Aujourd’hui, 10:20 AM
Les deux jeunes gens se faisaient face sans prononcer un mot. Cylian restait stupéfait de voir que quelqu'un ayant autant d'assurance et de charisme puisse être rongé intérieurement par tant de chagrin et de tristesse.
Il s'avança lentement vers la silhouette sombre. La pénombre aidant, on aurait dit une panthère noire agonisante, blessée en plein cœur par la balle d'un chasseur.
Le jeune homme aux cheveux bruns entrouvrit timidement les lèvres pour demander:
— Pardon, je... je ne savais pas que tu étais ici, si tu veux rester seul je comprendrais.
— Non reste ! Ne t'en vas pas... s'il te plaît, ta présence m'apaisera.
— Je me demande qu'est-ce qui te rends aussi triste ?
— Mon âme n'est que chagrin et mon cœur n'est que douleur, ce serait trop long à t'expliquer...
— Tu t'appelles Talion n'est-ce pas ? Comme la loi qui porte ton nom ? Moi je m'appelle Cylian, je suis heureux de faire ta connaissance même si j'aurai préféré que ce soit en d'autres circonstances. J'ai entendu tes exploits tout à l'heure devant Sofian et Yliria...
Talion releva doucement la tête, son regard tourné au loin vers le relief dentelé que faisait ressortir la pâle lueur de l'astre Selenn.
— J'ai appris ta venue Cylian et je suis content de t'avoir parmi nous.
Le beau brun se rapprocha de Talion et posa sa main sur l'épaule de son camarade. Celui-ci sursauta, un peu surpris par ce geste de compassion.
— Excuse-moi Cylian, mais de temps à autre, je repense à quelqu'un que j'ai connu il y a longtemps, une personne que j'aimais par-dessus tout. Et que j'ai perdu...
Nous étions liés par un amour passionnel. Il était beau comme le jour, son regard suffisait à chasser tous les malheurs que nous pouvions endurer.
— Il ? C'était un garçon alors ?
— Oui Cylian, le plus tendre et le plus merveilleux de tous les garçons, son cœur s'accordait au mien comme jamais il n'a pu l'être avec quelqu'un d'autre.
À écouter Talion, l'éthéré sentit son cœur se serrer... ils avaient connu un sort identique.
— Nous avons le même destin alors, j'ai moi aussi perdu un être cher, le mot « amour » n'était pas assez fort pour décrire ce que nous ressentions l'un pour l'autre.
— Parfois j'ai l'impression qu'il se trouve à mes côtés, qu'il veille tendrement sur moi...
— ... qu'il me susurre « ne t'inquiètes pas, je pense toujours à toi » compléta Cylian.
— Il arrive que je sente son contact contre ma peau, comme si ses doigts délicats effleuraient ma main...
Ils s'interrompirent pour admirer la voûte étoilée qui les surplombait. Les mots étaient inutiles, tous les deux avaient connu un sourire, un regard plein d'amour destiné à réchauffer le cœur, des caresses et des baisers attentionnés prodigués par leur ange respectif.
— Nous nous comprenons tellement Talion, nous avons chacun aimé un être formidable qui nous manque cruellement à présent. Ce monde nous laisse de côté, il tourne alors que nous, nous restons au bord du chemin, voyant les autres s'aimer et s'amuser. Malgré tous les pouvoirs qu'il existe sur cette terre, cela ne nous permet pas toujours de résoudre tous les problèmes.
Un ami à moi m'a dit un jour: « si on regarde les étoiles en ayant une pensée pour l'être qui nous est cher, il se peut que l'être en question regarde la même étoile au même instant que nous ». J'espère du fond du cœur qu'il dit vrai.
— Je le pense Cylian, je le pense vraiment. Souvenons-nous de ces moments partagés avec l'autre, de ces instants fugaces du bonheur passé.
— Euh... je vais peut-être paraître indiscret mais William m'avait dit qu'Yliria et toi vous vous aimiez, ce n'est donc pas tout à fait vrai ?
Talion croisa les bras et marcha silencieusement sur les dalles du balcon.
— Yliria... même si elle désirerait qu'il y ait plus que de l'amitié entre nous, cela ne serait pas possible. Je sais qu'elle m'aime mais cet amour sera toujours à sens unique. Cylian, Yliria m'a divulgué un secret à ton sujet qui risque de te surprendre... écoutes-moi bien, ce que je vais te dire est vrai, crois-moi. Elle t'en a beaucoup voulu, cela remonte à plus d'une année...
