20-09-2020, 09:42 PM
4 - Nocturnes
Dimanche 14 décembre
Une résidence, située dans un quartier tranquille. Dans une chambre, deux jeunes écoutent de la musique. Le CD se termine et le plus âgé s'adresse à l'autre:
- Tu es prêt pour demain, mon petit Yann ?
- Pfff, qu'est-ce que tu crois, Stef ?
- Si je te pose la question.
- Oui, il va bien falloir que j'affronte cette journée.
- Eh, ce n'est pas à ton enterrement qu'on va.
- Si, figure-toi.
- C'est juste un jour comme les autres.
- Un jour comme les autres ? Papa a dû répéter au moins une centaine de fois le mot « responsabilités » cette semaine.
- Eh, je suis passé par là il n'y a pas deux ans, je ne suis pas mort, que je sache.
- Tu as Isabelle.
- Il serait temps que tu te trouves aussi une copine.
- Je suis trop timide.
- Tu vas rester seul toute ta vie si tu ne te lances pas.
- J'en ai peur.
- Si tu n'acceptes pas le fait que tu passeras par des échecs avant de réussir, tu n'y arriveras jamais.
- C'est censé m'encourager ?
- Je te dis ça pour que tu cesses d'avoir peur de l'échec. Je m'en suis mangé, des râteaux, avant de rencontrer Isa. Fais un effort, lance-toi bon sang.
- C'est facile pour toi de dire ça.
- Tu es impossible.
- En fait, le problème, c'est que je n'en ressens même pas l'envie.
- C'est pas croyable qu'à la veille de tes 18 ans tu puisses dire une chose pareille. Tu as raté ton tour à la distribution d'hormones ?
- Très drôle.
- Écoute, je t'ai parlé de Sylvie, la copine d'Isa ? Je peux organiser une rencontre entre vous deux, le premier pas sera déjà fait comme ça.
– (paniqué) Et je vais lui dire quoi ?
– (se frappant le front de sa main) Mais qui m'a fichu un frangin pareil ?
Je me réveille et m'étire délicieusement dans mon lit. (Notre lit)
Alex est déjà levé, j'entends couler l'eau de la douche.
(*Bonjour toi)
(Bonjour. Tiens, c'est bien la première fois qu'on se dit bonjour)
(*Il y a un début à tout)
(Ça ne me dérange pas. Mais je pensais à quelque chose...)
(*Quoi donc ?)
(Tu le sais déjà)
(*Je fais semblant de ne pas savoir, j'aime bien te parler, j'en ai été privé trop longtemps)
(D'accord. Je t'appelle la Voix depuis le début, mais tu deviens de plus en plus une personnalité à part entière, tu commences même à déborder sur ma vie réelle. Il va te falloir un nom)
(*C'est vrai que je n'en avais pas ressenti le besoin pendant ces dernières années, mais tu as raison)
(Il y en a un qui te ferait plaisir ?)
(*Inny)
(Inny ? C'est joli, mais je ne l'ai jamais entendu auparavant)
(*Je l'ai inventé, pour qu'il soit à moi seul. Je suis content que tu le trouves joli)
(Il va falloir que j'en prenne l'habitude)
Je me lève et entre dans la salle de bains.
- Mon cœur, coupe l'eau un instant, j'arrive !
Alex me regarde, amusé, tandis que je surveille la montée du niveau du précieux liquide.
- La cafetière ne va pas s'envoler. Il y a même un petit bip pour t'avertir quand c'est prêt.
- Hé. Bien dormi ?
- Oui, et toi ?
- Ça va.
- Tu as rêvé ?
- Oui.
- Bon ou mauvais rêve ?
- Hum. J'ai revécu la veille de mes 18 ans, avec mon frère. J'ai passé un bon moment avec lui.
- Bon, alors.
- Oui, c'est la suite qui s'est mal passée.
- Ton anniversaire ?
- Non, le cadeau de mon frère.
- C'était quoi ?
- Une fille. Sylvie.
- Aargh. Tu veux me raconter ?
- Eh bien...
Bip !
- Plus tard.
Une fois mon café englouti, je reprends ma conversation.
- Je suis en train de te révéler tout mon douloureux passé, petit à petit. Mais, et toi ?
- Tu veux connaître mes noirs secrets ?
- Tu en as tant que ça ?
- Non, pas vraiment. Mais je crois que c'est de bonne guerre. Par contre, vu que tu as commencé, autant que tu en termines avec Sylvie.
