Le don de guérir (Florian 18 ans surdoué) Livre 4 Tome 1

[laurentdu51100]

CHAPITRE 5 : « Centre hospitalier De Bierne » « Afrique »


« Une semaine plus tôt, avant la prérentrée universitaire. »

L’ascenseur émet un « bip » quand la porte s’ouvre au dernier étage de la tour administrative où se trouvent les bureaux de la direction du complexe hospitalier.

Une femme d’âge mûr en sort avec le sourire resplendissant démontrant bien le plaisir qu’elle éprouve à se trouver là, il ne lui faut que quelques pas dans le couloir pour qu’elle entre son badge et pousse la porte de son bureau, inondé par la lumière de cette journée radieuse qui s’annonce.

Elle s’arrête un instant pour, comme chaque matin, admirer le paysage que les grandes baies vitrées panoramiques lui délivrent de cette végétation luxuriante et sauvage qui entoure le complexe.

Un bref soupir de bien-être suivi d’une action de la main pour opacifier légèrement les immenses baies, afin de rendre lisible l’écran de son ordinateur et la voilà déjà prête à entamer sa longue journée de travail.

Un bref regard sur l’immense poster représentant ceux nombreux qui comme elle et sa famille à l’époque, ont quitté leur pays d’origine pour rejoindre cette fraternité de cœur qui chaque jour qui passe, démontre un peu plus ce que les mots amitié et famille, peuvent ici y avoir tous leurs sens.

Déjà presque dix-sept ans qu’elle a pris son poste comme directrice juridique de ce qui est, elle doit bien le reconnaître, le plus grand centre hospitalier qui sans doute existe actuellement sur Terre.

Quitter son poste de juge pour enfant pour s’expatrier aussi loin de chez elle ne lui a posé aucun problème particulier, du fait que tous ceux qu’elle aime l’ont suivie et Annie à l’approche de la soixantaine, ne peut que se réjouir de ce choix de vie sans commune mesure avec ce qu’elle avait vécu jusqu’alors.

Elle s’empresse de se libérer des affaires courantes, pour ensuite prendre sa pause du matin en s’installant confortablement sur le canapé du coin salon avec sa tasse de café fumante en main.

Comme à chaque fois qu’elle se retrouve seule, ses pensées dérivent et reprennent le cours des événements qui l’ont amenée ici et qui comme de bien entendu commence toujours par cette année deux mille deux où son fils de cœur et ses deux amis ont mystérieusement disparu, en mettant sens dessus dessous toutes les polices du monde entier.

Un sourire ému apparaît alors sur son visage en se rappelant cette première communication vidéo télépathique qu’ils ont tous reçue quelque temps plus tard et qui les a rassurés sur leur sort, recevant depuis chaque trimestre un petit compte rendu de leur nouvelle vie au sein de cet immense empire interstellaire.

Annie tourne la tête vers le calendrier électronique fixé au mur de son bureau, encore un mois avant la prochaine visite qu’ils vont leur faire et qui, comme chaque année, va passer beaucoup trop vite à son gré, les laissant ensuite dans l’attente de l’année suivante.

Il est aisé de comprendre que l’occasion est aussi la seule qu’ils ont tous à prendre quelques vacances pour faire la fête et profiter autant que faire se peut de la présence de ceux qui le reste du temps laissent un énorme vide dans leur cœur.

Un nouveau regard vers l’horloge lui dit qu’il est temps pour elle de reprendre le travail, un dernier coup d’œil vers l’extérieur avant de s’y remettre lui montre l’incessant ballet d’hélicoptères amenant les nouveaux patients venant des endroits les plus éloignés du continent et certainement les moins accessibles qui soient.

***/***

« Ancien dispensaire. »

Raphaël sort de la salle d’opération suivi par deux de ses assistants, ces derniers poussent devant eux le chariot transportant la femelle gorille retrouvée gravement blessée par les gardes-chasses de ce qui est devenu une immense réserve depuis que l’humanité s’est enfin rendu compte qu’il fallait à tout prix sauvegarder ce qui reste de la faune sauvage.

À l’approche de la quarantaine, c’est resté un très bel homme qui fait s’en retourner encore beaucoup sur son passage mais qui n’y prête aucune attention, toujours aussi amoureux qu’au premier jour d’Éric qui vit avec lui depuis bientôt vingt ans déjà.

Mariés depuis quelques années pour le meilleur et pour le « meilleur » comme ils aiment le dire, habitant une confortable hutte en bois dans le lotissement ceinturant la bourgade située à quelques kilomètres de là et qui abrite tous les personnels du centre.

