06-09-2021, 09:25 PM
5 - Transition
Marseille, France
Marc s'est allongé sur mon canapé et s'est endormi aussitôt. Son état m'inquiète un peu, mais je pense qu'il doit s'agir d'épuisement. La Lumière sait ce qu'il peut avoir vécu.
Les heures qui s'écoulent me semblent interminables, mais j'entends soudain une moto s'arrêter devant chez moi. Je regarde par la fenêtre et découvre une silhouette familière, mais j'attends de le voir sans son casque avant d'ouvrir.
- Ludo ! Ça va ?
- Non... Un enfoiré a balancé ma moto dans le jardin du voisin avant d'essayer de me tuer.
- Merde...
- Tu ne crois pas si bien dire, vu que c'était celui que je considérais comme mon meilleur ami. Un protecteur.
- Je suis désolé.
- Pfff... Ah, bordel !
Il entre chez moi en égrenant un chapelet de jurons et remarque Marc endormi sur mon canapé. Il s'agenouille alors près de lui en caressant son visage et en l'appelant doucement.
- Il y avait un rêveur chez lui.
- Non... Ce n'est pas possible !
- Il servait les ténèbres. Il était en lien direct avec un prince des ténèbres qui le manipulait comme un pantin. Il a investi son corps pendant que je lui faisait face.
- Quoi ?! Et qu'a-t-il fait à Marc ?
- Il l'a envoyé dans le royaume des ténèbres pour l'examiner... J'ai pu obtenir qu'il nous le ramène.
Ludo me regarde complètement stupéfait.
- Comment as-tu réussi une chose pareille ?
- J'ai négocié une trêve... à leur manière, les ténèbres sont plus accessibles à la négociation que nos adversaires.
- Hum...
Il retourne à son homme.
- Je pense qu'il a besoin de sommeil. Il était dans un état d'épuisement avancé lorsque je l'ai récupéré.
- D'accord.
- J'ai découvert quelque chose... Les ténèbres semblent avoir appris que le chef des protecteurs vise le même but que les destructeurs.
- Ah ouais ? Ça expliquerait pourquoi ils recrutent de tels psychopathes.
- Comment ça s'est fini avec le protecteur ?
- Il menaçait Marc... Il avait des hommes à lui sur place, apparemment. Je ne pouvais pas le laisser faire.
- À mon avis, le Rêveur Noir a dû s'occuper de ses complices, ainsi que des destructeurs.
- Je l'ignorais... alors, je... j'ai tué ce salaud.
- Merde, Ludo ! Tu te rends compte de ce que tu as fait ? Sur Terre...
- C'est bon, j'ai appelé Johann pour qu'il nettoie ça. Je lui ai dit qu'un protecteur m'avait attaqué et qu'il n'était pas seul, puis j'ai crié et coupé mon portable. Le temps qu'il comprenne que j'ai filé par moi-même...
- Je vois...
- Je ne peux plus attendre, je veux retrouver Marc tout de suite.
- D'accord, nous avons à parler de toute façon, inutile d'attendre son réveil.
Fillian, Royaume Signari, Outremonde
À force de passer d'un monde à l'autre, on finit par comprendre le truc. En fermant les yeux et en se concentrant, on peut forcer la transition. Ça permet de gagner du temps, et c'est vital quand notre corps est en danger dans l'un des mondes.
J'ouvre les yeux dans ma chambre, à l'auberge des trois colombes.
La nuit est tombée depuis plusieurs heures, et je dois me forcer à me lever tout en bâillant. Il est rare que je fasse un truc de ce genre. Mon corps est plus que fatigué dans ce monde, après tout ce que j'ai traversé.
Au moins, j'ai gardé mon bâton en main. C'est rassurant.
Un sort d'énergie chasse toute fatigue de mon corps.
Je m'habille et décide de laisser à Ludvik et Marc un peu de temps entre eux. J'ouvre ma porte pour sortir dans le couloir avec l'intention de patienter jusqu'à ce qu'ils sortent pour s'enquérir de moi.
Je réprime un sursaut en constatant qu'il y a quelqu'un.
Malédiction. Je n'ai lancé aucun sortilège de défense. J'ai peut-être effacé ma fatigue physique, mais j'ai dû laisser mes neurones sur Terre.
L'homme, qui se tient pile devant ma porte, une bougie à la main, est assez jeune, peut-être vingt ans à tout casser. Il a des yeux d'un bleu intense, qui me font presque oublier le reste de son visage encadré de cheveux blonds qu'il a fort longs. Je ne parviens plus à fixer autre chose que son regard hypnotique, dans lequel je suis bien près de me noyer. Une petite voix au fond de mon esprit murmure des avertissements, mais je ne suis plus à même de l'écouter pleinement. Juste avant d'abdiquer toute conscience, toutefois, je finis par avoir un sursaut de volonté et commence à engager une lutte terrible pour écarter mon regard du sien. J'ai rarement eu autant de mal à faire ce simple mouvement oculaire - mais je parviens enfin à détourner mon regard.
