24-07-2022, 06:28 PM
Quatrième Policeman
La voiture de police occupait l’emplacement devant la maison de mes parents, mais depuis l’appel de maman, tous les voisins étaient revenus du boulot, j’ai dû me garer à une centaine de mètres et remonter la rue. A la moitié du chemin, j’ai vu maman raccompagner le jeune officier à son véhicule, elle m’a indiqué du doigt, il a brièvement regardé dans ma direction avant de prendre le volant et de repartir, mais ce court moment m’a permis de le reconnaitre.
***
Observateur, direz-vous… Je vous répondrais que ça dépend du sujet. Je suis incapable de vous décrire très fidèlement le physique de Lucie, la réceptionniste du la société d’audit qui m’emploie, alors que je la croise au moins matin et soir depuis plus d’un an. Par contre, pour les beaux mecs, j’ai une mémoire photographique !
Tenez, le petit coursier d’Uber Eats qui nous livre quelquefois les repas au bureau, et que Lucie n’autorise pourtant jamais à dépasser son bureau à l’entrée, il a des yeux gris, de jolies petites dents parfaitement alignées, trois taches de beauté sur la joue gauche, des fossettes quand il sourit, un anneau discret à l’oreille droite, et des clavicules très apparentes, remarquées sous le col ouvert de son polo vert pomme, pas mal, hein ?
Donc, physionomiste, ouais, c’est clair. Après, faire une description très complète du visage du jeune flic aperçu pendant trois ou quatre secondes à cinquante mètres de distance, vous vous dites que je frime, non ? Sauf que ce n’est pas la première fois que je le vois. Déjà il y a deux mois, au Pélican Rassasié, avec Léonard…
— Sais-tu qu’il est aussi ridicule qu’impoli de garder des lunettes de soleil sur le nez dans un établissement, Denis ?
— Léo, vous êtes retraité du barreau depuis quinze ans et vous vous endormez en trente minutes devant votre télé, je viens de passer huit heures devant un écran d’ordinateur à analyser des bilans, permettez-moi d’un peu me reposer les yeux.
Et d’accessoirement – sinon surtout - d’observer attentivement le splendide spécimen d’humain assis de profil derrière lui, caché derrière mes RayBan Clubmaster. Des traits parfait, une carrure prometteuse, des cheveux châtains à la coupe stricte, et de superbes yeux bleus… le plus souvent tournés vers une petite poupée assez jolie. Le hasard a fait que nous sortions de la brasserie trente secondes après eux, j’ai pu voir l’objet fugitif de mon désir ouvrir la portière conducteur de la Mini turquoise de la fille, dont il a ignoré les lèvres offertes pour lui déposer un sage baiser sur la joue. ‘Timide ou vraiment très respectueux, lui’, m’étais-je dit.
J’ai un souvenir assez vague du repas, mais les traits du garçon m’ont trainé à l’esprit, jusqu’à Kevin, notre stagiaire. Il m’avait divinement sucé sur l’aire d’autoroute de La Courneuve Ouest, au retour d’une réunion en clientèle, avant que je lui avoue que nous partagions les mêmes préférences. Parce que je devais me faire pardonner, et que je prends mon rôle de maitre de stage toujours très au sérieux, j’ai autant tenu à lui apprendre les ficelles du métier qu’à l’initier à certaines techniques extra-professionnelles moins éthiques mais parfois efficaces en finalité.
— Vous l’avez… ?’ a-t-il bredouillé.
— Arrête de me vouvoyer, s’il te plait. Et oui, Best Western Opéra, premier étage, à gauche en sortant de l’ascenseur, chambre 132, et techniquement, c’est lui qui m’a…, vu que, perso… Raison pour laquelle je t’emmène aujourd‘hui à l’une des plus importantes foires de la bite gay d’Europe.
— Pas un bon souvenir, on dirait.
