Chapitre 33
Dans le palais du Seigneur Frégast, sur le plateau de la Base-Noyau.
- Que veux-tu, Richard ?
- L'équipe d'Anthony Fournier est maintenant à portée de radio, monseigneur.
- Fais-le toi-même, j'ai des choses plus urgentes à régler ! répond le seigneur Frégast.
- Mais, monseigneur, Fournier n'a pas été mis au courant du plan visant à éliminer les personnes gênantes...
- Comment ça ? Tu as négligé ton travail !
- Je vous en prie, pardonnez-moi ! s'excuse Richard. Je n'ai pas eu une minute à moi ces dernier temps et son cas m'est complètement sorti de la tête ! J'ai...
- Ça suffit ! Va-t'en ! Je vais m'en charger. J'ai suivi de près ses fait et gestes quand il était sur Terre. Étant donné son arrivisme, il trahira ses amis sans hésiter, vu la récompense à la clé !
--- --- ---
Dans le zeppelin de Franz, au-dessus des plaines de Kyzam.
- Regardez ! crie Justin, en montrant du doigt un troupeau de brachiosaures, qu'il aperçoit depuis la vitre du zeppelin.
Les animaux s'étalent dans la vallée en contrebas, ils sont une dizaine de spécimens, le plus important mesurant un peu plus de douze mètres de haut.
Leur couleur, par endroit verte ou grisâtre, la majesté et la taille de ces bêtes laissent les voyageurs pantois.
- Ils sont gigantesques... Souffle Anthony, impressionné.
- Jamais je n'ai vu quoi que ce soit d'aussi gros... Commente Evran, plus habitué aux petites créatures de la forêt.
- C'est pas vers Syl qu'ils peuvent se promener ! répond Justin, sans détacher ses yeux du spectacle.
- Rien que pour voir ça, ça valait le déplacement et les désagréments ! ajoute Franz, le pilote.
Comme à chaque fois qu'une phrase de ce genre est prononcée, Justin sent se former une boule dans sa gorge. Malgré le temps, il lui est impossible de se faire à l'idée d'une rupture définitive avec sa famille.
Il est sorti de ses pensées par Anthony qui le bouscule légèrement en allant dans le fond de la cabine, une radio à la main.
Une fois à l'écart, Anthony s'adresse à la voix à l'autre bout du fil.
- Je vous reçois cinq sur cinq.
- Anthony Fournier, je suis ravi de faire enfin ta connaissance. Siffle une voix métallique et autoritaire, qui impressionne Anthony.
- Je suis désavantagé, vous connaissez mon nom mais j'ignore le vôtre...
- Je suis le Seigneur Frégast.
- Oh ! Monseigneur ? S'étonne le jeune homme.
- En personne. Je te joins pour t'informer de mes plans, ce que Richard n'a pas jugé bon de faire. Il est impensable de laisser dans l'ignorance quelqu'un qui à un tel potentiel... J'ai suivi ta progression depuis le début et je dois dire que je suis impressionné, nous nous ressemblons beaucoup...
- Je suis honoré de ce compliment mais vous m'intriguez.
- Il y a de quoi. Je vais être franc avec toi : La recherche scientifique n'est qu'un prétexte idiot pour cacher mes véritables intentions et l'authentique finalité de la Fondation.
- Qui est ?
- Ce monde n'est que l'instrument qui m'ouvrira, ou plutôt, qui nous ouvrira la possibilité de conquérir la Terre tout entière.
- C'est impossible ! glapit Anthony. Comment pourrait-on...
- Attends ! Écoute moi, j'ai tout planifié, aussi minutieusement que le reste. Tu sais aussi bien que moi que pour des hommes tels que nous, rien n'est impossible. Sache que certaines zones géographiques de ce monde sont très importantes, car elles peuvent être exploitées de manière à prendre le pouvoir dans divers états de la Terre... Tout cela sans que personne ou presque ne s'en rende compte... Du moins, pas avant qu'il ne soit trop tard.
- Mais comment une telle chose est possible ?... Monseigneur. Ajoute Anthony, se rappelant subitement à qui il a affaire.
- C'est un procédé compliqué et je préférerais qu'on en parle face à face...
- Bien, monseigneur, je comprends...
- Tu dois te douter que beaucoup ne nous suivrons pas, c'est pourquoi j'ai décidé d'éliminer maintenant les plus susceptibles de nous mettre des bâtons dans les roues plus tard.
Anthony grimace, avant de reprendre.
- Tout le personnel scientifique ou diplomatique, n'est-ce pas ? demande-il, d'une voix blanche.