— Moi ? Mais qu'est-ce que je lui ai fait ?
— Tu lui as tout simplement volé une chose qu'elle désirait plus que tout au monde.
— Attends, il y a un an, Yliria, William et Sofian nous ont aidés à combattre un psychique qui nous avait fait du mal.
— C'est vrai, mais ce jour-là, Yliria est aussi tombée amoureuse du garçon que tu aimais, dès la première seconde où elle l'a aperçu.
— Tu veux parler de Toni ?
— En effet... il n'a jamais dû te l'avouer mais ils se sont revus quelques mois plus tard. Celui à qui tu tenais tant avait un service à lui demander et elle, croyant qu'il éprouvait des sentiments à son égard, l'a aidé naturellement.
« Mais quand elle a su par la suite que ce coup de main était destiné à garantir votre relation, elle en a eu le cœur brisé. C'est là qu'elle a compris que Toni était gay et qu'il ne te laisserait jamais tomber pour elle. Tu étais sa flamme et lui se consumait d'amour chaque jour plus intensément que le précédent... Je pense qu'elle en était jalouse, votre attachement l'un à l'autre devait être si grand...
Voilà. Tout ce que je sais, je le tiens d'Yliria, mais elle ne m'en a pas dit plus.
Talion retomba dans son mutisme.
— Mais alors cela a peut-être un rapport avec sa disparition ? Il faut que je parle à Yliria demain ! Se peut-il qu'elle soit la clé du mystère ?
Toni et Yliria... je ne savais pas qu'ils s'étaient revus ensuite...
Cylian serra nerveusement le poing puis se jeta presque sur son interlocuteur pour le forcer à avouer les détails de cette histoire incroyable.
— Je doute qu'elle puisse t'aider. Je me suis fâché avec Yliria tout à l'heure car elle ne veut pas me voir à tes côtés. Elle craint que cela se reproduise.
— Quoi ? Mais elle n'en a pas le droit ! Tu fais ce que tu veux ! Comme si j'allais... non rien, laisse tomber.
— En tout cas, merci de m'avoir écouté Cylian, il fallait que je te parle de ce secret. Je voudrai qu'on soit amis à partir de maintenant, tu veux bien ?
En guise de réponse, Cylian s'approcha du jeune homme masqué et prit sa main dans la sienne.
Il aurait juré que l'éclaireur lui souriait au travers de son heaume. De superbes yeux bleus brillaient sous le casque noir.
— Talion, je peux te demander une faveur ? Maintenant ? J'aimerais voir ton visage, depuis que je suis arrivé, tu n'as pas enlevé ton casque une seule fois... s'il te plaît. Même seulement pendant quelques secondes, tu veux bien ?
Sitôt après la requête du jeune homme, Talion eu un mouvement de recul.
Il pivota en direction de la balustrade, effeuillant de la main les fleurs de glycine au parfum suave et capiteux qu'elles libéraient dans la fraîcheur nocturne. Leur fragrance était si forte qu'elle en donnait mal à la tête.
— Je suis désolé, je ne peux pas faire ça... commença Talion. L'épreuve d'Icare ne m'a pas épargné et j'en ai payé le prix fort, le destin ne m'a pas fait de cadeau. « Œil pour œil, dent pour dent » Cylian. C'est la loi biblique du Talion dont je tire mon surnom.
Je suis bien loin de ce que j'ai été jadis. Mon visage est à présent défiguré et mon corps, lacéré de cicatrices.
Voici ce qui m'est arrivé, voici un bout de ma vie : Les champs électriques sont ma limitation, par conséquent, je ne peux pas voler à proximité des habitations.
Un jour, ignorant encore cela, je me suis écrasé près d'une antenne électrique.
C'est Yliria qui m'a sauvé... Je lui dois la vie mais j'ai perdu mon amour ce jour-là, j'ai eu peur de lui montrer ce que j'étais devenu. Et depuis, certains soirs je pleure...
Touché par la tragique histoire de l'éclaireur, Cylian se mit à pleurer à son tour, se blottissant doucement contre son ami pour le réconforter.
— Oh je suis tellement désolé Talion, si tu savais ! Si seulement je pouvais faire quelque chose pour toi, c'est injuste, je ne te connais pas encore mais tu mérites tellement d'être heureux !
— Cylian, ce soir tu m'as beaucoup apporté en m'écoutant, tu m'as rempli le cœur de chaleur et rien que pour cet instant, je t'en suis éternellement reconnaissant. Alors... amis ?
— Oui, amis ! Bien sûr !
