08-01-2024, 04:49 PM
On discuta comme ça encore une bonne heure et je rentrais à la maison. Je fis sortir les loups avec qui je me baladais une bonne partie de l'après-midi. En rentrant je ramassais le linge qui était sec et je repartis en ville acheter de quoi souper. Le barbecue sur la terrasse m'avait fait de l'œil pendant que j'étendais le linge et une envie de côte de bœuf me faisait saliver. Par acquit de conscience je pris aussi une salade verte. Ça irait bien avec les frites au four et les cotes de bœuf.
Tout le monde arriva ensemble. R et R couraient dans tous les sens pour faire des fêtes à tous. Puis ce fut la ruée sur la salle de bain. Les garçons y allèrent tous ensemble.
Hans alla dans la nôtre qui avait sa douche. Il vit le linge plié sur le lit et me fit un bisou.
— C'est gentil d'avoir fait la lessive Bé.
— Je ne savais pas trop quoi faire pour m'occuper et comme j'ai vu que la panière de linge débordait alors je m'en suis occupé.
— Laszlo m'a dit qu'il t'avait vu avec ses profs.
— Oui PJ m'a téléphoné et du coup je suis allé les rejoindre. Il était avec JP qui m'a parlé des fouilles qui ont été faites et de celles à venir. Ça va faire du monde aux Fourches au mois de juin cette année . J'ai plus pensé que j’avais à te dire un truc. Dans 3 semaines je dois aller à Marseille pour une visite médicale pour être réformé définitivement du corps des marins pompiers.
— J'ai cru que tu n'en faisais plus parti depuis longtemps. Je pensais que l'argent qu'ils te versaient tous les mois c'était une pension d’invalidité.
— Non c'était mon salaire. Et justement j'y vais pour définir mon degré de handicap et de là être réformé et après je pense que je toucherai une pension d’invalidité. Je ne sais pas de combien elle sera mais on fera avec.
— Au fait, on fait quoi cet été pour les vacances.
— Je ne pense pas pouvoir prendre plus d'un mois de congé cette année.
— On en parlera avec les jumeaux mais je pense que les 2 semaines de camping sont obligatoires. Tu as envie de faire quoi toi ?
— J'ai pas trop envie de bouger, Hans. Ça ne serait que de moi on se ferait tout le mois de camping. Mais je suppose que les jumeaux vont vouloir aller voir Victoria. Je sais que Nick y va 2 semaines en Aout.
— Dans ce cas pourquoi ne pas les lui confier et faire un mois de camping. Après on pourra inviter du monde à la maison.
— Tu ne veux pas aller voir tes parents et ta famille en Hollande ?
— Je ne sais pas encore mais pourquoi pas. Je pourrais aussi y aller avec les jumeaux. Au fait Bé, un de mes profs m'a branché sur une association qui s'occupe de gamins surdoués et en échec scolaire. Ça se passe en partenariat avec des psy. Il veut que j'y participe et il aimerait aussi que Chip et Gus y aillent aussi.
— Ça c'est toi qui voit avec le planning. Bon je vais préparer le repas. J'avais envie de manger des cotes de bœuf.
— Bonne idée ça. Tu as besoin d’aide ?
— Non ça ira. J'ai juste le four et le barbecue à allumer. Mais si tu pouvais faire la sauce de la salade.
— Ok, je m'en occupe.
Le week-end passa trop rapidement et c'est le cœur gros que je repris la route le dimanche soir.
Dans 2 semaines je reviendrai et après 2 autres semaines c'est eux qui seraient à la maison pour une semaine entière. Je redescendis 2 semaines plus tard à Montpellier et la semaine suivante je me présentais à l'hôpital militaires de Marseille pour y passer des tests.
La première journée fut plus axée sur des tests physiques. Le lendemain matin j'eus droit au réveil à des prises de sang puis dans la foulée un scanner et un IRM puis plus tard des radios. L'après-midi j'eus plusieurs entretiens avec différents médecins.
