Chapitre 16
Forêt de Syl.
Evran est sur le retour. Les archers ainsi que lui-même ont bien travaillé : la troupe d'éclaireurs du seigneur Frégast a été neutralisée avec succès et le jeune autochtone est maintenant chargé d'apporter la nouvelle à Esso.
Il se doute bien que son père Gwornal l'a surtout renvoyé pour avoir la conscience tranquille. Il n'aime pas savoir son fils exposé aux batailles, même si ce dernier reste furtif.
Alors qu'il médite là-dessus, Evran constate soudainement la présence de trois carcasses encore saignantes de vélociraptors.
Intrigué, le jeune homme s'en approche et il est pour le moins surpris de trouver sur les lieux un morceau du jean bleu de son homme. Il sait qu'il ne peut s'agir d'Anthony, ce dernier étant habituellement vêtu de noir.
Il ressent une grande bouffée de fierté pour son homme, car tuer trois dinosaures dans la nuit n'est pas une mince affaire. Mais autre chose retient son attention, il s'agit des empreintes.
Au départ, Justin devait suivre Anthony, qui se dirigeait vers l'orée de la forêt. Mais les traces qu'il a sous les yeux s'enfoncent au cœur de la jungle.
Justin a dû s'égarer, cela ne peut être que ça.
Tant pis pour l'archonte, Evran préfère suivre la piste de son homme perdu. De toute façon apporter les nouvelles à Esso n'est qu'un prétexte pour que l'autochtone reste en sécurité au village et il le sait très bien.
Un arc dans son dos et son nouveau zak à la main, le jeune homme commence à suivre la piste de son amant.
Il ne sait pas encore à quel point il va marcher longtemps.
--- --- ---
Village de Syl.
Vena passe à peine l'entrée du village, qu'Esso lui bondit dessus pour lui conseiller de rester à Syl le temps que le problème de ces Terriens soit réglé. L'invitation paraît ridicule à l'ermite, qui vivait déjà hors du village lors de la guérilla, ce n'est donc pas maintenant qu'elle changera son mode de vie.
Lorsqu'elle pénètre le baraquement où dort le blessé, elle sursaute. Malgré l'extrême pâleur de son visage et son air général très affaibli, elle voit très bien de qui il s'agit.
- Mais je le reconnais ! Il m'a agressée l'autre jour, celui-là ! Comme on se retrouve !
Elle sourit, avant de constater rapidement l'état du malade. Elle lui fait avaler de force une mixture incolore. Le capitaine ouvre les yeux et se met à geindre.
- Vous ! glapit-il.
- Alors, ça fait quoi d'être sans défense devant moi après ce que vous avez fait ? nargue-elle.
- Tuez-moi, ça vaudra mieux... halète John, fiévreux.
- Je ne suis pas si rancunière que ça ! Ne vous réjouissez pas trop vite, c'est pour pouvoir vous botter le cul que je vais vous remettre sur pieds !
- Vous... ne comprenez pas...
- Je comprends surtout qu'il va falloir du temps ! Vous avez chopé quoi exactement ? J'ai jamais vu ça !
- ... pas une maladie ordinaire... Seul le Dragon...
- Quoi ?
- Lisez... mon... esprit... dormir... Baragouine-il, avant de replonger dans sa léthargie.
- S'il le demande... marmonne-elle.
Prudente, Vena prend mille précautions pour investir l'esprit du capitaine : elle ne connaît que trop bien sa puissance et n'a pas envie d'en être de nouveau victime. Immédiatement, une anomalie dans le psychisme de l'homme lui saute aux yeux : deux esprits s'affrontent là où elle n'aurait dû en trouver qu'un.
Le premier semble très éprouvé et tente de ne pas perdre de son essence, pour l'avoir déjà touché, l'alchimiste sait qu'il s'agit de l'esprit du capitaine John.
L'autre, en revanche dégage une aura inhumaine et malsaine. Il semble se développer et gagner en force à chaque instant. Vena comprend que ce que John a contracté est bien plus qu'une maladie : cette pathologie est consciente et elle attaque aussi bien l'organisme du capitaine que son esprit.
Sans attendre, Vena se porte au secours de son patient, qu'elle sent complètement désespéré face à son assaillant.
