14-06-2023, 10:56 PM
Chapitre 22
Dans l'auberge.
Plus d'une demi-heure d'attente pour un repas exécrable, il s'agit d'une arnaque flagrante. Le seul point positif est que l'aubergiste semble si ailleurs qu'il en oublie de se faire payer. C'est pour cette raison qu'Evran se contient, bien que l'idée de dire ses quatre vérités à ce bonhomme le démange fortement.
Alors qu'il s'apprête à quitter la table, une jeune femme brune s'assied face à lui.
- Bonjour... dit-elle, avec un sourire avenant.
- Salut. Vous êtes la première à ne pas m'ignorer.
- Je sais, les gens d'ici ne sont pas très accueillants... Que viens-tu faire ici ?
- Je cherche un ami mais ce ne sont pas les villageois qui vont me renseigner.
- Pourquoi dites-vous ça ?
- Regardez autour de vous, ils sont tous complètement vides... l'aubergiste a mis plus d'assaisonnement que de viande dans mon assiette et l'homme au coin du mur lit son livre à l'envers. Sans parler du vieux dans mon dos qui touille sa soupe depuis vingt minutes, ainsi que la femme de l'aubergiste qui nettoie la même table depuis mon arrivée. Et puis tous se comportent comme si je n'existais pas.
- Pas moi.
- C'est pourquoi je vous trouve louche, rétorque Evran, désarmant de franchise, en la fixant de son regard le plus sérieux.
Les choses se gâtent pour la jeune femme, qui comptait aborder le beau brun et le mettre à l'aise, afin d'en apprendre plus sur lui et éventuellement sur l'hôte de Nurmiyax, avant de le tuer. Mais son idée première ne peut aboutir, étant donné sa méfiance. Sous la table, Thanya dégaine discrètement sa dague et s'apprête à bondir pour l'assassiner mais Evran n'est pas dupe. Il se lève brusquement en renversant la table contre elle.
Lorsqu'elle se relève, le jeune homme pointe son arme blanche vers elle. Thanya lance un regard vers la sienne, qui gît à quelques pas. Le gibier est devenu le chasseur.
- N'y pense même pas, menace Evran.
- Très bien, tu m'as eu. Je capitule.
- Pourquoi vouloir me tuer ? Et comment se fait-il que personne ne réagit ? répondez !
- Inutile, mon amour... lance une voix que l'autochtone reconnaîtrait entre mille. Je vais tout t'expliquer.
Il tourne légèrement la tête et aperçoit Justin dans l'encadrement de la porte. Il sourit mais préfère rester concentré sur sa captive.
- Tu peux la laisser, elle ne te fera aucun mal.
Evran s'éloigne de Thanya, en confisquant son arme au passage. S'il a encore quelques doutes quant au fait que son homme soit tout à fait lui-même, ils sont balayés lorsque celui-ci lui lance un regard. Ce regard dans lequel l'amour s'échappe pour lui transpercer l'âme.
Il s'approche de lui et l'embrasse avec volupté. À peine leurs lèvres se séparent, qu'Evran reçoit un violent coup de genou au ventre.
Le jeune homme hurle de douleur, complètement plié par ce coup aussi puissant qu'inattendu. Il relève la tête et comprend tout. Le fameux regard n'était pas trompeur mais il ne lui était tout simplement pas destiné.
- Tu n'es pas Justin... souffle-il, d'une voix rauque.
- Plus maintenant, je suis Nurmiyax ! lance l'autre, avant de sourire, comme pour se gausser de son machiavélisme.
- Tuons-le, maintenant. Il m'a fait mal ! propose Thanya.
- Pas de précipitation, ma chère. Je lui ai promis une explication et je suis un valvor d'honneur. Suivez-moi tous les deux !
Ils quittent la taverne et traversent une partie du village, comme dans l'auberge où personne n'a réagi, tous restent de marbre, comme si ce qui arrivait était d'une banalité affligeante. Nurmiyax sourit déjà à l'idée de ce que va être la terreur d'Evran, lorsqu'il va le rencontrer.
Ils entrent dans une maison, puis sans un mot, le valvor désigne un trou béant, accessible par une échelle. Une fois à l'intérieur, les yeux d'Evran s'écarquillent. Une armée de valvors en sommeil se trouve entassée ici, prête à déferler sur le monde.
Nurmiyax envoie une onde de choc à l'aide de son pouvoir et toutes les consciences de l'armée s'éveillent et les mots à l'égard des humains ne sont pas tendres.
- Surveille-le bien, je ne veux pas d'incident pendant qu'il sera là...
