19-02-2023, 02:21 PM
L'épave numéro deux,
Hendaye – Janvier 2023
— T’avais quel âge quand tu es venu ici ? demande Thomas, alors que nous remontons le quai du port de Caneta.
— Euh… deux mille dix-huit, j’avais seize ans. Et demi.
— Précision importante, en effet, a-t-il dit, me tirant un sourire en me rappelant le souvenir de la réplique identique de Bixente… ‘’Pfff, c’est le bled, ici, et ça doit être à peine mieux en été, ta mère vous choisissait des destinations de vacances où t’étais sûr de pas pécho, mon pauvre Jules. Sitôt rentrés à l’hôtel, je vais t’aider à exorciser le souvenir de… Ben, de rien du tout, en fait !’’
Tom se gargarise de l’idée auto-suggérée que je suis une jolie plante à floraison tardive que ses talents, tout aussi imaginés, d’horticulteur du plaisir ont seulement fait éclore l’année dernière seulement, sans imaginer un instant que j’ai eu une vie avant lui. Alors que ses vingt-six ans lui donnent juste la plus faible différence d’âge avec les quelques mecs qui…
Recherche d’image du père, dirait ma psy, imposée par maman, et que je bassine avec mes rêves inventés auxquels elle s’acharne à donner un sens.
Je n’en ai rien dit. La faute à ma discrétion, pourquoi raconter mon passé quand j’ai l’impression que le sien fait l’essentiel de nos conversations ? Puis un peu celle de la timidité qui m’avait étreint l’été dernier, lorsque son regard bleu surmontant une grimace lubrique m’avait virtuellement déshabillé, une demi-heure avant qu’il le fasse réellement, avec une brusquerie inhabituelle, mais pour un plaisir inattendu, que je n’avais pas pu lui cacher.
Sans un mot, je lui ai jeté mon regard de chiot affectueux, heureux à la perspective d’une caresse, avant de reprendre l’observation des bateaux amarrés et d’en déchiffrer les noms.
Étrange, pensé-je. À cette heure-ci, et surtout en cette saison, ils devraient tous être au port…
— Excusez-moi, ai-je demandé à l’homme assis sur un banc, ‘’Je ne vois pas le Point Reyes, un chalutier blanc avec…‘’
— Je vois très bien, ouais ! Et non, il n’est plus ici, tu le trouveras passé la pointe Sainte-Anne, l’est mieux là, a-t-il grogné, avant de cracher dans l’eau de la rade.
Nous avons remonté le quai sur une vingtaine de mètres avant que Tom m’interroge.
— C’est le chalutier sur lequel j’avais fait une sortie en mer…
— Chiant comme la pluie, je me dis, alors pourquoi tu souris bêtement ?
— Oh, c’est rien, juste que je devais avoir l’air très gamin, le pêcheur m’avait demandé mon âge… avant de larguer l’amarre… pour les assurances, je pense, ai-je menti.
En réalité, Bixente ne m’avait posé la question que passée l’Isla de Amuitz, dans les eaux espagnoles, me repoussant gentiment après que je lui avais volé un baiser.
Hendaye – Août 2018
Je peux bien me raconter que c’est le mouvement souple mais assuré de ses doigts sur les filets, les muscles de ses bras ou de son torse qui roulent sous sa peau brunie que j’imagine pourtant douce, mais c’est finalement la couleur de ses yeux, d’un bleu très pâle, qui m’a séduit, lorsque son regard a croisé le mien, surement trop insistant, lors de la balade quotidienne qui m’amène depuis cinq soirs jusqu’au bout du port, où le Point Reyes est amarré.
Il m’a souri.
— En vacances ?
— Oui, ai-je soufflé.
— Les jeunes touristes comme toi trainent plutôt à la plage des Deux-Jumeaux.
Mon expression a dû lui faire comprendre que la compagnie de ceux de mon âge… ‘’Je préfère observer la vie des locaux, voilà.’’