— Il s’était justifié de bander mou par le fait que j’étais le plus beau garçon qu’il ait soi-disant séduit, comme si ça avait dû lui arriver souvent, j’ai simulé et on a eu l’exemption pour notre client. Dont j’aurais aimé qu’il me paie en nature, lui, mais bon… Pour l’heure, bienvenue au Christopher Street Day de Köln, Kevin ! Ici, nous sommes Roncalli Platz et là…
Je me suis interrompu en apercevant au loin un profil de visage connu, interpelé par un géant teuton blond, qu’il a observé des pieds à la tête sur près de deux mètres, avant de refuser avec un sourire contrit, puis de sortir de mon champ de vision. Dans la foule, je ne l’aurais jamais retrouvé, puis il y avait Kevin… Trente minutes plus tard, mon stagiaire, le regard halluciné, chevauchait le sexe de taille honorable du blond Hanno qui, tristement inspiré par le porno, lui pinçait les tétons et lui claquait les fesses autant que sa situation le lui permettait. Fridolin était un bien meilleur choix, il avait consenti à me prendre en missionnaire, position qui me permettait de nouer mes jambes et ses bras sur son corps parfait, et de m’abandonner à l’invasion de mon corps par un rondin comme j’en ai connu peu… Cerise sur le gâteau, il était châtain, en fermant les yeux, j’ai pu imaginer que le jeune homme de la brasserie m’accordait ce qui semblait impossible. Jusqu’à aujourd’hui.
Si son bisou sur la joue de la fille n’augurait objectivement de rien, j’avais capté assez de leur conversation pour savoir qu’il était Français et pas Allemand, sa présence à la Pride de Cologne n’avait forcément rien d’anodin, et il devenait une perspective… N’était que, sauf hasard extraordinaire, je ne le reverrais plus jamais.
***
— Maman, ça va, tu n’as rien ?
— Je n’étais pas ici, Denis, en revenant, j’ai trouvé la maison dévastée et la porte du jardin forcée, j’ai directement appelé la police et ils sont venus constater, prendre des notes et me faire remplir des documents. Des rustres, pas comme le jeune homme de la police scientifique que tu as peut-être entr’aperçu, il s’appelle Martin… Lemaitre, oui, c’est ça.
— J’ai l’impression de l’avoir déjà croisé.
— Ne me dis pas qu’il est gay, lui aussi ! Il a été charmant, et très attentionné, il m’a bien demandé cinq fois si j’avais besoin de quelque chose. Puis il m’a expliqué patiemment les étapes de son travail, et je ne suis pas bête, c’était pour m’occuper l’esprit à autre chose qu’au cambriolage, très psychologue, donc.
— Euh, merci maman, mais tout cela n’est pas incompatible, tu sais ? Regarde… moi, par exemple.
— Bien sûr, mon chéri, mais il est peu probable que tu l’aies rencontré lors de tes sorties, il m’a expliqué être le seul technicien de la ville, les renforts n’arriveront au mieux que dans quatre mois, il n’a aucune vie sociale, le pauvre.
— Le pauvre, en effet…
Quoique, le dîner il y a deux mois au Pélican Rassasié, avec une possible meilleure amie, éperdue d’amour pour lui, mais qui ne lui sert peut-être que de couverture, et sa présence le week-end dernier à la messe… sinon la Messe (*) annuelle gay de Cologne, sa trop longue hésitation à suivre le bûcheron blond clairement calibré actif sur mon gaydar…
— Il va repasser ici ? Pour son enquête, je veux dire ?
— Roooh ! Mais tu es impossible, je t’ai dit qu’il n’est… Enfin, bref, non, il a agité son petit plumeau et ses poudres sur les surfaces planes pour conclure qu’ils portaient du latex.
— Du latex ? Qui cela ?
— Les cambrioleurs, Denis, des gants en latex ! Mais à quoi pensais-tu… Oh ! Je vois. Dis-moi, tu te protèges, mon chéri ?
Martin, c’est beau… ‘Martin et Denis ont l’honneur de vous inviter…’
— MARTIN !’’ ai-je crié dans ma voiture, en rentrant chez moi ‘’Comment te rencontrer, te connaitre ?’’