- Eh bien... J'hésite vraiment, Alex, parce qu'en matière de noir secret, celui-ci tient le haut du pavé.
- A ce point ?
- Oh que oui. J'ai peur de ta réaction en fait.
- Je t'ai déjà fait cette promesse. Quoi qu'il y ait eu dans ton passé, c'est derrière toi maintenant. C'est le Yann du présent que j'aime.
- Merci.
Je prends une inspiration.
- Bon... Quelques jours après mon anniversaire...
- Salut Yann !
Sylvie est une fille vive et sympathique. Brune, les yeux noisette, un joli visage toujours souriant, elle ne laisse pas les garçons indifférents mais a jusqu'ici repoussé toutes leurs avances, prétextant détester la drague et vouloir faire son choix elle-même, comme au supermarché. Beaucoup de garçons apprécient peu d'être considérés comme un bien de consommation. Ils préfèrent se voir comme des prédateurs, mais ils se cassent tous les dents avec elle. Certains la traitent de lesbienne, mais ce sont de mauvaises langues.
- Euh, salut.
- Ça va ?
- Oui.
- Bigre, ton frère m'avait dit que tu étais timide, mais tu bats des records.
Je suis horriblement gêné.
- Mais tu sais quoi ?
- Euh, non.
- Ça me plaît.
- Hein ?
- Eh oui ! J'ai horreur des garçons arrogants qui croient que le monde leur appartient. Je préfère quelqu'un de réservé, qui ne me considérera pas comme une simple conquête qu'on met dans son lit mais comme une femme que l'on peut aimer, tu comprends ?
- Euh, oui, je crois.
- Allez viens, on va s'éclater tous les deux.
- On a fait les 400 coups ensemble, cette fille était une véritable tornade, entraînant tout sur son passage - et je faisais partie du lot.
- Tu... l'aimais ?
- Non... Je n'éprouvais aucun désir pour elle, mais je voulais croire le contraire. Je me mentais à moi-même, aveugle à mes véritables sentiments... Toutefois, ce n'était pas les sentiments, ou mon corps, qui l'intéressaient. Elle voulait simplement quelqu'un qui la suivrait partout, dans tous les coups tordus qu'elle pouvait imaginer.
Je soupire avant de reprendre.
- Elle m'a fait mener pendant un temps une vie que je n'aurais jamais vécue en temps normal. C'était un peu comme vivre avec une catastrophe naturelle. On n'en ressort pas intact.
- J'ai du mal à imaginer.
- Eh bien...
- Tu es sûre que c'est une bonne idée ?
- Il n'y a personne ici, ils sont en vacances.
- C'est fermé de toute façon.
- Rien ne reste fermé pour moi.
Je la regarde avec étonnement sortir deux outils de sa poche et les insérer dans le verrou qui ferme la grille. Il ne lui faut que quelques secondes pour le déverrouiller.
- Ouah ! Mais comment as-tu appris à faire ça ?
- Un copain.
C'était sa réponse à toutes les questions indiscrètes que je lui posais.
Nous entrons, je prélève une autre bière dans mon sac à dos pour me donner du courage.
- Tu as assez bu, il faut que tu sois en forme ce soir.
Je reste un moment silencieux, Alex me regarde stupéfait.
- J'y crois pas ! Mais vous faisiez quoi dans cette maison ?
Alex attend une réponse qui ne vient pas, je fixe mon bol vide, la gorge serrée par ma culpabilité. Je finis par prendre une grande inspiration.
- Un cambriolage.
Pour le coup, il reste bouche bée, là.
- J'ai honte, Alex, de tout ce que j'ai pu faire dans le sillage de cette fille. Je me suis laissé entraîner, dominer, je n'étais plus maître de moi-même.
- C'est allé loin cette histoire ?
Sylvie me regarde faire, tandis que je crochète la serrure, mais j'ai bien retenu mes leçons, et la porte s'ouvre. J'entre et cherche une éventuelle alarme, mais je n'en vois pas. Je pousse un soupir de soulagement.
- Bravo, me souffle-t-elle à l'oreille.
Je souris sous ma cagoule tandis qu'elle referme la porte. Je me repère rapidement et monte l'escalier, lui laissant le rez-de-chaussée.
Alex laisse échapper un sifflement.
- La vache ! Il vaut mieux que mon père n'apprenne pas ça !
- Tu peux le dire.
