06-03-2022, 11:19 PM
34 - Dans la nasse
- Mais... mais... je rêve !
Cédric regarde d'un air ahuri le fragment de Chrystal qui trône dans la chambre.
- Oh oh... on a bien choisi notre endroit, tiens.
- J'en ai un aussi dans ma chambre, marmonne Thibault.
- Je vais poser la question, dit Thomas, mais je commence à savoir ce que le mineur voulait trouver.
Il revient bientôt, l'air sombre.
- Ces cristaux font fureur depuis plus de dix ans, tout le monde se les arrache pour décorer sa maison. Il y en a plein la ville.
- Oh bon sang... on s'est fait piéger comme des bleus. Impossible de se téléporter hors de la ville, et impossible de fuir sans être repérés. Et je ne pourrai toujours pas faire de divination.
- Je n'arrive plus à entrer en contact avec les esprits, dit Uria en arrivant. Oh, vous en avez aussi ici.
Nous tentons de trouver un plan, mais c'est sans issue. Soit nous partons maintenant, sans aucune garantie de pouvoir sortir sans problème, et nous aurons à nouveau affaire aux hordes des ténèbres, soit nous attendons qu'elles viennent nous chercher ici.
- Nous avons besoin de nous remettre de l'assaut. Un peu de repos, on prépare nos armes, et on s'en va. Dès qu'on sera hors de portée, je nous téléporterai au loin.
Cédric commence à nettoyer ses carreaux et à les insérer dans le réservoir latéral de ses arbalètes. Je suis fasciné par leur mécanique sophistiquée.
- Tu as toujours ton bâton ?
- Celui qui était devenu une Arme de Lumière a été détruit, mais j'en ai fabriqué un autre. Il n'est pas aussi performant, faute de moteurs et d'électronique, mais j'ai fait de mon mieux.
- C'est vraiment incroyable ce que tu arrives à faire dans ce monde.
- Merci. Rien que beaucoup de patience et de volonté ne puissent résoudre.
- Nettoie ton arme et affûte-là, me lance Finnadan.
- Euh, oui.
Je frissonne en nettoyant la lame de mon épée, me disant que j'ai réellement été confronté aux ténèbres, et qu'elles risquent de se répandre sur Terre.
Et ? Ces oiseaux de malheur ne feraient pas long feu contre des armes modernes.
- Il y a quelque chose que je ne comprends pas... j'ai étudié les créatures des ténèbres en classe, et j'en ai certes affronté quelques-unes, mais... quel danger représentent-elles réellement ? Je veux dire, il y a toujours des gens ici, alors qu'il y a des hurleurs, des sembleurs, et que sais-je encore.
- Elles viennent, peu nombreuses au début, explique Cédric. Elles se reproduisent. Elles tuent au hasard, sauvagement. Chaque mort sanglante apporte un peu de ténèbres en ce monde, mais chaque créature tuée en retire. Aussi évitent-elles les grands rassemblements humains, au début du moins. Puis, à mesure que l'énergie des ténèbres se répand, de nouvelles créatures apparaissent, toujours plus puissantes et meurtrières. Les lames noires bâtissent des citadelles par sorcelleries, forment des armées, conquièrent des territoires. Les sembleurs poussent des mortels à vouer leur âme aux ténèbres, ce qui apporte en contrepartie une plus forte présence encore. Les princes des ténèbres organisent la conquête et préparent la grande guerre. Et lorsque l'équilibre des forces bascule... c'est le bain de sang général, pour faire complètement sombrer le monde dans les ténèbres.
- Oh... mais ça marcherait aussi sur Terre ?
- Ce serait plus difficile, mais oui, elles peuvent y parvenir. Tu imagines un sembleur aux commandes d'un pays, lançant une guerre nucléaire ? Ou l'équivalent de ton époque. Le monde après ça tomberait très facilement dans les mains des ténèbres.
- Argh. J'espère qu'on n'en arrivera pas là.
- Moi aussi... mais c'est une guerre contre le temps, et on est en train d'en perdre.
Déprimé, je retourne à mon sac, vérifiant mes affaires et les rangeant plus proprement. Je retourne dans ma chambre faire un brin de toilette et m'allonge pour récupérer un peu. Le sort d'énergie ne repose pas vraiment les muscles, ai-je appris auprès de Thibault, et je leur offre donc un peu de répit.