Et là, l’idée ! Absurde, abusée, mais si simple et en même temps tellement capillotractée que personne n’imaginera que le jeune homme raisonnable et posé que je suis l’aurait jamais eue ! Puis aussi, pourquoi faire simple quand…
D’ici à ce week-end, j’aurai le temps d’acheter ou de me faire livrer un tee-shirt sobrement explicite, et deux-trois objets de décoration dans la thématique gay discrète. Puis de préparer une histoire, et un contexte de vie qu’il pourrait éventuellement imaginer au diapason de la sienne.
J’ai établi une liste mentale des faits avérés, ou suffisamment probables : (1) Martin est gay, ou bi, ou du moins hétéro-curieux (2) Il est empathique, il me suffit d’avoir entendu maman vanter sa gentillesse envers elle (3) Martin reste un policier, et il semble assez pro, je vais devoir être très malin…
***
Vendredi soir, 23h, tout est prêt ! Enfin, façon de parler, mon pavillon est dévasté, les tiroirs jetés au sol, idem pour le pêle-mêle de selfies en compagnie de potes, que j’ai fait imprimer en précipitation, du verre brisé partout… Le tout réalisé avec les précieux gants en latex dont maman m’a involontairement signalé la nécessité de les utiliser…
***
Samedi matin, 9h, les policiers ont constaté les dégâts, ont vu les artefacts arc-en-ciel tellement ridicules, et ont soulevé de deux doigts dégoûtés le tee-shirt thématique livré in extremis hier soir et que j’ai directement porté. Ils viennent de partir, pour laisser le champ libre à Martin. ‘’Eh bien, quel chantier ! Et mes collègues m’ont dit que vous les avez surpris ? Ils vous ont violenté ?’’
— NON ! Non, pas ça, ce n’est… ce n’est pas arrivé !
— J’ai dit ‘violenté’, mais… Oh ! Vous voulez parler de… ?
— De rien du tout ! Aïe’’ ai-je gémi en m’asseyant sur le canapé.
— Mais vous devez vous faire examiner ! Il… Désolé d’être peut-être trop… technique, mais il y aura des traces qui…
— Personne ne doit savoir ! Pas mon employeur, jamais ! Je mène une vie discrète, presque personne ne sait, je suis au fond du placard et c’est bien comme ça.
— Je comprends’’ a-t-il dit. ‘’Enfin, j’imagine seulement, bien sûr, mais vous n’avez pas quelqu’un, de la famille ?
— Pas maman, surtout pas, elle a été cambriolée lundi, elle va se faire un sang d’encre, déjà qu’elle en même temps embarrassée et inquiète pour moi, je ne veux pas…
— Votre maman habite rue Descartes ?
— Oui, mais comment… ?
— Je me suis occupé de son cambriolage, mais comme ici, ils portaient des gants, aucune trace utilisable, malheureusement.
— Ah… Ben oui, on classe le dossier, pour ce que ça vaut, c’est pas plus mal.
— Je suis désolé, c’est un échec pour nous, c’est frustrant… Après, pour ce que ça vaut aussi, votre tee-shirt est assez marrant ‘Je ne suis pas gay, mais 50€, c’est 50€’, il faut oser.
— Je trouvais ça ironique, mais maintenant…
***
Dimanche, 11h, je finissais de remettre mon rez-de-chaussée en ordre, lorsqu’un véhicule de police s’est arrêté devant chez moi, dans ma rue autrement très tranquille. ‘Ça commence à faire beaucoup’ me suis-je dit, avant de voir Martin en sortir, un sachet à la main. ‘’Yesss’’ ai-je clamé, en levant un poing anticipativement victorieux.
— Votre histoire m’a trainé en tête, c’est tellement injuste, un cambriolage est déjà traumatisant, mais le vôtre…
— S’il vous plait, n’en parlons plus, je préfère. Maman m’avait dit que vous êtes très empathique, je réalise qu’elle avait raison, mais mon cas est sans importance, et tombe dans les statistiques, voilà, n’en parlons plus.
