CHAPITRE 70 (Aix en Provence)
« Chez les De Bierne »
Antoine regarde une dernière fois la chambre avant de sortir rejoindre Michel et Maryse au salon, il est satisfait du résultat et ne les remerciera jamais assez d’avoir financé entièrement la refonte complète de la pièce, celle-ci n’a plus rien à voir avec celle d’aspect vieillot qu’elle remplace.
Un grand lit plus un clic-clac aux couleurs vives, un bureau moderne avec des chaises pliantes et une armoire pouvant contenir facilement les affaires de trois personnes venant passer quelques semaines.
Le tout dans des tons naturels mis en valeur par une peinture à l’effet taloché/gratté orangé comme c’est à la mode en Provence depuis quelques années.
Un petit soupire satisfait du jeune homme quand son attention se porte vers la fenêtre qui donne côté rue, une jeune fille de son âge fort jolie au demeurant passe devant la maison en s’aidant d’une béquille et s’arrête un instant devant le porche, semblant y chercher quelque chose du regard.
Antoine est troublé par le visage triste de la jeune fille, son regard croise le sien dans un instant fugace qui semble pourtant l’apeurer et la faire reprendre son chemin en marchant avec peine.
La curiosité d’Antoine est si grande, qu’il dévale l’escalier pour entrer en trombe dans le salon où Michel sursaute en le voyant arriver sur lui.
- Et bien Que t’arrive-t-il ?
- La jeune fille qui s’est arrêtée devant chez toi mon oncle, elle avait l’air si triste !! Il m’a semblé qu’elle cherchait quelque chose et elle a pris peur quand elle m’a aperçue, pourtant je ne l’avais jamais vu !! Ça m’a fait bizarre !!
Le visage de Michel perd subitement le sourire qu’il avait à l’arrivée de son neveu.
- C’est Chloé !! Elle vient quelques fois pour nous dire bonjour et passer un moment avec nous, c’est une gentille fille.
- Pourquoi n’est-elle pas entrée alors ?
- Elle t’a sans doute pris pour ton cousin !!
- Aie !! Encore une victime du Florian d’avant !!
- On peut dire ça comme ça en effet !!
- Qu’est-ce qu’il lui a fait cette fois ?
- Chloé a failli perdre sa jambe de la faute à ton cousin, depuis ses onze ans elle ne peut plus marcher qu’avec sa béquille. Ce n’est pas faute d’avoir fait tout notre possible pour lui sauver sa jambe, ton oncle a dépensé une fortune pour ça !! Les médecins n’ont rien pu faire malheureusement et la pauvre Chloé sera infirme toute sa vie, tu imagines ce que ça peut lui faire à son âge ?
- Comment ça s’est passé ?
Michel revit alors ce jour funeste où tout est arrivé, sa voix en tremble encore de colère et d’émotion quand il se décide enfin à prendre la parole.
- C’était l’été il y a de cela sept ans, Florian venait encore passer quelques semaines chez nous à l’époque et crois-moi nous n’avions alors qu’une hâte, celle qu’il rentre chez ses parents !!
- Il vous en a fait voir à vous aussi alors ?
- Ce gamin a toujours été pire qu’une teigne !! Nous avions pourtant espoir qu’il finisse par s’assagir et nous n’avons rien vu venir ce jour-là. Les voisins d’en face avaient un fils de l’âge de ton cousin, ce garçon va savoir pourquoi voulait à tout prix compter Florian parmi ses amis et un après-midi particulièrement chaud, il l’a invité avec d’autres copains à lui à venir s’amuser dans la piscine qu’avait fait tout nouvellement construire ses parents.
- Il était cool !!
- C’est aussi ce que nous avons pensé avec ta tante quand nous avons autorisé Florian à y aller, il semblait aller mieux depuis quelque temps et comme ta tante avait des soins à faire, nous l’avons laissé chez nos voisins en pensant qu’ils resteraient près des enfants. Quand nous sommes rentrés de la clinique, il y avait deux ambulances et une voiture de police devant chez eux, mon Dieu !! Pourquoi avons-nous pu croire que tout se passerait bien !!
