CHAPITRE XIV (Suite)
De retour au travail l’après-midi, Jean m’annonce qu’après réflexion, il a pris la décision de démissionner. Il quittera ses fonctions à la fin de son préavis. Je l’informe que je ferais l’impasse sur ses propos déplacés à condition qu’il n’y a plus aucune récrimination sur le sujet durant le temps qui lui reste à faire. Jean a validé le "deal". Il n’a d’ailleurs pas d’autre choix s’il escompte retrouver facilement un autre job.
Je m’aperçois aussi à travers cette expérience qu’il reste encore beaucoup à faire pour normaliser l’homosexualité même si pour le cas d’espèce, il y avait une énorme frustration au départ. Ceci étant, ça n’excuse pas les propos déplacés.
Avec tout cela, mes plans sont chamboulés et pour l’instant, tout se bouscule dans ma tête. J’ai besoin d’un peu de temps et de réflexion pour reprendre la situation en mains.
Marion attendait dans le couloir. Elle a entendu ; la porte était restée entre-ouverte. Elle rentre dans mon bureau juste après que Jean en soit sorti.
- Jean démissionne ?
- Oui, il vient de me donner son préavis. On en reparlera ce soir. Pour l’instant on va terminer la présentation. Tu as pu avoir les éléments de Sarah ?
- Elle m’a tout envoyé par mail. Elle m’a confirmé qu’elle sera bien là ce soir.
On met une dernière touche à la présentation et on se sépare. Marion rentre chez elle et j’en profite aussi pour m’éclipser, direction le magasin de lingerie.
Je franchis le seuil de la boutique et je me fais de suite interpeller par la patronne.
- Le masque est obligatoire, monsieur.
Ah oui, j’avais oublié ce détail. Je fouille dans mes poches et eurêka, je trouve ledit objet un peu froissé que je pose sur mon visage. Je me dis aussi qu’il faudra peut-être envisager de le changer. Il doit bien avoir une bonne semaine au moins. La patronne se dirige vers moi.
- Je peux vous aider ?
- Non merci, je vais attendre que Johanna se libère.
La jeune femme est en grande discussion avec une dame d’un certain âge qui ne semble pas trop pressée. J’en profite pour faire le tour de la boutique. Les mannequins sont sexy. Les tenues qu’ils portent sont volages, transparentes, parfois rikiki, parfois amples mais toujours de très bon goûts.
- Bonjour Pascal.
- Bonjour Johanna. Vous vous rappelez toujours du prénom de vos clients lui dis-je avec un grand sourire ?
- Pas tous mais de vous oui. Et vous, vous vous rappelez du prénom de toutes les vendeuses ?
- Que des plus jolies Johanna, les autres j’oublie assez facilement.
Johanna rougit. Elle est chic avec son tailleur sur mesure, ses bas sombres qui donnent un regard interminable sur ses jambes effilées, son chemisier blanc qui laisse entrevoir un soutien-gorge de la maison aux couleurs pastel. Je me demande si sa culotte est assortie à son soutien-gorge.
- Alors, votre amie, a-t-elle apprécié vos achats la dernière fois ?
- Oui très bien et c’est d’ailleurs pourquoi je suis de retour. Je cherche quelque chose d’excentrique, d’humoristique mais de bonne facture. Vous avez ça ?
- Le côté humoristique, vous allez être déçu Pascal. Ce n’est pas trop le genre de la maison, comme vous avez probablement pu voir.
Elle jette un œil furtif vers sa patronne.
- En revanche, pour le côté excentrique, on a des choses. Des culottes ouvertes de très bon goût. Elles peuvent s’ouvrir pour mettre en valeur les fesses ou le sexe. C’est au choix. Tenez, regardez celle-là en fine dentelle transparente. Elle donne libre accès au sexe et les fesses sont très joliment soulignées sous la dentelle. L’effet glamour est garanti. En taille basse, on a deux coloris, noir ou blanc. Elle est très agréable à porter même si généralement, ce type de sous-vêtement n’est pas fait pour être mis toute la journée.
- Ah ? Vous êtes en train de me dire qu’il faut en plus de celle-ci en acheter une autre mais moins fantaisiste ?
- Trois si vous êtes vraiment gourmand Pascal.
- Il est vrai que la gourmandise, c’est mon péché mignon…
Elle éclate de rire en me dévisageant avec un sourire malicieux. Trop coquine la petite Johanna. Trop naturelle aussi. Elle arrive à discuter petites culottes avec un homme comme s'il s'agissait de vin, de voitures ou de tout autre choses futiles.