— Les locos ? Les seuls fous, ici, sont ceux qui restent à terre.
— Alors que les pêcheur… ? Je ne sais pas, je ne suis monté qu’une fois sur un bateau, et encore, le ferry pour aller en Corse.
— Rien à voir avec une sortie au large !
— Oui, ça… doit être excitant, ai-je dégluti.
— Demande à tes parents, si tu veux, demain, neuf heures, retour pour dix-huit ! Moi, c’est Bixente.
— Jules…
Un peu inutilement, sans doute, j’accentue mon expression d’ennui, alors que je pioche distraitement dans mon assiette de chipirons, mais peu importe, le résultat attendu se produit, elle affiche une moue désolée, à court d’idées.
— Le château d’Abbadie, on l’a fait lundi, maman, et le casino, je ne peux pas encore y entrer… Mais puisque tu en parles, un pêcheur m’a proposé une sortie en mer, et si je donne un coup de main, c’est gratuit, je peux ?
— Je ne sais pas, ça peut être dangereux, tu es un peu jeune.
— Dans la marine du roi, les mousses embarquaient bien à dix ans, eux.
— Pas ce terme ! On sait ce que ces pauvres enfants subissaient, quelle horreur !
— Ben, ça n’a rien à voir, ici, maman, c’est juste remonter les filets au palan, et ça n’a rien de dangereux.
— Écoute, demande à ton père s’il est d’accord.
— Il n’a même pas répondu à mon texto d’il y a cinq jours, où je disais que j’étais bien arrivé et que ce seraient des vacances extra ! Tu ne voudrais pas me donner tort…
— Hmmm, vu comme ça, soit, si ça peut te remettre un sourire, pourquoi pas ?
Je dois me retenir de ne pas afficher vingt de mes trente-deux dents…
Au retour, assis sur le bas-bord au fond du chalutier, les jambes écartées, mes orteils rageusement écrasés dans mes tongs, juste vêtu d’un shorty et d’un tee-shirt, bien légers pour le vent du large, j’essaie de faire bonne figure. Avec un résultat mitigé, contrairement à Bixente ! Ô Capitaine ! Mon Capitaine ! Notre effroyable voyage est terminé, le vaisseau a franchi tous les caps, la récompense recherchée est gagnée…
Mais à quel prix ! Il s’était gentiment moqué en me promettant une redoutable pêche au thon… alors que nous n’avons remonté que des anchois !
Avant de passer l’Isla de Amuitz, il a coupé le moteur du Point Reyes, et m’a rejoint à l’arrière.
— Déçu ?
— De la pêche, mais pas de la vue, ai-je clamé en me relevant pour – tentant ma chance – l’embrasser.
— Jules ! Tu ne sais pas ce que tu fais. M’a-t-il dit en me repoussant doucement. ‘’Ni ce dont tu as envie, sérieux !’’
— Je le sais, je sais tout cela, depuis presque une semaine à passer tous les jours sur le port, à espérer que tu me remarques ! Et tu l’as fait ! Discrètement, bien sûr, mais j’ai capté ton regard… À moins que ce n’ait été que de la curiosité, et je serais parfaitement ridicule d’imaginer…
— Tu n’as rien imaginé ! Mais quel âge as-tu, Jules ?
— Seize ans. Et demi…
— Détail important, mais techniquement… pratiquement, je pourrais presque être ton père.
— Rien que pour la considération que tu montres, tu es mieux ! Pour lui, je ne serai jamais assez musclé, assez sportif, assez… tout. Mais si je suis un peu quelque chose pour toi…
— Pour moi, tu es parfait ! Mince, beau, désirable…
Bixente m’a aimé, doucement, délicatement… Avant de m’abandonner pour se répandre sur mon dos, alors que ma semence poissait déjà les coussins de sa cabine.
— Pourquoi moi ? a-t-il soufflé dans mon cou.
— Tu vas trouver ça bête, ai-je gémi, toujours à mon plaisir, ‘’Tes yeux’’.