- Bonsoir, dit-il alors.
- Qui êtes-vous ? Dis-je en érigeant une première barrière défensive.
- Alkarn de Valden.
- Vous vouliez jouer à quoi, à essayer de m'hypnotiser ?
- Je suis vraiment désolé. Un charme actif que je n'ai pas interrompu. Voilà.
Je jette un regard rapide, mais il a effectivement annulé le sort. J'en profite pour le foudroyer du regard.
- Vous êtes fort, dit-il, c'est ce que j'ai senti en entrant dans cette auberge. En fait, j'étais devant votre porte car j'essayais de déterminer ce qui pouvait irradier une aura de pouvoir aussi puissante.
- Vous savez, maintenant.
- En effet. Je vous présente mes respects. Il ne m'avait pas été donné de rencontrer un sorcier de votre envergure, et j'ai pourtant vécu plusieurs siècles.
- Vous devez vous-même être un puissant mage, en ce cas. La jouvence n'est pas donnée. Mais je remarque maintenant la qualité de votre sort. Je trouve assez original de s'éclairer avec une illusion de bougie.
- Voir c'est croire.
- La devise des illusionnistes.
- Je ne suis pas que ça. J'ai profité de tout ce temps pour assouvir ma soif de connaissances. Je suis également sorcier, géomancien, alchimiste, enchanteur et maître des runes.
- C'est à moi de vous présenter mes respects !
Il sourit. Mon inquiétude à son égard a diminué d'un petit cran, mais pas plus.
J'ai trouvé un moyen de dissimuler l'aura de pouvoir de mon bâton en la mêlant à la mienne, ce qui fait qu'aux yeux d'un observateur sensible à la magie, c'est moi qui suis puissant. Mais si je lâchais mon arme, son aura distincte sauterait aux yeux et attirerait une attention dont je me passerais bien.
- Je serais ravi d'échanger des connaissances avec vous. J'ai pu conserver bien des savoirs oubliés... Et la baronnie de Valden est située dans une contrée plus que favorable à l'étude de l'ancienne magie.
- Voilà une proposition plus qu'alléchante... Mais quel en serait le prix ?
Il se penche vers moi, son jeune visage - qui masque un esprit très âgé et plus que brillant - est maintenant près du mien.
- Pourquoi tout devrait-il se payer ? Ne pouvons-nous pas échanger des connaissances en hommes amoureux du savoir et de sa préservation ?
- Si... et j'en serais ravi, croyez-moi, mais j'ai beaucoup à faire en ce moment. J'espère bien, toutefois, lorsque mes affaires seront réglées, vous rendre visite.
- Très bien.
- Où pourrais-je vous trouver ?
- Demandez donc le baron, dit-il en levant sa main de manière à ce que je puisse voir sa chevalière.
- Excusez-moi, je...
- Ah, non, ne m'embêtez pas avec une quelconque marque de respect. Je suis baron, pas roi.
- Comme vous voudrez...
Il sourit de nouveau. Je commence à le trouver presque sympathique... Mais je me méfie quand même. J'ai bien peu apprécié l'accueil hypnotique qu'il m'a fait.
Il se détourne et s'éloigne avant de descendre l'escalier. Je secoue la tête, perplexe, puis décide de remettre ces réflexions à plus tard. Autant rejoindre les autres maintenant.
Oubliant mon idée initiale, je frappe à la porte de la chambre qu'ils partagent. Je suis sûr que le deuxième lit n'a pas servi.
- Entre.
Je trouve Ludvik et Marc assis sur l'un des lits. Marc, serré dans les bras de son homme, a posé sa tête sur son épaule, et Ludo le couve du regard. Je le comprends. Il a bien failli le perdre à jamais.
- Cédric, je ne te remercierai jamais assez pour ce que tu as fait.
- C'est bien normal.
- Tu as mis ta vie en jeu pour sauver Marc, alors que tu le connais à peine !
- Je te connais, toi. Ça me suffit.
- Depuis quelques jours seulement...
- Nous nous sommes mutuellement sauvés ces derniers temps. Assez avec ça. Je le referais sans l'ombre d'une hésitation.
Marc tourne enfin son regard vers moi.
- Merci, de tout cœur, merci. Ce que j'ai vécu là-bas était horrible. Je te dois plus que la vie.
- Assez, j'ai dit. Nous devons discuter de ce que nous allons faire.
J'élève une barrière de silence devant la porte et nous commençons à échanger nos informations.