Les ténèbres ne vont pas nous chercher ici. C'est bien inutile : elles n'ont qu'à attendre qu'on cherche à sortir de la ville. Quelque chose me dit que ça va être chaud. Les gens de ce monde ont des armes à feu et savent s'en servir.
Je retourne en parler avec les autres. Ils en sont bien conscients.
- Je crains fort que ce monde ne soit proche de basculer à son tour. J'ai la certitude qu'il y a déjà au moins un prince des ténèbres qui dirige les choses.
- Je ne veux pas laisser une telle chose arriver !
Mon exclamation surprend tout le monde, moi y compris, mais c'est venu du fond du cœur. Je connais à peine ce monde, ses habitants, mais l'idée de ce qui les attend m'est intolérable.
- Nous non plus, dit Ludvik. Nous ferons tout pour éviter que cela arrive.
- Alors, avez-vous une idée pour nous sortir d'ici ?
Il ne faut jamais mettre au défi un archimage, me dis-je alors que nous franchissons les portes de la ville, chargés de fardeaux. Il a toujours dix idées pour se tirer d'affaire, mais je dois avouer que là, il m'a bluffé. Je me souviens que nous avions croisé, alors que nous venions d'arriver dans la ville, un marchand avec son âne de bât. Et voilà qu'un autre marchand chantonne à nos côtés, ravi de sa bonne affaire. Pensez donc : onze ânes robustes et dociles, à un prix dérisoire !
Faites-moi penser à étrangler Cédric, quand j'aurai à nouveau des mains...
Mais je dois reconnaître que son idée est tout simplement géniale : nul ne nous inquiète alors que nous nous éloignons de la cité. Ça marche tellement bien que Cédric décide qu'on est très bien comme ça pour le moment. Ou alors, il a oublié comment on lance le sort inverse.
Le soir venu, l'un d'entre nous exprime bruyamment son mécontentement. Ou son inquiétude.
Mais aucune réponse ne vient, jusqu'à ce que le marchand et sa garde établissent un campement. Nous devons patienter jusqu'au milieu de la nuit avant de retrouver forme humaine, tandis que les gardes s'effondrent, pris de sommeil.
- Il était temps ! Que s'est-il passé ?
- J'ai décidé d'attendre que nous soyons loin de la ville. Fini de fuir à l'aveuglette, je vais d'abord faire ma divination, et ensuite on avisera. Et par ailleurs, si les agents des ténèbres croient que nous sommes encore dans la ville, nous aurons plus de tranquillité.
Bien raisonné. Cédric s'installe en tailleur et ferme les yeux, murmurant des paroles inaudibles. Il oscille légèrement d'avant en arrière, son esprit ouvert aux dimensions extérieures, et finit par revenir auprès de nous.
- Une semaine, et nous croiserons Tenerba. Il va falloir tenir une semaine...
- Où allons-nous aller ?
- Loin. J'espère trouver un pays qui n'a pas succombé à la mode du Chrystal. Mais nous allons devoir attendre le retour du soleil.
Le soleil... je pensais avoir tout vu, mais non. Il y a un corps qui tourne autour de lui et l'éclipse régulièrement, faisant alterner le jour et la nuit sur ce monde étrange. Aux limites nord et sud, une bande de feu éclaire l'horizon : toute la zone qui n'est jamais éclipsée. Il ne doit pas faire froid, là-bas. Nous organisons des tours de garde et attendons l'aube avec impatience. Alors que le pays se révèle de nouveau à nos yeux, Cédric libère les gardes de leur sommeil et nous téléporte aux limites de la vision, dans une région côtière.
Nous repérons un village côtier et y descendons, ravis de pouvoir nous y installer pour un temps. Nous trouvons les portes barricadées mais les gardes nous laissent entrer. Les attaques de monstres sont plus fréquentes ces derniers temps, disent-ils. Nous promettons de les aider en cas d'attaque, et gagnons leur amitié. Mais une clameur issue du rivage se fait entendre, et nous dégainons nos armes : les habitants fuient la mer, d'où émergent des kappas en nombre. Nous n'aurons la paix nulle part, dans ce monde au bord des ténèbres. Mais nous sommes prêts nous battre pour elle.
