28-07-2020, 04:17 PM
CHAPITRE XXX
''Cucullus non facit monacum''
Gershaw attendait Burydan sur la place centrale, avec un gros paquet sous le bras.
- Tu as fait tout ce que tu avais à faire, kohai ?
- Oui, maître.
- Bien, parons au plus pressé...
Ils entrèrent dans une friperie et Gershaw lui acheta plusieurs chemises et trois pantalons, ainsi que des chaussettes, de seconde main. Burydan ne comprit pas la différence entre ces vêtements et les siens, mais ne dit rien. Ils entrèrent ensuite dans une autre boutique. Une femme d'une soixantaine d'années s'avança en souriant :
- Oh, maître Gershaw, que je suis aise de vous revoir dans mon humble échoppe.
- Tout le plaisir est pour moi, Lucia. Je viens pour ce jeune homme. Mon... élève...
- Votre élève ?!
- Hė oui, tout arrive.
Lucia se saisit d'un écritoire, affûta sa plume et demanda :
- Alors, que vous faut-il ?
- Sept chemises de toile légère... sept chemises de toile épaisse... sept pantalons de toile légère... sept demi pantalons de toile légère... trois vestes de toile légère... sept tricots (1) de mianhua (2)... sept tricots de lana (3)... sept paires de chaussettes... sept sous-vêtements...
Lucia écrivait à toute vitesse.
- Très bien... connaissez-vous vos mensurations, jeune homme ?
- Euh... non...
- Suivez moi, alors... comment vous appelez vous ?
- Burydan...
Elle entraîna Burydan dans l'arrière boutique.
- Déshabillez vous.
- Pardon ?
- Déshabillez vous... il faut que je prenne des mesures...
Burydan se déshabilla donc, en rougissant, et cacha son sexe de ses mains. Il se sentait bête, s'étant mis nu devant une quantité d'hommes, mais il ne put s'en empêcher. Lucia sourit.
- Désolée, jeune homme, mais il va falloir enlever vos mains, je dois mesurer vos bras...
Burydan soupira mais s'exécuta.
- Et bien voilà, il n’y a pas à avoir de vergogne, je pourrais être votre grand-mère...
Lucia mesura ses bras, ses jambes, son tour de taille, de poitrine, de hanche, etc...
- Bien, j'ai tout ce qu'il faut... vous pouvez vous rhabiller.
Il rejoignit Gershaw et Lucia dans l'échoppe.
- Quinze jours c'est long, Lucia...
- Bien, je vais mettre toutes mes couturières dessus, mais c'est bien parce que c'est vous... disons dix jours... je ne peux pas faire plus vite...
- Parfait pour dix jours. Faites les porter chez moi, avec la facture...
- Sans problème, maître Gershaw.
Ils sortirent, firent quelques toises, et entrèrent dans une nouvelle échoppe, une tannerie.
- Maître Gershaw, dit un homme de haute taille, quel plaisir de vous voir.
- Plaisir partagé Edwin.
- Que puis-je faire pour vous ?
- Des vêtements de cuir et des chaussures pour mon... élève... Burydan
- Votre élève ?!
- Et oui.
- Et bien Burydan connait-il ses mesures ?
Et Burydan se retrouva de nouveau nu à se faire mesurer de la tête aux pieds.
- Il me faut sept pantalons... trois vestes... trois paires de chaussures... trois paires de bottes... et trois paires de chaussures de toile... dit Gershaw.
- Aucun problème... je les ferai livrer chez vous dans... dix jours ?
- Parfait.
Ils repartirent enfin vers Malkchour.
- Viens, dit Gershaw, je te montre ta chambre.
Il montèrent à l'étage.
- Tout au fond du couloir, c'est ma chambre.
Il ouvrit la première porte sur la gauche.
- Et voici la tienne.
Petite pièce proprette, un grand lit, une armoire, une commode, une table et deux chaises. La fenêtre s'ouvrait sur le jardin, devant la maison.
- La salle d'eau est en face. Elle n'est que pour toi, j'ai la mienne attenante à ma chambre. Attention, kohai, je suis très à cheval sur la propreté et j'ai le nez sensible. On se lave tous les jours, nous sommes bien d'accord ?
- Oui, maître, je vais aux bains publics tous les jours.
- Parfait. Mais on se lave tous les jours devant le lavabo. De la tête aux pieds. Les bains publics, c'est une fois par semaine, le jeudi matin.
- Très bien maître.
- Tiens, pour t'installer. Si tu as besoin d'autre chose, tu n'auras qu'à me le dire. Je t'attends au salon.
Burydan ouvrit le paquet que Gershaw venait de lui donner. Il contenait tout le nécessaire de toilette et Burydan le plaça dans la salle d'eau. Il rangea ses vêtements dans la commode et dans l'armoire, fit son lit et rejoignit son maître au salon.
- Tu es bien installé, kohai ?
- Très bien, maître.
- Alors, que vas-tu nous préparer de bon ce soir ?
- Euh...
- Regarde dans le garde manger, il doit y avoir quelque chose...
Burydan prépara une omelette aux champignons et une salade verte. Repas frugal, mais qui sembla suffire à Gershaw. Il sortit sous le porche et commença à pétuner.
- Kohai, tu peux te coucher à l'heure que tu veux, du moment où tu es en forme le lendemain.
Burydan alla se coucher à dix heures. La journée avait été forte en émotion. Il régla le réveil pour quatre heures et demi et s'endormit comme une masse.
(1) Tricot : prit ici comme synonyme de pull over.
(2) Mianhua : fibre textile provenant des graines du mianhuer. Très semblable au coton.
(3) Lana : fibre textile provenant de la toison de plusieurs animaux. Très semblable à la laine.