'ai toujours apprécié cet endroit où je venais lorsque j'avais, par exemple, besoin de penser à mes parents, j'avais comme l'impression de les retrouver, de rétablir un contact alors même que je n'étais pas, et de loin, d'une religiosité exemplaire.
Cela faisait un bon moment déjà que j'étais tranquille, agenouillé, ne pensant à rien de précis sinon à toi et à ce que tu représentais pour moi, pour nous. Soudain, j'ai réalisé que quelqu'un était dans la chapelle car un raclement de chaise se fit entendre : A quelques mètres de moi, deux-trois rangs en arrière, le Père B. était en prière, cela se voyait au très léger mouvement de ses lèvres, je le sentais très loin, je pressentais qu'il cherchait une solution pour mon problème, j'en fus profondément ému et mon émotion fut à son comble lorsque je constatais qu'il avait pleuré… J'avais failli me lever et me jeter dans ses bras mais je n'en fis rien, je sentais qu'il était en relation avec Dieu et que je n'avais pas le droit d'interrompre ce moment sacré.
- Flo/ La nuit avait été courte et je finissais mon petit-déjeuner lorsque le Père B. est entré dans ma cellule, l'air grave et fatigué mais en même temps serein, je pensais immédiatement que sa méditation lui avait apporté une solution
- Père B./ Je te remercie de ne pas avoir troublé le silence de l'obscurité de la chapelle et tu sais, quelque soit la raison de ta présence, j'ai été heureux de te voir dans ce lieu lorsque je suis arrivé.
Tu le sais, tu as été mon élève préféré ce qui n'est pas étonnant puisque tu as passé une quinzaine d'années dans cet établissement. Je t'ai aimé comme un père aime un fils et tu me l'as bien rendu. J'ai peut-être péché par orgueil, mais j'aspirais pour toi à un bel avenir et c'est la raison pour laquelle je t'ai suggéré de partir dans un grand collège pour terminer tes études. Aujourd'hui, je me pose la question de savoir si c'était une bonne décision quand je vois le dilemme dans lequel tu te trouves et dans lequel tu m'as mis.
Mon garçon, depuis que tu es là, je me torture l'esprit pour savoir quelle doit être ma réaction qui ne saurait être qu'une solution purement ecclésiastique selon le dogme de notre Eglise car vois-tu, Florentin, ce que je veux c'est avant tout ton bonheur et, cas échéant, votre bonheur
- Ben/ Oh ! Il a dit votre bonheur, alors cela veut…
- Flo/ Du calme Benjamin, je t'ai dit qu'il fallait que tu suives le raisonnement jusqu'au bout
- Père B./ Fondamentalement, je dois admettre que l'homosexualité est contraire à la morale de l'Eglise mais que, malheureusement, dans nos propres rangs, celle-ci est pratiquée jusque dans les plus hautes sphères de la hiérarchie, que cela se sait et qu'on le tolère. Je n'ai jamais été d'accord avec la condamnation absolue de l'homosexualité par l'Eglise , et aujourd'hui moins que jamais, je pense qu'il faut relativiser ce péché, si s'en est véritablement un, en fonction des circonstances, des personnes et de ce qu'on place dans une telle relation.
Il y a deux jours, quand tu m'as longuement exposé le comment et le pourquoi de vos actes, et je te connais tellement bien que je sais que tu m'as non seulement tout dit mais aussi que tu es totalement sincère sur ce que tu es et ce que tu ressens, j'en suis arrivé à la conclusion ou plus tôt à la conviction que Benjamin et toi, vous vous aimez d'un véritable amour, qu'il n'y a rien de dégradant dans ce que vous faites ensemble, qu'au contraire il s'agit d'une action très édifiante et très belle.
Alors voici ce que j'ai décidé, non, excuse-moi pas ce que je décide mais ce que je te propose, ce que je vous suggère :
Je vous demande une année, douze mois, d'abstinence totale l'un envers l'autre, de ne vous voir que dans le stricte cadre scolaire et donc de ne plus aller l'un chez l'autre, d'éviter absolument de vous retrouver seul les deux afin de ne pas succomber à la tentation. C'est à cette condition absolue que je vous donnerai alors ma bénédiction et je sais que tu seras honnête lorsqu'avec Benjamin vous viendrez me trouver pour me dire que vous avez traverser cette épreuve, qui sera très dure je m'en doute, sans faillir et pour moi cela sera la preuve dont j'ai besoin pour me justifier et être fier de ma décision, de votre décision.
Je ne veux pas que tu me répondes maintenant, tu dois prendre le temps de la réflexion car c'est un engagement très sérieux et tu dois absolument en débattre avec ton Benjamin. Cela ne doit pas être qu'un engagement de ta part, mais de vous deux car ce n'est qu'ensemble que vous pourrez tenir votre promesse.
