CHAPITRE V (1/2)
La voiture est chargée. J’ai embrassé les filles en leurs laissant l’appartement. Caroline m’a fait un énorme câlin encore plus appuyé que d’habitude, comme si elle avait quelque chose à se faire pardonner. Mais je sais. Enfin non, je suppose. Disons que je me laisse le temps parce que j’ai besoin de me préparer à digérer ce qui ne m’était jamais venu à l’esprit auparavant et s’impose maintenant comme une évidence.
- Bonne route et ne roule pas comme un dingue. Tu as tout ton temps.
- C’est fou, je crois entendre ta mère.
- C’est que je te connais. Rappelle moi combien il te reste de points sur le permis ?
- Presque autant que toi ma chérie. Mais ne t’inquiète pas, je t’appelle dès que je suis à Nice.
- Je t’aime papa. Fais bien attention à toi. On se retrouve à la châtaigneraie la semaine prochaine.
- Super ! Et pas de bêtises toutes les deux.
- Ben ! Pourquoi veux-tu qu’on fasse des bêtises. On s’entend trop bien Léa et moi et puis si on a un soucis, maman est toujours là.
- Bon allez je vous laisse. J’ai encore de la route à faire.
J’ai abandonné Léa et Caroline sur le bord du trottoir et dans le rétroviseur de ma Mercedes, avant que leurs silhouettes ne disparaissent derrière le premier virage, j’ai vu les filles reprendre le chemin de l’appartement, la main dans la main, heureuses j’en suis certain, de se retrouver seules dans l’intimité de leur couple.
Compliqué pour un père de se rendre à l’évidence. Caroline n’est pas comme les autres. Enfin comme la majorité des autres. Léa n’est pas non plus comme les autres et outre sa beauté remarquable, il y a ce petit quelque chose qui fait qu’elle est différente. Mais en quoi sont-elles si différentes ? Je ne sais pas dire et c'est dérangeant, probablement la preuve que je fais fausse route. Tout est brouillé dans mon esprit. Je ne sais pas si c’est bien. Je ne sais pas si c’est mal et si c’est le cas, en quoi serait-ce mal ? Je suis noyé dans mes incertitudes, conscient que mes convictions sont en train de prendre l’eau.
Elles sont sympathiques, joueuses, rêveuses, admirables toutes les deux et pourtant je comprends que dans leur schéma, il n’y aura aucune place pour la gente masculine. Je vois d’ici la déception d’Eléna qui aimerait, je suis sûr, être grand-mère à un âge où elle pourrait encore établir une complicité avec ses petits enfants et là, je crois que c’est plutôt mal parti. Et puis, il y a le regard des autres, de la famille qui ne vont pas comprendre, des amis qui moins concernés, seront plus indulgents.
Je fouille dans ma mémoire à la recherche de moments où j’aurais pu inciter, provoquer mais je ne trouve rien. Aucun indice aussi du côté d’Eléna. Nous avons tous les deux élevé Caroline en notre âme et conscience, pour qu’elle puisse, armée de notre expérience, porter seule le flambeau de sa vie, selon ses propres concepts. Et maintenant qu’on est au pied du mur, qu’elle a choisi ce qui lui semble être le mieux pour elle, pourrait-on être capable de la blâmer ? Non, c’est stupide. Totalement stupide.
Je comprends que le voyage va être long, très long, engoncé dans mes pensées divergentes et opposées qui me tiraillent de toutes parts ; tous ces dilemmes qui me sautent à la figure. Je sais que je ne trouverai pas la solution parce qu’elle est déjà devant mes yeux et qu’il me faut juste l’accepter.
Je veux penser à autre chose, éviter de me prendre la tête pendant les douze heures du trajet qu’il me reste à parcourir. Mais lorsqu'un sujet taraude l'esprit, compliqué de l'évacuer aussi simplement.
La voiture est chargée. J’ai embrassé les filles en leurs laissant l’appartement. Caroline m’a fait un énorme câlin encore plus appuyé que d’habitude, comme si elle avait quelque chose à se faire pardonner. Mais je sais. Enfin non, je suppose. Disons que je me laisse le temps parce que j’ai besoin de me préparer à digérer ce qui ne m’était jamais venu à l’esprit auparavant et s’impose maintenant comme une évidence.
- Bonne route et ne roule pas comme un dingue. Tu as tout ton temps.
- C’est fou, je crois entendre ta mère.
- C’est que je te connais. Rappelle moi combien il te reste de points sur le permis ?
- Presque autant que toi ma chérie. Mais ne t’inquiète pas, je t’appelle dès que je suis à Nice.
- Je t’aime papa. Fais bien attention à toi. On se retrouve à la châtaigneraie la semaine prochaine.
- Super ! Et pas de bêtises toutes les deux.
- Ben ! Pourquoi veux-tu qu’on fasse des bêtises. On s’entend trop bien Léa et moi et puis si on a un soucis, maman est toujours là.
- Bon allez je vous laisse. J’ai encore de la route à faire.
J’ai abandonné Léa et Caroline sur le bord du trottoir et dans le rétroviseur de ma Mercedes, avant que leurs silhouettes ne disparaissent derrière le premier virage, j’ai vu les filles reprendre le chemin de l’appartement, la main dans la main, heureuses j’en suis certain, de se retrouver seules dans l’intimité de leur couple.
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Compliqué pour un père de se rendre à l’évidence. Caroline n’est pas comme les autres. Enfin comme la majorité des autres. Léa n’est pas non plus comme les autres et outre sa beauté remarquable, il y a ce petit quelque chose qui fait qu’elle est différente. Mais en quoi sont-elles si différentes ? Je ne sais pas dire et c'est dérangeant, probablement la preuve que je fais fausse route. Tout est brouillé dans mon esprit. Je ne sais pas si c’est bien. Je ne sais pas si c’est mal et si c’est le cas, en quoi serait-ce mal ? Je suis noyé dans mes incertitudes, conscient que mes convictions sont en train de prendre l’eau.
Elles sont sympathiques, joueuses, rêveuses, admirables toutes les deux et pourtant je comprends que dans leur schéma, il n’y aura aucune place pour la gente masculine. Je vois d’ici la déception d’Eléna qui aimerait, je suis sûr, être grand-mère à un âge où elle pourrait encore établir une complicité avec ses petits enfants et là, je crois que c’est plutôt mal parti. Et puis, il y a le regard des autres, de la famille qui ne vont pas comprendre, des amis qui moins concernés, seront plus indulgents.
Je fouille dans ma mémoire à la recherche de moments où j’aurais pu inciter, provoquer mais je ne trouve rien. Aucun indice aussi du côté d’Eléna. Nous avons tous les deux élevé Caroline en notre âme et conscience, pour qu’elle puisse, armée de notre expérience, porter seule le flambeau de sa vie, selon ses propres concepts. Et maintenant qu’on est au pied du mur, qu’elle a choisi ce qui lui semble être le mieux pour elle, pourrait-on être capable de la blâmer ? Non, c’est stupide. Totalement stupide.
Je comprends que le voyage va être long, très long, engoncé dans mes pensées divergentes et opposées qui me tiraillent de toutes parts ; tous ces dilemmes qui me sautent à la figure. Je sais que je ne trouverai pas la solution parce qu’elle est déjà devant mes yeux et qu’il me faut juste l’accepter.
Je veux penser à autre chose, éviter de me prendre la tête pendant les douze heures du trajet qu’il me reste à parcourir. Mais lorsqu'un sujet taraude l'esprit, compliqué de l'évacuer aussi simplement.
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