A deux contre un, la tendance s'inverse mais l'ennemi est retors et sournois. La consistance elle-même de cette entité est répugnante. Quand l'alchimiste défend son patient contre un de ses assauts, elle sent comme une huile noire visqueuse qui vient étouffer sa propre conscience, cherchant des failles pour s'y engouffrer. Cette chose est corrosive, collante, poisseuse et dégoûtante. Vena peine pendant un long moment à repousser ce voile immonde, heureusement affaiblie au préalable par le capitaine. Ce contact, bien qu'il ne soit pas physique, lui donne envie de vomir.
Vaincue pour le moment, l'entité recule mais reste bien enracinée dans le psychisme de son hôte.
- Laissez tomber... Vous ne faites depuis des millions d'années que retarder l'inévitable... Nous nous nourrirons... susurre-elle.
Sa voix elle-même est angoissante. Extrêmement grave, presque caverneuse, pleine de langueur. Une voix d'outre-tombe.
- Vous êtes nombreux ? demande Vena, curieuse d'en savoir plus sur ce monstre ignoble.
- Des millions et des millions... Et bientôt, d'autres millions...
- Bloqués dans un monde lointain ! rétorque le capitaine, provoquant.
- Les Dragons eux-mêmes ne nous ont pas arrêtés ! Qu'en sera-il pour vous, humains, neldars et valvors ? Votre mort contribuera tôt ou tard à notre expansion infinie...
- Malheureusement, je veillerai et vous ne vous échapperez jamais dans la nature. Cessez le combat et je vous permettrai de survivre en tant que Daukn. Propose Vena, qui ignore tout de la nature du Mal.
- Ne perdez pas votre temps, ses instincts sont plus forts que tout ! avertit John.
En effet, l'esprit du Mal, poussé dans ses retranchements choisit ce moment pour attaquer avec violence, consumant ses dernières forces... Il se jette contre la barrière que Vena a érigée autour d'elle-même et s'évanouit dans les ténèbres... Pour l'instant.
- Peut être que l'avoir vaincu me permettra de guérir votre corps... suppose l'alchimiste.
- J'en doute, son esprit finira par se régénérer, j'ai été piqué par une de ces créatures, ses cellules se multiplient dans mon sang... Ce n'est que le premier assaut... Vous devriez me tuer avant qu'il ne finisse par me dominer complètement mais avant, je dois vous donner des informations capitales pour la survie des deux mondes !
- Ne dîtes pas d'imbécilités, vous sous-estimez mes talents... Continuez de le combattre quand il se ranimera. Je reviendrai régulièrement pour vous aider, en attendant je vais essayer de guérir votre corps, dit-elle, en s'apprêtant à partir.
- Attendez !
- Oui ?
- J'ai peut-être une idée... Trouvez un cristal de Daukn, il faudra tenter d'y transférer mon esprit. C'est ma seule chance d'y rechaper.
- Vous croyez que c'est une vie, pour un humain ? Vous n'aurez plus de corps ! hurle Vena, que cette idée ne séduit pas du tout.
- En temps normal je serais d'accord avec vous mais depuis notre dernière rencontre, des choses ont changé ! J'ai doté le chef des Terriens, qui est un fou furieux, d'une arme de son monde si dévastatrice qu'il n'en existe que peu ! Une arme qui pourrait briser le monde, une bombe nucléaire.
L'alchimiste n'ayant aucune confiance en ce prophète qui l'a autrefois agressée et volée, elle plonge rapidement dans l'esprit tout écorché du capitaine et ce qu'elle y voit l'anéantit.
- Vous avez donné ÇA au seigneur Frégast ? Mais vous êtes complètement malade !
- Avec mon don psychique, je comptais m'infiltrer dans leur base et la récupérer... Mon but était de la confier à mes puissants alliés, pour la faire exploser dans le monde du Mal, afin de le détruire pour de bon. Si je meurs maintenant, l'arme risque d'être utilisée par le seigneur Frégast, ou tomber entre de mauvaises mains. Je vous en supplie... Transférez-moi dans un Daukn.
Complètement interdite suite à ces révélations, Vena reste sans voix pendant un long moment, ce qui ne lui arrive jamais. Précipitamment, elle rompt le contact mental avec le capitaine sans même l'en avertir, car elle a vraiment besoin de revenir à la réalité pour réfléchir.
- Vous êtes encore là ? demande John, tardivement.
- ENNEMI ! hurle l'esprit du Mal, qui semble s'être ranimé, en repassant à l'attaque.