Rappelez-vous que vous êtes réellement libres de votre choix, un choix que dans deux jours vous me confirmerez tous les deux dans ce que j'appellerai, un peu pompeusement, une déclaration solennelle.
Voilà mon enfant, quoi qu'il en soit, je t'aimerai toujours et, pendant ces deux jours à venir, je prierai dans la petite chapelle, pour Benjamin et Florentin.
Dépêche-toi maintenant, tu as un train dans une demi-heure, n'oublie pas que je suis là pour vous deux si vous en éprouvez le besoin, je vous aime comme vous êtes.
En partant du Collège, nous étions tous les deux très émus, j'avais les yeux humides, le Père B. m'a embrassé et je lui ai simplement dit
- Ayez confiance en nous mon Père
J'étais abasourdi par tout ce que venait de me raconter Florentin, je ne savais pas vraiment qu'en penser mais dans l'immédiat je retenais que le Père B. ne nous avait pas condamnés, bien au contraire, et que nous avions la perspective de nous retrouver. Je saisis également, sans en avoir encore discuter avec lui, que si je refusais cette solution, je perdrais mon Florentin car, après avoir vécu ces derniers jours, je le voyais mal s'engager durablement sans avoir la bénédiction de celui qu'il considérait à la fois comme son père terrestre et spirituel, cela équivaudrait pour lui à se renier dans tout son être, dans toute sa conscience et cela, je ne le voulais en aucun cas pour lui.
Nous avons alors décidé de nous voir le lendemain afin de prendre notre décision et de la communiquer au Père B. Pour moi, c'était clair même si terriblement exigeant, mais pour Florentin, qu'en était-il, il n'avait rien laisser transparaître.
A la pause de dix heures, le lendemain, Florentin me dit juste
- Ca te vas si on discute à midi, on ira déjeuner ensemble une dernière fois
- Ben/ Tu as dis une dernière fois, ta décision est donc prise ?
- Flo/ Je pense que oui, mais il faut que nous en parlions ensemble
- Ben/ D'accord, à tout à l'heure
Je suis retourné en classe mais l'esprit totalement absent, je n'entendais plus rien, ni le professeur ni mes camarades, la tête commença à tourner, je sentis que j'allais tomber et je perdis conscience.
Il parait qu'une ambulance est venue pour me transporter à l'hôpital
A ce stade du récit de Florentin, il fit un long arrêt durant lequel je comprenais que des tas d'idées entraient en collision les unes avec les autres, qu'il était en plein désarrois : il ne fallait surtout pas que je dise quoique ce soit, je devais le laisser réfléchir et que son silence était en quelque sorte la prolongation de sa cure de solitude. Je comprenais également qu'il allait y avoir de profondes modifications dans notre relation mais que Florentin ne me rejetterait pas comme si j'étais une personne malfaisante.
Je le sentais très malheureux.
Flo/ Lorsque je suis sorti, j'étais comme paralysé de tout ce que j'avais avoué au Père B. et, soudain, je réalisais la portée pour moi, pour toi Benjamin et également pour le Père B. qui a tant fait pour moi, qui a cru et espéré en moi. Je pensais à toi que j'aimais comme jamais je n'avais aimé quelqu'un, et je savais que jamais je ne serais aussi heureux qu'avec toi.
Je ne vais pas te raconter tout le cheminement incohérent et contradictoire de mes pensées, de mes sentiments qui passaient de la tendresse pour toi en même temps que de la colère contre toi qui m'avait entraîné sur cette voie de l'amour ; je regrettais mon innocence et j'étais content d'avoir découvert la réalité de la vie, de ce que j'appelais par moment la vraie vie par opposition à celle que je vivais à D.
J'envisageais, au cour des heures de solitude que m'avait imposé le Père B., même si j'étais libre de partir, trente-six solutions : entrer dans les ordres ou accéder à la prêtrise, changer de ville et de collège et donc mettre de la distance entre nous en partant loin, très loin. Je pouvais également balayer tout ce qui avait contribué à faire ce que j'étais devenu et poursuivre et construire cette vie que nous avions déjà commencé à vivre. J'ai même envisagé, un très bref moment, la solution du suicide : ce n'aurait pas été une solution mais de la lâcheté pure et simple, cela aurait été un coup de poignard pour les deux seules personnes que j'aimais par-dessus tout, toi Benjamin et le Père B.
Aucune de ces solutions n'emportait mon adhésion et finalement je décidais de ne rien décider, de m'en remettre simplement à ce que mon conducteur de conscience jugerait être le mieux pour moi et pour nous deux.