- Vous n’étiez pas au centre équestre hier soir avec Julie ? Il me semble vous avoir aperçu.
- Vous montez vous aussi Johanna ?
- Oui de temps en temps. Je pratique en dilettante, pour le plaisir uniquement. Mon salaire ne me permet pas trop d’écarts. Mais dimanche prochain, je participerai quand même au concours de sauts d'obstacles en Normandie.
- Mon amie s'y est inscrite elle aussi. On aura peut-être l’occasion de s’y rencontrer.
J’achète un shorty vert pastel qui s’ouvre sur les fesses en tirant sur trois petits nœuds qui font office de fermeture, et un petit dernier où selon Johanna, quand on passe la main on a paraît-il, la sensation qu’il n’y a pas de culotte. Je me languis déjà d’essayer toutes ces combinaisons plutôt prometteuses. Alice n’aura qu’à bien se tenir.
Avec tout cela, je vais encore être en retard à mon cours d’équitation. Julie va me maudire.
Dix-huit heures dix. J’arrive ventre à terre au centre équestre. Je me dépêche de sortir de la voiture et mon pied se coince dans la ceinture de sécurité, je m’étale de tout mon long sur le gazon terreux. Julie qui a assisté à la scène, me gratifie d’un énorme sourire sarcastique.
- Voilà ce que c’est que d’être en retard. Ça va Pascal ? Tu ne t’es pas fait mal ?
- Non ça va Julie. Merci. Dis-je en me relevant, vexé de cette mésaventure.
Julie s’est rapprochée de ma voiture. Elle pose une main sur le montant de la portière. Son regard survole mes sièges arrières et tombe sur le sac en papier à l’effigie immanquable de la boutique de lingerie et comble de malchance, certains articles se sont échappés du sac durant le trajet.
- Tiens ! Tu achètes des petites culottes toi ?
- Ben oui, pour mes jolies fesses, il faut bien ça.
- Ah, Monsieur fait dans le fétichisme. Je suis curieuse de voir ça.
J’avoue que Julie commence à m’embarrasser. Mais, je fais bonne figure.
- Tu veux que je te montre ?
- Non, non. Ça ira Pascal. Rejoints-moi dans le manège et elle s’éloigne en gloussant comme poule.
Je retrouve Julie après m'être un peu débarbouillé la chemise.
- Je suis prêt. On peut y aller.
Julie me jette un œil amusé. Elle ne s’en est toujours pas remise.
- Bon on y va ? Insistais-je.
- Excuse-moi, mais les images que j’ai dans la tête sont trop marrantes. Allez, on y va Pascal.
Le professionnalisme de Julie l’a rattrapé. On est parti pour faire des courbes à droite, à gauche, des serpentines et des cercles. Dans l’ensemble ça se passe plutôt bien même si parfois le canasson n’en fait qu’à sa tête. On termine la séance par le curetage des sabots. Je commence à me sentir un peu plus à l’aise et surtout plus serein.
- Demain, on tentera une sortie dans la prairie.
Je sens bien que je l’amuse. C’est surprenant cette intuition masculine. Je remarque qu’elle hésite entre l’envie de séduire et le naturel autoritaire dans laquelle elle se complaît. La jeune femme oscille entre les deux postures, adoptant l’une ou l’autre selon des circonstances qu’elle seule maîtrise. Ce petit jeu, volontaire ou pas, fait qu’on lui porte une attention particulière. C’est probablement sa manière de se démarquer, sa marque de fabrique. En contrepartie, elle devient particulièrement insaisissable. Si je n’avais pas rencontré Alice, par défi je me serais probablement laissé séduire par cette femme juste pour savoir qui mangerait dans la main de qui.
Aussitôt le cours terminé je rentre chez moi prendre une douche vite fait, en profiter pour me changer et retrouver une apparence plus civilisée.
Je saisis une bouteille de champagne bien fraîche dans le réfrigérateur et en avant toute.
Chez Marion, c’est à quinze minutes d’ici. En chemin, je repense à la suggestion d’Alice. Cette proposition de vie commune que nous avons actée de concert m’excite et en même temps je me dis que nous allons peut-être vite en besogne. On se connaît de presque trois semaines et même si nos relations sont aujourd’hui mirifiques, il faut qu’elles tiennent dans la durée, confrontées à l’usure du quotidien.