- Et ça a duré longtemps ?
- Presque un an.
- Tes parents ne se sont doutés de rien ?
- Ils étaient persuadés que Sylvie et moi étions devenus intimes, et elle n'a rien fait pour les détromper, bien au contraire. Mon frère était aux anges, s'il avait su...
- Il pensait bien faire en te la présentant.
- Je sais.
- Tu as conservé tes talents ?
- Je saurais toujours crocheter une serrure, bien que je n'aie plus le matériel, mais les alarmes évoluent constamment, et je ne me suis pas tenu à jour.
- Comment ça s'est terminé ? Vous avez été surpris ?
- Oh, une ou deux fois, mais on s'en est tirés. Je cours plutôt vite, dis-je en souriant. Non, c'est autre chose qui nous a séparés.
Sylvie compte les billets que notre dernier coup nous a rapporté.
- C'est dingue, Yann ! Elle planquait tout ça dans son matelas !
Je partage son enthousiasme, cette fois-ci on a décroché le gros lot. Des liasses sont éparpillées sur toute la table. Dommage qu'il n'y ait que des petites coupures, mais c'est quand même une somme.
Elle renonce, il y en a trop, et me serre dans ses bras.
- On va fêter ça !
- Qu'as-tu en tête ?
Ses mains remontent le long de mon dos jusqu'à ma nuque, et ses lèvres se portent à la rencontre des miennes.
Je ne m'y attendais pas, et je reste un moment sans réaction.
- Qu'y a-t-il ?
- Euh, j'ai été surpris.
- Pfff.
Elle m'embrasse de nouveau, et je tâche de répondre à son baiser, cette fois. Sa langue vient dans ma bouche, je fais de même...
(J'aurais cru que ce serait plus agréable... Ou au moins, excitant)
Elle commence à défaire ma chemise, puis m'en débarrasse, suivi de mon tee-shirt, ses mains parcourent ma poitrine.
- Tu vas rester planté là longtemps ?
- Euh...
- Mais c'est vrai que tu es puceau ! Laisse-toi faire, ça va être le grand jour pour toi.
Je souris, rougissant. (Je vais le faire. Ouaouh !)
Elle baisse ma braguette, et ôte mon jean et mon caleçon d'un seul mouvement. Me voici nu devant elle, je commence à la déshabiller à son tour...
Ôtant son soutien-gorge, je contemple ses seins, que je me mets à caresser. Ça lui fait visiblement du bien, mais...
(C'est la panne de mon côté, c'est pas possible une malchance pareille. Allez, Popaul, un effort !)
Elle me pousse sur le lit et nous commençons à nous caresser, nous embrassant, mais ça commence à me poser de plus en plus de problèmes. Ça ne me plaît pas, ça ne m'excite pas du tout. Que se passe-t-il ?
(Tu es ce que tu es. On ne change pas, dit un souvenir importun)
- Écoute...
- Chut.
Ses lèvres descendent le long de ma poitrine, ses mains deviennent plus indiscrètes...
- Non...
J'essaie de la repousser, de plus en plus mal à l'aise, comprenant enfin à quel point je me suis menti.
- Laisse-toi faire.
Elle ne se rend pas compte de mon état... À moins que ma résistance ne soit la cause de son excitation. Je sens monter en moi un dégoût qui ne prend pas sa source dans ma situation présente. J'ai déjà vécu ça...
- Sylvie...
- Allez, je sais que tu en as envie.
Je suis en train de replonger dans mon cauchemar, j'ai à nouveau 16 ans, et Seb est en train de...
Je me redresse soudain, la repoussant.
- Non !
Sylvie me regarde, sidérée, tandis que me rhabille en sanglotant.
- Yann ? Mais qu'est-ce qui t'arrive ?
- Je m'en vais.
- Mais qu'est-ce qui te prend ? Ça ne va pas ?
- Disparais de ma vie ! Je ne veux plus te voir ! Plus jamais, tu m'entends !
- Mais... Yann ?!
Je récupère le reste de mes affaires et sors dans la nuit.
- Je ne l'ai jamais revue. J'ai expliqué à mes parents que Sylvie et moi avions rompu, j'ai retrouvé ma chambre, ma solitude, et cessé définitivement mes escapades nocturnes. Je crois qu'elle n'a jamais compris ma réaction, ce n'est pas elle que j'avais repoussé et fui, c'était Seb.
Je pousse un long soupir... Ce n'est pas terminé, hélas.