— Parlons de quoi, alors ? De boulot ? Pas du mien, cinquante à soixante heures par semaine me suffisent’’ a-t-il dit en agitant son sachet. ‘’Au fait, j’ai pris la liberté d’amener des viennoiseries’’.
— Je ne parlerai du mien qu’avec vos collègues de la brigade financière, je suis expert-comptable dans une boîte d’audit et de conseil fiscal pour des entreprises, nous sommes tous potentiellement des criminels, mais en col blanc, évidemment.
J’ai cru encore imaginer un truc lorsqu’il a répondu ‘’Ah, assez fréquentables, donc’’.
— Merci pour votre sollicitude, mais ce ne serait pas une bonne idée, inspecteur, je…
— Martin, on pourrait peut-être se tutoyer… Denis ? Et pourquoi ne serait-ce pas une bonne idée ?
— Vous… Tu ne veux pas entendre ça, mais tu es le quasi-sosie du premier et du seul garçon dont j’aie été éperdument amoureux, Jeffrey, pendant mon Erasmus à… San Diego.
— Oh ! Alors, tu pourrais me parler de lui, non ?
J’ai inventé de toutes pièces Jeffrey, décédé depuis – j’étais inconsolable - qui non seulement était son clone, mais avait les qualités que je supposais à Martin et qui, avant moi, se cherchait, n’osant franchir le pas, pour se découvrir dans mes bras…
***
Ma voisine va se demander pourquoi une voiture de police a passé la nuit devant ma maison, car Martin est resté dormir, prétendument pour me soutenir comme il le peut dans mon ‘épreuve’…
Il est si beau, puis sous le drap, je vois son torse doucement monter et descendre, et plus bas, dans son boxer ample, une troisième érection nocturne déforme le relief de son corps, dont ce que j’en ai vu me plait beaucoup. Mais je vais lui laisser le temps de se déclarer, et à moi, de peut-être découvrir le charme d’une vie tranquille, et monogame. Quelque chose me dit qu’il en vaut la peine.
(*) Messe (all.) = foire
La voiture de police occupait l’emplacement devant la maison de mes parents, mais depuis l’appel de maman, tous les voisins étaient revenus du boulot, j’ai dû me garer à une centaine de mètres et remonter la rue. A la moitié du chemin, j’ai vu maman raccompagner le jeune officier à son véhicule, elle m’a indiqué du doigt, il a brièvement regardé dans ma direction avant de prendre le volant et de repartir, mais ce court moment m’a permis de le reconnaitre.
***
Observateur, direz-vous… Je vous répondrais que ça dépend du sujet. Je suis incapable de vous décrire très fidèlement le physique de Lucie, la réceptionniste du la société d’audit qui m’emploie, alors que je la croise au moins matin et soir depuis plus d’un an. Par contre, pour les beaux mecs, j’ai une mémoire photographique !
Tenez, le petit coursier d’Uber Eats qui nous livre quelquefois les repas au bureau, et que Lucie n’autorise pourtant jamais à dépasser son bureau à l’entrée, il a des yeux gris, de jolies petites dents parfaitement alignées, trois taches de beauté sur la joue gauche, des fossettes quand il sourit, un anneau discret à l’oreille droite, et des clavicules très apparentes, remarquées sous le col ouvert de son polo vert pomme, pas mal, hein ?
Donc, physionomiste, ouais, c’est clair. Après, faire une description très complète du visage du jeune flic aperçu pendant trois ou quatre secondes à cinquante mètres de distance, vous vous dites que je frime, non ? Sauf que ce n’est pas la première fois que je le vois. Déjà il y a deux mois, au Pélican Rassasié, avec Léonard…
— Sais-tu qu’il est aussi ridicule qu’impoli de garder des lunettes de soleil sur le nez dans un établissement, Denis ?