Le soir après le repas je sortis prendre l’air. Et mes pas me dirigèrent vers les urgences. Une ambulance des pompiers arrivait toutes sirènes hurlantes. Elle stoppa à quelques mètres de moi. Quelques minutes après deux pompiers en sortirent. C'était Tom et un autre que je ne connaissais pas. Ils confièrent leur passager aux infirmiers.
— Hé Tom, ça va ?
Il se retourna vers moi.
— Jeff qu'est-ce-que tu fous là ? Tu es malade ?
On se fit la bise. Il me présenta son collègue.
— Non, je vais bien. Je suis ici pour passer des examens avant d'être réformé définitivement. Comment ça se passe à la caserne ?
On discuta près d'une heure avant qu'il ne reparte en interventions, la radio les ayant appelé. Quand je rentrais, je me fis engueuler par l’infirmière de garde, parce que j'étais parti trop longtemps. Et ce n'est pas le petit sourire narquois que je lui faisais qui la calma. Je lui tournais le dos sans lui répondre et je rentrais dans ma chambre.
Vous êtes déjà tous allé à l'hôpital et vous savez donc que ce n'est pas l'endroit le plus adapté pour se reposer et dormir. Dans la nuit c'est tout un convoi d'ambulances qui arriva. Le téléphone sonnait dans le couloir et personne ne répondait. Excédé, je me levais et j'allais répondre.
— Ça fait un quart d'heure que j'appelle vous attendez quoi pour répondre ?
— Je ne suis pas un des infirmiers de garde. Je suis juste un patient qui en avait marre d'entendre le téléphone sonner.
— Excusez-moi monsieur de m'être emporté contre vous. Si vous voyez les infirmiers vous pouvez leur dire de rappeler les urgences rapidement ?
— Je vais faire le tour du service voir si je les trouve.
— Merci de votre aide. Vous leur dites que c'est très urgent. Et que c'est Stéphane qui les demande.
— Stéphane, j'en ai connu un qui était interne à l'hôpital de Valence quand j'y faisais mes études d’infirmier, j’ai l’impression de reconnaître votre voix. On était aux urgences et on avait fait un rapport de stage qui était remonté jusqu'au directeur.
— Putain, oui, je m'en souviens. Tu es Joris ou Jean-François ?
— Je suis Jeff.
— Ok. Jeff, tu les cherches et tu les trouves. Les connaissant, ils doivent baiser dans une chambre. Tu leur dis qu'il faut qu'il y en ait un des deux qui descende aux urgences de suite et tu rappliques aussi.
-- Hey ! Je suis là en tant que patient.
— On s'en fout, c'est la panique ici.
Je finis par les trouver… en pleine action. Je me fis un malin plaisir à les interrompre et je descendis avec l'infirmière qui m'avait engueulé et qui maintenant me faisait carrément la gueule.
— Jeff tu viens avec moi, on va à l'arrivée des ambulances et on fera le tri. Vous, vous allez aider vos collègues à soigner ceux qui n'ont que des traumatismes bénins.
Bon Jeff, on fait simple. Ceux qu'on peut sauver sans chirurgie lourde on prend, les autres on les expédie dans d'autres hôpitaux. Tous les blocs sont pris et ils auront plus de chance de s'en sortir si on les envoie immédiatement dans un autre hosto que s'ils attendent ici.
— Ok. Il s'est passé quoi pour qu'il y ait tant de blessés d'un coup ?
— Deux autobus dont un à impériale qui se sont renversés et qui, évidemment, allaient bien trop vite.
Je repris vite mes marques et c'est sans état d'âme que je triais les blessés. De temps en temps je relevais le drap qui couvrait un patient sur son visage et les pompiers l'emmenaient à la morgue. Ce n'est que vers 6 heures du matin que ça se calma. Le dernier patient à arriver était un jeune de 15 ou 16 ans en état de choc, il était nu sous des serviettes et les cheveux mouillés. À première vue il n'avait rien de grave physiquement mais Tom qui me l’amenait me dit qu'il était resté ''enterré' vivant'' sous les corps de ses amis qui avaient été gravement mutilés et qu'il l'avait mis nu et lavé sommairement parce qu'il était couvert du sang et d’autres restes de ses potes.