Marseille, France
Marc s'est allongé sur mon canapé et s'est endormi aussitôt. Son état m'inquiète un peu, mais je pense qu'il doit s'agir d'épuisement. La Lumière sait ce qu'il peut avoir vécu.
Les heures qui s'écoulent me semblent interminables, mais j'entends soudain une moto s'arrêter devant chez moi. Je regarde par la fenêtre et découvre une silhouette familière, mais j'attends de le voir sans son casque avant d'ouvrir.
- Ludo ! Ça va ?
- Non... Un enfoiré a balancé ma moto dans le jardin du voisin avant d'essayer de me tuer.
- Merde...
- Tu ne crois pas si bien dire, vu que c'était celui que je considérais comme mon meilleur ami. Un protecteur.
- Je suis désolé.
- Pfff... Ah, bordel !
Il entre chez moi en égrenant un chapelet de jurons et remarque Marc endormi sur mon canapé. Il s'agenouille alors près de lui en caressant son visage et en l'appelant doucement.
- Il y avait un rêveur chez lui.
- Non... Ce n'est pas possible !
- Il servait les ténèbres. Il était en lien direct avec un prince des ténèbres qui le manipulait comme un pantin. Il a investi son corps pendant que je lui faisait face.
- Quoi ?! Et qu'a-t-il fait à Marc ?
- Il l'a envoyé dans le royaume des ténèbres pour l'examiner... J'ai pu obtenir qu'il nous le ramène.
Ludo me regarde complètement stupéfait.
- Comment as-tu réussi une chose pareille ?
- J'ai négocié une trêve... à leur manière, les ténèbres sont plus accessibles à la négociation que nos adversaires.
- Hum...
Il retourne à son homme.
- Je pense qu'il a besoin de sommeil. Il était dans un état d'épuisement avancé lorsque je l'ai récupéré.
- D'accord.
- J'ai découvert quelque chose... Les ténèbres semblent avoir appris que le chef des protecteurs vise le même but que les destructeurs.
- Ah ouais ? Ça expliquerait pourquoi ils recrutent de tels psychopathes.
- Comment ça s'est fini avec le protecteur ?
- Il menaçait Marc... Il avait des hommes à lui sur place, apparemment. Je ne pouvais pas le laisser faire.
- À mon avis, le Rêveur Noir a dû s'occuper de ses complices, ainsi que des destructeurs.
- Je l'ignorais... alors, je... j'ai tué ce salaud.
- Merde, Ludo ! Tu te rends compte de ce que tu as fait ? Sur Terre...
- C'est bon, j'ai appelé Johann pour qu'il nettoie ça. Je lui ai dit qu'un protecteur m'avait attaqué et qu'il n'était pas seul, puis j'ai crié et coupé mon portable. Le temps qu'il comprenne que j'ai filé par moi-même...
- Je vois...
- Je ne peux plus attendre, je veux retrouver Marc tout de suite.
- D'accord, nous avons à parler de toute façon, inutile d'attendre son réveil.
Fillian, Royaume Signari, Outremonde
À force de passer d'un monde à l'autre, on finit par comprendre le truc. En fermant les yeux et en se concentrant, on peut forcer la transition. Ça permet de gagner du temps, et c'est vital quand notre corps est en danger dans l'un des mondes.
J'ouvre les yeux dans ma chambre, à l'auberge des trois colombes.
La nuit est tombée depuis plusieurs heures, et je dois me forcer à me lever tout en bâillant. Il est rare que je fasse un truc de ce genre. Mon corps est plus que fatigué dans ce monde, après tout ce que j'ai traversé.
Au moins, j'ai gardé mon bâton en main. C'est rassurant.
Un sort d'énergie chasse toute fatigue de mon corps.
Je m'habille et décide de laisser à Ludvik et Marc un peu de temps entre eux. J'ouvre ma porte pour sortir dans le couloir avec l'intention de patienter jusqu'à ce qu'ils sortent pour s'enquérir de moi.
Je réprime un sursaut en constatant qu'il y a quelqu'un.
Malédiction. Je n'ai lancé aucun sortilège de défense. J'ai peut-être effacé ma fatigue physique, mais j'ai dû laisser mes neurones sur Terre.
L'homme, qui se tient pile devant ma porte, une bougie à la main, est assez jeune, peut-être vingt ans à tout casser. Il a des yeux d'un bleu intense, qui me font presque oublier le reste de son visage encadré de cheveux blonds qu'il a fort longs. Je ne parviens plus à fixer autre chose que son regard hypnotique, dans lequel je suis bien près de me noyer. Une petite voix au fond de mon esprit murmure des avertissements, mais je ne suis plus à même de l'écouter pleinement. Juste avant d'abdiquer toute conscience, toutefois, je finis par avoir un sursaut de volonté et commence à engager une lutte terrible pour écarter mon regard du sien. J'ai rarement eu autant de mal à faire ce simple mouvement oculaire - mais je parviens enfin à détourner mon regard.