- Mais... mais... je rêve !
Cédric regarde d'un air ahuri le fragment de Chrystal qui trône dans la chambre.
- Oh oh... on a bien choisi notre endroit, tiens.
- J'en ai un aussi dans ma chambre, marmonne Thibault.
- Je vais poser la question, dit Thomas, mais je commence à savoir ce que le mineur voulait trouver.
Il revient bientôt, l'air sombre.
- Ces cristaux font fureur depuis plus de dix ans, tout le monde se les arrache pour décorer sa maison. Il y en a plein la ville.
- Oh bon sang... on s'est fait piéger comme des bleus. Impossible de se téléporter hors de la ville, et impossible de fuir sans être repérés. Et je ne pourrai toujours pas faire de divination.
- Je n'arrive plus à entrer en contact avec les esprits, dit Uria en arrivant. Oh, vous en avez aussi ici.
Nous tentons de trouver un plan, mais c'est sans issue. Soit nous partons maintenant, sans aucune garantie de pouvoir sortir sans problème, et nous aurons à nouveau affaire aux hordes des ténèbres, soit nous attendons qu'elles viennent nous chercher ici.
- Nous avons besoin de nous remettre de l'assaut. Un peu de repos, on prépare nos armes, et on s'en va. Dès qu'on sera hors de portée, je nous téléporterai au loin.
Cédric commence à nettoyer ses carreaux et à les insérer dans le réservoir latéral de ses arbalètes. Je suis fasciné par leur mécanique sophistiquée.
- Tu as toujours ton bâton ?
- Celui qui était devenu une Arme de Lumière a été détruit, mais j'en ai fabriqué un autre. Il n'est pas aussi performant, faute de moteurs et d'électronique, mais j'ai fait de mon mieux.
- C'est vraiment incroyable ce que tu arrives à faire dans ce monde.
- Merci. Rien que beaucoup de patience et de volonté ne puissent résoudre.
- Nettoie ton arme et affûte-là, me lance Finnadan.
- Euh, oui.
Je frissonne en nettoyant la lame de mon épée, me disant que j'ai réellement été confronté aux ténèbres, et qu'elles risquent de se répandre sur Terre.
Et ? Ces oiseaux de malheur ne feraient pas long feu contre des armes modernes.
- Il y a quelque chose que je ne comprends pas... j'ai étudié les créatures des ténèbres en classe, et j'en ai certes affronté quelques-unes, mais... quel danger représentent-elles réellement ? Je veux dire, il y a toujours des gens ici, alors qu'il y a des hurleurs, des sembleurs, et que sais-je encore.
- Elles viennent, peu nombreuses au début, explique Cédric. Elles se reproduisent. Elles tuent au hasard, sauvagement. Chaque mort sanglante apporte un peu de ténèbres en ce monde, mais chaque créature tuée en retire. Aussi évitent-elles les grands rassemblements humains, au début du moins. Puis, à mesure que l'énergie des ténèbres se répand, de nouvelles créatures apparaissent, toujours plus puissantes et meurtrières. Les lames noires bâtissent des citadelles par sorcelleries, forment des armées, conquièrent des territoires. Les sembleurs poussent des mortels à vouer leur âme aux ténèbres, ce qui apporte en contrepartie une plus forte présence encore. Les princes des ténèbres organisent la conquête et préparent la grande guerre. Et lorsque l'équilibre des forces bascule... c'est le bain de sang général, pour faire complètement sombrer le monde dans les ténèbres.
- Oh... mais ça marcherait aussi sur Terre ?
- Ce serait plus difficile, mais oui, elles peuvent y parvenir. Tu imagines un sembleur aux commandes d'un pays, lançant une guerre nucléaire ? Ou l'équivalent de ton époque. Le monde après ça tomberait très facilement dans les mains des ténèbres.
- Argh. J'espère qu'on n'en arrivera pas là.
- Moi aussi... mais c'est une guerre contre le temps, et on est en train d'en perdre.
Déprimé, je retourne à mon sac, vérifiant mes affaires et les rangeant plus proprement. Je retourne dans ma chambre faire un brin de toilette et m'allonge pour récupérer un peu. Le sort d'énergie ne repose pas vraiment les muscles, ai-je appris auprès de Thibault, et je leur offre donc un peu de répit.
