20-02-2021, 10:56 AM
CHAPITRE XI
J'ai déposé ma remorque et mon matériel chez moi et je file ventre à terre chez Dominique. Elle habite avec ses parents dans un hameau à proximité de Lens.
Sylvie est rentrée à la maison de famille. Elle est montée de suite se réfugier à l'étage, dans la chaleur douillette et protectrice de sa chambre. Elle n'a dit mot à personne. Il faut dire que le retour en voiture n'a pas été une véritable partie de plaisir. Entre sa mère qui était presque plus offusquée qu'elle ait déposée plainte, portant ainsi à la connaissance de tous le déshonneur de sa fille et ma petite amie qui estimait qu'il n'était pas nécessaire d'en faire tout un plat, que d'une façon ou d'une autre, un jour elle aurait perdu sa virginité, la pauvre Sylvie s'est sentie totalement abandonnée par les siens, là où elle avait besoin plus que tout d'un soutien sans faille. Pire encore, elle s'est sentie coupable de dramatiser outre mesure l'agression subie ce matin.
En arrivant, je n'avais qu'une idée en tête, monter la rejoindre, m'asseoir sur son lit à côté d'elle et prendre cette main qu'elle m'a tendue avec tant d'espoir, de partager sa douleur, de prendre avec moi un peu de sa souffrance. Dominique et sa maman m'ont de suite dissuadé. Je n'aurais jamais du les écouter...
Un peu avant le repas du soir, autour de la table familiale, comme tous les jours, le clan s'est réuni autour d'un apéritif assez simple. Il ne manquait plus que Sylvie et les discussions allaient bon train. Sa maman, beaucoup plus préoccupée par le dépôt de plainte que par le viol lui même, cherchait une solution pour étouffer l'affaire ou tout au moins éviter que la nouvelle s'emballe, s'ébruite au delà du cercle familial. Toucher à la chair de sa chair, pour son père était pratiquement insoutenable et la réponse s'habillait d'avantage d'un apparat de violence que de la moindre tentative de compréhension envers ce que pouvait ressentir sa fille. Le petit dernier ne comprenait pas grand chose. Il avait perçu néanmoins que la situation était particulière et qu'elle revêtait une dimension plutôt périlleuse. Prudent, Il ne disait mot, se contentant d'observer. Les quatre autres sœurs, ayant baigné toute la journée dans les lamentations n'avaient qu'une seule idée en tête, passer à autre chose. Je regardais bouche bée tout ce petit monde évoluer verbalement. Je savais que bientôt, j'allais me trouver devant Sylvie et je n'ai toujours pas trouvé la moindre idée de la façon de l'aborder. Dans mon esprit maintenant, c'est la panique qui s'installe. je comprends que sans stratégie, je vais moi aussi droit à l'échec mais rien ne se dessine et entre le brouhaha familial et mon propre dilemme, je n'arrive même plus à raisonner.
Dehors, la pluie s'est invitée avec empressement, auréolant d'un voile sombre la nuit tombante. Les gouttes d'eau se fracassent sur les carreaux, désespérées elles-aussi. Distrait, je les entends, je les écoute, je les regarde presque sans les voir. L'apéritif prend fin et c'est la soupe qui est servie à table, une soupière grandiose, à la hauteur de la tablée, que le couvercle à peine soulevé laisse échapper d'abondantes fumerolles odorantes.
Sylvie est appelée à table. Et j'entends encore ses pas dans l'escalier, des pas fébriles faisant grincer le bois vieilli, des pas hésitants puis peut-être me semble t'il de plus en plus décidés. Et lorsqu'elle apparaît au fond du couloir, c'est le silence. Le bruit des paroles s'est subitement évanoui ne laissant planer qu'une chape de plomb, un silence lourd de signification et les têtes, pour majorité, se sont tournées sur Sylvie.
La jeune femme s'est arrêtée, juste un instant avant de regagner sa place, en bout de table. Le regard vide, absente, elle s'est assise fixant son assiette de ses yeux perdus et avec une lenteur imperceptible, son visage s'est levé sur l'assemblée pour la parcourir, un visage plein de courage et d'émotion vu ses yeux embués, déterminé, coupable par innocence, égaré au cœur de la consternation, désorienté.
Et, lorsque son regard a croisé le mien, je n'ai réussi ni à sourire, ni à exprimer quoi que ce soit et par faiblesse, par lâcheté probablement, j'ai baissé les yeux moi aussi, comme les autres.
