CHAPITRE XIII
Il fait froid pour ne pas dire glacial. Mon bouquet de fleurs à la main, j’avance dans les allées désertes. Le jour n’est pas encore levé et même s’il avait bravé les interdits, la bruine qui se répand inlassablement ne lui donne aucune chance de lumière.
Le gravier dans l’allée crisse sous mes pas mais je n’entends rien. Je ne sais pas où je vais. Je ne sais même pas pourquoi je suis là. Les fleurs n’ont pas d’odeur. Elles sont juste immenses, portées par un grand pot de terre cuite. J’ai la gorge serrée. J’ai peur, non pas de ce qui peut arriver mais de ce que je peux découvrir ici.
Des fleurs, il y en a partout, de toutes les couleurs. Parfois les pots sont renversés. Parfois même et c’est plus affligeant, il n’y a pas de pot. Je m’arrête. J’ai trouvé. Je tremble. Mais, ce n’est pas possible. Non, c’est juste impossible.
Il y a une inscription. Je n‘arrive pas à lire. Je n’ai pas pris mes lunettes et cette bruine qui me poursuit sans cesse. Je m’assois sur le rebord. Il est tout mouillé mais je ne sens rien. Je regarde. Les larmes coulent à flot comme des ruisseaux ensorcelés alimentés par la pluie incessante. De ma gorge sort un immense cri de douleur, un hurlement de détresse, un abîme spatial où les étoiles se mélangent à celles de la voie lactée pour balayer le ciel de toute la souffrance du monde. Ma douleur est telle qu'elle n’est plus mesurable, elle dépasse l'entendement mais personne ne l'entend.
Sur la porte des étoiles, il y en a une que je reconnais parmi toutes. Son visage m’est familier. Je l’ai caressé tant de fois. Il n’y a pas une seule partie que mes lèvres n'ont pas honorée. C’est vrai, elle n’est pas jolie. Elle est juste merveilleuse, magnifique, sereine dans son petit médaillon doré. Je ne peux m’empêcher de caresser le verre avec une mélancolie infinie. Je sens la chaleur de sa peau. Je vois ses cils qu’elle a perdus, ses sourcils qui ne sont plus, ses cheveux qui ont disparu. En dessous, il y a une inscription. J’ai du mal à lire. Je ne discerne pas très bien, je dois me faire vieux :
Alice PARIS
14/09/1990 – 25/11/2020
Je m’approche. Il y a erreur. Je reprends espoir. Tout est encore possible. Il faut juste effacer la dernière date. Alors je m’applique. Le crayon magique peine et les chiffres aussitôt effacés réapparaissent. Je ne vais pas assez vite. Il faut que je sois plus performant. Allez Pascal, fais un effort, tu y es presque. Tu peux le faire. Tu vas y arriver, pour elle, pour toi. Mais … rien n’y fait.
Je suis comme un loup désemparé dans l'oasis de ma souffrance. Chaque cellule de mon corps hurle à la mort. Si je n’arrive pas à effacer, je dois pouvoir écrire ? Oui, c’est la solution et ça marche, mais j’écris quoi ? On n’est pas marié. On le voulait mais on n’a pas eu le temps. C’est important ? Non alors je m’en fous. Ce qui est important, c’est l’instant présent. Alors, je vais l'épouser pour l’éternité, prendre son nom. Je veux être elle, tout comme elle voulait être moi. Je reprends le crayon magique. Je dessine les lettres et les chiffres de notre alliance post mortem.
Pascal PARIS
14/01/198...
Le stylo ne marche plus. Mais c’est quoi ce binz ? Je veux la retrouver, être avec elle. La vie sans elle, c’est comme la mort sans lui. Si l’un manque à l’appel l’autre ne peut plus survivre. Il y a bien une solution pour que je la rejoigne sur son lit éternel ?
J’implore le dieu de l’univers mais il ne m’entend pas. Alors je crie ma douleur sur le toit du monde. Alice, ma chérie, mon amour, viens ! Viens vite. Viens me chercher. Je suis là. Dépêche-toi je n’en peux plus d’attendre.
Une porte s’ouvre. Je suis fébrile, pressé, heureux. Je vais enfin te retrouver mon étoile. Merci ma puce.
Je bascule dans le vide sidéral.