- Exactement, tuez Justin Deschamps. Adrien Hube se chargera de Bertrand Vasseur.
- Je... Je... Je... Vous auriez pu me prévenir ! la plupart de ces gens sont devenus mes amis ! explose Anthony.
- Richard aurait dû le faire, il sera châtié, sois-en sûr. Une fois ton travail terminé, tu pourrais devenir mon bras droit et m'assister. Comme je te l'ai déjà dit, nous sommes pareils. Toi et moi, nous ne reculons devant rien ! Notre collaboration n'en serait que plus bénéfique...
- Et monsieur Archer ? demande Anthony, qui n'a jamais vraiment compris son rôle si peu en adéquation avec sa personnalité.
- Il n'est rien d'autre qu'un serviteur. Néanmoins, s'il est là, c'est grâce à son dévouement sans faille. Mais il n'est pas vraiment compétent, il ne fait preuve d'aucune initiative. Tu pourrais changer ça... Qu'en dis-tu ? lui susurre le seigneur Frégast.
- Je... Ce sera fait, monseigneur ! clame Anthony, d'un ton résolu.
- Nous nous verrons dans mon palais, à ton retour à la Base-Noyau. Ne me déçois pas, j'attends beaucoup de toi ! dit le maître, avant de clore la conversation.
Anthony, en proie à un difficile dilemme, reste pensif une minute. La proposition de son employeur est de celles qui ne se présentent qu'une fois dans une vie. Anthony ne doute pas un instant que le plan du Seigneur Frégast soit viable, car ce dernier est d'une minutie incroyable.
Anthony se voit déjà gouverner aux côtés du seigneur Frégast. L'opportunité offerte est tellement gigantesque et inattendue que le jeune meurtrier n'arrive même pas à en mesurer toute la portée. Oui, la proposition est tentante, pour une personne aussi égoïste, arriviste et dénuée de toute morale qu'Anthony.
Mais le maître de la Fondation se trompe sur un point. Malgré ses défauts, dont le jeune fait l'éloge sous couvert de pragmatisme, il n'est pas une copie conforme de son seigneur. Si Anthony est clairement psychopathe, contrairement à ce dernier qui n'est que haine et folie, il reste une part d'amour en lui. Amour de la vie, du risque, de l'argent. Mais surtout pour deux personnes qui ont toujours eu une place primordiale dans son cœur. Il s'agit d'Alexis, son frère cadet, ainsi que bien sûr Justin.
Justin... Qu'il a toujours protégé quand ce dernier avait besoin de lui. Cette fois l'enjeu est bien plus important. Il sait que son meilleur ami ne sera jamais de son avis et s'opposerait de toutes ses forces au Seigneur Frégast. C'est d'ailleurs pour cela que ce dernier réclame sa mort.
D'un autre côté, le maître de la Fondation lui a offert une place de choix dans son projet de conquête du monde.
Anthony maudit Justin un long moment. Il vient de prendre sa décision. Celle qu'il a toujours prise, en toute circonstance.
La mine sombre, le jeune homme s'avance, dégaine un Uzi, puis sous le regard effaré de ses compagnons, il le pointe contre la tête du pilote. Franz, surpris déglutit péniblement.
- Qu'est-ce que tu fais ? demande Justin, qui ne comprend pas.
- C'est simple... Je prends le pouvoir. Franz, saurais-tu nous emmener à Syl ?
- Ce n'est pas mes ordres, bredouille ce dernier.
- Donc je te fais péter la cervelle ? demande Anthony, qui ne va pas par quatre chemins.
- Non... Non, j'y vais, obtempère le pilote, qui tremble.
- C'est quoi ce bordel ? demande Evran, qui ne comprend pas tout à cause du français mais semble prêt à se battre si la situation l'exige.
Pendant qu'Anthony essaie tant bien que mal de calmer les esprits, un autre dialogue, silencieux, se déroule. L'intrus psychique du pilote, qui se faisait discret depuis quelques heures et se contentait de suivre la position du zeppelin, intervient.
- Franz, tu es en fâcheuse posture et j'ai besoin de ton aide, tu ne dois absolument pas mourir... Dit-il.
- J'en avais l'intention, figure-toi ! ironise Franz, toujours stressé.
- Écoute, je vois ton appareil, d'où je suis... Je te propose un marché, pose-toi pour me laisser monter et je le neutraliserai.
- Tu pourrais vraiment faire ça ?
- Je suis dans ta tête, non ? Je peux même le faire dès maintenant, si je veux ! Mais je préfère passer à l'action que si je n'ai pas le choix, car c'est très fatigant ! D'autant plus que tes refus m'ont obligé à marcher jusqu'ici pendant des heures...