Voilà, Benjamin, ce n'est pas très glorieux je te l'accorde, mais c'est comme ça…
Cela faisait plus de deux heures que Florentin parlait et que je l'écoutais pratiquement sans rien dire et nous avons décidé de faire une pose et de boire quelque chose. Les quelques quinze minutes que durèrent cette interruption furent pour le moins curieuses, aucun de nous deux n'osant vraiment regarder l'autre, je sentais bien que mon ami était nerveux, comme incertain de ce qu'il allait encore me dire alors que curieusement j'étais moi-même étonnement calme, non de résignation mais de la certitude que la décision qui avait été arrêtée était mûrement réfléchie. Alors que j'ouvrais la bouche pour tenter d'en savoir plus
- Non, Benjamin, n'essaie pas de me tirer les vers du nez, il faut que tu entendes dans l'ordre la suite de nos réflexions sinon tu risquerais d'en tirer de fausses conclusions
Nos verres de coca sont vides, je reprends ma place sur le canapé alors que Florentin prend place, cette fois, dans le fauteuil qui me fait face ce qui me laisse perplexe et il le remarque
- Pour cette suite, je veux que tu me voies, que tu puisses suivre la trace de mes sentiments et de mes émotions et moi, que je puisse lire sur ton visage l'acceptation ou le refus de ce que tu vas entendre.
Mais s'il te plaît, laisse-moi parler sans m'interrompre, quelque difficile cela puisse être pour toi mais sache que pour moi cela est encore plus pénible car cette décision, c'est vraiment moi qui ait dû la prendre, seul avec le Père B. en face de moi qui, lui également, attendait de savoir comment je voyais tout ce qu'il m'avait exposé.
- Ben/ D'accord, je comprends, mais… non, il n'y a pas de mais, je t'écoute
- Durant ces 36 heures de solitude, je suis allé une première fois à la messe du soir mais j'étais intérieurement révolté de sorte que ce moment ne m'a rien apporté. Au cours de la deuxième nuit, j'ai ressenti le besoin impérieux d'aller dans la petite chapelle où l'on accède depuis la nef principale. Il y régnait une pénombre relativement claire vu les quelques petites lampes, très discrètes, qui répandaient une lumière indirecte. Je me suis agenouillé sur un prie-Dieu, la tête dans mes mains et, contrairement à la fois précédente, j'étais parfaitement calme et détendu, il faut dire que cette petite chapelle était beaucoup plus intime et accueillante que la grande nef. J'étais calme mais en même temps mon esprit était comme bloqué, j'étais incapable de réfléchir et je ne le souhaitais même pas, je me laissais juste imprégner par l'atmosphère, comme hors du monde, de l'endroit où je me trouvais et où, il y avait que quelques mois seulement, je venais fréquemment et avec beaucoup de plaisir !
Oui, Benjamin, j'ai toujours apprécié cet endroit où je venais lorsque j'avais, par exemple, besoin de penser à mes parents, j'avais comme l'impression de les retrouver, de rétablir un contact alors même que je n'étais pas, et de loin, d'une religiosité exemplaire.
Cela faisait un bon moment déjà que j'étais tranquille, agenouillé, ne pensant à rien de précis sinon à toi et à ce que tu représentais pour moi, pour nous. Soudain, j'ai réalisé que quelqu'un était dans la chapelle car un raclement de chaise se fit entendre : A quelques mètres de moi, deux-trois rangs en arrière, le Père B. était en prière, cela se voyait au très léger mouvement de ses lèvres, je le sentais très loin, je pressentais qu'il cherchait une solution pour mon problème, j'en fus profondément ému et mon émotion fut à son comble lorsque je constatais qu'il avait pleuré… J'avais failli me lever et me jeter dans ses bras mais je n'en fis rien, je sentais qu'il était en relation avec Dieu et que je n'avais pas le droit d'interrompre ce moment sacré.
- Flo/ La nuit avait été courte et je finissais mon petit-déjeuner lorsque le Père B. est entré dans ma cellule, l'air grave et fatigué mais en même temps serein, je pensais immédiatement que sa méditation lui avait apporté une solution
- Père B./ Je te remercie de ne pas avoir troublé le silence de l'obscurité de la chapelle et tu sais, quelque soit la raison de ta présence, j'ai été heureux de te voir dans ce lieu lorsque je suis arrivé.
Tu le sais, tu as été mon élève préféré ce qui n'est pas étonnant puisque tu as passé une quinzaine d'années dans cet établissement. Je t'ai aimé comme un père aime un fils et tu me l'as bien rendu. J'ai peut-être péché par orgueil, mais j'aspirais pour toi à un bel avenir et c'est la raison pour laquelle je t'ai suggéré de partir dans un grand collège pour terminer tes études. Aujourd'hui, je me pose la question de savoir si c'était une bonne décision quand je vois le dilemme dans lequel tu te trouves et dans lequel tu m'as mis.
