02-04-2021, 08:40 PM
16 - Séparations
Une chose pareille n'a pas pu arriver, c'est horrible, je n'ai pas fait ça, ce n'est pas possible, ce n'était pas moi qui me battais là-bas, ce n'est pas possible, ce n'était pas moi, ce n'était pas moi, c'était un autre... un autre... un autre...
Je tente de me protéger de la réalité, de m'enfermer dans une bulle protectrice, de refouler le souvenir de ce qui s'est passé, de ce qui n'a pas pu se passer, c'est quelqu'un d'autre que moi qui était là-bas, je ne peux pas accepter cette réalité, cette horreur, mais ma culpabilité, implacable, me ressort tout de même la vérité.
(J'ai tué quelqu'un !) (Non !) (J'ai fait une chose horrible) (Non, je n'ai rien fait !)
Pleurant à chaudes larmes, je refoule cette culpabilité de toutes mes forces, et je crois bien que je finis par succomber à l'épuisement nerveux et moral que je vis en tombant dans les pommes.
Je me réveille suite à un cauchemar que j'ai heureusement oublié. Je tente de retrouver mes repères en regardant autour de moi, regarde ma chambre dépouillée, l'heure sur l'horloge (Il est tard !) et finis par me lever, affamé.
Je ne me souviens pas de m'être endormi, ni de ce que j'ai pu faire de ma journée.
Troublé, je m'habille et m'apprête à sortir.
(*Eh ! T'oublies rien ?)
Je sursaute, la main sur la poignée de la porte. D'où vient cette pensée ?
(*Appelle-moi ta conscience si tu veux, mais tu as intérêt à aller te regarder dans la glace avant de descendre, parce que tu t'es fait agresser aujourd'hui et tes parents ne sont pas au courant, tu ferais bien de savoir quoi répondre).
(Quoi ? Quoi ? Qui es-tu ? J'ai des voix dans ma tête !)
(*J'ai toujours été avec toi, simplement j'ai enfin trouvé la force de te parler avec le coup que tu as reçu sur la tête)
(Je suis fou, oui !)
(*Pas du tout. Tu n'es de toute façon pas un gars raisonnable à la base, alors c'est pas moi qui vais changer quelque chose)
Je suis désarçonné par la pique qu'il m'a lancé, et décide que si les voix que j'entends ont le sens de l'humour, ça ne doit pas être bien grave. Je serais bien en peine d'expliquer pourquoi je trouve ça rassurant. Je suis peut-être effectivement fou, mais je ne peux pas vraiment y faire grand chose, et puis bon, si on est deux pour affronter les difficultés de la vie, alors c'est plutôt un avantage, non ? Un peu comme mon don d'anticipation...
(Euh, d'accord. Mais, il m'est arrivé quoi alors ?)
(*Vu que je partage en grande partie ta mémoire, je ne saurais pas vraiment t'en dire beaucoup plus. Tu n'as pas eu de chance, mais tu t'es bien défendu, et tu les as mis en fuite).
(Ah).
Ma conscience est décidément vraiment rassurante, comme un esprit gardien qui me protègerait du monde extérieur.
Je sors de la chambre, et me dirige vers la salle de bains. Le visage que je regarde dans le miroir m'a l'air tout à fait sain d'esprit, mais les coups que j'ai reçu sont eux bien plus visibles. Et zut...
Je mets un peu de pommade en grimaçant et descend vers la cuisine.
- La faim sort le loup du bois, dit mon frère. Eh, Yann, tu t'es battu ?
- Je me suis fait agresser, dis-je en ressortant l'histoire racontée par ma conscience, me disant qu'elle m'a bien aidé sur ce coup-là.
- Tu t'es fait voler ? Demande ma mère.
- Je les ai mis en fuite, oui ! Je me suis bien défendu !
- Yann ! Je t'ai déjà dit que je refusais que tu te battes ! Jésus a dit : « Si on te frappe sur la joue droite, tu tendras la joue gauche. »
Je sens la colère monter en moi tellement c'est injuste.
Heureusement, mon frère vole à mon secours.
- Je suis persuadé que Jésus faisait une parabole et parlait en fait des injustices de la vie. Refuser de se défendre est d'une telle lâcheté qu'elle encourage le mal à prospérer et à frapper d'autres faibles, ce qui est contraire à notre morale !
- Hum...
- Où est papa ? Dis-je afin de détourner la conversation.
- Il est dehors, il discute avec les voisins, comme bientôt nous ne seront plus là, il leur dit adieu.
Le départ ! Ça me revient durement à l'esprit, Stef et moi on part demain matin avec les premières affaires et nos parents suivront avec le reste...
