10-12-2021, 10:24 PM
Un dernier (?) texte sur l'image de la brasserie japonaise
Un soir de semaine au bar du Marais où j’ai mes habitudes.
Je sirote tranquillement ma bière. A quelques tables de là, presque en bordure de mon champ de vision, un jeune blond, assez mignon. Il a gardé son imperméable, et il tapote sur une tablette. En fait, il alterne entre le téléphone et la tablette. Il tchatte, il lit ses mails, probablement. Sa tâche n’a pas l’air trop absorbante. Il lève les yeux. Nos regards se croisent. Je crois déceler une brève lueur d’intérêt, mais il replonge aussitôt dans ses activités numériques.
C’est la troisième fois que ça arrive depuis une heure. Le gars ne me fait pas le coup du mépris, consistant à vite regarder ailleurs comme s’il ne me voyait pas. Mais il ne témoigne pas non plus un intérêt marqué, pas de sourire, et il ne soutient pas le regard.
Alors j’ai posé la question à Tony, le barman, qui vaquait tranquillement à ses occupations derrière le comptoir. Plutôt beau mec, mais marié, père de famille (il a trois gosses en bas âge) et désespérément hétéro. Il y a bien des mecs mariés que ça ne gênerait pas trop d’aller tirer un coup, en passant, avec un homme, mais pas lui, aux dires de ceux qui s’y sont essayé. Comment s’est-il retrouvé barman dans un établissement dont la clientèle est majoritairement gay, c’est un peu un mystère. Le patron trouve que ça fait peut-être plus chic.
Tony est un type sympa, j’aime bien discuter avec lui, et là il semble disponible.
— Dis-moi, Tony, tu le connais, le petit blond qui est trois tables derrière ?
— Je ne le connais pas vraiment. Il vient depuis quelques semaines, assez régulièrement, il reste souvent le soir un petit moment.
— Tu l’a déjà vu avec quelqu’un ?
— Non, il est toujours seul, et il n’a pas l’air très liant. Mario a essayé de l’aborder, mais il s’est pris une veste.
Mario c’est un grand dragueur, sympa, mais un peu envahissant. Plutôt un bon point pour notre bel inconnu.
— Et tu sais comment il s’appelle ?
— Aucune idée ! Il faudrait peut-être que tu lui demandes.
— Il me plait bien, mais je crois qu’il évite un peu mon regard. Tu crois que je dois tenter ma chance ?
— A toi de voir, mais tu n’as pas grand-chose à perdre…
Et puis Tony est pris par des clients, et je reçois un message dont la lecture requiert mon attention. Quand j’émerge, le beau jeune homme est parti.
Le même scénario se reproduit quelques jours plus tard. J’observe ce beau gosse un peu plus attentivement, et, plus je le regarde, plus je suis attiré. Il a un air innocent et candide qui me fait fondre. Mais j’ai aussi peur d’être trop direct et de le faire fuir par une approche trop abrupte. Alors, je reste vigilant, j’attends une ouverture. Laquelle ouverture ne vient pas, il reste dans son coin et moi dans le mien.
La semaine suivante, j’en reparle à Tony le barman.
— Ecoute, je le trouve vraiment mignon, ce gars, c’est tout à fait mon genre, mais il a l’air tellement innocent que je crains un peu de me lancer, je ne voudrais pas être l’éléphant dans le magasin de porcelaine.
Ce à quoi Tony soupire et répond d’un ton bourru :
— Tu as vu les images d’oiseaux accrochées aux murs ? Eh bien, il y a en a au moins un auquel tu me fais penser.
Au vu de mon air dubitatif, il insiste :
— Cherche un peu.
Du coup, je me lance :
— Pas l’aigle, ça c’est sûr, mais pas le faisan, non plus, ni le perdreau, je ne vois pas trop en fait.
— Fais un effort.
— La poule, la grive, le pigeon… Non, désolé, je ne vois pas.
— Bon, je vais t’aider, tu connais la fable ?
—Laquelle ?
— C’est un héron qui se promène dans un ruisseau, il voit un brochet, une carpe, il pourrait les attraper, mais il trouve que c’est un peu tôt, il manque d’appétit. Il préfère attendre. Il trouve ensuite des goujons, mais c’est trop petit. Et vers l’heure de midi, il ne trouve plus rien, il finit par manger une grenouille, et il reste un peu sur sa faim.
— Et que dois-je en tirer comme conclusion ?
— Attendre, ça ne fera pas avancer tes affaires, c’est clair. Et même si tu prends un râteau, tu n’auras pas perdu grand-chose.
Je suis convaincu par le bon sens de cette réflexion.
— Que boit-il, le jeune homme ? Tu m’en mets deux, et j’irai le voir.
Ainsi fut dit, ainsi fut fait, et l’entreprise fut couronnée de succès. Mon nouvel ami s’appellait Ludovic, il était adorable, c’était un grand timide. Il a fini la soirée dans mon lit, où là il n’a pas manqué d’audace, mais je ne vais pas vous raconter ça, quand même ?