Bien entendu ils sont voisins directs avec leurs autres amis qui comme eux sont en couples sans enfant, les autres vivant dans des logements plus grands au centre de cette petite ville créée spécialement pour eux où ils peuvent se rendre à pied aux écoles et autres commerces ou bâtiments administratifs, nécessaires à une communauté aussi importante.

Lui aussi commence à compter les jours, la visite annuelle de ses trois amis, quatre en fait depuis que Florian a retrouvé la mémoire de ses origines et qu’il a ramené avec lui cet étrange et magnifique garçon*, sorti tout droit des films de fantasy qu’il adorait regarder dans sa jeunesse.

Un toussotement se fait entendre qui le ramène au moment présent.

- Hum !! Docteur !!
- Oui ??
- C’est l’heure de la visite de nos pensionnaires, rappelez-vous que vous devez statuer sur la remise en liberté de certains d’entre eux avec les gardes-chasses qui sont déjà arrivés avec les matériels de transport nécessaires.
- J’arrive !! Donnez-moi une petite minute le temps que je me change !!
- Entendu docteur !!! Il y a aussi le nouveau stagiaire qui vient d’arriver !!

Raphaël sourit.

- Eh bien, faites-le donc entrer !!

Quelques secondes passent alors qu’il termine de se laver les mains, quand un tonitruant et joyeux « salut tonton » le fait se retourner vers un jeune et magnifique garçon, rayonnant autant de beauté que de joie de vivre.

- Ah !! Te voilà sale garnement, content d’être enfin assez grand pour apprendre un vrai métier avec un vrai pro ??
- Je ne savais pas que vous étiez deux dans cette clinique ??

Raphaël tend les bras pour y recevoir le garçon qui ne se fait pas prier pour venir s’y lover.

- Tu te crois drôle je suis sûr, pas vrai ??
- Tu sais bien que j’adore te taquiner tonton !!
- Ouaih !! Mais pas pendant le boulot, tu sais ce que ton père m’a dit !! Il t’envoie direct en Chine pour gérer les affaires de la famille si tu ne t'en tiens pas sérieusement à tes stages d’études ici !!
- Je suis sûr que l’idée vient de grand-père Ming, papa en ferait une drôle de tronche si je devais vraiment le quitter ! Hi ! Hi !

Une voix résonne alors, venant de derrière leur dos.

- Pourtant tu vas devoir partir quelque temps à l’étranger pour poursuivre tes études, nous avons une mission à te confier qui demandera beaucoup de discrétion de ta part.

Raphaël regarde son ami Yuan qui vient de les surprendre, comprenant à son regard que quelque chose le trouble.

- Une mission ??

*Lire l’apprenti magicien



CHAPITRE 6 : « Gare de Shanpaï » « Keisuke »


Keisuke range son iPhone dans la poche de sa veste en soupirant, moitié d’amusement et moitié d’énervement, d’amusement parce qu’il a bien saisi la raison du revirement soudain de son copain dès qu’il a compris qui serait son nouveau coloc et d’énervement du changement que lui a à subir, alors qu’il s’entendait à merveille avec son ami Hiroki, l’étudiant qui a partagé sa chambre avec lui l’année précédente.

Ce n’est pas tellement le fait d’avoir un gay comme nouveau camarade de chambre qui le gène, mais les « Toots » comme sont nommés ceux qui sont particulièrement maniérés et efféminés, l’ont toujours laissé avec une forte impression d’antipathie à leur façon d’être toujours à minauder, à se faire remarquer et à imiter la gent féminine, les rendant plus ridicules à ses yeux qu’autre chose.

Celui avec qui il va devoir partager sa chambre étant dans ses souvenirs du moins, le pire de tous et rien que d’y penser, Keisuke en a des frissons qui lui glacent le corps.

Le souvenir de la drague assidue qu’il a reçue de sa part tout du long du premier trimestre de sa première année n’arrange rien à son moral, conscient qu’il va devoir remettre les choses au point encore cette fois-ci quitte à être plus menaçant encore.

Heureusement un son encore lointain annonce l’arrivée du train et le fait se lever avec cette fois un sourire épanoui aux lèvres rien qu’à la pensée de retrouver enfin son meilleur ami et surtout, de pouvoir rester à ses côtés durant les trois prochaines années.

Il est toujours surpris de la simplicité de « Tom » qui au quotidien ne profite jamais de sa condition familiale, la preuve en est encore cette fois par son arrivée en train alors que beaucoup vont rejoindre l’université par leurs propres moyens en montrant bien la richesse de leur famille, se faisant conduire jusqu’aux portes de la cité universitaire dans des berlines de luxe avec chauffeur.

Keisuke sait bien pour l’avoir maintes fois vécu, que la prestance seule de son ami fera qu’il n’ait pas besoin de toutes ces démonstrations de richesses pour qu’une fois encore il devienne celui avec qui il faut être ami pour avoir la moindre chance de gagner en popularité sur le campus.