L'idée de partir maintenant me bouleverse, et en même temps, me réconforte : j'ai laissé trop de mauvais souvenirs ici. C'est du moins l'impression que j'ai, car je suis incapable de me souvenir de quelque chose de clair, comme si j'avais rayé cette année de ma mémoire. Des images de cours surnagent, le bac, que j'ai eu, oui, et d'autres choses anodines...
(Euh, j'ai un grand trou dans ma tête).
(*Je me disais bien qu'il y avait un courant d'air).
(Je suis sérieux ! Je me souviens à peine de cette année).
(*Tu as reçu un méchant coup, mais ça va revenir, déjà tu te souviens de certains trucs, ce n'est pas bien grave)
(Bon, si tu le dis)
Je suis quand même déprimé pendant le repas, ressentant un manque, un vide en mois que je finis par attribuer à la perte de mes souvenirs.
Je me couche tôt, mais impossible de trouver le sommeil après avoir dormi toute l'après-midi. Je regarde tristement le carton qui contient mon ordinateur (ah, je me souviens de ça) et me résigne à passer une nuit particulièrement longue et ennuyeuse. Je finis par m'endormir assez tard. Et me réveille tout aussi tard. Je n'ai pas fait de cauchemar, mais je ne peux me départir d'un sentiment de malaise.
Le camion de déménagement arrive alors que j'ai fini de déjeuner. Et, alors que nous aidons à le charger, j'ai de plus en plus le sentiment d'avoir oublié quelque chose.
(*C'est ta vie que tu laisse derrière toi. Toute ton enfance, ton adolescence...)
(Ouais. Mes amis, aussi... mes amis...)
J'ai l'impression d'être sur le point de me rappeler de quelque chose d'essentiel, mais mon père m'appelle et j'émerge brusquement de mes pensées, dont je perd le fil aussitôt.
(Zut !)
Je monte dans la voiture de mon frère, qui soupire en regardant la maison et la rue.
- C'est dur de partir, dit-il.
- Oui...
- Mais c'est une nouvelle vie qui s'offre à nous, et surtout à toi, tu entres à l'université mon ptit Yann ! Dit-il en démarrant.
- Euh, ouais, mais bon...
- Allez, ça passera, va. Enfin, j'ai la chance de retrouver Isa là-bas, et j'espère pour toi que tu trouveras aussi le bonheur.
Mes pensées sont malheureusement à mille lieues de là. En regardant la maison s'éloigner, j'ai l'impression de laisser sur place une partie de moi...
Et d'avoir oublié quelque chose de très important.
Une chose pareille n'a pas pu arriver, c'est horrible, je n'ai pas fait ça, ce n'est pas possible, ce n'était pas moi qui me battais là-bas, ce n'est pas possible, ce n'était pas moi, ce n'était pas moi, c'était un autre... un autre... un autre...
Je tente de me protéger de la réalité, de m'enfermer dans une bulle protectrice, de refouler le souvenir de ce qui s'est passé, de ce qui n'a pas pu se passer, c'est quelqu'un d'autre que moi qui était là-bas, je ne peux pas accepter cette réalité, cette horreur, mais ma culpabilité, implacable, me ressort tout de même la vérité.
(J'ai tué quelqu'un !) (Non !) (J'ai fait une chose horrible) (Non, je n'ai rien fait !)
Pleurant à chaudes larmes, je refoule cette culpabilité de toutes mes forces, et je crois bien que je finis par succomber à l'épuisement nerveux et moral que je vis en tombant dans les pommes.
Je me réveille suite à un cauchemar que j'ai heureusement oublié. Je tente de retrouver mes repères en regardant autour de moi, regarde ma chambre dépouillée, l'heure sur l'horloge (Il est tard !) et finis par me lever, affamé.
Je ne me souviens pas de m'être endormi, ni de ce que j'ai pu faire de ma journée.
Troublé, je m'habille et m'apprête à sortir.
(*Eh ! T'oublies rien ?)
Je sursaute, la main sur la poignée de la porte. D'où vient cette pensée ?
(*Appelle-moi ta conscience si tu veux, mais tu as intérêt à aller te regarder dans la glace avant de descendre, parce que tu t'es fait agresser aujourd'hui et tes parents ne sont pas au courant, tu ferais bien de savoir quoi répondre).
(Quoi ? Quoi ? Qui es-tu ? J'ai des voix dans ma tête !)
(*J'ai toujours été avec toi, simplement j'ai enfin trouvé la force de te parler avec le coup que tu as reçu sur la tête)
(Je suis fou, oui !)
(*Pas du tout. Tu n'es de toute façon pas un gars raisonnable à la base, alors c'est pas moi qui vais changer quelque chose)
Je suis désarçonné par la pique qu'il m'a lancé, et décide que si les voix que j'entends ont le sens de l'humour, ça ne doit pas être bien grave. Je serais bien en peine d'expliquer pourquoi je trouve ça rassurant. Je suis peut-être effectivement fou, mais je ne peux pas vraiment y faire grand chose, et puis bon, si on est deux pour affronter les difficultés de la vie, alors c'est plutôt un avantage, non ? Un peu comme mon don d'anticipation...