Le visage d’Alice rayonnant de bonheur apparaît en filigrane dans une fenêtre de mon esprit et balaye avec légèreté toutes mes appréhensions. Je suis rassuré par cette femme volontaire et déterminée. Je suis convaincu que le temps n’a pas prise sur notre amour. J’ai même l’impression de la connaître depuis des siècles et de ne jamais me lasser de sa présence. Je reste persuadé d’avoir pris la bonne décision. D'abord parce que l'idée me séduit au plus haut point et même si j'ai été surpris car je ne m'y attendais pas, vivre avec Alice, maintenant que je caresse cette perspective dans tous les sens, ne peut être autre chose qu'une évidence. Et puis il faut bien se l'avouer, sa proposition m'a fait chaud au cœur, comme une pluie de bonheur si délicieuse que je n'avais pas d'autre choix que d'acquiescer au risque de me fâcher définitivement avec ma conscience. Et d'ailleurs, comment aurait-il pu en être autrement ?
Si l’opération d’Alice ne donnait pas les résultats escomptés, je serais alors au plus près d’elle et dans tous les cas, elle aura besoin de ma présence, de tout mon amour pour mieux supporter son traitement. J'ai conscience qu'elle m'apporte elle aussi quelque chose d'énorme, de magistral. Je ne sais pas mesurer parce que je n'arrive pas à définir précisément. Mais, ce qui est sûr, c'est qu'avec elle je suis un autre homme, un homme comblé, un homme accompli. Je réalise que si la vie était vraiment trop ingrate, sans elle rien ne serait plus pareil. Je m'aperçois avec certitude que tout compte fait, j'ai besoin d'elle au moins autant qu'elle a besoin de moi et c'est probablement cette complémentarité qui fait la solidité de notre amour. Je suis heureux que nos chemins aient réussi à se croiser pour pouvoir s'unir en toute simplicité. Ce n'était pas gagné. Et maintenant, je nous imagine parcourir ensemble avec amusement et complicité notre quotidien et, je sais que chaque soir de mon existence, je prendrai plaisir à lui réserver une petite place pour que sa tête toute chaude puisse venir se poser et s'endormir sur mon torse, juste pour me prouver qu’elle existe.
De retour au travail l’après-midi, Jean m’annonce qu’après réflexion, il a pris la décision de démissionner. Il quittera ses fonctions à la fin de son préavis. Je l’informe que je ferais l’impasse sur ses propos déplacés à condition qu’il n’y a plus aucune récrimination sur le sujet durant le temps qui lui reste à faire. Jean a validé le "deal". Il n’a d’ailleurs pas d’autre choix s’il escompte retrouver facilement un autre job.
Je m’aperçois aussi à travers cette expérience qu’il reste encore beaucoup à faire pour normaliser l’homosexualité même si pour le cas d’espèce, il y avait une énorme frustration au départ. Ceci étant, ça n’excuse pas les propos déplacés.
Avec tout cela, mes plans sont chamboulés et pour l’instant, tout se bouscule dans ma tête. J’ai besoin d’un peu de temps et de réflexion pour reprendre la situation en mains.
Marion attendait dans le couloir. Elle a entendu ; la porte était restée entre-ouverte. Elle rentre dans mon bureau juste après que Jean en soit sorti.
- Jean démissionne ?
- Oui, il vient de me donner son préavis. On en reparlera ce soir. Pour l’instant on va terminer la présentation. Tu as pu avoir les éléments de Sarah ?
- Elle m’a tout envoyé par mail. Elle m’a confirmé qu’elle sera bien là ce soir.
On met une dernière touche à la présentation et on se sépare. Marion rentre chez elle et j’en profite aussi pour m’éclipser, direction le magasin de lingerie.
- °° -
Je franchis le seuil de la boutique et je me fais de suite interpeller par la patronne.
- Le masque est obligatoire, monsieur.
Ah oui, j’avais oublié ce détail. Je fouille dans mes poches et eurêka, je trouve ledit objet un peu froissé que je pose sur mon visage. Je me dis aussi qu’il faudra peut-être envisager de le changer. Il doit bien avoir une bonne semaine au moins. La patronne se dirige vers moi.
- Je peux vous aider ?
- Non merci, je vais attendre que Johanna se libère.
La jeune femme est en grande discussion avec une dame d’un certain âge qui ne semble pas trop pressée. J’en profite pour faire le tour de la boutique. Les mannequins sont sexy. Les tenues qu’ils portent sont volages, transparentes, parfois rikiki, parfois amples mais toujours de très bon goûts.