Le train apparaît enfin et amorce son freinage avec le crissement strident des mâchoires mises à rude épreuve, les rares passagers commencent à sortir sitôt l’ouverture des portes automatiques et il ne faut pas longtemps à Keisuke pour repérer son copain à sa taille au-dessus de la moyenne.

Il lève alors les deux bras en les agitant au-dessus de sa tête, tout en sautant à pieds joints et en hurlant pour se faire entendre.

- « Tom » !! Hé… « Tom » !! Par ici !!

Il voit le visage de son ami devenir rayonnant de joie en l’apercevant, levant à son tour sa main libre pour lui faire signe tout en prenant d’un bon pas sa direction.

Une fois encore Keisuke se laisse subjuguer par la vision qu’il en a de cette beauté virile qui attire inexorablement les regards, laissant ensuite les visages dans un état de béatitude à contempler ce jeune homme qui face aux retrouvailles avec son meilleur ami laisse éclater sa joie sans se préoccuper le moins du monde de l’effet qu’il produit à ceux qui l’entourent.

Keisuke ferme un instant les yeux en s’obligeant à calmer les battements de son cœur et à se reprendre d’une respiration qui soudainement s’était accélérée.

Ça aurait pu marcher si seulement Tomoya ne l’avait pas rejoint pour le serrer chaleureusement dans ses bras, l’embrassant sur les deux joues à la mode européenne.

C’est donc avec le cœur battant la chamade que Keisuke rouvre les yeux, plongeant dans ceux de son ami qui le regarde avec un plaisir non dissimulé.

- Hé bien quoi ?? C’est quoi cette tête ??
- Putain « Tom » !! Combien de fois il faudra que je te répète de ne pas faire ça, je vais finir par faire une syncope un de ces jours et tu auras l’air fin après coup !!
- Tu devrais y penser sérieusement alors ! Hi ! Hi !
- Qu’est-ce que tu vas me balancer encore comme connerie ??
- Juste que ça aurait été l’occasion pour toi de recevoir un « bouche-à-bouche » de ma part pour te sauver la vie ! Hi ! Hi !

Tomoya prend néanmoins un peu de recul en voyant bien combien son copain semble perturbé.

- Depuis tout ce temps que l’on se connaît, tu n’arrives toujours pas à t’y faire ?? C’est à croire que tu es amoureux ma parole ! Hi ! Hi !
- Arrête de dire tes conneries tu veux bien !! N’importe qui réagirait comme moi si tu lui tombais dessus comme tu viens de le faire.
- N’importe quoi !!
- On parie ??
- Décidément tu aimes bien perdre !!

La conversation aide Keisuke à reprendre enfin le contrôle de ses émotions qu’une fois encore il avait perdu face à la beauté intemporelle de « Tom », beauté qui a encore monté d’un cran par rapport à leur dernier « tête à tête ».

- Je tiens le pari !! Quant à perdre ce serait étonnant, même si c'était souhaitable quelque part !!
- De quoi tu parles encore ??
- Des problèmes qui ne vont assurément pas manquer, cette école n’est pas mixte et tous les étudiants y sont pensionnaires, tu vas devoir éviter de trop sourire.

Tomoya fronce les sourcils, conscient qu’il y a une grande part de vérité dans les paroles de son copain et l’année passée en Suisse lui avait déjà amené cette réflexion qu’il lui fallait faire en sorte de ne surtout pas laisser les personnes qu’il côtoyait alors, avoir le sentiment qu’il s’intéressait à elles plus que comme de simples amis.

Un soupir lui vient avant de répondre.

- Pffttt !! Comme si c’était de ma faute !! Tu crois que c’est facile pour moi d’être toujours à me retenir pour ne froisser personne, il y a des fois où j’envie ceux qui se fondent dans la foule sans jamais se faire remarquer.

Il reprend sa valise en main.

- Bon !! On y va !! Raconte-moi plutôt ce qu’il en est depuis notre dernière rencontre !!
- Toi d’abord, parce que si je commence à te parler de qui tu sais, il n’y aura plus moyen de changer de sujet !!

***/***

Les voilà donc à faire le chemin à pied jusqu’à l’université, papotant de tout et de rien comme deux vieux amis qu’ils sont dans la vie et qui ne s’étaient pas vus depuis un long moment, sans faire spécialement attention aux personnes qu’ils croisent ou encore qui suivent le même chemin non loin d’eux et qui hélas amènent un accent de vérité aux craintes émises quelques minutes plus tôt par Keisuke, sur les tensions qui ne vont pas manquer face à la personnalité hors norme de Tomoya.