(Euh, d'accord. Mais, il m'est arrivé quoi alors ?)
(*Vu que je partage en grande partie ta mémoire, je ne saurais pas vraiment t'en dire beaucoup plus. Tu n'as pas eu de chance, mais tu t'es bien défendu, et tu les as mis en fuite).
(Ah).
Ma conscience est décidément vraiment rassurante, comme un esprit gardien qui me protègerait du monde extérieur.
Je sors de la chambre, et me dirige vers la salle de bains. Le visage que je regarde dans le miroir m'a l'air tout à fait sain d'esprit, mais les coups que j'ai reçu sont eux bien plus visibles. Et zut...
Je mets un peu de pommade en grimaçant et descend vers la cuisine.
- La faim sort le loup du bois, dit mon frère. Eh, Yann, tu t'es battu ?
- Je me suis fait agresser, dis-je en ressortant l'histoire racontée par ma conscience, me disant qu'elle m'a bien aidé sur ce coup-là.
- Tu t'es fait voler ? Demande ma mère.
- Je les ai mis en fuite, oui ! Je me suis bien défendu !
- Yann ! Je t'ai déjà dit que je refusais que tu te battes ! Jésus a dit : « Si on te frappe sur la joue droite, tu tendras la joue gauche. »
Je sens la colère monter en moi tellement c'est injuste.
Heureusement, mon frère vole à mon secours.
- Je suis persuadé que Jésus faisait une parabole et parlait en fait des injustices de la vie. Refuser de se défendre est d'une telle lâcheté qu'elle encourage le mal à prospérer et à frapper d'autres faibles, ce qui est contraire à notre morale !
- Hum...
- Où est papa ? Dis-je afin de détourner la conversation.
- Il est dehors, il discute avec les voisins, comme bientôt nous ne seront plus là, il leur dit adieu.
Le départ ! Ça me revient durement à l'esprit, Stef et moi on part demain matin avec les premières affaires et nos parents suivront avec le reste...
L'idée de partir maintenant me bouleverse, et en même temps, me réconforte : j'ai laissé trop de mauvais souvenirs ici. C'est du moins l'impression que j'ai, car je suis incapable de me souvenir de quelque chose de clair, comme si j'avais rayé cette année de ma mémoire. Des images de cours surnagent, le bac, que j'ai eu, oui, et d'autres choses anodines...
(Euh, j'ai un grand trou dans ma tête).
(*Je me disais bien qu'il y avait un courant d'air).
(Je suis sérieux ! Je me souviens à peine de cette année).
(*Tu as reçu un méchant coup, mais ça va revenir, déjà tu te souviens de certains trucs, ce n'est pas bien grave)
(Bon, si tu le dis)
Je suis quand même déprimé pendant le repas, ressentant un manque, un vide en mois que je finis par attribuer à la perte de mes souvenirs.
Je me couche tôt, mais impossible de trouver le sommeil après avoir dormi toute l'après-midi. Je regarde tristement le carton qui contient mon ordinateur (ah, je me souviens de ça) et me résigne à passer une nuit particulièrement longue et ennuyeuse. Je finis par m'endormir assez tard. Et me réveille tout aussi tard. Je n'ai pas fait de cauchemar, mais je ne peux me départir d'un sentiment de malaise.
Le camion de déménagement arrive alors que j'ai fini de déjeuner. Et, alors que nous aidons à le charger, j'ai de plus en plus le sentiment d'avoir oublié quelque chose.
(*C'est ta vie que tu laisse derrière toi. Toute ton enfance, ton adolescence...)
(Ouais. Mes amis, aussi... mes amis...)
J'ai l'impression d'être sur le point de me rappeler de quelque chose d'essentiel, mais mon père m'appelle et j'émerge brusquement de mes pensées, dont je perd le fil aussitôt.
(Zut !)
Je monte dans la voiture de mon frère, qui soupire en regardant la maison et la rue.
- C'est dur de partir, dit-il.
- Oui...
- Mais c'est une nouvelle vie qui s'offre à nous, et surtout à toi, tu entres à l'université mon ptit Yann ! Dit-il en démarrant.
- Euh, ouais, mais bon...
- Allez, ça passera, va. Enfin, j'ai la chance de retrouver Isa là-bas, et j'espère pour toi que tu trouveras aussi le bonheur.
Mes pensées sont malheureusement à mille lieues de là. En regardant la maison s'éloigner, j'ai l'impression de laisser sur place une partie de moi...
Et d'avoir oublié quelque chose de très important.
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