Antoine vient s’asseoir près de son oncle pour le réconforter, comprenant que de se souvenir de ce jour-là lui est particulièrement pénible.
- Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
- Nous ne l’avons su réellement que le lendemain quand nous avons été convoqués au commissariat et ensuite quand Chloé est sortie de l’hôpital. Ils jouaient tous les quatre dans la piscine et…
- Comment ça tous les quatre ? Il y avait quelqu’un d’autre avec eux ?
- Un garçon, un ami d’Éric il me semble !! Mais ne me coupe pas sans arrêt sinon je ne vais jamais y arriver !! C’est déjà bien assez difficile à raconter !!
- Excuse-moi mon oncle, continue s’il te plaît !!
- Je disais donc qu’ils jouaient dans la piscine, à un moment ils ont décidé de faire une partie de carte et il semblerait que ton cousin en ait profité pour ouvrir la bonde qui sert à vider le bassin, bien sûr sans en avertir les autres et quand la partie de carte s’est terminée, l’ami d’Éric s’est précipité en courant et a plongé la tête la première, les autres en entendant son cri sont venus au bord du bassin complètement affolés sauf ton cousin bien sûr qui riait aux éclats de voir la mare de sang s’élargir autour de la tête du gamin.
- Mais c’est horrible !!
- Et ce n’est pas fini !! Chloé a voulu descendre pour venir au secours de son ami et ton cousin n’a rien trouvé de plus drôle que de la pousser violemment, heureusement pour elle l’endroit où elle se trouvait n’était pas trop profond mais sa jambe s’est coupée profondément à une arête vive sur une coupe du carrelage qui bordait la piscine.
- C’est pour cette raison qu’elle boite toujours ?
- S’il n’y avait eu que cette coupure, elle s’en serait remise !! Non !! Encore une idée de Florian de lui faire un pansement en y mélangeant une mixture à base de déchets du poulailler d’après les rapports de police et c’est ça qui a infecté la jambe de la petite Chloé, quand les secours s’en sont enfin aperçu le mal était déjà trop avancé et l’infection faisait déjà son œuvre !!
- Et le gamin mon oncle ? C’était grave ?
- Le choc lui a déplacé le cerveau et il ne s’en est jamais remis, ses parents ou ceux chez qui il était, je ne me rappelle plus très bien depuis le temps. Tout ce que je me souviens, c’est qu’ils ont déménagé presque aussitôt car ils ne supportaient plus cet endroit et aux dernières nouvelles qui datent de cette époque, le garçon était à l’état végétatif dans une clinique spécialisée. Ton oncle paie depuis tous les frais, il n’en parle jamais tout comme nous d’ailleurs car nous nous sentons tous fautifs tu comprends ?
- Mais ce n’était pas votre faute !!
- Nous savions comment était ton cousin et nous l’avons laissé avec eux !! Tu es pourtant bien placé pour comprendre après tout ce qu’il t’a fait subir à toi aussi !!
- Quand « Flo » va savoir ça !!
Michel attrape le bras d’Antoine assez rudement pour que le garçon comprenne que ce qui va suivre est important.
- N’en parle jamais à Florian tu m’as bien compris ?? C’est de l’histoire ancienne et ce n’était pas lui, enfin pas celui qu’il est devenu maintenant !!
- Et s’il croise la jeune fille ?? Cette Chloé, pendant ses vacances ?
CHAPITRE 71 (Aix en Provence) (suite)
«Sur le parking de l’aéroport »
L’Audi A8 est garé juste en face de la sortie du terminal, l’homme à l’intérieur semble nerveux et n’arrête pas de regarder sa montre en se triturant les doigts, ce n’est pas tant la venue de son patron et ami ainsi que sa femme qui le perturbe, mais de se retrouver une fois de plus en face de leur fils et de ses paroles acerbes comme il ne manque jamais d’en avoir à chaque fois qu’ils se voient.