- D'accord, je vais le faire, répond Franz, après quelques secondes de réflexion.
Après tout, il a une arme pointée sur sa tête. Embarquer un passager doté d'étranges pouvoirs ne sera pas beaucoup plus dangereux.
De son côté, Anthony vient de raconter en détails sa conversation avec le seigneur Frégast, en s'attardant sur l'offre que ce dernier lui a proposée.
- Ah. Répond Justin, après un long silence. Il est trop abasourdi pour avoir une autre réaction en ce moment.
- Ne me dis pas que c'est tout ce que tu trouves à dire ? s'énerve Anthony, en français.
- Ben spontanément... C'est vrai que la Fondation n'était pas super nette mais à ce point-là, ça me surprend quand même...
- Alors là, bravo ! Le seigneur Frégast me propulse au sommet de la hiérarchie de la Fondation et peut-être même du monde quand tout sera terminé. Pour toi, je fais une croix dessus, alors que je n'ai vraiment pas envie de laisser passer une chance pareille. Et toi... Tout ce que tu trouves à dire, c'est « Ah. » ? C'est quand que tu comptes me dire « Merci Anthony », merde ? s'énerve-il, visiblement très déçu.
- Parce qu'en plus tu aurais accepté ? s'emporte aussi Justin.
- Parfaitement !
- Et je devrais te remercier parce que tu prends une décision logique que n'importe qui d'autre prendrait ? T'as complètement perdu le sens des réalités, je me demande vraiment s'ils t'ont rendu taré, ou si tu l'as toujours été !
- T'es bien placé pour me parler de la réalité ! Tu ne l'as jamais regardée en face ! Tu sais très bien quel homme je suis et depuis plus longtemps que tu ne veux bien le dire !
- Un meurtrier psychopathe ?
- Un ambitieux !
Le ton monte et les mâchoires se crispent sous l'effet de la colère. Les amis de toujours sont prêts à se jeter l'un sur l'autre dans une bagarre qui, dans une cabine de pilotage pourrait faire de grands dégâts.
Evran voit les poings de son homme se serrer, en même temps que le corps d'Anthony se raidit. Il comprend qu'ils s'apprêtent à se battre et s'interpose. Le temps semble se figer, jusqu'à ce que les trois coéquipiers comprennent que le zeppelin perd de l'altitude.
Dans le palais du Seigneur Frégast, sur le plateau de la Base-Noyau.
- Que veux-tu, Richard ?
- L'équipe d'Anthony Fournier est maintenant à portée de radio, monseigneur.
- Fais-le toi-même, j'ai des choses plus urgentes à régler ! répond le seigneur Frégast.
- Mais, monseigneur, Fournier n'a pas été mis au courant du plan visant à éliminer les personnes gênantes...
- Comment ça ? Tu as négligé ton travail !
- Je vous en prie, pardonnez-moi ! s'excuse Richard. Je n'ai pas eu une minute à moi ces dernier temps et son cas m'est complètement sorti de la tête ! J'ai...
- Ça suffit ! Va-t'en ! Je vais m'en charger. J'ai suivi de près ses fait et gestes quand il était sur Terre. Étant donné son arrivisme, il trahira ses amis sans hésiter, vu la récompense à la clé !
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Dans le zeppelin de Franz, au-dessus des plaines de Kyzam.
- Regardez ! crie Justin, en montrant du doigt un troupeau de brachiosaures, qu'il aperçoit depuis la vitre du zeppelin.
Les animaux s'étalent dans la vallée en contrebas, ils sont une dizaine de spécimens, le plus important mesurant un peu plus de douze mètres de haut.
Leur couleur, par endroit verte ou grisâtre, la majesté et la taille de ces bêtes laissent les voyageurs pantois.
- Ils sont gigantesques... Souffle Anthony, impressionné.
- Jamais je n'ai vu quoi que ce soit d'aussi gros... Commente Evran, plus habitué aux petites créatures de la forêt.
- C'est pas vers Syl qu'ils peuvent se promener ! répond Justin, sans détacher ses yeux du spectacle.
- Rien que pour voir ça, ça valait le déplacement et les désagréments ! ajoute Franz, le pilote.
Comme à chaque fois qu'une phrase de ce genre est prononcée, Justin sent se former une boule dans sa gorge. Malgré le temps, il lui est impossible de se faire à l'idée d'une rupture définitive avec sa famille.
Il est sorti de ses pensées par Anthony qui le bouscule légèrement en allant dans le fond de la cabine, une radio à la main.
Une fois à l'écart, Anthony s'adresse à la voix à l'autre bout du fil.