— Stéphane, tu peux venir s'il te plait.
Je lui résumais ce que Tom venait de me dire.
— Tu le redouches convenablement et quand c'est fait, tu le montes en psy.
— Ok, je m'en occupe.
Salut je suis Jean-François et toi comment tu t’appelles ?
Pas de réponse. Il avait une gourmette au poignet. J'y lus Alexis.
— Bon Alexis, tu arrives à marcher où je vais chercher un fauteuil ?
Devant son mutisme j'allais chercher un fauteuil où je le fis asseoir et dès que je trouvais une salle de bain je l'installais sous la douche. Je réglais l'eau et je commençais à le mouiller. Il ne réagissait toujours pas. Je pris un flacon de Bétadine et je lui en versais dessus. De voir la couleur orangée le tétanisa.
-- Alexis, Alexis… regarde ma main. J'y verse du produit, tu vois, il est rouge. Ce n'est pas du sang mais du savon que tu vois.
— Mes amis… mes amis… ils sont morts… coupés en deux… et j'ai tout reçu sur moi.
— Calme toi Alexis, je vais te rincer ferme les yeux.
— Non frotte moi encore. J'ai du sang de partout encore.
— Ok, je te rince d'abord et si tu veux tu te relaveras après encore une fois.
Il se laissa faire mais il voulut se laver une autre fois. Il se frottait si fort qu'il se griffait avec ses ongles.
— C'est bon Alexis tu es propre. Ça suffit comme ça. Je te laisse te rincer pendant que je vais vite te chercher un drap pour t'essuyer et une blouse pour te couvrir. Après je vais te monter dans une chambre où on te donnera quelque chose pour te calmer un peu.
Stéphane avait prévenu le service et dès mon arrivée il fut pris en charge par un infirmier qui lui donna de quoi le faire dormir. Je redescendis aux urgences, je pris congé de Stéphane qui me remercia de mon aide et je retournais à ma chambre. Je me fis copieusement engueuler par une des infirmières du matin, parce qu'ils me cherchaient de partout. Je dus lui expliquer où j’étais – au changement d’équipe, ceux de nuit n’ayant pas jugé utile de le leur dire, comme par hasard.
— Je crois que j'ai gaffé grave, là. Pour me faire pardonner je t'offre des croissants et du café tout frais, ça te va ?
— Si tu me prends par les sentiments, alors tu es toute pardonnée.
— Au fait, tu as rendez-vous à 10 heures avec le toubib. On viendra te chercher.
— Après le petit-déjeuner je voudrais prendre une douche et me reposer une heure, c'est possible ?
— Oui, tu n'auras qu'à faire comme tu as envie. Ferme la porte de la salle de bain à clef parce que j'en connais quelques-unes qui vont vouloir entrer quand tu y seras. Hé, hé !
— Mais c'est quoi cet hôpital ? C'est un baisodrome !
— Faut pas abuser non plus mais c'est que tu es plutôt bel homme.
-- Ha, ha, ha ! Merci du compliment mais je suis pris et fidèle ¡
À 10 heures le toubib vint me chercher et me conduisit dans son bureau. Il me fit asseoir et consulta le dossier de mes examens.
— Bon, Jean-François je ne vais pas y aller par quatre chemins. Vous êtes en parfaite santé. Mais, lors de votre scanner, on a repéré une petite tache noire au niveau de votre poumon blessé et ça nous inquiète. On suppose qu'il s'agit d'un éclat de la balle qui vous avait touché et par sécurité on voudrait vous l’enlever.
— C'est à dire ?
— Il faudrait vous enlever l'équivalent d'un morceau de sucre de poumon. D'ailleurs votre poumon, même s'il a été amputé s'est bien développé et à presque totalement repris toute votre cage thoracique. Vous faites beaucoup de sport je suppose ?
— Ça va, je m’entretiens. Je vais être arrêté combien de temps si vous m’opérez ?