Le rouquin le hait, pourtant Franck car c’est bien de lui qu’il s’agit ne lui a jamais rien fait et au contraire il a toujours fait l’effort de garder le sourire en sa présence, mais jamais rien n’y a fait et toujours ce monstre le fait passer pour un profiteur qui n’est ami avec son père que parce qu’il bénéficie de ses largesses.
Pourtant Franck mérite largement la paie qu’il touche chaque mois, il s’investit complètement dans la société de son copain de toujours et ce depuis les premiers jours quand ils allaient ensemble faire le chaland pour négocier avec leurs premiers clients.
Les premières années ont été dures voire très dures et ce n’est qu’au bout d’un certain nombre d’entre elles qu’ils ont enfin pu se payer un salaire décent, vivant jusque-là sur les économies ainsi que la prime de retraite de Michel qui les avait recueillis chez lui en leur remontant le moral les jours trop fréquents où ils n’y croyaient plus.
Cette période de vaches maigres les a encore plus soudés les uns aux autres, Franck y trouvant une famille qui jamais depuis ne lui a fait défaut ne serait-ce ce voyou qu’ils ont engendré et qui depuis leur pourrit la vie, sans qu’aucune parole pour leur ouvrir les yeux n’y change rien.
Alors se faire traiter de parasite, voire pire encore à la moindre occasion n’est pas pour calmer Franck qui voit venir l’heure de sa prochaine mise en présence avec le rouquin avec une boule à l’estomac.
***/***
Pierre en sortant de l’aéroport aperçoit de suite l’Audi, il sourit tout en sachant dans quel état doit encore être son ami et s’arrête en faisant signe à sa femme et à son fils de venir près de lui, ceux-ci stoppent donc avec le chariot transportant leurs affaires et attendent de connaître les raisons de leur immobilisation devant les portes de sortie.
- (Pierre amusé) Je vais passer devant, j’imagine que Franck ne doit plus avoir d’ongles à force de se les ronger de nervosité à l’idée de revoir Florian Hi ! Hi !
- Tu vas lui dire quoi p’pa ?
- Voilà la question qu’elle est bonne !! Quoi que je lui dise, jamais il ne va me croire c’est sûr !!
- Alors allons-y tous ensemble et nous verrons bien !!
- (Hellènes) Florian a raison mon chéri, de toute façon il faudra bien en passer par là !!
- (Pierre) Alors allons-y !! Tout le monde aux abris Hi ! Hi ! Putainnn !!! La tête qu’il va faire !! Je vais regretter toute ma vie de ne pas avoir pris d’appareil photo !!
- (Hellènes) Tu demanderas à ton fils d’en faire un croquis !!
Je relève les yeux surpris vers ma mère.
- Tu as vu mes dessins ?
- Je n’ai pas pu résister figure toi, si tu ne voulais pas que je les vois il ne fallait pas me les mettre dans les mains !! Tu sais comment sont les femmes Hi ! Hi !
- (Pierre surpris) C’est quoi cette histoire de dessins ?
- (Hellènes) Tu n’auras qu’à demander à Florian de te les montrer !! Mais crois-moi mon chéri, c’est bluffant de réalisme !!
- Vous ne croyez pas que nous ferions bien d’y aller ? Tonton « Francky » va finir par se demander ce que nous faisons debout à comploter devant la porte !!
- (Hellènes) Tonton « Francky » ???????????????
- (Pierre) Tu comprends pourquoi l’appareil photo maintenant Hi ! Hi !
- (Hellènes hilare) Alors là oui !! Woufff !! Pauvre Franck !! Il va croire que tu te moques de lui encore une fois Hi ! Hi !
***/***
Franck se demande bien ce qu’ils fabriquent et de les voir rire tous les trois le trouble encore plus, surtout venant du rouquin qu’il n’a jamais vu autrement qu’à faire la gueule.
Il les regarde donc s’avancer enfin vers la voiture et décide de descendre pour ouvrir le coffre, Pierre est le premier à le prendre par les épaules pour lui faire la bise, suivit quasi immédiatement par Hellènes et il reste figé devant le visage amusé du rouquin qui lui demande d’une voix si chargée de gentillesse qu’il en reste comme un con les yeux ronds.
