12-12-2022, 12:59 PM
– Ils sont malades, docteur ? Maman ne m'a rien dit.
– Non Agnès, ils ne sont pas malades. C'est juste qu'ils ne sont plus très jeunes alors je prends les devants. Bon, avec Cyprien c'est pas évident de le soigner. La dernière fois, je lui ai dit qu'il faudrait qu'il ralentisse un peu le pastis et il m'a répondu qu'il préférait mourir de suite. Que de toute façon à 96 ans c'est pas un gamin de 50 ans qui allait lui dire quoi faire. Et que c'est son pastis qui le tenait en vie. J'avoue que j'aimerais que certains de mes patients aient ses analyses de sang.
Il me pris en aparté, ma mère étant rassurée sur mon état de santé.
– Revenons à toi Bébé, ta maman m'a dit ce qu'il s'était passé. Physiquement tu vas bien mais dans ta tête, comment ça se passe ?
– Je pense souvent à Liam et chaque fois ça me fait mal.
– Oui, ça c'est normal. Tu es en train de faire ton deuil et la durée varie selon chaque personne… et sexuellement comment ça se passe ?
– Depuis que Liam est parti en août je n'ai plus fait l’amour.
– Oui, ça aussi je le comprends mais enfin je vais pas te faire un dessin, il y a des besoins impératifs à ton âge.
– Ah, je dois me branler même pas une fois par semaine. En fait quand ça me travaille trop je me branle sous la douche vite fait. Je bande même pas convenablement et quand j'ai joui ça va mieux, enfin ça me soulage jusqu'à la fois suivante.
– D'accord et avant c'était comment ?
– Déjà tous les matins en me levant j'avais une érection et je me branlais une fois le matin et une fois le soir quand Liam n'était pas là et quand il était là on faisait l'amour presque tous les jours.
– Je vais te prescrire un léger antidépresseur. Ça va t'aider à faire ton deuil. Ne t'en fait pas, ça ne va pas t’ensuquer, juste calmer tes angoisses. Tu veux bien le prendre.
– Si ça m'aide, oui je veux bien.
– Je vais te faire une ordonnance pour six mois, mais si tu te sens mieux avant tu pourras arrêter.
– Et comment je sais que je vais mieux ?
– Écoute quand le matin tu te réveilleras et que tu auras une érection par exemple et si ça dure plus de huit jours, tu pourras arrêter.
– D’accord, si je bande le matin pendant une semaine j'arrête ?
– C'est ça. Et si tu ne te sens pas bien par la suite tu peux en reprendre ponctuellement. Mais c'est pas de l'aspirine, Bé, si tu en reprends tu le fais au moins deux mois pas moins.
– D’accord, je ferai comme vous dites.
– Et puis ça serait bien que tu reprennes une vie active. Tu es bien infirmier non ?
– Oui, mais là j'ai pas trop envie d'être enfermé dans un hôpital pour le moment.
– Tu n'as qu'à aller aider Tim, s'il a besoin d’un coup de main.
– En fait, on ne se voit plus trop. Et c'est un peu la saison morte pour lui.
Et j'ai pas trop envie de voir du monde en ce moment.
– Ça va changer quand le médicament fera effet. Bon c'est pas tout ça mais il faut que je rentre. Tu es bien ici, c'est tranquille, ça change de la plaine.
Il me donna mon ordonnance, je le payais et il partit.
– Au fait Bé, j'ai oublié de te dire. Ce week-end avec papa on va chez Audrey et Pierrick pour les aider à faire leur piscine. Tu es invité pour travailler. Tu viendras ?
– Je sais pas.
– Bon, puisque tu ne sais pas, tu viens. Ça te sortira d’ici.
– D'accord Man, j’irai.
– Tu devrais téléphoner à ta grand-mère pour lui dire que demain tu vas te faire faire la prise de sang chez eux.
Je pris mon téléphone et l’appelais. Bien sûr c'est elle qui répondit comme toujours.
– Ha, c'est toi Jean-François, ça fait plaisir de t’entendre. Ça fait deux jours que tu n'es pas venu nous voir. Tu es malade ?
– Non Mamie, je vais bien. Tu m'invites demain matin à prendre le café ?
– Bien sûr, mais l'infirmière doit passer nous faire une prise de sang à tous les trois.
– Je sais, je dois m'en faire faire une aussi.
– Mon Dieu! Tu as quoi ?
– Mais rien Mamie, c'est juste que ça fait longtemps que je n'en ai pas eu et le docteur veut savoir où j'en suis.