Les ténèbres ne vont pas nous chercher ici. C'est bien inutile : elles n'ont qu'à attendre qu'on cherche à sortir de la ville. Quelque chose me dit que ça va être chaud. Les gens de ce monde ont des armes à feu et savent s'en servir.
Je retourne en parler avec les autres. Ils en sont bien conscients.
- Je crains fort que ce monde ne soit proche de basculer à son tour. J'ai la certitude qu'il y a déjà au moins un prince des ténèbres qui dirige les choses.
- Je ne veux pas laisser une telle chose arriver !
Mon exclamation surprend tout le monde, moi y compris, mais c'est venu du fond du cœur. Je connais à peine ce monde, ses habitants, mais l'idée de ce qui les attend m'est intolérable.
- Nous non plus, dit Ludvik. Nous ferons tout pour éviter que cela arrive.
- Alors, avez-vous une idée pour nous sortir d'ici ?
Il ne faut jamais mettre au défi un archimage, me dis-je alors que nous franchissons les portes de la ville, chargés de fardeaux. Il a toujours dix idées pour se tirer d'affaire, mais je dois avouer que là, il m'a bluffé. Je me souviens que nous avions croisé, alors que nous venions d'arriver dans la ville, un marchand avec son âne de bât. Et voilà qu'un autre marchand chantonne à nos côtés, ravi de sa bonne affaire. Pensez donc : onze ânes robustes et dociles, à un prix dérisoire !
Faites-moi penser à étrangler Cédric, quand j'aurai à nouveau des mains...
Mais je dois reconnaître que son idée est tout simplement géniale : nul ne nous inquiète alors que nous nous éloignons de la cité. Ça marche tellement bien que Cédric décide qu'on est très bien comme ça pour le moment. Ou alors, il a oublié comment on lance le sort inverse.
Le soir venu, l'un d'entre nous exprime bruyamment son mécontentement. Ou son inquiétude.
Mais aucune réponse ne vient, jusqu'à ce que le marchand et sa garde établissent un campement. Nous devons patienter jusqu'au milieu de la nuit avant de retrouver forme humaine, tandis que les gardes s'effondrent, pris de sommeil.
- Il était temps ! Que s'est-il passé ?
- J'ai décidé d'attendre que nous soyons loin de la ville. Fini de fuir à l'aveuglette, je vais d'abord faire ma divination, et ensuite on avisera. Et par ailleurs, si les agents des ténèbres croient que nous sommes encore dans la ville, nous aurons plus de tranquillité.
Bien raisonné. Cédric s'installe en tailleur et ferme les yeux, murmurant des paroles inaudibles. Il oscille légèrement d'avant en arrière, son esprit ouvert aux dimensions extérieures, et finit par revenir auprès de nous.
- Une semaine, et nous croiserons Tenerba. Il va falloir tenir une semaine...
- Où allons-nous aller ?
- Loin. J'espère trouver un pays qui n'a pas succombé à la mode du Chrystal. Mais nous allons devoir attendre le retour du soleil.
Le soleil... je pensais avoir tout vu, mais non. Il y a un corps qui tourne autour de lui et l'éclipse régulièrement, faisant alterner le jour et la nuit sur ce monde étrange. Aux limites nord et sud, une bande de feu éclaire l'horizon : toute la zone qui n'est jamais éclipsée. Il ne doit pas faire froid, là-bas. Nous organisons des tours de garde et attendons l'aube avec impatience. Alors que le pays se révèle de nouveau à nos yeux, Cédric libère les gardes de leur sommeil et nous téléporte aux limites de la vision, dans une région côtière.
Nous repérons un village côtier et y descendons, ravis de pouvoir nous y installer pour un temps. Nous trouvons les portes barricadées mais les gardes nous laissent entrer. Les attaques de monstres sont plus fréquentes ces derniers temps, disent-ils. Nous promettons de les aider en cas d'attaque, et gagnons leur amitié. Mais une clameur issue du rivage se fait entendre, et nous dégainons nos armes : les habitants fuient la mer, d'où émergent des kappas en nombre. Nous n'aurons la paix nulle part, dans ce monde au bord des ténèbres. Mais nous sommes prêts nous battre pour elle.
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Série des secrets : One shots La saga d'outremonde (fantastique avec des personnages gays)
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