- Qui, exactement ? demande Thanya, qui craint que le valvor ne commette une folie.
- Aucun humain n'est digne de prononcer son nom, même toi.
Fébrile, le valvor plaque ses paumes sur la montagne de cristal, qui vibre un instant. Il sent de nouveau toute la puissance du cristal et peine à la maîtriser tant ce qu'il s'apprête à faire est démentiel. Après quelques instants, il dirige cette formidable énergie invisible droit au cœur du château de Shyna. Là où est emmuré le très puissant Morgal.
De crainte d'être anéanti dans la seconde qui suit, Nurmiyax renonce à son emprise lorsqu'il sent le dieu valvor sortir de sa léthargie, pour répondre à son appel.
Morgal le Chaos se matérialise dans la caverne, sous forme d'illusion. Toutes les consciences valvors font silence devant ce prodige. Nurmiyax fait discrètement signe aux humains de se prosterner, pendant que lui-même s'exécute.
Morgal est très impressionnant et atteint presque les trois mètres. Son armure noire ornée de pics d'acier et sa cape rouge en lambeaux lui confère un aspect à la fois noble et sanguinaire. Ses yeux rouge vifs scintillent dans la caverne, renforçant sa présence. Evran se sent transpercé par son regard, lorsque celui-ci se pose sur lui. Incapable de le soutenir plus de quelques secondes (cela ne serait d'ailleurs pas très prudent) Evran verrouille son regard sur un petit caillou, à ses pied.
- Qui ose ?
Ce murmure pourtant à peine audible est entendu par tous, tant la voix est grave. Nurmiyax lui-même perd de son assurance et déglutit.
- Morgal, dieu du Chaos et seigneur de Tout, je me présente devant vous en tant qu'humble serviteur et je vous demande à genoux votre attention. Supplie obséquieusement le valvor, en prenant sur lui pour oser regarder son maître dans les yeux.
- Qui es-tu, valvor ? demande le Roi Noir, qui paraît satisfait de cet accueil.
- On me nomme Nurmiyax d'Elosed. J'ai eu l'honneur d'assister le prophète Grohen pendant près de deux siècles en tant que sous-commandant. J'ai vu de mes yeux des choses jusqu'alors inconnues de notre monde. Certaines ont bien affecté Sterrn, votre fief. Ce sont des faits que vous devez connaître, il en va de mon honneur de seigneur valvor.
Dans l'auberge.
Plus d'une demi-heure d'attente pour un repas exécrable, il s'agit d'une arnaque flagrante. Le seul point positif est que l'aubergiste semble si ailleurs qu'il en oublie de se faire payer. C'est pour cette raison qu'Evran se contient, bien que l'idée de dire ses quatre vérités à ce bonhomme le démange fortement.
Alors qu'il s'apprête à quitter la table, une jeune femme brune s'assied face à lui.
- Bonjour... dit-elle, avec un sourire avenant.
- Salut. Vous êtes la première à ne pas m'ignorer.
- Je sais, les gens d'ici ne sont pas très accueillants... Que viens-tu faire ici ?
- Je cherche un ami mais ce ne sont pas les villageois qui vont me renseigner.
- Pourquoi dites-vous ça ?
- Regardez autour de vous, ils sont tous complètement vides... l'aubergiste a mis plus d'assaisonnement que de viande dans mon assiette et l'homme au coin du mur lit son livre à l'envers. Sans parler du vieux dans mon dos qui touille sa soupe depuis vingt minutes, ainsi que la femme de l'aubergiste qui nettoie la même table depuis mon arrivée. Et puis tous se comportent comme si je n'existais pas.
- Pas moi.
- C'est pourquoi je vous trouve louche, rétorque Evran, désarmant de franchise, en la fixant de son regard le plus sérieux.
Les choses se gâtent pour la jeune femme, qui comptait aborder le beau brun et le mettre à l'aise, afin d'en apprendre plus sur lui et éventuellement sur l'hôte de Nurmiyax, avant de le tuer. Mais son idée première ne peut aboutir, étant donné sa méfiance. Sous la table, Thanya dégaine discrètement sa dague et s'apprête à bondir pour l'assassiner mais Evran n'est pas dupe. Il se lève brusquement en renversant la table contre elle.
Lorsqu'elle se relève, le jeune homme pointe son arme blanche vers elle. Thanya lance un regard vers la sienne, qui gît à quelques pas. Le gibier est devenu le chasseur.
- N'y pense même pas, menace Evran.
- Très bien, tu m'as eu. Je capitule.
- Pourquoi vouloir me tuer ? Et comment se fait-il que personne ne réagit ? répondez !