— Léo, vous êtes retraité du barreau depuis quinze ans et vous vous endormez en trente minutes devant votre télé, je viens de passer huit heures devant un écran d’ordinateur à analyser des bilans, permettez-moi d’un peu me reposer les yeux.
Et d’accessoirement – sinon surtout - d’observer attentivement le splendide spécimen d’humain assis de profil derrière lui, caché derrière mes RayBan Clubmaster. Des traits parfait, une carrure prometteuse, des cheveux châtains à la coupe stricte, et de superbes yeux bleus… le plus souvent tournés vers une petite poupée assez jolie. Le hasard a fait que nous sortions de la brasserie trente secondes après eux, j’ai pu voir l’objet fugitif de mon désir ouvrir la portière conducteur de la Mini turquoise de la fille, dont il a ignoré les lèvres offertes pour lui déposer un sage baiser sur la joue. ‘Timide ou vraiment très respectueux, lui’, m’étais-je dit.
J’ai un souvenir assez vague du repas, mais les traits du garçon m’ont trainé à l’esprit, jusqu’à Kevin, notre stagiaire. Il m’avait divinement sucé sur l’aire d’autoroute de La Courneuve Ouest, au retour d’une réunion en clientèle, avant que je lui avoue que nous partagions les mêmes préférences. Parce que je devais me faire pardonner, et que je prends mon rôle de maitre de stage toujours très au sérieux, j’ai autant tenu à lui apprendre les ficelles du métier qu’à l’initier à certaines techniques extra-professionnelles moins éthiques mais parfois efficaces en finalité.
— Vous l’avez… ?’ a-t-il bredouillé.
— Arrête de me vouvoyer, s’il te plait. Et oui, Best Western Opéra, premier étage, à gauche en sortant de l’ascenseur, chambre 132, et techniquement, c’est lui qui m’a…, vu que, perso… Raison pour laquelle je t’emmène aujourd‘hui à l’une des plus importantes foires de la bite gay d’Europe.
— Pas un bon souvenir, on dirait.
— Il s’était justifié de bander mou par le fait que j’étais le plus beau garçon qu’il ait soi-disant séduit, comme si ça avait dû lui arriver souvent, j’ai simulé et on a eu l’exemption pour notre client. Dont j’aurais aimé qu’il me paie en nature, lui, mais bon… Pour l’heure, bienvenue au Christopher Street Day de Köln, Kevin ! Ici, nous sommes Roncalli Platz et là…
Je me suis interrompu en apercevant au loin un profil de visage connu, interpelé par un géant teuton blond, qu’il a observé des pieds à la tête sur près de deux mètres, avant de refuser avec un sourire contrit, puis de sortir de mon champ de vision. Dans la foule, je ne l’aurais jamais retrouvé, puis il y avait Kevin… Trente minutes plus tard, mon stagiaire, le regard halluciné, chevauchait le sexe de taille honorable du blond Hanno qui, tristement inspiré par le porno, lui pinçait les tétons et lui claquait les fesses autant que sa situation le lui permettait. Fridolin était un bien meilleur choix, il avait consenti à me prendre en missionnaire, position qui me permettait de nouer mes jambes et ses bras sur son corps parfait, et de m’abandonner à l’invasion de mon corps par un rondin comme j’en ai connu peu… Cerise sur le gâteau, il était châtain, en fermant les yeux, j’ai pu imaginer que le jeune homme de la brasserie m’accordait ce qui semblait impossible. Jusqu’à aujourd’hui.
Si son bisou sur la joue de la fille n’augurait objectivement de rien, j’avais capté assez de leur conversation pour savoir qu’il était Français et pas Allemand, sa présence à la Pride de Cologne n’avait forcément rien d’anodin, et il devenait une perspective… N’était que, sauf hasard extraordinaire, je ne le reverrais plus jamais.
***
— Maman, ça va, tu n’as rien ?