- Bonjour Pascal.
- Bonjour Johanna. Vous vous rappelez toujours du prénom de vos clients lui dis-je avec un grand sourire ?
- Pas tous mais de vous oui. Et vous, vous vous rappelez du prénom de toutes les vendeuses ?
- Que des plus jolies Johanna, les autres j’oublie assez facilement.
Johanna rougit. Elle est chic avec son tailleur sur mesure, ses bas sombres qui donnent un regard interminable sur ses jambes effilées, son chemisier blanc qui laisse entrevoir un soutien-gorge de la maison aux couleurs pastel. Je me demande si sa culotte est assortie à son soutien-gorge.
- Alors, votre amie, a-t-elle apprécié vos achats la dernière fois ?
- Oui très bien et c’est d’ailleurs pourquoi je suis de retour. Je cherche quelque chose d’excentrique, d’humoristique mais de bonne facture. Vous avez ça ?
- Le côté humoristique, vous allez être déçu Pascal. Ce n’est pas trop le genre de la maison, comme vous avez probablement pu voir.
Elle jette un œil furtif vers sa patronne.
- En revanche, pour le côté excentrique, on a des choses. Des culottes ouvertes de très bon goût. Elles peuvent s’ouvrir pour mettre en valeur les fesses ou le sexe. C’est au choix. Tenez, regardez celle-là en fine dentelle transparente. Elle donne libre accès au sexe et les fesses sont très joliment soulignées sous la dentelle. L’effet glamour est garanti. En taille basse, on a deux coloris, noir ou blanc. Elle est très agréable à porter même si généralement, ce type de sous-vêtement n’est pas fait pour être mis toute la journée.
- Ah ? Vous êtes en train de me dire qu’il faut en plus de celle-ci en acheter une autre mais moins fantaisiste ?
- Trois si vous êtes vraiment gourmand Pascal.
- Il est vrai que la gourmandise, c’est mon péché mignon…
Elle éclate de rire en me dévisageant avec un sourire malicieux. Trop coquine la petite Johanna. Trop naturelle aussi. Elle arrive à discuter petites culottes avec un homme comme s'il s'agissait de vin, de voitures ou de tout autre choses futiles.
- Vous n’étiez pas au centre équestre hier soir avec Julie ? Il me semble vous avoir aperçu.
- Vous montez vous aussi Johanna ?
- Oui de temps en temps. Je pratique en dilettante, pour le plaisir uniquement. Mon salaire ne me permet pas trop d’écarts. Mais dimanche prochain, je participerai quand même au concours de sauts d'obstacles en Normandie.
- Mon amie s'y est inscrite elle aussi. On aura peut-être l’occasion de s’y rencontrer.
J’achète un shorty vert pastel qui s’ouvre sur les fesses en tirant sur trois petits nœuds qui font office de fermeture, et un petit dernier où selon Johanna, quand on passe la main on a paraît-il, la sensation qu’il n’y a pas de culotte. Je me languis déjà d’essayer toutes ces combinaisons plutôt prometteuses. Alice n’aura qu’à bien se tenir.
Avec tout cela, je vais encore être en retard à mon cours d’équitation. Julie va me maudire.
- °° -
Dix-huit heures dix. J’arrive ventre à terre au centre équestre. Je me dépêche de sortir de la voiture et mon pied se coince dans la ceinture de sécurité, je m’étale de tout mon long sur le gazon terreux. Julie qui a assisté à la scène, me gratifie d’un énorme sourire sarcastique.
- Voilà ce que c’est que d’être en retard. Ça va Pascal ? Tu ne t’es pas fait mal ?
- Non ça va Julie. Merci. Dis-je en me relevant, vexé de cette mésaventure.
Julie s’est rapprochée de ma voiture. Elle pose une main sur le montant de la portière. Son regard survole mes sièges arrières et tombe sur le sac en papier à l’effigie immanquable de la boutique de lingerie et comble de malchance, certains articles se sont échappés du sac durant le trajet.
- Tiens ! Tu achètes des petites culottes toi ?
- Ben oui, pour mes jolies fesses, il faut bien ça.
- Ah, Monsieur fait dans le fétichisme. Je suis curieuse de voir ça.
J’avoue que Julie commence à m’embarrasser. Mais, je fais bonne figure.