J'ai déposé ma remorque et mon matériel chez moi et je file ventre à terre chez Dominique. Elle habite avec ses parents dans un hameau à proximité de Lens.
Sylvie est rentrée à la maison de famille. Elle est montée de suite se réfugier à l'étage, dans la chaleur douillette et protectrice de sa chambre. Elle n'a dit mot à personne. Il faut dire que le retour en voiture n'a pas été une véritable partie de plaisir. Entre sa mère qui était presque plus offusquée qu'elle ait déposée plainte, portant ainsi à la connaissance de tous le déshonneur de sa fille et ma petite amie qui estimait qu'il n'était pas nécessaire d'en faire tout un plat, que d'une façon ou d'une autre, un jour elle aurait perdu sa virginité, la pauvre Sylvie s'est sentie totalement abandonnée par les siens, là où elle avait besoin plus que tout d'un soutien sans faille. Pire encore, elle s'est sentie coupable de dramatiser outre mesure l'agression subie ce matin.
En arrivant, je n'avais qu'une idée en tête, monter la rejoindre, m'asseoir sur son lit à côté d'elle et prendre cette main qu'elle m'a tendue avec tant d'espoir, de partager sa douleur, de prendre avec moi un peu de sa souffrance. Dominique et sa maman m'ont de suite dissuadé. Je n'aurais jamais du les écouter...
Un peu avant le repas du soir, autour de la table familiale, comme tous les jours, le clan s'est réuni autour d'un apéritif assez simple. Il ne manquait plus que Sylvie et les discussions allaient bon train. Sa maman, beaucoup plus préoccupée par le dépôt de plainte que par le viol lui même, cherchait une solution pour étouffer l'affaire ou tout au moins éviter que la nouvelle s'emballe, s'ébruite au delà du cercle familial. Toucher à la chair de sa chair, pour son père était pratiquement insoutenable et la réponse s'habillait d'avantage d'un apparat de violence que de la moindre tentative de compréhension envers ce que pouvait ressentir sa fille. Le petit dernier ne comprenait pas grand chose. Il avait perçu néanmoins que la situation était particulière et qu'elle revêtait une dimension plutôt périlleuse. Prudent, Il ne disait mot, se contentant d'observer. Les quatre autres sœurs, ayant baigné toute la journée dans les lamentations n'avaient qu'une seule idée en tête, passer à autre chose. Je regardais bouche bée tout ce petit monde évoluer verbalement. Je savais que bientôt, j'allais me trouver devant Sylvie et je n'ai toujours pas trouvé la moindre idée de la façon de l'aborder. Dans mon esprit maintenant, c'est la panique qui s'installe. je comprends que sans stratégie, je vais moi aussi droit à l'échec mais rien ne se dessine et entre le brouhaha familial et mon propre dilemme, je n'arrive même plus à raisonner.
Dehors, la pluie s'est invitée avec empressement, auréolant d'un voile sombre la nuit tombante. Les gouttes d'eau se fracassent sur les carreaux, désespérées elles-aussi. Distrait, je les entends, je les écoute, je les regarde presque sans les voir. L'apéritif prend fin et c'est la soupe qui est servie à table, une soupière grandiose, à la hauteur de la tablée, que le couvercle à peine soulevé laisse échapper d'abondantes fumerolles odorantes.
Sylvie est appelée à table. Et j'entends encore ses pas dans l'escalier, des pas fébriles faisant grincer le bois vieilli, des pas hésitants puis peut-être me semble t'il de plus en plus décidés. Et lorsqu'elle apparaît au fond du couloir, c'est le silence. Le bruit des paroles s'est subitement évanoui ne laissant planer qu'une chape de plomb, un silence lourd de signification et les têtes, pour majorité, se sont tournées sur Sylvie.
La jeune femme s'est arrêtée, juste un instant avant de regagner sa place, en bout de table. Le regard vide, absente, elle s'est assise fixant son assiette de ses yeux perdus et avec une lenteur imperceptible, son visage s'est levé sur l'assemblée pour la parcourir, un visage plein de courage et d'émotion vu ses yeux embués, déterminé, coupable par innocence, égaré au cœur de la consternation, désorienté.
Et, lorsque son regard a croisé le mien, je n'ai réussi ni à sourire, ni à exprimer quoi que ce soit et par faiblesse, par lâcheté probablement, j'ai baissé les yeux moi aussi, comme les autres.
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