- Je vous reçois cinq sur cinq.
- Anthony Fournier, je suis ravi de faire enfin ta connaissance. Siffle une voix métallique et autoritaire, qui impressionne Anthony.
- Je suis désavantagé, vous connaissez mon nom mais j'ignore le vôtre...
- Je suis le Seigneur Frégast.
- Oh ! Monseigneur ? S'étonne le jeune homme.
- En personne. Je te joins pour t'informer de mes plans, ce que Richard n'a pas jugé bon de faire. Il est impensable de laisser dans l'ignorance quelqu'un qui à un tel potentiel... J'ai suivi ta progression depuis le début et je dois dire que je suis impressionné, nous nous ressemblons beaucoup...
- Je suis honoré de ce compliment mais vous m'intriguez.
- Il y a de quoi. Je vais être franc avec toi : La recherche scientifique n'est qu'un prétexte idiot pour cacher mes véritables intentions et l'authentique finalité de la Fondation.
- Qui est ?
- Ce monde n'est que l'instrument qui m'ouvrira, ou plutôt, qui nous ouvrira la possibilité de conquérir la Terre tout entière.
- C'est impossible ! glapit Anthony. Comment pourrait-on...
- Attends ! Écoute moi, j'ai tout planifié, aussi minutieusement que le reste. Tu sais aussi bien que moi que pour des hommes tels que nous, rien n'est impossible. Sache que certaines zones géographiques de ce monde sont très importantes, car elles peuvent être exploitées de manière à prendre le pouvoir dans divers états de la Terre... Tout cela sans que personne ou presque ne s'en rende compte... Du moins, pas avant qu'il ne soit trop tard.
- Mais comment une telle chose est possible ?... Monseigneur. Ajoute Anthony, se rappelant subitement à qui il a affaire.
- C'est un procédé compliqué et je préférerais qu'on en parle face à face...
- Bien, monseigneur, je comprends...
- Tu dois te douter que beaucoup ne nous suivrons pas, c'est pourquoi j'ai décidé d'éliminer maintenant les plus susceptibles de nous mettre des bâtons dans les roues plus tard.
Anthony grimace, avant de reprendre.
- Tout le personnel scientifique ou diplomatique, n'est-ce pas ? demande-il, d'une voix blanche.
- Exactement, tuez Justin Deschamps. Adrien Hube se chargera de Bertrand Vasseur.
- Je... Je... Je... Vous auriez pu me prévenir ! la plupart de ces gens sont devenus mes amis ! explose Anthony.
- Richard aurait dû le faire, il sera châtié, sois-en sûr. Une fois ton travail terminé, tu pourrais devenir mon bras droit et m'assister. Comme je te l'ai déjà dit, nous sommes pareils. Toi et moi, nous ne reculons devant rien ! Notre collaboration n'en serait que plus bénéfique...
- Et monsieur Archer ? demande Anthony, qui n'a jamais vraiment compris son rôle si peu en adéquation avec sa personnalité.
- Il n'est rien d'autre qu'un serviteur. Néanmoins, s'il est là, c'est grâce à son dévouement sans faille. Mais il n'est pas vraiment compétent, il ne fait preuve d'aucune initiative. Tu pourrais changer ça... Qu'en dis-tu ? lui susurre le seigneur Frégast.
- Je... Ce sera fait, monseigneur ! clame Anthony, d'un ton résolu.
- Nous nous verrons dans mon palais, à ton retour à la Base-Noyau. Ne me déçois pas, j'attends beaucoup de toi ! dit le maître, avant de clore la conversation.
Anthony, en proie à un difficile dilemme, reste pensif une minute. La proposition de son employeur est de celles qui ne se présentent qu'une fois dans une vie. Anthony ne doute pas un instant que le plan du Seigneur Frégast soit viable, car ce dernier est d'une minutie incroyable.
Anthony se voit déjà gouverner aux côtés du seigneur Frégast. L'opportunité offerte est tellement gigantesque et inattendue que le jeune meurtrier n'arrive même pas à en mesurer toute la portée. Oui, la proposition est tentante, pour une personne aussi égoïste, arriviste et dénuée de toute morale qu'Anthony.
Mais le maître de la Fondation se trompe sur un point. Malgré ses défauts, dont le jeune fait l'éloge sous couvert de pragmatisme, il n'est pas une copie conforme de son seigneur. Si Anthony est clairement psychopathe, contrairement à ce dernier qui n'est que haine et folie, il reste une part d'amour en lui. Amour de la vie, du risque, de l'argent. Mais surtout pour deux personnes qui ont toujours eu une place primordiale dans son cœur. Il s'agit d'Alexis, son frère cadet, ainsi que bien sûr Justin.