- Et moi tonton Francky ? Je n’ai pas droit aux bisous ?
CHAPITRE 72 (Orléans) (La veille)
« Chez les Lemont »
Flavien quitte le dojo avec le sourire, son retour à Orléans après sa première année de fac à Reims lui fait un bien fou et il se presse à faire les quelques kilomètres qui le séparent de l’appartement pour y retrouver sa famille.
Un plissement du front démontre quand même que ce grand jeune homme blond sportif a quelques soucis qui le minent, ne serait-ce déjà son petit frère qui ne va pas bien depuis quelques temps et que ses parents ont conduit une nouvelle fois aux urgences ce matin même, sa tumeur au cerveau ne semblant pas vouloir se résorber comme l’affirment pourtant avec confiance les médecins qui le suivent.
***/***
Bastien et Henriette rentrent seuls à leur appartement car le petit Ludovic devant subir une opération qui cette fois ci ne peut plus être reculée, est resté en observation le temps qu’un spécialiste du cerveau n’arrive de Paris.
Les parents sont abattus et ce même s’ils s’y attendaient un jour ou l’autre, leur fils souffrant trop pour qu’ils n’accèdent pas enfin à la demande des médecins qui cette fois ne prétendent plus qu’une guérison par médication est encore possible.
Flavien en arrivant chez lui comprend aussitôt qu’il y a un problème à l’ambiance qui règne dans l’appartement, il rejoint immédiatement ses parents sans même prendre le temps d’ôter ses chaussures.
- C’est « Ludo » ? Il est resté là-bas ?
- (Bastien) Il doit subir une opération d’urgence !!
- Mais !! Je croyais que…
- (Henriette) Nous aussi mon grand, seulement les choses se sont encore aggravées et les médecins ne voient plus que cette solution.
Flavien ne sais plus quoi dire, il sait très bien que la moindre parole aggravera la tristesse de ses parents et préfère donc attendre que ce soient eux qui lui en disent plus, restant debout à les regarder droit dans les yeux.
- (Bastien) La tumeur de ton frère a encore grossi et elle comprime trop fortement son cerveau, ses mots de têtes de plus en plus fréquents viennent de là !!
- C’est pour quand ?
- Dans trois jours !!
- Comment ça ?? Pas avant ??
- Le spécialiste ne pourra se rendre disponible qu’à cette date, mais les toubibs nous ont assuré qu’il y avait encore un peu de temps et que de toute façon, ils le gardaient en observation en attendant.
Flavien bout intérieurement et préfère aller passer ses nerfs dans sa chambre, il y reste un bon moment à ruminer avant de prendre son téléphone pour prévenir ses amis qu’il ne sera pas disponible pour la petite fête où ils avaient prévu de se retrouver pour le week-end.
Quand il raccroche enfin, Flavien se sent mieux et il retrouve même un instant le sourire, le soutien de ses amis l’ayant quelque peu réconforté.
De savoir qu’en plus ils vont faire le voyage rien que pour être près de lui dans ce moment difficile pour lui, lui fait chaud au cœur et c’est donc beaucoup plus calme qu’il rejoint ses parents dans le salon, passant le restant de la journée à leur donner tout le réconfort qu’il lui est humainement possible étant donné les circonstances.
***/***
« Centre hospitalier d’Orléans »
- Comment te sens-tu ce soir mon garçon ?
- J’ai toujours très mal à la tête monsieur !!
- L’infirmière va venir t’apporter un calmant, essaie de dormir car demain il y aura encore beaucoup d’examens à passer
- Je vais essayer monsieur !! Dites monsieur ?? Vous croyez que je vais guérir ??
- Mais bien sûr !! Tu n’as même pas à te poser la question, le docteur qui va s’occuper de toi est le meilleur qu’il existe à ce jour. Allez !! Repose-toi, je t’envoie l’infirmière !!
Le médecin à peine sorti de la chambre, perd immédiatement le sourire qu’il montrait au petit bout d’homme pour le rassurer car les chances réelles qu’il s’en sorte sont suffisamment minces pour qu’il s’en inquiète fortement.