Les deux éthérés se mirent à rire doucement, comme pour chasser leur larmes et apaiser leur cœur. Le beau brun se tut, tout occupé qu'il était à écouter le rire de Talion.
Le jeune homme avait une voix si chaude et si douce qui émanait du morceau de métal posé sur ses lèvres... C'est comme s'il avait l'impression de l'avoir toujours connu, comme si leur rencontre était prédestinée.
Prédestinée...
— Un éthéré sans visage... souffla Cylian.
Cette pensée le figea de stupeur.
Ses jambes vacillèrent et son cœur s'emballa.
— Oh non !
— Cylian ? Qu'y a-t-il ?
— Non ! Rien ! Il se fait tard, je dois rentrer ! prétexta-t-il. Talion, merci ! Ce soir tu m'as rendu le sourire ! J'espère que nous passerons un peu de temps ensemble ces prochains jours, mais là, je dois aller me reposer...
— Bonne nuit Cylian ! Tu... tu vas peut-être penser que je suis fou mais ta présence m'apaise, j'ai besoin de toi...
— Moi aussi... enfin, je crois... Excuse mon empressement, je crois que c'est moi qui suis en train de devenir fou !
Le jeune français s'enfuit à toutes jambes en direction de sa chambre tandis qu'il se remémorait une phrase émergeant d'un passé lointain, enfoui depuis tout ce temps dans un coin de sa mémoire.
Un beau soir d'été comme celui-ci, une presciente lui avait dit:
« Tu trouveras l'amour de ta vie, un amour pur ! Mais je suis navrée Cylian, je ne vois pas Toni dans ma vision, je vois un étheré qui n'a pas de visage. Mais rassures-toi. Je te vois très heureux.
Par contre, il y a autre chose qui te concerne, je comprends maintenant pourquoi nous étions amenés à nous rencontrer, je devais t'avertir. Ton destin et celui de la Guilde des Pouvoirs est intimement lié ! »
— Par tous les éthérés, est-ce lui ? Sommes-nous destinés à nous aimer ? Tout serait déjà tracé ?
Sur le balcon, Talion restait songeur tandis que les bruits de pas s'éloignaient dans le couloir voisin.
Un murmure s'échappa de ses lèvres, rapidement recouvert par le chant des cigales.
— Je suis navré Cylian, il est trop tôt pour le moment mais un jour, nous te dirons la vérité.
Il s'avança lentement vers la silhouette sombre. La pénombre aidant, on aurait dit une panthère noire agonisante, blessée en plein cœur par la balle d'un chasseur.
Le jeune homme aux cheveux bruns entrouvrit timidement les lèvres pour demander:
— Pardon, je... je ne savais pas que tu étais ici, si tu veux rester seul je comprendrais.
— Non reste ! Ne t'en vas pas... s'il te plaît, ta présence m'apaisera.
— Je me demande qu'est-ce qui te rends aussi triste ?
— Mon âme n'est que chagrin et mon cœur n'est que douleur, ce serait trop long à t'expliquer...
— Tu t'appelles Talion n'est-ce pas ? Comme la loi qui porte ton nom ? Moi je m'appelle Cylian, je suis heureux de faire ta connaissance même si j'aurai préféré que ce soit en d'autres circonstances. J'ai entendu tes exploits tout à l'heure devant Sofian et Yliria...
Talion releva doucement la tête, son regard tourné au loin vers le relief dentelé que faisait ressortir la pâle lueur de l'astre Selenn.
— J'ai appris ta venue Cylian et je suis content de t'avoir parmi nous.
Le beau brun se rapprocha de Talion et posa sa main sur l'épaule de son camarade. Celui-ci sursauta, un peu surpris par ce geste de compassion.
— Excuse-moi Cylian, mais de temps à autre, je repense à quelqu'un que j'ai connu il y a longtemps, une personne que j'aimais par-dessus tout. Et que j'ai perdu...
Nous étions liés par un amour passionnel. Il était beau comme le jour, son regard suffisait à chasser tous les malheurs que nous pouvions endurer.
— Il ? C'était un garçon alors ?
— Oui Cylian, le plus tendre et le plus merveilleux de tous les garçons, son cœur s'accordait au mien comme jamais il n'a pu l'être avec quelqu'un d'autre.
À écouter Talion, l'éthéré sentit son cœur se serrer... ils avaient connu un sort identique.
— Nous avons le même destin alors, j'ai moi aussi perdu un être cher, le mot « amour » n'était pas assez fort pour décrire ce que nous ressentions l'un pour l'autre.