— Je n’étais pas ici, Denis, en revenant, j’ai trouvé la maison dévastée et la porte du jardin forcée, j’ai directement appelé la police et ils sont venus constater, prendre des notes et me faire remplir des documents. Des rustres, pas comme le jeune homme de la police scientifique que tu as peut-être entr’aperçu, il s’appelle Martin… Lemaitre, oui, c’est ça.
— J’ai l’impression de l’avoir déjà croisé.
— Ne me dis pas qu’il est gay, lui aussi ! Il a été charmant, et très attentionné, il m’a bien demandé cinq fois si j’avais besoin de quelque chose. Puis il m’a expliqué patiemment les étapes de son travail, et je ne suis pas bête, c’était pour m’occuper l’esprit à autre chose qu’au cambriolage, très psychologue, donc.
— Euh, merci maman, mais tout cela n’est pas incompatible, tu sais ? Regarde… moi, par exemple.
— Bien sûr, mon chéri, mais il est peu probable que tu l’aies rencontré lors de tes sorties, il m’a expliqué être le seul technicien de la ville, les renforts n’arriveront au mieux que dans quatre mois, il n’a aucune vie sociale, le pauvre.
— Le pauvre, en effet…
Quoique, le dîner il y a deux mois au Pélican Rassasié, avec une possible meilleure amie, éperdue d’amour pour lui, mais qui ne lui sert peut-être que de couverture, et sa présence le week-end dernier à la messe… sinon la Messe (*) annuelle gay de Cologne, sa trop longue hésitation à suivre le bûcheron blond clairement calibré actif sur mon gaydar…
— Il va repasser ici ? Pour son enquête, je veux dire ?
— Roooh ! Mais tu es impossible, je t’ai dit qu’il n’est… Enfin, bref, non, il a agité son petit plumeau et ses poudres sur les surfaces planes pour conclure qu’ils portaient du latex.
— Du latex ? Qui cela ?
— Les cambrioleurs, Denis, des gants en latex ! Mais à quoi pensais-tu… Oh ! Je vois. Dis-moi, tu te protèges, mon chéri ?
Martin, c’est beau… ‘Martin et Denis ont l’honneur de vous inviter…’
— MARTIN !’’ ai-je crié dans ma voiture, en rentrant chez moi ‘’Comment te rencontrer, te connaitre ?’’
Et là, l’idée ! Absurde, abusée, mais si simple et en même temps tellement capillotractée que personne n’imaginera que le jeune homme raisonnable et posé que je suis l’aurait jamais eue ! Puis aussi, pourquoi faire simple quand…
D’ici à ce week-end, j’aurai le temps d’acheter ou de me faire livrer un tee-shirt sobrement explicite, et deux-trois objets de décoration dans la thématique gay discrète. Puis de préparer une histoire, et un contexte de vie qu’il pourrait éventuellement imaginer au diapason de la sienne.
J’ai établi une liste mentale des faits avérés, ou suffisamment probables : (1) Martin est gay, ou bi, ou du moins hétéro-curieux (2) Il est empathique, il me suffit d’avoir entendu maman vanter sa gentillesse envers elle (3) Martin reste un policier, et il semble assez pro, je vais devoir être très malin…
***
Vendredi soir, 23h, tout est prêt ! Enfin, façon de parler, mon pavillon est dévasté, les tiroirs jetés au sol, idem pour le pêle-mêle de selfies en compagnie de potes, que j’ai fait imprimer en précipitation, du verre brisé partout… Le tout réalisé avec les précieux gants en latex dont maman m’a involontairement signalé la nécessité de les utiliser…
***
Samedi matin, 9h, les policiers ont constaté les dégâts, ont vu les artefacts arc-en-ciel tellement ridicules, et ont soulevé de deux doigts dégoûtés le tee-shirt thématique livré in extremis hier soir et que j’ai directement porté. Ils viennent de partir, pour laisser le champ libre à Martin. ‘’Eh bien, quel chantier ! Et mes collègues m’ont dit que vous les avez surpris ? Ils vous ont violenté ?’’