Dimanche 14 décembre
Une résidence, située dans un quartier tranquille. Dans une chambre, deux jeunes écoutent de la musique. Le CD se termine et le plus âgé s'adresse à l'autre:
- Tu es prêt pour demain, mon petit Yann ?
- Pfff, qu'est-ce que tu crois, Stef ?
- Si je te pose la question.
- Oui, il va bien falloir que j'affronte cette journée.
- Eh, ce n'est pas à ton enterrement qu'on va.
- Si, figure-toi.
- C'est juste un jour comme les autres.
- Un jour comme les autres ? Papa a dû répéter au moins une centaine de fois le mot « responsabilités » cette semaine.
- Eh, je suis passé par là il n'y a pas deux ans, je ne suis pas mort, que je sache.
- Tu as Isabelle.
- Il serait temps que tu te trouves aussi une copine.
- Je suis trop timide.
- Tu vas rester seul toute ta vie si tu ne te lances pas.
- J'en ai peur.
- Si tu n'acceptes pas le fait que tu passeras par des échecs avant de réussir, tu n'y arriveras jamais.
- C'est censé m'encourager ?
- Je te dis ça pour que tu cesses d'avoir peur de l'échec. Je m'en suis mangé, des râteaux, avant de rencontrer Isa. Fais un effort, lance-toi bon sang.
- C'est facile pour toi de dire ça.
- Tu es impossible.
- En fait, le problème, c'est que je n'en ressens même pas l'envie.
- C'est pas croyable qu'à la veille de tes 18 ans tu puisses dire une chose pareille. Tu as raté ton tour à la distribution d'hormones ?
- Très drôle.
- Écoute, je t'ai parlé de Sylvie, la copine d'Isa ? Je peux organiser une rencontre entre vous deux, le premier pas sera déjà fait comme ça.
– (paniqué) Et je vais lui dire quoi ?
– (se frappant le front de sa main) Mais qui m'a fichu un frangin pareil ?
Je me réveille et m'étire délicieusement dans mon lit. (Notre lit)
Alex est déjà levé, j'entends couler l'eau de la douche.
(*Bonjour toi)
(Bonjour. Tiens, c'est bien la première fois qu'on se dit bonjour)
(*Il y a un début à tout)
(Ça ne me dérange pas. Mais je pensais à quelque chose...)
(*Quoi donc ?)
(Tu le sais déjà)
(*Je fais semblant de ne pas savoir, j'aime bien te parler, j'en ai été privé trop longtemps)
(D'accord. Je t'appelle la Voix depuis le début, mais tu deviens de plus en plus une personnalité à part entière, tu commences même à déborder sur ma vie réelle. Il va te falloir un nom)
(*C'est vrai que je n'en avais pas ressenti le besoin pendant ces dernières années, mais tu as raison)
(Il y en a un qui te ferait plaisir ?)
(*Inny)
(Inny ? C'est joli, mais je ne l'ai jamais entendu auparavant)
(*Je l'ai inventé, pour qu'il soit à moi seul. Je suis content que tu le trouves joli)
(Il va falloir que j'en prenne l'habitude)
Je me lève et entre dans la salle de bains.
- Mon cœur, coupe l'eau un instant, j'arrive !
Alex me regarde, amusé, tandis que je surveille la montée du niveau du précieux liquide.
- La cafetière ne va pas s'envoler. Il y a même un petit bip pour t'avertir quand c'est prêt.
- Hé. Bien dormi ?
- Oui, et toi ?
- Ça va.
- Tu as rêvé ?
- Oui.
- Bon ou mauvais rêve ?
- Hum. J'ai revécu la veille de mes 18 ans, avec mon frère. J'ai passé un bon moment avec lui.
- Bon, alors.
- Oui, c'est la suite qui s'est mal passée.
- Ton anniversaire ?
- Non, le cadeau de mon frère.
- C'était quoi ?
- Une fille. Sylvie.
- Aargh. Tu veux me raconter ?
- Eh bien...
Bip !
- Plus tard.
Une fois mon café englouti, je reprends ma conversation.
- Je suis en train de te révéler tout mon douloureux passé, petit à petit. Mais, et toi ?
- Tu veux connaître mes noirs secrets ?
- Tu en as tant que ça ?
- Non, pas vraiment. Mais je crois que c'est de bonne guerre. Par contre, vu que tu as commencé, autant que tu en termines avec Sylvie.