Forêt de Syl.
Evran est sur le retour. Les archers ainsi que lui-même ont bien travaillé : la troupe d'éclaireurs du seigneur Frégast a été neutralisée avec succès et le jeune autochtone est maintenant chargé d'apporter la nouvelle à Esso.
Il se doute bien que son père Gwornal l'a surtout renvoyé pour avoir la conscience tranquille. Il n'aime pas savoir son fils exposé aux batailles, même si ce dernier reste furtif.
Alors qu'il médite là-dessus, Evran constate soudainement la présence de trois carcasses encore saignantes de vélociraptors.
Intrigué, le jeune homme s'en approche et il est pour le moins surpris de trouver sur les lieux un morceau du jean bleu de son homme. Il sait qu'il ne peut s'agir d'Anthony, ce dernier étant habituellement vêtu de noir.
Il ressent une grande bouffée de fierté pour son homme, car tuer trois dinosaures dans la nuit n'est pas une mince affaire. Mais autre chose retient son attention, il s'agit des empreintes.
Au départ, Justin devait suivre Anthony, qui se dirigeait vers l'orée de la forêt. Mais les traces qu'il a sous les yeux s'enfoncent au cœur de la jungle.
Justin a dû s'égarer, cela ne peut être que ça.
Tant pis pour l'archonte, Evran préfère suivre la piste de son homme perdu. De toute façon apporter les nouvelles à Esso n'est qu'un prétexte pour que l'autochtone reste en sécurité au village et il le sait très bien.
Un arc dans son dos et son nouveau zak à la main, le jeune homme commence à suivre la piste de son amant.
Il ne sait pas encore à quel point il va marcher longtemps.
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Village de Syl.
Vena passe à peine l'entrée du village, qu'Esso lui bondit dessus pour lui conseiller de rester à Syl le temps que le problème de ces Terriens soit réglé. L'invitation paraît ridicule à l'ermite, qui vivait déjà hors du village lors de la guérilla, ce n'est donc pas maintenant qu'elle changera son mode de vie.
Lorsqu'elle pénètre le baraquement où dort le blessé, elle sursaute. Malgré l'extrême pâleur de son visage et son air général très affaibli, elle voit très bien de qui il s'agit.
- Mais je le reconnais ! Il m'a agressée l'autre jour, celui-là ! Comme on se retrouve !
Elle sourit, avant de constater rapidement l'état du malade. Elle lui fait avaler de force une mixture incolore. Le capitaine ouvre les yeux et se met à geindre.
- Vous ! glapit-il.
- Alors, ça fait quoi d'être sans défense devant moi après ce que vous avez fait ? nargue-elle.
- Tuez-moi, ça vaudra mieux... halète John, fiévreux.
- Je ne suis pas si rancunière que ça ! Ne vous réjouissez pas trop vite, c'est pour pouvoir vous botter le cul que je vais vous remettre sur pieds !
- Vous... ne comprenez pas...
- Je comprends surtout qu'il va falloir du temps ! Vous avez chopé quoi exactement ? J'ai jamais vu ça !
- ... pas une maladie ordinaire... Seul le Dragon...
- Quoi ?
- Lisez... mon... esprit... dormir... Baragouine-il, avant de replonger dans sa léthargie.
- S'il le demande... marmonne-elle.
Prudente, Vena prend mille précautions pour investir l'esprit du capitaine : elle ne connaît que trop bien sa puissance et n'a pas envie d'en être de nouveau victime. Immédiatement, une anomalie dans le psychisme de l'homme lui saute aux yeux : deux esprits s'affrontent là où elle n'aurait dû en trouver qu'un.
Le premier semble très éprouvé et tente de ne pas perdre de son essence, pour l'avoir déjà touché, l'alchimiste sait qu'il s'agit de l'esprit du capitaine John.
L'autre, en revanche dégage une aura inhumaine et malsaine. Il semble se développer et gagner en force à chaque instant. Vena comprend que ce que John a contracté est bien plus qu'une maladie : cette pathologie est consciente et elle attaque aussi bien l'organisme du capitaine que son esprit.
Sans attendre, Vena se porte au secours de son patient, qu'elle sent complètement désespéré face à son assaillant.