— Entre trois semaines et un mois. Et vous n'aurez pas une grosse balafre comme la première fois, on vous fera juste trois trous et vous ne resterez hospitalisé que quelques jours. Je vous propose de vous opérer la semaine prochaine.
— Ça ne peut pas attendre, docteur ?
— Ce n'est pas une urgence vitale, donc oui, ça peut attendre un peu mais pas des années, pourquoi ?
— Mes fils sont à la fac de Montpellier et ils seront en vacances la semaine prochaine et je voudrais profiter d'eux et ne me faire opérer qu’après. Il faut aussi que je m'organise pour le boulot.
— Si vous voulez je peux aussi vous opérer sur Montpellier, je bosse en alternance entre ici et le CHU. Ça ne me pose donc pas de problème. Et comme ça vos fils pourront venir vous voir.
— Je préfère faire comme ça, oui.
— Je vous enverrai un mail pour vous dire les dates disponibles. Et je vais demander qu'on vous fasse des prises de sang pour voir si vous avez des traces de saturnisme.
— Par contre, docteur, en plus d’un contrôle de suivi, j'étais venu pour un examen afin d'obtenir ma réforme définitive du corps des marins pompiers de Marseille. Ça devient quoi ?
— Je vais leur envoyer mon rapport en disant qu'il faut vous enlever un autre bout de poumon et il faudra repasser en commission quand vous irez mieux. Et vous serez sans nul doute réformé définitivement. Je participe souvent à ce genre de commissions et comme il s'agit d'un ''accident'' de travail vous toucherez votre salaire complet jusqu'à ce que vous soyez à la retraite. Je vous prépare vos documents pour votre sortie et l'infirmière vous les apportera.
— Je vous remercie docteur et j'attends votre mail.
On se serra la main et une heure plus tard je quittais l'hôpital et rentrais aux Fourches. Je m'arrêtais chez mes grands-parents et je leur fis un résumé rapide des trois jours sans leur parler de l'opération que je devais subir. Ça ne servait à rien de leur faire faire du souci à l’avance. J'en parlerai ce soir à mes parents de vive voix. Bien sur ma grand-mère me garda à manger et me donna même de quoi souper puis j'allais à la carrière pour tenir mes parents au courant. Il y avait mes parents ainsi que mon oncle et ma tante au bureau.
108
Tout le monde arriva ensemble. R et R couraient dans tous les sens pour faire des fêtes à tous. Puis ce fut la ruée sur la salle de bain. Les garçons y allèrent tous ensemble.
Hans alla dans la nôtre qui avait sa douche. Il vit le linge plié sur le lit et me fit un bisou.
— C'est gentil d'avoir fait la lessive Bé.
— Je ne savais pas trop quoi faire pour m'occuper et comme j'ai vu que la panière de linge débordait alors je m'en suis occupé.
— Laszlo m'a dit qu'il t'avait vu avec ses profs.
— Oui PJ m'a téléphoné et du coup je suis allé les rejoindre. Il était avec JP qui m'a parlé des fouilles qui ont été faites et de celles à venir. Ça va faire du monde aux Fourches au mois de juin cette année . J'ai plus pensé que j’avais à te dire un truc. Dans 3 semaines je dois aller à Marseille pour une visite médicale pour être réformé définitivement du corps des marins pompiers.
— J'ai cru que tu n'en faisais plus parti depuis longtemps. Je pensais que l'argent qu'ils te versaient tous les mois c'était une pension d’invalidité.
— Non c'était mon salaire. Et justement j'y vais pour définir mon degré de handicap et de là être réformé et après je pense que je toucherai une pension d’invalidité. Je ne sais pas de combien elle sera mais on fera avec.
— Au fait, on fait quoi cet été pour les vacances.
— Je ne pense pas pouvoir prendre plus d'un mois de congé cette année.
— On en parlera avec les jumeaux mais je pense que les 2 semaines de camping sont obligatoires. Tu as envie de faire quoi toi ?