— Tu ne les as pas vus, là, Jules.
— J’aimerais, la prochaine fois…
Il y en a eu deux. ‘’Maman, je vais à Biarritz avec des potes, c’est bon ?’’ ‘’Sage, bonhomme !’’ ‘’Bah, tu sais bien, hein !’’
Le corps de Bixente sur moi, en moi, cette fois sur le dos, sur un matelas du Best Western, à voir ses yeux bleus briller alors qu’il jouit…
Puis Bixente, embarrassé, qui retire et noue le préservatif à l’arrière de son Kangoo, sur l’aire de l’Auchan… ‘’Je suis un peu serré, fin du mois, je suis désolé, tu mérites mieux’’… alors que je joue du bout d’un doigt avec la semence que j’ai répandue sur mon ventre…
Puis le départ, sans promesses qui ne seront jamais tenues, avec la distance, à quoi bon ?
Je n’ai jamais parlé de lui à maman, c’était inutile, elle respecte mes silences.
— Je n’ose pas te demander…
— C’était un très beau séjour, maman, je te promets !
— Ce n’était pas vraiment Antalya, le mois prochain, avec ton père, bien sûr…
— Je n’irai pas, il trouvera bien un moyen d’activer l’assurance annulation, ne t’inquiète pas pour lui.
— Mais ce sera un moment pour vous, père et fils, il doit s’en faire une fête, et tu en avais envie, toi aussi.
— C’est juste que… je dois vous avouer un truc, à tous les deux, et papa… Je me dis que ça va un peu flinguer notre… relation père-fils. Alors voilà, ça va te décevoir, ou te faire de la peine, et je suis désolé…
Hendaye – Janvier 2023
— On doit se taper jusqu’à la pointe Sainte-Anne ? Pour revoir un bateau sur lequel tu as bêtement navigué un jour, il y a cinq ans ?
— Tu n’es pas obligé de me suivre ! ai-je répondu, décidé.
— Soit ! Mais c’est deux bornes de marche, hein !
Juste pour le contrarier, le bus nous a déposés en dix minutes à la pointe, que j’ai dévalée… Pour y trouver le Pont Reyes échoué, une épave sur la plage presque déserte, sauf pour une dame qui y promène son chien et s’est arrêtée.
— Qu’est-ce qu’il s’est passé ? ai-je gémi.
— Triste histoire, a-t-elle dit. « Bixente… c’était son nom…il est sorti lors de la tempête de deux mille vingt, pour Dieu sait quelle raison, peut-être pour prouver qu’il était autant que les autres, mais quand il a bien dû appeler à l’aide, aucun pêcheur n’a répondu, ni n’a transmis l’information aux garde-côtes. Son bateau s’est échoué ici, on n’a jamais retrouvé son corps. »
— Mais pourquoi personne n’a… ? ai-je gémi, alors que Tom jette son bras sur mes épaules et pose un baiser sur ma tempe, en geste de défi plus que de compassion.
— Les ragots veulent qu’il aimait les hommes, ça ne plaisait pas… Un si gentil garçon, il ne méritait pas ça.
Après qu’elle a repris sa promenade, Tom a murmuré ‘’Putain ! Le mec était gay et tu es parti avec lui.’’
— Tu sais, c’est cet été-là que j’ai fait mon coming-out à ma mère, mais sans parler de lui, et ça non plus, il ne le méritait pas.
Alors, j’ai raconté Bixente, sa gentillesse, ses réticences initiales, la douceur de ses gestes… puis ses yeux bleus… ‘’Finalement votre seul point commun.’’
Thomas est reparti à l’hôtel. J’y trouverai peut-être la chambre vide de toute trace de sa présence, dans un sens, je l’espère, mais ça n’a pas tellement d’importance.
Tu m’avais souhaité d’être heureux avec quelqu’un qui me mériterait, Bixente, aujourd’hui, je te promets de m’y appliquer.
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