– Ah bon, alors ça me rassure. À demain mon grand.
– À demain Mamie.
– J'ai oublié de te dire, elle sera là à sept heures. Ne sois pas en retard.
– D'accord Mamie à demain.
On raccrocha. Et au grand désespoir de ma mère, ce soir-là je ne mangeais pas plus que les autres jours. Une fois au lit je réfléchis à ce que m'avait dit le docteur. Je n'étais pas bien dans ma tête mais j'étais bien dans mon corps. Alors, j’espérais que de prendre les comprimés qu'il m'avait prescrits allait m’aider, en plus de continuer à m’entraîner.
J'arrivais chez mes grands-parents avant l'infirmière et déjà Cyprien râlait.
– … Je te dis que si c'est la vieille bique, Henriette, je ne la laisse pas me toucher. La dernière fois qu'elle m'a piqué elle s'y est prise en trois fois et j'ai eu le bras bleu pendant huit jours.
– Bonjour! Après qui tu râles Papé ?
– Une infirmière qui ne sait pas piquer.
– Il exagère toujours.
– Non Chérie, je suis d'accord avec ton père. Elle ne sait pas piquer, moi aussi j'ai eu le bras bleu, presque une semaine.
– Hébé, si toi aussi tu t'y mets François, on n'est pas sorti de l’auberge.
– Il y a une voiture qui arrive.
Et, évidemment, c'était la fameuse infirmière. Bien sûr, Cyprien ne mâcha pas ses mots.
– Vous n'avez qu'à vous faire piquer par qui vous voudrez, puisque vous ne voulez pas de moi. Allez en trouver une autre qui veuille monter jusqu’ici.
– Bé, tu n'as qu'à me piquer toi. Tu sais faire ?
– Oui Papé, je sais faire, mais je n'ai pas ce qu'il faut.
– Elle doit bien l'avoir, elle, le matériel puisqu'elle est venue nous faire les prises de sang.
– Oui, ‘elle’ l'a le matériel. Mais votre petit fils ne vous piquera pas. Il n'en a pas le droit. Il faut être infirmier ou docteur pour le faire. Sinon c'est de l'exercice illégal de la médecine.
Ma grand-mère essaya de calmer le jeu.
– Madame, mon petit-fils est infirmier.
Elle se tourna vers moi et me toisa.
– C'est vrai ça que tu es infirmier ?
– Oui, j'ai eu mon diplôme en juin.
– Et bien puisqu'il veut que tu le piques, tu n'as qu'à le faire. Pendant ce temps je ferai quelqu'un d’autre.
– J'aimerai autant que ce soit Jean-François qui me pique aussi.
– Et vous Madame ?
– Heu! Tu veux bien me le faire aussi, Bé ?
– Mais oui Mamie, pas de souci.
Elle me sortit tout ce qu'il fallait, à contre cœur. Je posais le garrot au bras de Cyprien et ça me fit tout drôle de passer mes doigts sur sa peau tannée pour chercher une veine. Je n'avais encore jamais eu ce genre de contact avec un proche. J'en trouvais une et je piquais. Je remplis les fioles que l'infirmière me tendait.
Puis je fis la même chose à mon grand-père et à ma grand-mère.
Et comme je n'allais pas me le faire à moi-même, c’est la vieille peau qui me piqua. Elle dut quand même s'y prendre à trois fois, sous prétexte que mes veines 'roulaient’.
Dès qu’elle fut partie, on but le café, et quand mes grands-parents me demandèrent si je restais manger avec eux je leur dis que je devais descendre dans la plaine, au bourg, pour aller chercher des médicaments.
– La pharmacie n'est plus dans le village du bas maintenant. Elle est dans la zone commerciale. Puisque tu y vas, je vais te donner nos ordonnances et nos cartes vitales. Ça nous évitera d'y descendre. Et comme ça, quand tu remontes, tu manges avec nous.
– Si vous voulez. Je vais chercher ma voiture et mon ordonnance et je repasse.
– Je te prépare ça en attendant.
Jusqu'à présent je n'étais jamais rentré dans la zone commerciale, nouvellement créée. Il y avait encore des chantiers de partout. Je trouvais facilement la pharmacie et je fis le plein de médicament.
Bon Cyprien, lui il en prenait contre le cholestérol, mon grand-père c'était contre le diabète et ma grand-mère elle c'était contre l’arthrose. Le docteur avait aussi ajouté pour tous des médicaments contre le mal à l'estomac et des vitamines.