Il fait froid pour ne pas dire glacial. Mon bouquet de fleurs à la main, j’avance dans les allées désertes. Le jour n’est pas encore levé et même s’il avait bravé les interdits, la bruine qui se répand inlassablement ne lui donne aucune chance de lumière.
Le gravier dans l’allée crisse sous mes pas mais je n’entends rien. Je ne sais pas où je vais. Je ne sais même pas pourquoi je suis là. Les fleurs n’ont pas d’odeur. Elles sont juste immenses, portées par un grand pot de terre cuite. J’ai la gorge serrée. J’ai peur, non pas de ce qui peut arriver mais de ce que je peux découvrir ici.
Des fleurs, il y en a partout, de toutes les couleurs. Parfois les pots sont renversés. Parfois même et c’est plus affligeant, il n’y a pas de pot. Je m’arrête. J’ai trouvé. Je tremble. Mais, ce n’est pas possible. Non, c’est juste impossible.
Il y a une inscription. Je n‘arrive pas à lire. Je n’ai pas pris mes lunettes et cette bruine qui me poursuit sans cesse. Je m’assois sur le rebord. Il est tout mouillé mais je ne sens rien. Je regarde. Les larmes coulent à flot comme des ruisseaux ensorcelés alimentés par la pluie incessante. De ma gorge sort un immense cri de douleur, un hurlement de détresse, un abîme spatial où les étoiles se mélangent à celles de la voie lactée pour balayer le ciel de toute la souffrance du monde. Ma douleur est telle qu'elle n’est plus mesurable, elle dépasse l'entendement mais personne ne l'entend.
Sur la porte des étoiles, il y en a une que je reconnais parmi toutes. Son visage m’est familier. Je l’ai caressé tant de fois. Il n’y a pas une seule partie que mes lèvres n'ont pas honorée. C’est vrai, elle n’est pas jolie. Elle est juste merveilleuse, magnifique, sereine dans son petit médaillon doré. Je ne peux m’empêcher de caresser le verre avec une mélancolie infinie. Je sens la chaleur de sa peau. Je vois ses cils qu’elle a perdus, ses sourcils qui ne sont plus, ses cheveux qui ont disparu. En dessous, il y a une inscription. J’ai du mal à lire. Je ne discerne pas très bien, je dois me faire vieux :
Alice PARIS
14/09/1990 – 25/11/2020
Je m’approche. Il y a erreur. Je reprends espoir. Tout est encore possible. Il faut juste effacer la dernière date. Alors je m’applique. Le crayon magique peine et les chiffres aussitôt effacés réapparaissent. Je ne vais pas assez vite. Il faut que je sois plus performant. Allez Pascal, fais un effort, tu y es presque. Tu peux le faire. Tu vas y arriver, pour elle, pour toi. Mais … rien n’y fait.
Je suis comme un loup désemparé dans l'oasis de ma souffrance. Chaque cellule de mon corps hurle à la mort. Si je n’arrive pas à effacer, je dois pouvoir écrire ? Oui, c’est la solution et ça marche, mais j’écris quoi ? On n’est pas marié. On le voulait mais on n’a pas eu le temps. C’est important ? Non alors je m’en fous. Ce qui est important, c’est l’instant présent. Alors, je vais l'épouser pour l’éternité, prendre son nom. Je veux être elle, tout comme elle voulait être moi. Je reprends le crayon magique. Je dessine les lettres et les chiffres de notre alliance post mortem.
Pascal PARIS
14/01/198...
Le stylo ne marche plus. Mais c’est quoi ce binz ? Je veux la retrouver, être avec elle. La vie sans elle, c’est comme la mort sans lui. Si l’un manque à l’appel l’autre ne peut plus survivre. Il y a bien une solution pour que je la rejoigne sur son lit éternel ?
J’implore le dieu de l’univers mais il ne m’entend pas. Alors je crie ma douleur sur le toit du monde. Alice, ma chérie, mon amour, viens ! Viens vite. Viens me chercher. Je suis là. Dépêche-toi je n’en peux plus d’attendre.
Une porte s’ouvre. Je suis fébrile, pressé, heureux. Je vais enfin te retrouver mon étoile. Merci ma puce.
Je bascule dans le vide sidéral.
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