- Eh bien... J'hésite vraiment, Alex, parce qu'en matière de noir secret, celui-ci tient le haut du pavé.
- A ce point ?
- Oh que oui. J'ai peur de ta réaction en fait.
- Je t'ai déjà fait cette promesse. Quoi qu'il y ait eu dans ton passé, c'est derrière toi maintenant. C'est le Yann du présent que j'aime.
- Merci.
Je prends une inspiration.
- Bon... Quelques jours après mon anniversaire...
- Salut Yann !
Sylvie est une fille vive et sympathique. Brune, les yeux noisette, un joli visage toujours souriant, elle ne laisse pas les garçons indifférents mais a jusqu'ici repoussé toutes leurs avances, prétextant détester la drague et vouloir faire son choix elle-même, comme au supermarché. Beaucoup de garçons apprécient peu d'être considérés comme un bien de consommation. Ils préfèrent se voir comme des prédateurs, mais ils se cassent tous les dents avec elle. Certains la traitent de lesbienne, mais ce sont de mauvaises langues.
- Euh, salut.
- Ça va ?
- Oui.
- Bigre, ton frère m'avait dit que tu étais timide, mais tu bats des records.
Je suis horriblement gêné.
- Mais tu sais quoi ?
- Euh, non.
- Ça me plaît.
- Hein ?
- Eh oui ! J'ai horreur des garçons arrogants qui croient que le monde leur appartient. Je préfère quelqu'un de réservé, qui ne me considérera pas comme une simple conquête qu'on met dans son lit mais comme une femme que l'on peut aimer, tu comprends ?
- Euh, oui, je crois.
- Allez viens, on va s'éclater tous les deux.
- On a fait les 400 coups ensemble, cette fille était une véritable tornade, entraînant tout sur son passage - et je faisais partie du lot.
- Tu... l'aimais ?
- Non... Je n'éprouvais aucun désir pour elle, mais je voulais croire le contraire. Je me mentais à moi-même, aveugle à mes véritables sentiments... Toutefois, ce n'était pas les sentiments, ou mon corps, qui l'intéressaient. Elle voulait simplement quelqu'un qui la suivrait partout, dans tous les coups tordus qu'elle pouvait imaginer.
Je soupire avant de reprendre.
- Elle m'a fait mener pendant un temps une vie que je n'aurais jamais vécue en temps normal. C'était un peu comme vivre avec une catastrophe naturelle. On n'en ressort pas intact.
- J'ai du mal à imaginer.
- Eh bien...
- Tu es sûre que c'est une bonne idée ?
- Il n'y a personne ici, ils sont en vacances.
- C'est fermé de toute façon.
- Rien ne reste fermé pour moi.
Je la regarde avec étonnement sortir deux outils de sa poche et les insérer dans le verrou qui ferme la grille. Il ne lui faut que quelques secondes pour le déverrouiller.
- Ouah ! Mais comment as-tu appris à faire ça ?
- Un copain.
C'était sa réponse à toutes les questions indiscrètes que je lui posais.
Nous entrons, je prélève une autre bière dans mon sac à dos pour me donner du courage.
- Tu as assez bu, il faut que tu sois en forme ce soir.
Je reste un moment silencieux, Alex me regarde stupéfait.
- J'y crois pas ! Mais vous faisiez quoi dans cette maison ?
Alex attend une réponse qui ne vient pas, je fixe mon bol vide, la gorge serrée par ma culpabilité. Je finis par prendre une grande inspiration.
- Un cambriolage.
Pour le coup, il reste bouche bée, là.
- J'ai honte, Alex, de tout ce que j'ai pu faire dans le sillage de cette fille. Je me suis laissé entraîner, dominer, je n'étais plus maître de moi-même.
- C'est allé loin cette histoire ?
Sylvie me regarde faire, tandis que je crochète la serrure, mais j'ai bien retenu mes leçons, et la porte s'ouvre. J'entre et cherche une éventuelle alarme, mais je n'en vois pas. Je pousse un soupir de soulagement.
- Bravo, me souffle-t-elle à l'oreille.
Je souris sous ma cagoule tandis qu'elle referme la porte. Je me repère rapidement et monte l'escalier, lui laissant le rez-de-chaussée.
Alex laisse échapper un sifflement.
- La vache ! Il vaut mieux que mon père n'apprenne pas ça !
- Tu peux le dire.
- Et ça a duré longtemps ?