J'allais partir quand je vis qu'il y avait un magasin de sport à proximité. Mes baskets avaient bien morflé et j'en avais un peu marre d'enfiler mes vieux shorts difformes. J'entrais y faire un tour. Il venait tout juste d’ouvrir. Des employés montaient encore des gondoles pour installer la marchandise.
Je finis par trouver le rayon 'jogging’. Je trouvais les shorts et j'en pris un. Un employé qui passait par là et qui m'avait vu faire vint me voir.
– Salut, j'ai vu que tu avais pris un short de running, je te le déconseille. Il n'est pas confortable si tu cours beaucoup ou longtemps.
– Tu veux dire quoi par pas confortable ?
– Au bout de quelque temps le slip intérieur se détend et tu as le service trois pièces qui ballotte dans tous les sens. Et, rapport qualité prix, il est cher.
– Tu me conseilles lequel alors ?
– Je suis en train de les mettre en tête de gondole. En promo ils font juste deux euros de plus que celui-là et tu verras, eux sont supers. Tu fais quelle taille ?
– En général je prends du L.
– Et en cm tu la connais ?
– Non, pas du tout.
– Je te demande ça parce que les cabines d'essayage ne sont pas encore montées. Tu ne pourras pas l'essayer ici du coup. Bouge pas. Laisse-moi prendre mon mètre, je reviens.
Je le vis farfouiller dans un carton, sortir un mètre ruban et revenir vers moi.
– Tu peux quitter ton sweat-shirt s'il te plaît ou juste le remonter que je puisse prendre tes mesures ?
– Pas de souci.
Mon tee-shirt remonta avec mon sweat, dévoilant mes abdos.
– Wow! T'as de sacrés tablettes mec.
– Ça va, pas à me plaindre.
– Bouge pas je mesure. 80 cm et des broutilles. Tu as le choix entre 76/80 ça va te mouler les fesses et le paquet, style short de compression ou 80/84 où tu seras plus à l'aise dedans mais quand même bien maintenu. C'est toi qui voit.
– Je sais pas trop parce que quand je cours je fais aussi des exercices d'assouplissement alors je voudrais pas qu'il craque où que ça m'éclate les couilles.
– Alors prends la plus grande taille tu y seras plus confortable.
– D'accord et en baskets pour courir tu me conseilles quoi ?
– Tu cours sur quel genre de terrain ?
– C'est plus de la terre, des cailloux, de l'herbe. Du tous terrains en fait.
– Et tu cours longtemps ?
– Quatre heures et je dois faire entre 35 et 40 bornes.
– D'accord, et tu cours combien de fois par semaine ?
– Cinq fois, en moyenne.
– Putain ! Tout ça ? Bon, alors je te conseille cette marque-là. C’est pas les moins chères mais elle sont robustes, elles ont de bons crampons et elles rebondissent bien. J'en ai et j'en suis très content. Tu chausses du combien ?
– Du 44 ou du 45, ça dépend des chaussures.
– Je vais te chercher ça.
Pendant qu'il cherchait les chaussures, je regardais la déco du magasin. Enfin, celle qui avait été posée. Ça me fit sourire. Tout était fait pour faire acheter. Entre chaque glace il y avait une affiche, une qui vantait telle marque de chaussette qui empêchait de transpirer, une autre une poudre à mettre dans les chaussures pour ne pas sentir des pieds …
Le mec revint et je pris la paire de 45 après les avoir essayées.
– Où est-ce que tu cours aussi souvent?
– Principalement aux Fourches.
– C'est bizarre ça parce que moi aussi et je ne t'ai jamais croisé.
– Oui, normal, moi c'est les Fourches le haut. Je cours pas en plaine c'est trop facile. Merci pour tes conseils et à l'occasion quand je repasserai je te dirai ce que j'en pense.
– Pas de souci, si tu me vois pas demande après Guillaume.
– Enchanté Guillaume, moi c'est Jean-François.
On se serra la main et je partis à la caisse. Quand je voulus payer, le code barre des chaussures passait à zéro et il y avait une grande affiche qui disait que si les articles ne passaient pas en caisse, ils étaient offerts.
Mes achats ne m'avaient pas coûté 50 euros !
J'avais envie de pisser. Un peu plus loin il y avait des tinettes de chantier. J'y allais et quand j'ouvris la porte, c'était l’infection. J'allais pisser derrière et quand je revins vers ma voiture, un mec costume cravate hurlait au téléphone.