Un soir de semaine au bar du Marais où j’ai mes habitudes.
Je sirote tranquillement ma bière. A quelques tables de là, presque en bordure de mon champ de vision, un jeune blond, assez mignon. Il a gardé son imperméable, et il tapote sur une tablette. En fait, il alterne entre le téléphone et la tablette. Il tchatte, il lit ses mails, probablement. Sa tâche n’a pas l’air trop absorbante. Il lève les yeux. Nos regards se croisent. Je crois déceler une brève lueur d’intérêt, mais il replonge aussitôt dans ses activités numériques.
C’est la troisième fois que ça arrive depuis une heure. Le gars ne me fait pas le coup du mépris, consistant à vite regarder ailleurs comme s’il ne me voyait pas. Mais il ne témoigne pas non plus un intérêt marqué, pas de sourire, et il ne soutient pas le regard.
Alors j’ai posé la question à Tony, le barman, qui vaquait tranquillement à ses occupations derrière le comptoir. Plutôt beau mec, mais marié, père de famille (il a trois gosses en bas âge) et désespérément hétéro. Il y a bien des mecs mariés que ça ne gênerait pas trop d’aller tirer un coup, en passant, avec un homme, mais pas lui, aux dires de ceux qui s’y sont essayé. Comment s’est-il retrouvé barman dans un établissement dont la clientèle est majoritairement gay, c’est un peu un mystère. Le patron trouve que ça fait peut-être plus chic.
Tony est un type sympa, j’aime bien discuter avec lui, et là il semble disponible.
— Dis-moi, Tony, tu le connais, le petit blond qui est trois tables derrière ?
— Je ne le connais pas vraiment. Il vient depuis quelques semaines, assez régulièrement, il reste souvent le soir un petit moment.
— Tu l’a déjà vu avec quelqu’un ?
— Non, il est toujours seul, et il n’a pas l’air très liant. Mario a essayé de l’aborder, mais il s’est pris une veste.
Mario c’est un grand dragueur, sympa, mais un peu envahissant. Plutôt un bon point pour notre bel inconnu.
— Et tu sais comment il s’appelle ?
— Aucune idée ! Il faudrait peut-être que tu lui demandes.
— Il me plait bien, mais je crois qu’il évite un peu mon regard. Tu crois que je dois tenter ma chance ?
— A toi de voir, mais tu n’as pas grand-chose à perdre…
Et puis Tony est pris par des clients, et je reçois un message dont la lecture requiert mon attention. Quand j’émerge, le beau jeune homme est parti.
Le même scénario se reproduit quelques jours plus tard. J’observe ce beau gosse un peu plus attentivement, et, plus je le regarde, plus je suis attiré. Il a un air innocent et candide qui me fait fondre. Mais j’ai aussi peur d’être trop direct et de le faire fuir par une approche trop abrupte. Alors, je reste vigilant, j’attends une ouverture. Laquelle ouverture ne vient pas, il reste dans son coin et moi dans le mien.
La semaine suivante, j’en reparle à Tony le barman.
— Ecoute, je le trouve vraiment mignon, ce gars, c’est tout à fait mon genre, mais il a l’air tellement innocent que je crains un peu de me lancer, je ne voudrais pas être l’éléphant dans le magasin de porcelaine.
Ce à quoi Tony soupire et répond d’un ton bourru :
— Tu as vu les images d’oiseaux accrochées aux murs ? Eh bien, il y a en a au moins un auquel tu me fais penser.
Au vu de mon air dubitatif, il insiste :
— Cherche un peu.
Du coup, je me lance :
— Pas l’aigle, ça c’est sûr, mais pas le faisan, non plus, ni le perdreau, je ne vois pas trop en fait.
— Fais un effort.
— La poule, la grive, le pigeon… Non, désolé, je ne vois pas.
— Bon, je vais t’aider, tu connais la fable ?
—Laquelle ?
— C’est un héron qui se promène dans un ruisseau, il voit un brochet, une carpe, il pourrait les attraper, mais il trouve que c’est un peu tôt, il manque d’appétit. Il préfère attendre. Il trouve ensuite des goujons, mais c’est trop petit. Et vers l’heure de midi, il ne trouve plus rien, il finit par manger une grenouille, et il reste un peu sur sa faim.
— Et que dois-je en tirer comme conclusion ?
— Attendre, ça ne fera pas avancer tes affaires, c’est clair. Et même si tu prends un râteau, tu n’auras pas perdu grand-chose.
Je suis convaincu par le bon sens de cette réflexion.
— Que boit-il, le jeune homme ? Tu m’en mets deux, et j’irai le voir.
Ainsi fut dit, ainsi fut fait, et l’entreprise fut couronnée de succès. Mon nouvel ami s’appellait Ludovic, il était adorable, c’était un grand timide. Il a fini la soirée dans mon lit, où là il n’a pas manqué d’audace, mais je ne vais pas vous raconter ça, quand même ?
Some girls can make my day, but only boys make my hole weak.