— J'ai pas trop envie de bouger, Hans. Ça ne serait que de moi on se ferait tout le mois de camping. Mais je suppose que les jumeaux vont vouloir aller voir Victoria. Je sais que Nick y va 2 semaines en Aout.
— Dans ce cas pourquoi ne pas les lui confier et faire un mois de camping. Après on pourra inviter du monde à la maison.
— Tu ne veux pas aller voir tes parents et ta famille en Hollande ?
— Je ne sais pas encore mais pourquoi pas. Je pourrais aussi y aller avec les jumeaux. Au fait Bé, un de mes profs m'a branché sur une association qui s'occupe de gamins surdoués et en échec scolaire. Ça se passe en partenariat avec des psy. Il veut que j'y participe et il aimerait aussi que Chip et Gus y aillent aussi.
— Ça c'est toi qui voit avec le planning. Bon je vais préparer le repas. J'avais envie de manger des cotes de bœuf.
— Bonne idée ça. Tu as besoin d’aide ?
— Non ça ira. J'ai juste le four et le barbecue à allumer. Mais si tu pouvais faire la sauce de la salade.
— Ok, je m'en occupe.
Le week-end passa trop rapidement et c'est le cœur gros que je repris la route le dimanche soir.
Dans 2 semaines je reviendrai et après 2 autres semaines c'est eux qui seraient à la maison pour une semaine entière. Je redescendis 2 semaines plus tard à Montpellier et la semaine suivante je me présentais à l'hôpital militaires de Marseille pour y passer des tests.
La première journée fut plus axée sur des tests physiques. Le lendemain matin j'eus droit au réveil à des prises de sang puis dans la foulée un scanner et un IRM puis plus tard des radios. L'après-midi j'eus plusieurs entretiens avec différents médecins.
Le soir après le repas je sortis prendre l’air. Et mes pas me dirigèrent vers les urgences. Une ambulance des pompiers arrivait toutes sirènes hurlantes. Elle stoppa à quelques mètres de moi. Quelques minutes après deux pompiers en sortirent. C'était Tom et un autre que je ne connaissais pas. Ils confièrent leur passager aux infirmiers.
— Hé Tom, ça va ?
Il se retourna vers moi.
— Jeff qu'est-ce-que tu fous là ? Tu es malade ?
On se fit la bise. Il me présenta son collègue.
— Non, je vais bien. Je suis ici pour passer des examens avant d'être réformé définitivement. Comment ça se passe à la caserne ?
On discuta près d'une heure avant qu'il ne reparte en interventions, la radio les ayant appelé. Quand je rentrais, je me fis engueuler par l’infirmière de garde, parce que j'étais parti trop longtemps. Et ce n'est pas le petit sourire narquois que je lui faisais qui la calma. Je lui tournais le dos sans lui répondre et je rentrais dans ma chambre.
Vous êtes déjà tous allé à l'hôpital et vous savez donc que ce n'est pas l'endroit le plus adapté pour se reposer et dormir. Dans la nuit c'est tout un convoi d'ambulances qui arriva. Le téléphone sonnait dans le couloir et personne ne répondait. Excédé, je me levais et j'allais répondre.
— Ça fait un quart d'heure que j'appelle vous attendez quoi pour répondre ?
— Je ne suis pas un des infirmiers de garde. Je suis juste un patient qui en avait marre d'entendre le téléphone sonner.
— Excusez-moi monsieur de m'être emporté contre vous. Si vous voyez les infirmiers vous pouvez leur dire de rappeler les urgences rapidement ?
— Je vais faire le tour du service voir si je les trouve.
— Merci de votre aide. Vous leur dites que c'est très urgent. Et que c'est Stéphane qui les demande.
— Stéphane, j'en ai connu un qui était interne à l'hôpital de Valence quand j'y faisais mes études d’infirmier, j’ai l’impression de reconnaître votre voix. On était aux urgences et on avait fait un rapport de stage qui était remonté jusqu'au directeur.
— Putain, oui, je m'en souviens. Tu es Joris ou Jean-François ?
— Je suis Jeff.