- Bonsoir, dit-il alors.
- Qui êtes-vous ? Dis-je en érigeant une première barrière défensive.
- Alkarn de Valden.
- Vous vouliez jouer à quoi, à essayer de m'hypnotiser ?
- Je suis vraiment désolé. Un charme actif que je n'ai pas interrompu. Voilà.
Je jette un regard rapide, mais il a effectivement annulé le sort. J'en profite pour le foudroyer du regard.
- Vous êtes fort, dit-il, c'est ce que j'ai senti en entrant dans cette auberge. En fait, j'étais devant votre porte car j'essayais de déterminer ce qui pouvait irradier une aura de pouvoir aussi puissante.
- Vous savez, maintenant.
- En effet. Je vous présente mes respects. Il ne m'avait pas été donné de rencontrer un sorcier de votre envergure, et j'ai pourtant vécu plusieurs siècles.
- Vous devez vous-même être un puissant mage, en ce cas. La jouvence n'est pas donnée. Mais je remarque maintenant la qualité de votre sort. Je trouve assez original de s'éclairer avec une illusion de bougie.
- Voir c'est croire.
- La devise des illusionnistes.
- Je ne suis pas que ça. J'ai profité de tout ce temps pour assouvir ma soif de connaissances. Je suis également sorcier, géomancien, alchimiste, enchanteur et maître des runes.
- C'est à moi de vous présenter mes respects !
Il sourit. Mon inquiétude à son égard a diminué d'un petit cran, mais pas plus.
J'ai trouvé un moyen de dissimuler l'aura de pouvoir de mon bâton en la mêlant à la mienne, ce qui fait qu'aux yeux d'un observateur sensible à la magie, c'est moi qui suis puissant. Mais si je lâchais mon arme, son aura distincte sauterait aux yeux et attirerait une attention dont je me passerais bien.
- Je serais ravi d'échanger des connaissances avec vous. J'ai pu conserver bien des savoirs oubliés... Et la baronnie de Valden est située dans une contrée plus que favorable à l'étude de l'ancienne magie.
- Voilà une proposition plus qu'alléchante... Mais quel en serait le prix ?
Il se penche vers moi, son jeune visage - qui masque un esprit très âgé et plus que brillant - est maintenant près du mien.
- Pourquoi tout devrait-il se payer ? Ne pouvons-nous pas échanger des connaissances en hommes amoureux du savoir et de sa préservation ?
- Si... et j'en serais ravi, croyez-moi, mais j'ai beaucoup à faire en ce moment. J'espère bien, toutefois, lorsque mes affaires seront réglées, vous rendre visite.
- Très bien.
- Où pourrais-je vous trouver ?
- Demandez donc le baron, dit-il en levant sa main de manière à ce que je puisse voir sa chevalière.
- Excusez-moi, je...
- Ah, non, ne m'embêtez pas avec une quelconque marque de respect. Je suis baron, pas roi.
- Comme vous voudrez...
Il sourit de nouveau. Je commence à le trouver presque sympathique... Mais je me méfie quand même. J'ai bien peu apprécié l'accueil hypnotique qu'il m'a fait.
Il se détourne et s'éloigne avant de descendre l'escalier. Je secoue la tête, perplexe, puis décide de remettre ces réflexions à plus tard. Autant rejoindre les autres maintenant.
Oubliant mon idée initiale, je frappe à la porte de la chambre qu'ils partagent. Je suis sûr que le deuxième lit n'a pas servi.
- Entre.
Je trouve Ludvik et Marc assis sur l'un des lits. Marc, serré dans les bras de son homme, a posé sa tête sur son épaule, et Ludo le couve du regard. Je le comprends. Il a bien failli le perdre à jamais.
- Cédric, je ne te remercierai jamais assez pour ce que tu as fait.
- C'est bien normal.
- Tu as mis ta vie en jeu pour sauver Marc, alors que tu le connais à peine !
- Je te connais, toi. Ça me suffit.
- Depuis quelques jours seulement...
- Nous nous sommes mutuellement sauvés ces derniers temps. Assez avec ça. Je le referais sans l'ombre d'une hésitation.
Marc tourne enfin son regard vers moi.
- Merci, de tout cœur, merci. Ce que j'ai vécu là-bas était horrible. Je te dois plus que la vie.
- Assez, j'ai dit. Nous devons discuter de ce que nous allons faire.
J'élève une barrière de silence devant la porte et nous commençons à échanger nos informations.
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Série des secrets : One shots La saga d'outremonde (fantastique avec des personnages gays)
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