Justin... Qu'il a toujours protégé quand ce dernier avait besoin de lui. Cette fois l'enjeu est bien plus important. Il sait que son meilleur ami ne sera jamais de son avis et s'opposerait de toutes ses forces au Seigneur Frégast. C'est d'ailleurs pour cela que ce dernier réclame sa mort.
D'un autre côté, le maître de la Fondation lui a offert une place de choix dans son projet de conquête du monde.
Anthony maudit Justin un long moment. Il vient de prendre sa décision. Celle qu'il a toujours prise, en toute circonstance.
La mine sombre, le jeune homme s'avance, dégaine un Uzi, puis sous le regard effaré de ses compagnons, il le pointe contre la tête du pilote. Franz, surpris déglutit péniblement.
- Qu'est-ce que tu fais ? demande Justin, qui ne comprend pas.
- C'est simple... Je prends le pouvoir. Franz, saurais-tu nous emmener à Syl ?
- Ce n'est pas mes ordres, bredouille ce dernier.
- Donc je te fais péter la cervelle ? demande Anthony, qui ne va pas par quatre chemins.
- Non... Non, j'y vais, obtempère le pilote, qui tremble.
- C'est quoi ce bordel ? demande Evran, qui ne comprend pas tout à cause du français mais semble prêt à se battre si la situation l'exige.
Pendant qu'Anthony essaie tant bien que mal de calmer les esprits, un autre dialogue, silencieux, se déroule. L'intrus psychique du pilote, qui se faisait discret depuis quelques heures et se contentait de suivre la position du zeppelin, intervient.
- Franz, tu es en fâcheuse posture et j'ai besoin de ton aide, tu ne dois absolument pas mourir... Dit-il.
- J'en avais l'intention, figure-toi ! ironise Franz, toujours stressé.
- Écoute, je vois ton appareil, d'où je suis... Je te propose un marché, pose-toi pour me laisser monter et je le neutraliserai.
- Tu pourrais vraiment faire ça ?
- Je suis dans ta tête, non ? Je peux même le faire dès maintenant, si je veux ! Mais je préfère passer à l'action que si je n'ai pas le choix, car c'est très fatigant ! D'autant plus que tes refus m'ont obligé à marcher jusqu'ici pendant des heures...
- D'accord, je vais le faire, répond Franz, après quelques secondes de réflexion.
Après tout, il a une arme pointée sur sa tête. Embarquer un passager doté d'étranges pouvoirs ne sera pas beaucoup plus dangereux.
De son côté, Anthony vient de raconter en détails sa conversation avec le seigneur Frégast, en s'attardant sur l'offre que ce dernier lui a proposée.
- Ah. Répond Justin, après un long silence. Il est trop abasourdi pour avoir une autre réaction en ce moment.
- Ne me dis pas que c'est tout ce que tu trouves à dire ? s'énerve Anthony, en français.
- Ben spontanément... C'est vrai que la Fondation n'était pas super nette mais à ce point-là, ça me surprend quand même...
- Alors là, bravo ! Le seigneur Frégast me propulse au sommet de la hiérarchie de la Fondation et peut-être même du monde quand tout sera terminé. Pour toi, je fais une croix dessus, alors que je n'ai vraiment pas envie de laisser passer une chance pareille. Et toi... Tout ce que tu trouves à dire, c'est « Ah. » ? C'est quand que tu comptes me dire « Merci Anthony », merde ? s'énerve-il, visiblement très déçu.
- Parce qu'en plus tu aurais accepté ? s'emporte aussi Justin.
- Parfaitement !
- Et je devrais te remercier parce que tu prends une décision logique que n'importe qui d'autre prendrait ? T'as complètement perdu le sens des réalités, je me demande vraiment s'ils t'ont rendu taré, ou si tu l'as toujours été !
- T'es bien placé pour me parler de la réalité ! Tu ne l'as jamais regardée en face ! Tu sais très bien quel homme je suis et depuis plus longtemps que tu ne veux bien le dire !
- Un meurtrier psychopathe ?
- Un ambitieux !
Le ton monte et les mâchoires se crispent sous l'effet de la colère. Les amis de toujours sont prêts à se jeter l'un sur l'autre dans une bagarre qui, dans une cabine de pilotage pourrait faire de grands dégâts.
Evran voit les poings de son homme se serrer, en même temps que le corps d'Anthony se raidit. Il comprend qu'ils s'apprêtent à se battre et s'interpose. Le temps semble se figer, jusqu'à ce que les trois coéquipiers comprennent que le zeppelin perd de l'altitude.