« Chez les De Bierne »
Antoine regarde une dernière fois la chambre avant de sortir rejoindre Michel et Maryse au salon, il est satisfait du résultat et ne les remerciera jamais assez d’avoir financé entièrement la refonte complète de la pièce, celle-ci n’a plus rien à voir avec celle d’aspect vieillot qu’elle remplace.
Un grand lit plus un clic-clac aux couleurs vives, un bureau moderne avec des chaises pliantes et une armoire pouvant contenir facilement les affaires de trois personnes venant passer quelques semaines.
Le tout dans des tons naturels mis en valeur par une peinture à l’effet taloché/gratté orangé comme c’est à la mode en Provence depuis quelques années.
Un petit soupire satisfait du jeune homme quand son attention se porte vers la fenêtre qui donne côté rue, une jeune fille de son âge fort jolie au demeurant passe devant la maison en s’aidant d’une béquille et s’arrête un instant devant le porche, semblant y chercher quelque chose du regard.
Antoine est troublé par le visage triste de la jeune fille, son regard croise le sien dans un instant fugace qui semble pourtant l’apeurer et la faire reprendre son chemin en marchant avec peine.
La curiosité d’Antoine est si grande, qu’il dévale l’escalier pour entrer en trombe dans le salon où Michel sursaute en le voyant arriver sur lui.
- Et bien Que t’arrive-t-il ?
- La jeune fille qui s’est arrêtée devant chez toi mon oncle, elle avait l’air si triste !! Il m’a semblé qu’elle cherchait quelque chose et elle a pris peur quand elle m’a aperçue, pourtant je ne l’avais jamais vu !! Ça m’a fait bizarre !!
Le visage de Michel perd subitement le sourire qu’il avait à l’arrivée de son neveu.
- C’est Chloé !! Elle vient quelques fois pour nous dire bonjour et passer un moment avec nous, c’est une gentille fille.
- Pourquoi n’est-elle pas entrée alors ?
- Elle t’a sans doute pris pour ton cousin !!
- Aie !! Encore une victime du Florian d’avant !!
- On peut dire ça comme ça en effet !!
- Qu’est-ce qu’il lui a fait cette fois ?
- Chloé a failli perdre sa jambe de la faute à ton cousin, depuis ses onze ans elle ne peut plus marcher qu’avec sa béquille. Ce n’est pas faute d’avoir fait tout notre possible pour lui sauver sa jambe, ton oncle a dépensé une fortune pour ça !! Les médecins n’ont rien pu faire malheureusement et la pauvre Chloé sera infirme toute sa vie, tu imagines ce que ça peut lui faire à son âge ?
- Comment ça s’est passé ?
Michel revit alors ce jour funeste où tout est arrivé, sa voix en tremble encore de colère et d’émotion quand il se décide enfin à prendre la parole.
- C’était l’été il y a de cela sept ans, Florian venait encore passer quelques semaines chez nous à l’époque et crois-moi nous n’avions alors qu’une hâte, celle qu’il rentre chez ses parents !!
- Il vous en a fait voir à vous aussi alors ?
- Ce gamin a toujours été pire qu’une teigne !! Nous avions pourtant espoir qu’il finisse par s’assagir et nous n’avons rien vu venir ce jour-là. Les voisins d’en face avaient un fils de l’âge de ton cousin, ce garçon va savoir pourquoi voulait à tout prix compter Florian parmi ses amis et un après-midi particulièrement chaud, il l’a invité avec d’autres copains à lui à venir s’amuser dans la piscine qu’avait fait tout nouvellement construire ses parents.
- Il était cool !!
- C’est aussi ce que nous avons pensé avec ta tante quand nous avons autorisé Florian à y aller, il semblait aller mieux depuis quelque temps et comme ta tante avait des soins à faire, nous l’avons laissé chez nos voisins en pensant qu’ils resteraient près des enfants. Quand nous sommes rentrés de la clinique, il y avait deux ambulances et une voiture de police devant chez eux, mon Dieu !! Pourquoi avons-nous pu croire que tout se passerait bien !!