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– Non Agnès, ils ne sont pas malades. C'est juste qu'ils ne sont plus très jeunes alors je prends les devants. Bon, avec Cyprien c'est pas évident de le soigner. La dernière fois, je lui ai dit qu'il faudrait qu'il ralentisse un peu le pastis et il m'a répondu qu'il préférait mourir de suite. Que de toute façon à 96 ans c'est pas un gamin de 50 ans qui allait lui dire quoi faire. Et que c'est son pastis qui le tenait en vie. J'avoue que j'aimerais que certains de mes patients aient ses analyses de sang.
Il me pris en aparté, ma mère étant rassurée sur mon état de santé.
– Revenons à toi Bébé, ta maman m'a dit ce qu'il s'était passé. Physiquement tu vas bien mais dans ta tête, comment ça se passe ?
– Je pense souvent à Liam et chaque fois ça me fait mal.
– Oui, ça c'est normal. Tu es en train de faire ton deuil et la durée varie selon chaque personne… et sexuellement comment ça se passe ?
– Depuis que Liam est parti en août je n'ai plus fait l’amour.
– Oui, ça aussi je le comprends mais enfin je vais pas te faire un dessin, il y a des besoins impératifs à ton âge.
– Ah, je dois me branler même pas une fois par semaine. En fait quand ça me travaille trop je me branle sous la douche vite fait. Je bande même pas convenablement et quand j'ai joui ça va mieux, enfin ça me soulage jusqu'à la fois suivante.
– D'accord et avant c'était comment ?
– Déjà tous les matins en me levant j'avais une érection et je me branlais une fois le matin et une fois le soir quand Liam n'était pas là et quand il était là on faisait l'amour presque tous les jours.
– Je vais te prescrire un léger antidépresseur. Ça va t'aider à faire ton deuil. Ne t'en fait pas, ça ne va pas t’ensuquer, juste calmer tes angoisses. Tu veux bien le prendre.
– Si ça m'aide, oui je veux bien.
– Je vais te faire une ordonnance pour six mois, mais si tu te sens mieux avant tu pourras arrêter.
– Et comment je sais que je vais mieux ?
– Écoute quand le matin tu te réveilleras et que tu auras une érection par exemple et si ça dure plus de huit jours, tu pourras arrêter.
– D’accord, si je bande le matin pendant une semaine j'arrête ?
– C'est ça. Et si tu ne te sens pas bien par la suite tu peux en reprendre ponctuellement. Mais c'est pas de l'aspirine, Bé, si tu en reprends tu le fais au moins deux mois pas moins.
– D’accord, je ferai comme vous dites.
– Et puis ça serait bien que tu reprennes une vie active. Tu es bien infirmier non ?
– Oui, mais là j'ai pas trop envie d'être enfermé dans un hôpital pour le moment.
– Tu n'as qu'à aller aider Tim, s'il a besoin d’un coup de main.
– En fait, on ne se voit plus trop. Et c'est un peu la saison morte pour lui.
Et j'ai pas trop envie de voir du monde en ce moment.
– Ça va changer quand le médicament fera effet. Bon c'est pas tout ça mais il faut que je rentre. Tu es bien ici, c'est tranquille, ça change de la plaine.
Il me donna mon ordonnance, je le payais et il partit.
– Au fait Bé, j'ai oublié de te dire. Ce week-end avec papa on va chez Audrey et Pierrick pour les aider à faire leur piscine. Tu es invité pour travailler. Tu viendras ?
– Je sais pas.
– Bon, puisque tu ne sais pas, tu viens. Ça te sortira d’ici.
– D'accord Man, j’irai.
– Tu devrais téléphoner à ta grand-mère pour lui dire que demain tu vas te faire faire la prise de sang chez eux.
Je pris mon téléphone et l’appelais. Bien sûr c'est elle qui répondit comme toujours.
– Ha, c'est toi Jean-François, ça fait plaisir de t’entendre. Ça fait deux jours que tu n'es pas venu nous voir. Tu es malade ?
– Non Mamie, je vais bien. Tu m'invites demain matin à prendre le café ?
– Bien sûr, mais l'infirmière doit passer nous faire une prise de sang à tous les trois.
– Je sais, je dois m'en faire faire une aussi.
– Mon Dieu! Tu as quoi ?
– Mais rien Mamie, c'est juste que ça fait longtemps que je n'en ai pas eu et le docteur veut savoir où j'en suis.
