28-07-2020, 05:33 PM
CHAPITRE XLIV
''Oderint dum metuant''
Burydan attendait, assis sur une chaise, entouré de deux gardes. L'un d'eux était David. Il se pencha vers Burydan et dit :
- Merci.
- De quoi ?
- Tu as remporté ton duel... et tu m'as fait gagner 50 lunars... Je suis désolé, par contre, que ça se termine comme ça...
- Pas tant que moi, David, pas tant que moi...
La porte du bureau du Duc s'ouvrit et Anselme leur fit signe d'entrer. Galbatorix était assis, un sourire goguenard aux lèvres.
- Détachez le, dit-il.
Burydan se massa les poignets et jaugea la situation. Il avait une furieuse envie de se jeter sur le Duc et de l'étrangler pour lui effacer son sourire. Il pouvait le faire. Un ou deux bonds et il pourrait lui casser l'os hyoïde. Certes, les douze gardes lui tomberaient dessus, mais il s'en moquait. Enfin, du moment où ils le tuaient. Parce que s'il était juste arrêté, il savait très bien ce qu'on réservait aux régicides (1).
- Assieds-toi, Burydan de Malkchour.
Burydan, ravalant ses pulsions meurtrières, s'assit en face du Duc.
- Vous m'avez trompé...
- Nenni, nenni. Je t’ai promis la vie sauve, et tu l'as...
- Que m'importe la vie si c'est pour passer le restant de mes jours dans une de vos geôles...
- C'est justement pour ça que tu es ici. Je vais te faire une proposition pour gagner ta liberté.
Burydan ne dit rien, attendant la suite. Le Duc prit une feuille sur son bureau et la glissa devant Burydan.
- Tu t'es présenté pour être chasseur de prime, n'est-ce pas. Et bien voilà ta première mission.
Burydan lu, et repoussa la feuille vers le Duc.
- Je refuse...
- Pardon ?! Et pourquoi ça ?!
- J'ai postulé pour être chasseur de prime, pas assassin.
- Pas assassin !!! Tu as tué deux de mes hommes !!!
- Parce que j'y étais obligé...
- Obligé ?
- Garrock parce que je savais que, même blessé, il continuerait à m'attaquer, et Edmund parce que je ne laisse à aucun homme le droit de me frapper... mais je ne tue jamais un homme si je n'y suis pas obligé.
Le Duc était blême de colère, mais Burydan ne détourna pas les yeux.
- Soit, dit le Duc. Je ne sais pourquoi je souffre ce genre d'impertinence de ta part, mais soit...
Il prit une plume et griffonna deux mots sur la feuille et la fit glisser de nouveau vers Burydan.
RECHERCHÉ MORT OU VIF
Comte Antiakos de Burg
Taille : 3 pieds 25 pouces
Cheveux : blonds
Yeux : bruns
Signes particuliers : petite cicatrice en forme d'étoile près de l’œil senestre
Vu pour la dernière fois à Zylbarite.
Récompense : 10 000 lunars.
Suivait un portrait à la plume du comte.
- Cela te convient-il ? Évidemment, la récompense ne sera pas les 10 000 lunars, mais ta liberté. Et il y a deux conditions...
- Lesquelles ?
- D'abord, tu as trois mois pour le retrouver et me l'amener. Ou au moins sa tête. Si, dans trois mois, tu n'es pas là...
- Je serai là...
- Si dans trois mois tu n'es pas là, reprit le Duc, je mettrai une prime sur ta tête tellement élevée que mes chasseurs de prime te traqueront où que tu ailles...
Burydan acquiesça.
- La seconde condition est que, si tu réussis, tu t'engageras à travailler pour moi comme chasseur de prime pendant au moins 5 ans.
Burydan réfléchit. Pas trop longtemps, il n'avait pas vraiment le choix.
- A une condition...
- Oh, une condition, ricana le Duc.
- Que je sois le seul à rechercher le comte. Je n'ai pas envie de croupir dans vos geôles parce qu'un chasseur de prime plus expérimenté que moi m'aura coiffé au poteau.
- C'est d'accord, dit le Duc après quelques secondes. Anselme, fais dire à mes chasseurs de prime que la recherche du comte est pour l'instant suspendue.
- Bien votre altesse.
Galbatorix claqua des doigts. Une jeune fille d'une quinzaine d'années, vêtue d'une robe transparente qui laissait voir son corps juvénile, approcha avec un plateau garni d'un pichet de picrate et de deux verres.
- Je vais faire le service, Bella, dit le Duc en lui caressant les fesses.
Burydan regarda la fillette partir.
- Elle est belle, n'est-ce pas ? C'est une esclave que j’ai achetée récemment. Et je l'ai dressé à coups de cravache pour qu'elle soit bien obéissante.
Burydan eut de nouveau envie de l'étrangler.
Le Duc versa du picrate dans les deux verres, et en poussa un vers Burydan. Celui ci ne bougea pas.
- Tu ne bois pas ?
Burydan ne répondit rien et continua à fixer Galbatorix. Le Duc haussa les épaules, bu une petite gorgée de vin et reposa son verre. Burydan poussa le sien vers lui et prit celui du Duc et bu.
Le Duc le regarda, surpris, puis son visage se contracta.
- Rien que pour ce geste, Burydan de Malkchour, je pourrais t'envoyer aux arènes...
(1) Régicide : certes, le Duc n'est pas roi, mais c'est la plus proche traduction du terme utopien ''ytrakdovfu''. De plus, la peine encourue pour s'être attaqué à la personne du Duc est la même que celle encourue pour s'être attaqué à la personne d'un roi.