Antoine vient s’asseoir près de son oncle pour le réconforter, comprenant que de se souvenir de ce jour-là lui est particulièrement pénible.
- Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
- Nous ne l’avons su réellement que le lendemain quand nous avons été convoqués au commissariat et ensuite quand Chloé est sortie de l’hôpital. Ils jouaient tous les quatre dans la piscine et…
- Comment ça tous les quatre ? Il y avait quelqu’un d’autre avec eux ?
- Un garçon, un ami d’Éric il me semble !! Mais ne me coupe pas sans arrêt sinon je ne vais jamais y arriver !! C’est déjà bien assez difficile à raconter !!
- Excuse-moi mon oncle, continue s’il te plaît !!
- Je disais donc qu’ils jouaient dans la piscine, à un moment ils ont décidé de faire une partie de carte et il semblerait que ton cousin en ait profité pour ouvrir la bonde qui sert à vider le bassin, bien sûr sans en avertir les autres et quand la partie de carte s’est terminée, l’ami d’Éric s’est précipité en courant et a plongé la tête la première, les autres en entendant son cri sont venus au bord du bassin complètement affolés sauf ton cousin bien sûr qui riait aux éclats de voir la mare de sang s’élargir autour de la tête du gamin.
- Mais c’est horrible !!
- Et ce n’est pas fini !! Chloé a voulu descendre pour venir au secours de son ami et ton cousin n’a rien trouvé de plus drôle que de la pousser violemment, heureusement pour elle l’endroit où elle se trouvait n’était pas trop profond mais sa jambe s’est coupée profondément à une arête vive sur une coupe du carrelage qui bordait la piscine.
- C’est pour cette raison qu’elle boite toujours ?
- S’il n’y avait eu que cette coupure, elle s’en serait remise !! Non !! Encore une idée de Florian de lui faire un pansement en y mélangeant une mixture à base de déchets du poulailler d’après les rapports de police et c’est ça qui a infecté la jambe de la petite Chloé, quand les secours s’en sont enfin aperçu le mal était déjà trop avancé et l’infection faisait déjà son œuvre !!
- Et le gamin mon oncle ? C’était grave ?
- Le choc lui a déplacé le cerveau et il ne s’en est jamais remis, ses parents ou ceux chez qui il était, je ne me rappelle plus très bien depuis le temps. Tout ce que je me souviens, c’est qu’ils ont déménagé presque aussitôt car ils ne supportaient plus cet endroit et aux dernières nouvelles qui datent de cette époque, le garçon était à l’état végétatif dans une clinique spécialisée. Ton oncle paie depuis tous les frais, il n’en parle jamais tout comme nous d’ailleurs car nous nous sentons tous fautifs tu comprends ?
- Mais ce n’était pas votre faute !!
- Nous savions comment était ton cousin et nous l’avons laissé avec eux !! Tu es pourtant bien placé pour comprendre après tout ce qu’il t’a fait subir à toi aussi !!
- Quand « Flo » va savoir ça !!
Michel attrape le bras d’Antoine assez rudement pour que le garçon comprenne que ce qui va suivre est important.
- N’en parle jamais à Florian tu m’as bien compris ?? C’est de l’histoire ancienne et ce n’était pas lui, enfin pas celui qu’il est devenu maintenant !!
- Et s’il croise la jeune fille ?? Cette Chloé, pendant ses vacances ?
CHAPITRE 71 (Aix en Provence) (suite)
«Sur le parking de l’aéroport »
L’Audi A8 est garé juste en face de la sortie du terminal, l’homme à l’intérieur semble nerveux et n’arrête pas de regarder sa montre en se triturant les doigts, ce n’est pas tant la venue de son patron et ami ainsi que sa femme qui le perturbe, mais de se retrouver une fois de plus en face de leur fils et de ses paroles acerbes comme il ne manque jamais d’en avoir à chaque fois qu’ils se voient.