- Tu veux que je te montre ?
- Non, non. Ça ira Pascal. Rejoints-moi dans le manège et elle s’éloigne en gloussant comme poule.
Je retrouve Julie après m'être un peu débarbouillé la chemise.
- Je suis prêt. On peut y aller.
Julie me jette un œil amusé. Elle ne s’en est toujours pas remise.
- Bon on y va ? Insistais-je.
- Excuse-moi, mais les images que j’ai dans la tête sont trop marrantes. Allez, on y va Pascal.
Le professionnalisme de Julie l’a rattrapé. On est parti pour faire des courbes à droite, à gauche, des serpentines et des cercles. Dans l’ensemble ça se passe plutôt bien même si parfois le canasson n’en fait qu’à sa tête. On termine la séance par le curetage des sabots. Je commence à me sentir un peu plus à l’aise et surtout plus serein.
- Demain, on tentera une sortie dans la prairie.
Je sens bien que je l’amuse. C’est surprenant cette intuition masculine. Je remarque qu’elle hésite entre l’envie de séduire et le naturel autoritaire dans laquelle elle se complaît. La jeune femme oscille entre les deux postures, adoptant l’une ou l’autre selon des circonstances qu’elle seule maîtrise. Ce petit jeu, volontaire ou pas, fait qu’on lui porte une attention particulière. C’est probablement sa manière de se démarquer, sa marque de fabrique. En contrepartie, elle devient particulièrement insaisissable. Si je n’avais pas rencontré Alice, par défi je me serais probablement laissé séduire par cette femme juste pour savoir qui mangerait dans la main de qui.
Aussitôt le cours terminé je rentre chez moi prendre une douche vite fait, en profiter pour me changer et retrouver une apparence plus civilisée.
Je saisis une bouteille de champagne bien fraîche dans le réfrigérateur et en avant toute.
Chez Marion, c’est à quinze minutes d’ici. En chemin, je repense à la suggestion d’Alice. Cette proposition de vie commune que nous avons actée de concert m’excite et en même temps je me dis que nous allons peut-être vite en besogne. On se connaît de presque trois semaines et même si nos relations sont aujourd’hui mirifiques, il faut qu’elles tiennent dans la durée, confrontées à l’usure du quotidien.
Le visage d’Alice rayonnant de bonheur apparaît en filigrane dans une fenêtre de mon esprit et balaye avec légèreté toutes mes appréhensions. Je suis rassuré par cette femme volontaire et déterminée. Je suis convaincu que le temps n’a pas prise sur notre amour. J’ai même l’impression de la connaître depuis des siècles et de ne jamais me lasser de sa présence. Je reste persuadé d’avoir pris la bonne décision. D'abord parce que l'idée me séduit au plus haut point et même si j'ai été surpris car je ne m'y attendais pas, vivre avec Alice, maintenant que je caresse cette perspective dans tous les sens, ne peut être autre chose qu'une évidence. Et puis il faut bien se l'avouer, sa proposition m'a fait chaud au cœur, comme une pluie de bonheur si délicieuse que je n'avais pas d'autre choix que d'acquiescer au risque de me fâcher définitivement avec ma conscience. Et d'ailleurs, comment aurait-il pu en être autrement ?
Si l’opération d’Alice ne donnait pas les résultats escomptés, je serais alors au plus près d’elle et dans tous les cas, elle aura besoin de ma présence, de tout mon amour pour mieux supporter son traitement. J'ai conscience qu'elle m'apporte elle aussi quelque chose d'énorme, de magistral. Je ne sais pas mesurer parce que je n'arrive pas à définir précisément. Mais, ce qui est sûr, c'est qu'avec elle je suis un autre homme, un homme comblé, un homme accompli. Je réalise que si la vie était vraiment trop ingrate, sans elle rien ne serait plus pareil. Je m'aperçois avec certitude que tout compte fait, j'ai besoin d'elle au moins autant qu'elle a besoin de moi et c'est probablement cette complémentarité qui fait la solidité de notre amour. Je suis heureux que nos chemins aient réussi à se croiser pour pouvoir s'unir en toute simplicité. Ce n'était pas gagné. Et maintenant, je nous imagine parcourir ensemble avec amusement et complicité notre quotidien et, je sais que chaque soir de mon existence, je prendrai plaisir à lui réserver une petite place pour que sa tête toute chaude puisse venir se poser et s'endormir sur mon torse, juste pour me prouver qu’elle existe.
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