– Ah bon, alors ça me rassure. À demain mon grand.
– À demain Mamie.
– J'ai oublié de te dire, elle sera là à sept heures. Ne sois pas en retard.
– D'accord Mamie à demain.
On raccrocha. Et au grand désespoir de ma mère, ce soir-là je ne mangeais pas plus que les autres jours. Une fois au lit je réfléchis à ce que m'avait dit le docteur. Je n'étais pas bien dans ma tête mais j'étais bien dans mon corps. Alors, j’espérais que de prendre les comprimés qu'il m'avait prescrits allait m’aider, en plus de continuer à m’entraîner.
J'arrivais chez mes grands-parents avant l'infirmière et déjà Cyprien râlait.
– … Je te dis que si c'est la vieille bique, Henriette, je ne la laisse pas me toucher. La dernière fois qu'elle m'a piqué elle s'y est prise en trois fois et j'ai eu le bras bleu pendant huit jours.
– Bonjour! Après qui tu râles Papé ?
– Une infirmière qui ne sait pas piquer.
– Il exagère toujours.
– Non Chérie, je suis d'accord avec ton père. Elle ne sait pas piquer, moi aussi j'ai eu le bras bleu, presque une semaine.
– Hébé, si toi aussi tu t'y mets François, on n'est pas sorti de l’auberge.
– Il y a une voiture qui arrive.
Et, évidemment, c'était la fameuse infirmière. Bien sûr, Cyprien ne mâcha pas ses mots.
– Vous n'avez qu'à vous faire piquer par qui vous voudrez, puisque vous ne voulez pas de moi. Allez en trouver une autre qui veuille monter jusqu’ici.
– Bé, tu n'as qu'à me piquer toi. Tu sais faire ?
– Oui Papé, je sais faire, mais je n'ai pas ce qu'il faut.
– Elle doit bien l'avoir, elle, le matériel puisqu'elle est venue nous faire les prises de sang.
– Oui, ‘elle’ l'a le matériel. Mais votre petit fils ne vous piquera pas. Il n'en a pas le droit. Il faut être infirmier ou docteur pour le faire. Sinon c'est de l'exercice illégal de la médecine.
Ma grand-mère essaya de calmer le jeu.
– Madame, mon petit-fils est infirmier.
Elle se tourna vers moi et me toisa.
– C'est vrai ça que tu es infirmier ?
– Oui, j'ai eu mon diplôme en juin.
– Et bien puisqu'il veut que tu le piques, tu n'as qu'à le faire. Pendant ce temps je ferai quelqu'un d’autre.
– J'aimerai autant que ce soit Jean-François qui me pique aussi.
– Et vous Madame ?
– Heu! Tu veux bien me le faire aussi, Bé ?
– Mais oui Mamie, pas de souci.
Elle me sortit tout ce qu'il fallait, à contre cœur. Je posais le garrot au bras de Cyprien et ça me fit tout drôle de passer mes doigts sur sa peau tannée pour chercher une veine. Je n'avais encore jamais eu ce genre de contact avec un proche. J'en trouvais une et je piquais. Je remplis les fioles que l'infirmière me tendait.
Puis je fis la même chose à mon grand-père et à ma grand-mère.
Et comme je n'allais pas me le faire à moi-même, c’est la vieille peau qui me piqua. Elle dut quand même s'y prendre à trois fois, sous prétexte que mes veines 'roulaient’.
Dès qu’elle fut partie, on but le café, et quand mes grands-parents me demandèrent si je restais manger avec eux je leur dis que je devais descendre dans la plaine, au bourg, pour aller chercher des médicaments.
– La pharmacie n'est plus dans le village du bas maintenant. Elle est dans la zone commerciale. Puisque tu y vas, je vais te donner nos ordonnances et nos cartes vitales. Ça nous évitera d'y descendre. Et comme ça, quand tu remontes, tu manges avec nous.
– Si vous voulez. Je vais chercher ma voiture et mon ordonnance et je repasse.
– Je te prépare ça en attendant.
Jusqu'à présent je n'étais jamais rentré dans la zone commerciale, nouvellement créée. Il y avait encore des chantiers de partout. Je trouvais facilement la pharmacie et je fis le plein de médicament.
Bon Cyprien, lui il en prenait contre le cholestérol, mon grand-père c'était contre le diabète et ma grand-mère elle c'était contre l’arthrose. Le docteur avait aussi ajouté pour tous des médicaments contre le mal à l'estomac et des vitamines.