Le rouquin le hait, pourtant Franck car c’est bien de lui qu’il s’agit ne lui a jamais rien fait et au contraire il a toujours fait l’effort de garder le sourire en sa présence, mais jamais rien n’y a fait et toujours ce monstre le fait passer pour un profiteur qui n’est ami avec son père que parce qu’il bénéficie de ses largesses.
Pourtant Franck mérite largement la paie qu’il touche chaque mois, il s’investit complètement dans la société de son copain de toujours et ce depuis les premiers jours quand ils allaient ensemble faire le chaland pour négocier avec leurs premiers clients.
Les premières années ont été dures voire très dures et ce n’est qu’au bout d’un certain nombre d’entre elles qu’ils ont enfin pu se payer un salaire décent, vivant jusque-là sur les économies ainsi que la prime de retraite de Michel qui les avait recueillis chez lui en leur remontant le moral les jours trop fréquents où ils n’y croyaient plus.
Cette période de vaches maigres les a encore plus soudés les uns aux autres, Franck y trouvant une famille qui jamais depuis ne lui a fait défaut ne serait-ce ce voyou qu’ils ont engendré et qui depuis leur pourrit la vie, sans qu’aucune parole pour leur ouvrir les yeux n’y change rien.
Alors se faire traiter de parasite, voire pire encore à la moindre occasion n’est pas pour calmer Franck qui voit venir l’heure de sa prochaine mise en présence avec le rouquin avec une boule à l’estomac.
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Pierre en sortant de l’aéroport aperçoit de suite l’Audi, il sourit tout en sachant dans quel état doit encore être son ami et s’arrête en faisant signe à sa femme et à son fils de venir près de lui, ceux-ci stoppent donc avec le chariot transportant leurs affaires et attendent de connaître les raisons de leur immobilisation devant les portes de sortie.
- (Pierre amusé) Je vais passer devant, j’imagine que Franck ne doit plus avoir d’ongles à force de se les ronger de nervosité à l’idée de revoir Florian Hi ! Hi !
- Tu vas lui dire quoi p’pa ?
- Voilà la question qu’elle est bonne !! Quoi que je lui dise, jamais il ne va me croire c’est sûr !!
- Alors allons-y tous ensemble et nous verrons bien !!
- (Hellènes) Florian a raison mon chéri, de toute façon il faudra bien en passer par là !!
- (Pierre) Alors allons-y !! Tout le monde aux abris Hi ! Hi ! Putainnn !!! La tête qu’il va faire !! Je vais regretter toute ma vie de ne pas avoir pris d’appareil photo !!
- (Hellènes) Tu demanderas à ton fils d’en faire un croquis !!
Je relève les yeux surpris vers ma mère.
- Tu as vu mes dessins ?
- Je n’ai pas pu résister figure toi, si tu ne voulais pas que je les vois il ne fallait pas me les mettre dans les mains !! Tu sais comment sont les femmes Hi ! Hi !
- (Pierre surpris) C’est quoi cette histoire de dessins ?
- (Hellènes) Tu n’auras qu’à demander à Florian de te les montrer !! Mais crois-moi mon chéri, c’est bluffant de réalisme !!
- Vous ne croyez pas que nous ferions bien d’y aller ? Tonton « Francky » va finir par se demander ce que nous faisons debout à comploter devant la porte !!
- (Hellènes) Tonton « Francky » ???????????????
- (Pierre) Tu comprends pourquoi l’appareil photo maintenant Hi ! Hi !
- (Hellènes hilare) Alors là oui !! Woufff !! Pauvre Franck !! Il va croire que tu te moques de lui encore une fois Hi ! Hi !
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Franck se demande bien ce qu’ils fabriquent et de les voir rire tous les trois le trouble encore plus, surtout venant du rouquin qu’il n’a jamais vu autrement qu’à faire la gueule.
Il les regarde donc s’avancer enfin vers la voiture et décide de descendre pour ouvrir le coffre, Pierre est le premier à le prendre par les épaules pour lui faire la bise, suivit quasi immédiatement par Hellènes et il reste figé devant le visage amusé du rouquin qui lui demande d’une voix si chargée de gentillesse qu’il en reste comme un con les yeux ronds.