— Ok. Jeff, tu les cherches et tu les trouves. Les connaissant, ils doivent baiser dans une chambre. Tu leur dis qu'il faut qu'il y en ait un des deux qui descende aux urgences de suite et tu rappliques aussi.
-- Hey ! Je suis là en tant que patient.
— On s'en fout, c'est la panique ici.
Je finis par les trouver… en pleine action. Je me fis un malin plaisir à les interrompre et je descendis avec l'infirmière qui m'avait engueulé et qui maintenant me faisait carrément la gueule.
— Jeff tu viens avec moi, on va à l'arrivée des ambulances et on fera le tri. Vous, vous allez aider vos collègues à soigner ceux qui n'ont que des traumatismes bénins.
Bon Jeff, on fait simple. Ceux qu'on peut sauver sans chirurgie lourde on prend, les autres on les expédie dans d'autres hôpitaux. Tous les blocs sont pris et ils auront plus de chance de s'en sortir si on les envoie immédiatement dans un autre hosto que s'ils attendent ici.
— Ok. Il s'est passé quoi pour qu'il y ait tant de blessés d'un coup ?
— Deux autobus dont un à impériale qui se sont renversés et qui, évidemment, allaient bien trop vite.
Je repris vite mes marques et c'est sans état d'âme que je triais les blessés. De temps en temps je relevais le drap qui couvrait un patient sur son visage et les pompiers l'emmenaient à la morgue. Ce n'est que vers 6 heures du matin que ça se calma. Le dernier patient à arriver était un jeune de 15 ou 16 ans en état de choc, il était nu sous des serviettes et les cheveux mouillés. À première vue il n'avait rien de grave physiquement mais Tom qui me l’amenait me dit qu'il était resté ''enterré' vivant'' sous les corps de ses amis qui avaient été gravement mutilés et qu'il l'avait mis nu et lavé sommairement parce qu'il était couvert du sang et d’autres restes de ses potes.
— Stéphane, tu peux venir s'il te plait.
Je lui résumais ce que Tom venait de me dire.
— Tu le redouches convenablement et quand c'est fait, tu le montes en psy.
— Ok, je m'en occupe.
Salut je suis Jean-François et toi comment tu t’appelles ?
Pas de réponse. Il avait une gourmette au poignet. J'y lus Alexis.
— Bon Alexis, tu arrives à marcher où je vais chercher un fauteuil ?
Devant son mutisme j'allais chercher un fauteuil où je le fis asseoir et dès que je trouvais une salle de bain je l'installais sous la douche. Je réglais l'eau et je commençais à le mouiller. Il ne réagissait toujours pas. Je pris un flacon de Bétadine et je lui en versais dessus. De voir la couleur orangée le tétanisa.
-- Alexis, Alexis… regarde ma main. J'y verse du produit, tu vois, il est rouge. Ce n'est pas du sang mais du savon que tu vois.
— Mes amis… mes amis… ils sont morts… coupés en deux… et j'ai tout reçu sur moi.
— Calme toi Alexis, je vais te rincer ferme les yeux.
— Non frotte moi encore. J'ai du sang de partout encore.
— Ok, je te rince d'abord et si tu veux tu te relaveras après encore une fois.
Il se laissa faire mais il voulut se laver une autre fois. Il se frottait si fort qu'il se griffait avec ses ongles.
— C'est bon Alexis tu es propre. Ça suffit comme ça. Je te laisse te rincer pendant que je vais vite te chercher un drap pour t'essuyer et une blouse pour te couvrir. Après je vais te monter dans une chambre où on te donnera quelque chose pour te calmer un peu.
Stéphane avait prévenu le service et dès mon arrivée il fut pris en charge par un infirmier qui lui donna de quoi le faire dormir. Je redescendis aux urgences, je pris congé de Stéphane qui me remercia de mon aide et je retournais à ma chambre. Je me fis copieusement engueuler par une des infirmières du matin, parce qu'ils me cherchaient de partout. Je dus lui expliquer où j’étais – au changement d’équipe, ceux de nuit n’ayant pas jugé utile de le leur dire, comme par hasard.