- Presque un an.
- Tes parents ne se sont doutés de rien ?
- Ils étaient persuadés que Sylvie et moi étions devenus intimes, et elle n'a rien fait pour les détromper, bien au contraire. Mon frère était aux anges, s'il avait su...
- Il pensait bien faire en te la présentant.
- Je sais.
- Tu as conservé tes talents ?
- Je saurais toujours crocheter une serrure, bien que je n'aie plus le matériel, mais les alarmes évoluent constamment, et je ne me suis pas tenu à jour.
- Comment ça s'est terminé ? Vous avez été surpris ?
- Oh, une ou deux fois, mais on s'en est tirés. Je cours plutôt vite, dis-je en souriant. Non, c'est autre chose qui nous a séparés.
Sylvie compte les billets que notre dernier coup nous a rapporté.
- C'est dingue, Yann ! Elle planquait tout ça dans son matelas !
Je partage son enthousiasme, cette fois-ci on a décroché le gros lot. Des liasses sont éparpillées sur toute la table. Dommage qu'il n'y ait que des petites coupures, mais c'est quand même une somme.
Elle renonce, il y en a trop, et me serre dans ses bras.
- On va fêter ça !
- Qu'as-tu en tête ?
Ses mains remontent le long de mon dos jusqu'à ma nuque, et ses lèvres se portent à la rencontre des miennes.
Je ne m'y attendais pas, et je reste un moment sans réaction.
- Qu'y a-t-il ?
- Euh, j'ai été surpris.
- Pfff.
Elle m'embrasse de nouveau, et je tâche de répondre à son baiser, cette fois. Sa langue vient dans ma bouche, je fais de même...
(J'aurais cru que ce serait plus agréable... Ou au moins, excitant)
Elle commence à défaire ma chemise, puis m'en débarrasse, suivi de mon tee-shirt, ses mains parcourent ma poitrine.
- Tu vas rester planté là longtemps ?
- Euh...
- Mais c'est vrai que tu es puceau ! Laisse-toi faire, ça va être le grand jour pour toi.
Je souris, rougissant. (Je vais le faire. Ouaouh !)
Elle baisse ma braguette, et ôte mon jean et mon caleçon d'un seul mouvement. Me voici nu devant elle, je commence à la déshabiller à son tour...
Ôtant son soutien-gorge, je contemple ses seins, que je me mets à caresser. Ça lui fait visiblement du bien, mais...
(C'est la panne de mon côté, c'est pas possible une malchance pareille. Allez, Popaul, un effort !)
Elle me pousse sur le lit et nous commençons à nous caresser, nous embrassant, mais ça commence à me poser de plus en plus de problèmes. Ça ne me plaît pas, ça ne m'excite pas du tout. Que se passe-t-il ?
(Tu es ce que tu es. On ne change pas, dit un souvenir importun)
- Écoute...
- Chut.
Ses lèvres descendent le long de ma poitrine, ses mains deviennent plus indiscrètes...
- Non...
J'essaie de la repousser, de plus en plus mal à l'aise, comprenant enfin à quel point je me suis menti.
- Laisse-toi faire.
Elle ne se rend pas compte de mon état... À moins que ma résistance ne soit la cause de son excitation. Je sens monter en moi un dégoût qui ne prend pas sa source dans ma situation présente. J'ai déjà vécu ça...
- Sylvie...
- Allez, je sais que tu en as envie.
Je suis en train de replonger dans mon cauchemar, j'ai à nouveau 16 ans, et Seb est en train de...
Je me redresse soudain, la repoussant.
- Non !
Sylvie me regarde, sidérée, tandis que me rhabille en sanglotant.
- Yann ? Mais qu'est-ce qui t'arrive ?
- Je m'en vais.
- Mais qu'est-ce qui te prend ? Ça ne va pas ?
- Disparais de ma vie ! Je ne veux plus te voir ! Plus jamais, tu m'entends !
- Mais... Yann ?!
Je récupère le reste de mes affaires et sors dans la nuit.
- Je ne l'ai jamais revue. J'ai expliqué à mes parents que Sylvie et moi avions rompu, j'ai retrouvé ma chambre, ma solitude, et cessé définitivement mes escapades nocturnes. Je crois qu'elle n'a jamais compris ma réaction, ce n'est pas elle que j'avais repoussé et fui, c'était Seb.
Je pousse un long soupir... Ce n'est pas terminé, hélas.
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