- Et moi tonton Francky ? Je n’ai pas droit aux bisous ?
CHAPITRE 72 (Orléans) (La veille)
« Chez les Lemont »
Flavien quitte le dojo avec le sourire, son retour à Orléans après sa première année de fac à Reims lui fait un bien fou et il se presse à faire les quelques kilomètres qui le séparent de l’appartement pour y retrouver sa famille.
Un plissement du front démontre quand même que ce grand jeune homme blond sportif a quelques soucis qui le minent, ne serait-ce déjà son petit frère qui ne va pas bien depuis quelques temps et que ses parents ont conduit une nouvelle fois aux urgences ce matin même, sa tumeur au cerveau ne semblant pas vouloir se résorber comme l’affirment pourtant avec confiance les médecins qui le suivent.
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Bastien et Henriette rentrent seuls à leur appartement car le petit Ludovic devant subir une opération qui cette fois ci ne peut plus être reculée, est resté en observation le temps qu’un spécialiste du cerveau n’arrive de Paris.
Les parents sont abattus et ce même s’ils s’y attendaient un jour ou l’autre, leur fils souffrant trop pour qu’ils n’accèdent pas enfin à la demande des médecins qui cette fois ne prétendent plus qu’une guérison par médication est encore possible.
Flavien en arrivant chez lui comprend aussitôt qu’il y a un problème à l’ambiance qui règne dans l’appartement, il rejoint immédiatement ses parents sans même prendre le temps d’ôter ses chaussures.
- C’est « Ludo » ? Il est resté là-bas ?
- (Bastien) Il doit subir une opération d’urgence !!
- Mais !! Je croyais que…
- (Henriette) Nous aussi mon grand, seulement les choses se sont encore aggravées et les médecins ne voient plus que cette solution.
Flavien ne sais plus quoi dire, il sait très bien que la moindre parole aggravera la tristesse de ses parents et préfère donc attendre que ce soient eux qui lui en disent plus, restant debout à les regarder droit dans les yeux.
- (Bastien) La tumeur de ton frère a encore grossi et elle comprime trop fortement son cerveau, ses mots de têtes de plus en plus fréquents viennent de là !!
- C’est pour quand ?
- Dans trois jours !!
- Comment ça ?? Pas avant ??
- Le spécialiste ne pourra se rendre disponible qu’à cette date, mais les toubibs nous ont assuré qu’il y avait encore un peu de temps et que de toute façon, ils le gardaient en observation en attendant.
Flavien bout intérieurement et préfère aller passer ses nerfs dans sa chambre, il y reste un bon moment à ruminer avant de prendre son téléphone pour prévenir ses amis qu’il ne sera pas disponible pour la petite fête où ils avaient prévu de se retrouver pour le week-end.
Quand il raccroche enfin, Flavien se sent mieux et il retrouve même un instant le sourire, le soutien de ses amis l’ayant quelque peu réconforté.
De savoir qu’en plus ils vont faire le voyage rien que pour être près de lui dans ce moment difficile pour lui, lui fait chaud au cœur et c’est donc beaucoup plus calme qu’il rejoint ses parents dans le salon, passant le restant de la journée à leur donner tout le réconfort qu’il lui est humainement possible étant donné les circonstances.
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« Centre hospitalier d’Orléans »
- Comment te sens-tu ce soir mon garçon ?
- J’ai toujours très mal à la tête monsieur !!
- L’infirmière va venir t’apporter un calmant, essaie de dormir car demain il y aura encore beaucoup d’examens à passer
- Je vais essayer monsieur !! Dites monsieur ?? Vous croyez que je vais guérir ??
- Mais bien sûr !! Tu n’as même pas à te poser la question, le docteur qui va s’occuper de toi est le meilleur qu’il existe à ce jour. Allez !! Repose-toi, je t’envoie l’infirmière !!
Le médecin à peine sorti de la chambre, perd immédiatement le sourire qu’il montrait au petit bout d’homme pour le rassurer car les chances réelles qu’il s’en sorte sont suffisamment minces pour qu’il s’en inquiète fortement.