- Inutile, mon amour... lance une voix que l'autochtone reconnaîtrait entre mille. Je vais tout t'expliquer.
Il tourne légèrement la tête et aperçoit Justin dans l'encadrement de la porte. Il sourit mais préfère rester concentré sur sa captive.
- Tu peux la laisser, elle ne te fera aucun mal.
Evran s'éloigne de Thanya, en confisquant son arme au passage. S'il a encore quelques doutes quant au fait que son homme soit tout à fait lui-même, ils sont balayés lorsque celui-ci lui lance un regard. Ce regard dans lequel l'amour s'échappe pour lui transpercer l'âme.
Il s'approche de lui et l'embrasse avec volupté. À peine leurs lèvres se séparent, qu'Evran reçoit un violent coup de genou au ventre.
Le jeune homme hurle de douleur, complètement plié par ce coup aussi puissant qu'inattendu. Il relève la tête et comprend tout. Le fameux regard n'était pas trompeur mais il ne lui était tout simplement pas destiné.
- Tu n'es pas Justin... souffle-il, d'une voix rauque.
- Plus maintenant, je suis Nurmiyax ! lance l'autre, avant de sourire, comme pour se gausser de son machiavélisme.
- Tuons-le, maintenant. Il m'a fait mal ! propose Thanya.
- Pas de précipitation, ma chère. Je lui ai promis une explication et je suis un valvor d'honneur. Suivez-moi tous les deux !
Ils quittent la taverne et traversent une partie du village, comme dans l'auberge où personne n'a réagi, tous restent de marbre, comme si ce qui arrivait était d'une banalité affligeante. Nurmiyax sourit déjà à l'idée de ce que va être la terreur d'Evran, lorsqu'il va le rencontrer.
Ils entrent dans une maison, puis sans un mot, le valvor désigne un trou béant, accessible par une échelle. Une fois à l'intérieur, les yeux d'Evran s'écarquillent. Une armée de valvors en sommeil se trouve entassée ici, prête à déferler sur le monde.
Nurmiyax envoie une onde de choc à l'aide de son pouvoir et toutes les consciences de l'armée s'éveillent et les mots à l'égard des humains ne sont pas tendres.
- Surveille-le bien, je ne veux pas d'incident pendant qu'il sera là...
- Qui, exactement ? demande Thanya, qui craint que le valvor ne commette une folie.
- Aucun humain n'est digne de prononcer son nom, même toi.
Fébrile, le valvor plaque ses paumes sur la montagne de cristal, qui vibre un instant. Il sent de nouveau toute la puissance du cristal et peine à la maîtriser tant ce qu'il s'apprête à faire est démentiel. Après quelques instants, il dirige cette formidable énergie invisible droit au cœur du château de Shyna. Là où est emmuré le très puissant Morgal.
De crainte d'être anéanti dans la seconde qui suit, Nurmiyax renonce à son emprise lorsqu'il sent le dieu valvor sortir de sa léthargie, pour répondre à son appel.
Morgal le Chaos se matérialise dans la caverne, sous forme d'illusion. Toutes les consciences valvors font silence devant ce prodige. Nurmiyax fait discrètement signe aux humains de se prosterner, pendant que lui-même s'exécute.
Morgal est très impressionnant et atteint presque les trois mètres. Son armure noire ornée de pics d'acier et sa cape rouge en lambeaux lui confère un aspect à la fois noble et sanguinaire. Ses yeux rouge vifs scintillent dans la caverne, renforçant sa présence. Evran se sent transpercé par son regard, lorsque celui-ci se pose sur lui. Incapable de le soutenir plus de quelques secondes (cela ne serait d'ailleurs pas très prudent) Evran verrouille son regard sur un petit caillou, à ses pied.
- Qui ose ?
Ce murmure pourtant à peine audible est entendu par tous, tant la voix est grave. Nurmiyax lui-même perd de son assurance et déglutit.
- Morgal, dieu du Chaos et seigneur de Tout, je me présente devant vous en tant qu'humble serviteur et je vous demande à genoux votre attention. Supplie obséquieusement le valvor, en prenant sur lui pour oser regarder son maître dans les yeux.
- Qui es-tu, valvor ? demande le Roi Noir, qui paraît satisfait de cet accueil.
- On me nomme Nurmiyax d'Elosed. J'ai eu l'honneur d'assister le prophète Grohen pendant près de deux siècles en tant que sous-commandant. J'ai vu de mes yeux des choses jusqu'alors inconnues de notre monde. Certaines ont bien affecté Sterrn, votre fief. Ce sont des faits que vous devez connaître, il en va de mon honneur de seigneur valvor.