— Parfois j'ai l'impression qu'il se trouve à mes côtés, qu'il veille tendrement sur moi...
— ... qu'il me susurre « ne t'inquiètes pas, je pense toujours à toi » compléta Cylian.
— Il arrive que je sente son contact contre ma peau, comme si ses doigts délicats effleuraient ma main...
Ils s'interrompirent pour admirer la voûte étoilée qui les surplombait. Les mots étaient inutiles, tous les deux avaient connu un sourire, un regard plein d'amour destiné à réchauffer le cœur, des caresses et des baisers attentionnés prodigués par leur ange respectif.
— Nous nous comprenons tellement Talion, nous avons chacun aimé un être formidable qui nous manque cruellement à présent. Ce monde nous laisse de côté, il tourne alors que nous, nous restons au bord du chemin, voyant les autres s'aimer et s'amuser. Malgré tous les pouvoirs qu'il existe sur cette terre, cela ne nous permet pas toujours de résoudre tous les problèmes.
Un ami à moi m'a dit un jour: « si on regarde les étoiles en ayant une pensée pour l'être qui nous est cher, il se peut que l'être en question regarde la même étoile au même instant que nous ». J'espère du fond du cœur qu'il dit vrai.
— Je le pense Cylian, je le pense vraiment. Souvenons-nous de ces moments partagés avec l'autre, de ces instants fugaces du bonheur passé.
— Euh... je vais peut-être paraître indiscret mais William m'avait dit qu'Yliria et toi vous vous aimiez, ce n'est donc pas tout à fait vrai ?
Talion croisa les bras et marcha silencieusement sur les dalles du balcon.
— Yliria... même si elle désirerait qu'il y ait plus que de l'amitié entre nous, cela ne serait pas possible. Je sais qu'elle m'aime mais cet amour sera toujours à sens unique. Cylian, Yliria m'a divulgué un secret à ton sujet qui risque de te surprendre... écoutes-moi bien, ce que je vais te dire est vrai, crois-moi. Elle t'en a beaucoup voulu, cela remonte à plus d'une année...
— Moi ? Mais qu'est-ce que je lui ai fait ?
— Tu lui as tout simplement volé une chose qu'elle désirait plus que tout au monde.
— Attends, il y a un an, Yliria, William et Sofian nous ont aidés à combattre un psychique qui nous avait fait du mal.
— C'est vrai, mais ce jour-là, Yliria est aussi tombée amoureuse du garçon que tu aimais, dès la première seconde où elle l'a aperçu.
— Tu veux parler de Toni ?
— En effet... il n'a jamais dû te l'avouer mais ils se sont revus quelques mois plus tard. Celui à qui tu tenais tant avait un service à lui demander et elle, croyant qu'il éprouvait des sentiments à son égard, l'a aidé naturellement.
« Mais quand elle a su par la suite que ce coup de main était destiné à garantir votre relation, elle en a eu le cœur brisé. C'est là qu'elle a compris que Toni était gay et qu'il ne te laisserait jamais tomber pour elle. Tu étais sa flamme et lui se consumait d'amour chaque jour plus intensément que le précédent... Je pense qu'elle en était jalouse, votre attachement l'un à l'autre devait être si grand...
Voilà. Tout ce que je sais, je le tiens d'Yliria, mais elle ne m'en a pas dit plus.
Talion retomba dans son mutisme.
— Mais alors cela a peut-être un rapport avec sa disparition ? Il faut que je parle à Yliria demain ! Se peut-il qu'elle soit la clé du mystère ?
Toni et Yliria... je ne savais pas qu'ils s'étaient revus ensuite...
Cylian serra nerveusement le poing puis se jeta presque sur son interlocuteur pour le forcer à avouer les détails de cette histoire incroyable.
— Je doute qu'elle puisse t'aider. Je me suis fâché avec Yliria tout à l'heure car elle ne veut pas me voir à tes côtés. Elle craint que cela se reproduise.
— Quoi ? Mais elle n'en a pas le droit ! Tu fais ce que tu veux ! Comme si j'allais... non rien, laisse tomber.
— En tout cas, merci de m'avoir écouté Cylian, il fallait que je te parle de ce secret. Je voudrai qu'on soit amis à partir de maintenant, tu veux bien ?
En guise de réponse, Cylian s'approcha du jeune homme masqué et prit sa main dans la sienne.
Il aurait juré que l'éclaireur lui souriait au travers de son heaume. De superbes yeux bleus brillaient sous le casque noir.