A deux contre un, la tendance s'inverse mais l'ennemi est retors et sournois. La consistance elle-même de cette entité est répugnante. Quand l'alchimiste défend son patient contre un de ses assauts, elle sent comme une huile noire visqueuse qui vient étouffer sa propre conscience, cherchant des failles pour s'y engouffrer. Cette chose est corrosive, collante, poisseuse et dégoûtante. Vena peine pendant un long moment à repousser ce voile immonde, heureusement affaiblie au préalable par le capitaine. Ce contact, bien qu'il ne soit pas physique, lui donne envie de vomir.
Vaincue pour le moment, l'entité recule mais reste bien enracinée dans le psychisme de son hôte.
- Laissez tomber... Vous ne faites depuis des millions d'années que retarder l'inévitable... Nous nous nourrirons... susurre-elle.
Sa voix elle-même est angoissante. Extrêmement grave, presque caverneuse, pleine de langueur. Une voix d'outre-tombe.
- Vous êtes nombreux ? demande Vena, curieuse d'en savoir plus sur ce monstre ignoble.
- Des millions et des millions... Et bientôt, d'autres millions...
- Bloqués dans un monde lointain ! rétorque le capitaine, provoquant.
- Les Dragons eux-mêmes ne nous ont pas arrêtés ! Qu'en sera-il pour vous, humains, neldars et valvors ? Votre mort contribuera tôt ou tard à notre expansion infinie...
- Malheureusement, je veillerai et vous ne vous échapperez jamais dans la nature. Cessez le combat et je vous permettrai de survivre en tant que Daukn. Propose Vena, qui ignore tout de la nature du Mal.
- Ne perdez pas votre temps, ses instincts sont plus forts que tout ! avertit John.
En effet, l'esprit du Mal, poussé dans ses retranchements choisit ce moment pour attaquer avec violence, consumant ses dernières forces... Il se jette contre la barrière que Vena a érigée autour d'elle-même et s'évanouit dans les ténèbres... Pour l'instant.
- Peut être que l'avoir vaincu me permettra de guérir votre corps... suppose l'alchimiste.
- J'en doute, son esprit finira par se régénérer, j'ai été piqué par une de ces créatures, ses cellules se multiplient dans mon sang... Ce n'est que le premier assaut... Vous devriez me tuer avant qu'il ne finisse par me dominer complètement mais avant, je dois vous donner des informations capitales pour la survie des deux mondes !
- Ne dîtes pas d'imbécilités, vous sous-estimez mes talents... Continuez de le combattre quand il se ranimera. Je reviendrai régulièrement pour vous aider, en attendant je vais essayer de guérir votre corps, dit-elle, en s'apprêtant à partir.
- Attendez !
- Oui ?
- J'ai peut-être une idée... Trouvez un cristal de Daukn, il faudra tenter d'y transférer mon esprit. C'est ma seule chance d'y rechaper.
- Vous croyez que c'est une vie, pour un humain ? Vous n'aurez plus de corps ! hurle Vena, que cette idée ne séduit pas du tout.
- En temps normal je serais d'accord avec vous mais depuis notre dernière rencontre, des choses ont changé ! J'ai doté le chef des Terriens, qui est un fou furieux, d'une arme de son monde si dévastatrice qu'il n'en existe que peu ! Une arme qui pourrait briser le monde, une bombe nucléaire.
L'alchimiste n'ayant aucune confiance en ce prophète qui l'a autrefois agressée et volée, elle plonge rapidement dans l'esprit tout écorché du capitaine et ce qu'elle y voit l'anéantit.
- Vous avez donné ÇA au seigneur Frégast ? Mais vous êtes complètement malade !
- Avec mon don psychique, je comptais m'infiltrer dans leur base et la récupérer... Mon but était de la confier à mes puissants alliés, pour la faire exploser dans le monde du Mal, afin de le détruire pour de bon. Si je meurs maintenant, l'arme risque d'être utilisée par le seigneur Frégast, ou tomber entre de mauvaises mains. Je vous en supplie... Transférez-moi dans un Daukn.
Complètement interdite suite à ces révélations, Vena reste sans voix pendant un long moment, ce qui ne lui arrive jamais. Précipitamment, elle rompt le contact mental avec le capitaine sans même l'en avertir, car elle a vraiment besoin de revenir à la réalité pour réfléchir.
- Vous êtes encore là ? demande John, tardivement.
- ENNEMI ! hurle l'esprit du Mal, qui semble s'être ranimé, en repassant à l'attaque.