Mon garçon, depuis que tu es là, je me torture l'esprit pour savoir quelle doit être ma réaction qui ne saurait être qu'une solution purement ecclésiastique selon le dogme de notre Eglise car vois-tu, Florentin, ce que je veux c'est avant tout ton bonheur et, cas échéant, votre bonheur
- Ben/ Oh ! Il a dit votre bonheur, alors cela veut…
- Flo/ Du calme Benjamin, je t'ai dit qu'il fallait que tu suives le raisonnement jusqu'au bout
- Père B./ Fondamentalement, je dois admettre que l'homosexualité est contraire à la morale de l'Eglise mais que, malheureusement, dans nos propres rangs, celle-ci est pratiquée jusque dans les plus hautes sphères de la hiérarchie, que cela se sait et qu'on le tolère. Je n'ai jamais été d'accord avec la condamnation absolue de l'homosexualité par l'Eglise , et aujourd'hui moins que jamais, je pense qu'il faut relativiser ce péché, si s'en est véritablement un, en fonction des circonstances, des personnes et de ce qu'on place dans une telle relation.
Il y a deux jours, quand tu m'as longuement exposé le comment et le pourquoi de vos actes, et je te connais tellement bien que je sais que tu m'as non seulement tout dit mais aussi que tu es totalement sincère sur ce que tu es et ce que tu ressens, j'en suis arrivé à la conclusion ou plus tôt à la conviction que Benjamin et toi, vous vous aimez d'un véritable amour, qu'il n'y a rien de dégradant dans ce que vous faites ensemble, qu'au contraire il s'agit d'une action très édifiante et très belle.
Alors voici ce que j'ai décidé, non, excuse-moi pas ce que je décide mais ce que je te propose, ce que je vous suggère :
Je vous demande une année, douze mois, d'abstinence totale l'un envers l'autre, de ne vous voir que dans le stricte cadre scolaire et donc de ne plus aller l'un chez l'autre, d'éviter absolument de vous retrouver seul les deux afin de ne pas succomber à la tentation. C'est à cette condition absolue que je vous donnerai alors ma bénédiction et je sais que tu seras honnête lorsqu'avec Benjamin vous viendrez me trouver pour me dire que vous avez traverser cette épreuve, qui sera très dure je m'en doute, sans faillir et pour moi cela sera la preuve dont j'ai besoin pour me justifier et être fier de ma décision, de votre décision.
Je ne veux pas que tu me répondes maintenant, tu dois prendre le temps de la réflexion car c'est un engagement très sérieux et tu dois absolument en débattre avec ton Benjamin. Cela ne doit pas être qu'un engagement de ta part, mais de vous deux car ce n'est qu'ensemble que vous pourrez tenir votre promesse.
Rappelez-vous que vous êtes réellement libres de votre choix, un choix que dans deux jours vous me confirmerez tous les deux dans ce que j'appellerai, un peu pompeusement, une déclaration solennelle.
Voilà mon enfant, quoi qu'il en soit, je t'aimerai toujours et, pendant ces deux jours à venir, je prierai dans la petite chapelle, pour Benjamin et Florentin.
Dépêche-toi maintenant, tu as un train dans une demi-heure, n'oublie pas que je suis là pour vous deux si vous en éprouvez le besoin, je vous aime comme vous êtes.
En partant du Collège, nous étions tous les deux très émus, j'avais les yeux humides, le Père B. m'a embrassé et je lui ai simplement dit
- Ayez confiance en nous mon Père
J'étais abasourdi par tout ce que venait de me raconter Florentin, je ne savais pas vraiment qu'en penser mais dans l'immédiat je retenais que le Père B. ne nous avait pas condamnés, bien au contraire, et que nous avions la perspective de nous retrouver. Je saisis également, sans en avoir encore discuter avec lui, que si je refusais cette solution, je perdrais mon Florentin car, après avoir vécu ces derniers jours, je le voyais mal s'engager durablement sans avoir la bénédiction de celui qu'il considérait à la fois comme son père terrestre et spirituel, cela équivaudrait pour lui à se renier dans tout son être, dans toute sa conscience et cela, je ne le voulais en aucun cas pour lui.
Nous avons alors décidé de nous voir le lendemain afin de prendre notre décision et de la communiquer au Père B. Pour moi, c'était clair même si terriblement exigeant, mais pour Florentin, qu'en était-il, il n'avait rien laisser transparaître.
A la pause de dix heures, le lendemain, Florentin me dit juste
- Ca te vas si on discute à midi, on ira déjeuner ensemble une dernière fois
- Ben/ Tu as dis une dernière fois, ta décision est donc prise ?
- Flo/ Je pense que oui, mais il faut que nous en parlions ensemble
- Ben/ D'accord, à tout à l'heure
Je suis retourné en classe mais l'esprit totalement absent, je n'entendais plus rien, ni le professeur ni mes camarades, la tête commença à tourner, je sentis que j'allais tomber et je perdis conscience.
Il parait qu'une ambulance est venue pour me transporter à l'hôpital