— Je crois que j'ai gaffé grave, là. Pour me faire pardonner je t'offre des croissants et du café tout frais, ça te va ?
— Si tu me prends par les sentiments, alors tu es toute pardonnée.
— Au fait, tu as rendez-vous à 10 heures avec le toubib. On viendra te chercher.
— Après le petit-déjeuner je voudrais prendre une douche et me reposer une heure, c'est possible ?
— Oui, tu n'auras qu'à faire comme tu as envie. Ferme la porte de la salle de bain à clef parce que j'en connais quelques-unes qui vont vouloir entrer quand tu y seras. Hé, hé !
— Mais c'est quoi cet hôpital ? C'est un baisodrome !
— Faut pas abuser non plus mais c'est que tu es plutôt bel homme.
-- Ha, ha, ha ! Merci du compliment mais je suis pris et fidèle ¡
À 10 heures le toubib vint me chercher et me conduisit dans son bureau. Il me fit asseoir et consulta le dossier de mes examens.
— Bon, Jean-François je ne vais pas y aller par quatre chemins. Vous êtes en parfaite santé. Mais, lors de votre scanner, on a repéré une petite tache noire au niveau de votre poumon blessé et ça nous inquiète. On suppose qu'il s'agit d'un éclat de la balle qui vous avait touché et par sécurité on voudrait vous l’enlever.
— C'est à dire ?
— Il faudrait vous enlever l'équivalent d'un morceau de sucre de poumon. D'ailleurs votre poumon, même s'il a été amputé s'est bien développé et à presque totalement repris toute votre cage thoracique. Vous faites beaucoup de sport je suppose ?
— Ça va, je m’entretiens. Je vais être arrêté combien de temps si vous m’opérez ?
— Entre trois semaines et un mois. Et vous n'aurez pas une grosse balafre comme la première fois, on vous fera juste trois trous et vous ne resterez hospitalisé que quelques jours. Je vous propose de vous opérer la semaine prochaine.
— Ça ne peut pas attendre, docteur ?
— Ce n'est pas une urgence vitale, donc oui, ça peut attendre un peu mais pas des années, pourquoi ?
— Mes fils sont à la fac de Montpellier et ils seront en vacances la semaine prochaine et je voudrais profiter d'eux et ne me faire opérer qu’après. Il faut aussi que je m'organise pour le boulot.
— Si vous voulez je peux aussi vous opérer sur Montpellier, je bosse en alternance entre ici et le CHU. Ça ne me pose donc pas de problème. Et comme ça vos fils pourront venir vous voir.
— Je préfère faire comme ça, oui.
— Je vous enverrai un mail pour vous dire les dates disponibles. Et je vais demander qu'on vous fasse des prises de sang pour voir si vous avez des traces de saturnisme.
— Par contre, docteur, en plus d’un contrôle de suivi, j'étais venu pour un examen afin d'obtenir ma réforme définitive du corps des marins pompiers de Marseille. Ça devient quoi ?
— Je vais leur envoyer mon rapport en disant qu'il faut vous enlever un autre bout de poumon et il faudra repasser en commission quand vous irez mieux. Et vous serez sans nul doute réformé définitivement. Je participe souvent à ce genre de commissions et comme il s'agit d'un ''accident'' de travail vous toucherez votre salaire complet jusqu'à ce que vous soyez à la retraite. Je vous prépare vos documents pour votre sortie et l'infirmière vous les apportera.
— Je vous remercie docteur et j'attends votre mail.
On se serra la main et une heure plus tard je quittais l'hôpital et rentrais aux Fourches. Je m'arrêtais chez mes grands-parents et je leur fis un résumé rapide des trois jours sans leur parler de l'opération que je devais subir. Ça ne servait à rien de leur faire faire du souci à l’avance. J'en parlerai ce soir à mes parents de vive voix. Bien sur ma grand-mère me garda à manger et me donna même de quoi souper puis j'allais à la carrière pour tenir mes parents au courant. Il y avait mes parents ainsi que mon oncle et ma tante au bureau.
108