— Talion, je peux te demander une faveur ? Maintenant ? J'aimerais voir ton visage, depuis que je suis arrivé, tu n'as pas enlevé ton casque une seule fois... s'il te plaît. Même seulement pendant quelques secondes, tu veux bien ?
Sitôt après la requête du jeune homme, Talion eu un mouvement de recul.
Il pivota en direction de la balustrade, effeuillant de la main les fleurs de glycine au parfum suave et capiteux qu'elles libéraient dans la fraîcheur nocturne. Leur fragrance était si forte qu'elle en donnait mal à la tête.
— Je suis désolé, je ne peux pas faire ça... commença Talion. L'épreuve d'Icare ne m'a pas épargné et j'en ai payé le prix fort, le destin ne m'a pas fait de cadeau. « Œil pour œil, dent pour dent » Cylian. C'est la loi biblique du Talion dont je tire mon surnom.
Je suis bien loin de ce que j'ai été jadis. Mon visage est à présent défiguré et mon corps, lacéré de cicatrices.
Voici ce qui m'est arrivé, voici un bout de ma vie : Les champs électriques sont ma limitation, par conséquent, je ne peux pas voler à proximité des habitations.
Un jour, ignorant encore cela, je me suis écrasé près d'une antenne électrique.
C'est Yliria qui m'a sauvé... Je lui dois la vie mais j'ai perdu mon amour ce jour-là, j'ai eu peur de lui montrer ce que j'étais devenu. Et depuis, certains soirs je pleure...
Touché par la tragique histoire de l'éclaireur, Cylian se mit à pleurer à son tour, se blottissant doucement contre son ami pour le réconforter.
— Oh je suis tellement désolé Talion, si tu savais ! Si seulement je pouvais faire quelque chose pour toi, c'est injuste, je ne te connais pas encore mais tu mérites tellement d'être heureux !
— Cylian, ce soir tu m'as beaucoup apporté en m'écoutant, tu m'as rempli le cœur de chaleur et rien que pour cet instant, je t'en suis éternellement reconnaissant. Alors... amis ?
— Oui, amis ! Bien sûr !
Les deux éthérés se mirent à rire doucement, comme pour chasser leur larmes et apaiser leur cœur. Le beau brun se tut, tout occupé qu'il était à écouter le rire de Talion.
Le jeune homme avait une voix si chaude et si douce qui émanait du morceau de métal posé sur ses lèvres... C'est comme s'il avait l'impression de l'avoir toujours connu, comme si leur rencontre était prédestinée.
Prédestinée...
— Un éthéré sans visage... souffla Cylian.
Cette pensée le figea de stupeur.
Ses jambes vacillèrent et son cœur s'emballa.
— Oh non !
— Cylian ? Qu'y a-t-il ?
— Non ! Rien ! Il se fait tard, je dois rentrer ! prétexta-t-il. Talion, merci ! Ce soir tu m'as rendu le sourire ! J'espère que nous passerons un peu de temps ensemble ces prochains jours, mais là, je dois aller me reposer...
— Bonne nuit Cylian ! Tu... tu vas peut-être penser que je suis fou mais ta présence m'apaise, j'ai besoin de toi...
— Moi aussi... enfin, je crois... Excuse mon empressement, je crois que c'est moi qui suis en train de devenir fou !
Le jeune français s'enfuit à toutes jambes en direction de sa chambre tandis qu'il se remémorait une phrase émergeant d'un passé lointain, enfoui depuis tout ce temps dans un coin de sa mémoire.
Un beau soir d'été comme celui-ci, une presciente lui avait dit:
« Tu trouveras l'amour de ta vie, un amour pur ! Mais je suis navrée Cylian, je ne vois pas Toni dans ma vision, je vois un étheré qui n'a pas de visage. Mais rassures-toi. Je te vois très heureux.
Par contre, il y a autre chose qui te concerne, je comprends maintenant pourquoi nous étions amenés à nous rencontrer, je devais t'avertir. Ton destin et celui de la Guilde des Pouvoirs est intimement lié ! »
— Par tous les éthérés, est-ce lui ? Sommes-nous destinés à nous aimer ? Tout serait déjà tracé ?
Sur le balcon, Talion restait songeur tandis que les bruits de pas s'éloignaient dans le couloir voisin.
Un murmure s'échappa de ses lèvres, rapidement recouvert par le chant des cigales.
— Je suis navré Cylian, il est trop tôt pour le moment mais un jour, nous te dirons la vérité.