J'allais partir quand je vis qu'il y avait un magasin de sport à proximité. Mes baskets avaient bien morflé et j'en avais un peu marre d'enfiler mes vieux shorts difformes. J'entrais y faire un tour. Il venait tout juste d’ouvrir. Des employés montaient encore des gondoles pour installer la marchandise.
Je finis par trouver le rayon 'jogging’. Je trouvais les shorts et j'en pris un. Un employé qui passait par là et qui m'avait vu faire vint me voir.
– Salut, j'ai vu que tu avais pris un short de running, je te le déconseille. Il n'est pas confortable si tu cours beaucoup ou longtemps.
– Tu veux dire quoi par pas confortable ?
– Au bout de quelque temps le slip intérieur se détend et tu as le service trois pièces qui ballotte dans tous les sens. Et, rapport qualité prix, il est cher.
– Tu me conseilles lequel alors ?
– Je suis en train de les mettre en tête de gondole. En promo ils font juste deux euros de plus que celui-là et tu verras, eux sont supers. Tu fais quelle taille ?
– En général je prends du L.
– Et en cm tu la connais ?
– Non, pas du tout.
– Je te demande ça parce que les cabines d'essayage ne sont pas encore montées. Tu ne pourras pas l'essayer ici du coup. Bouge pas. Laisse-moi prendre mon mètre, je reviens.
Je le vis farfouiller dans un carton, sortir un mètre ruban et revenir vers moi.
– Tu peux quitter ton sweat-shirt s'il te plaît ou juste le remonter que je puisse prendre tes mesures ?
– Pas de souci.
Mon tee-shirt remonta avec mon sweat, dévoilant mes abdos.
– Wow! T'as de sacrés tablettes mec.
– Ça va, pas à me plaindre.
– Bouge pas je mesure. 80 cm et des broutilles. Tu as le choix entre 76/80 ça va te mouler les fesses et le paquet, style short de compression ou 80/84 où tu seras plus à l'aise dedans mais quand même bien maintenu. C'est toi qui voit.
– Je sais pas trop parce que quand je cours je fais aussi des exercices d'assouplissement alors je voudrais pas qu'il craque où que ça m'éclate les couilles.
– Alors prends la plus grande taille tu y seras plus confortable.
– D'accord et en baskets pour courir tu me conseilles quoi ?
– Tu cours sur quel genre de terrain ?
– C'est plus de la terre, des cailloux, de l'herbe. Du tous terrains en fait.
– Et tu cours longtemps ?
– Quatre heures et je dois faire entre 35 et 40 bornes.
– D'accord, et tu cours combien de fois par semaine ?
– Cinq fois, en moyenne.
– Putain ! Tout ça ? Bon, alors je te conseille cette marque-là. C’est pas les moins chères mais elle sont robustes, elles ont de bons crampons et elles rebondissent bien. J'en ai et j'en suis très content. Tu chausses du combien ?
– Du 44 ou du 45, ça dépend des chaussures.
– Je vais te chercher ça.
Pendant qu'il cherchait les chaussures, je regardais la déco du magasin. Enfin, celle qui avait été posée. Ça me fit sourire. Tout était fait pour faire acheter. Entre chaque glace il y avait une affiche, une qui vantait telle marque de chaussette qui empêchait de transpirer, une autre une poudre à mettre dans les chaussures pour ne pas sentir des pieds …
Le mec revint et je pris la paire de 45 après les avoir essayées.
– Où est-ce que tu cours aussi souvent?
– Principalement aux Fourches.
– C'est bizarre ça parce que moi aussi et je ne t'ai jamais croisé.
– Oui, normal, moi c'est les Fourches le haut. Je cours pas en plaine c'est trop facile. Merci pour tes conseils et à l'occasion quand je repasserai je te dirai ce que j'en pense.
– Pas de souci, si tu me vois pas demande après Guillaume.
– Enchanté Guillaume, moi c'est Jean-François.
On se serra la main et je partis à la caisse. Quand je voulus payer, le code barre des chaussures passait à zéro et il y avait une grande affiche qui disait que si les articles ne passaient pas en caisse, ils étaient offerts.
Mes achats ne m'avaient pas coûté 50 euros !
J'avais envie de pisser. Un peu plus loin il y avait des tinettes de chantier. J'y allais et quand j'ouvris la porte, c'était l’infection. J'allais pisser derrière et quand je revins vers ma voiture, un mec costume cravate hurlait au téléphone.
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