— NON ! Non, pas ça, ce n’est… ce n’est pas arrivé !
— J’ai dit ‘violenté’, mais… Oh ! Vous voulez parler de… ?
— De rien du tout ! Aïe’’ ai-je gémi en m’asseyant sur le canapé.
— Mais vous devez vous faire examiner ! Il… Désolé d’être peut-être trop… technique, mais il y aura des traces qui…
— Personne ne doit savoir ! Pas mon employeur, jamais ! Je mène une vie discrète, presque personne ne sait, je suis au fond du placard et c’est bien comme ça.
— Je comprends’’ a-t-il dit. ‘’Enfin, j’imagine seulement, bien sûr, mais vous n’avez pas quelqu’un, de la famille ?
— Pas maman, surtout pas, elle a été cambriolée lundi, elle va se faire un sang d’encre, déjà qu’elle en même temps embarrassée et inquiète pour moi, je ne veux pas…
— Votre maman habite rue Descartes ?
— Oui, mais comment… ?
— Je me suis occupé de son cambriolage, mais comme ici, ils portaient des gants, aucune trace utilisable, malheureusement.
— Ah… Ben oui, on classe le dossier, pour ce que ça vaut, c’est pas plus mal.
— Je suis désolé, c’est un échec pour nous, c’est frustrant… Après, pour ce que ça vaut aussi, votre tee-shirt est assez marrant ‘Je ne suis pas gay, mais 50€, c’est 50€’, il faut oser.
— Je trouvais ça ironique, mais maintenant…
***
Dimanche, 11h, je finissais de remettre mon rez-de-chaussée en ordre, lorsqu’un véhicule de police s’est arrêté devant chez moi, dans ma rue autrement très tranquille. ‘Ça commence à faire beaucoup’ me suis-je dit, avant de voir Martin en sortir, un sachet à la main. ‘’Yesss’’ ai-je clamé, en levant un poing anticipativement victorieux.
— Votre histoire m’a trainé en tête, c’est tellement injuste, un cambriolage est déjà traumatisant, mais le vôtre…
— S’il vous plait, n’en parlons plus, je préfère. Maman m’avait dit que vous êtes très empathique, je réalise qu’elle avait raison, mais mon cas est sans importance, et tombe dans les statistiques, voilà, n’en parlons plus.
— Parlons de quoi, alors ? De boulot ? Pas du mien, cinquante à soixante heures par semaine me suffisent’’ a-t-il dit en agitant son sachet. ‘’Au fait, j’ai pris la liberté d’amener des viennoiseries’’.
— Je ne parlerai du mien qu’avec vos collègues de la brigade financière, je suis expert-comptable dans une boîte d’audit et de conseil fiscal pour des entreprises, nous sommes tous potentiellement des criminels, mais en col blanc, évidemment.
J’ai cru encore imaginer un truc lorsqu’il a répondu ‘’Ah, assez fréquentables, donc’’.
— Merci pour votre sollicitude, mais ce ne serait pas une bonne idée, inspecteur, je…
— Martin, on pourrait peut-être se tutoyer… Denis ? Et pourquoi ne serait-ce pas une bonne idée ?
— Vous… Tu ne veux pas entendre ça, mais tu es le quasi-sosie du premier et du seul garçon dont j’aie été éperdument amoureux, Jeffrey, pendant mon Erasmus à… San Diego.
— Oh ! Alors, tu pourrais me parler de lui, non ?
J’ai inventé de toutes pièces Jeffrey, décédé depuis – j’étais inconsolable - qui non seulement était son clone, mais avait les qualités que je supposais à Martin et qui, avant moi, se cherchait, n’osant franchir le pas, pour se découvrir dans mes bras…
***
Ma voisine va se demander pourquoi une voiture de police a passé la nuit devant ma maison, car Martin est resté dormir, prétendument pour me soutenir comme il le peut dans mon ‘épreuve’…
Il est si beau, puis sous le drap, je vois son torse doucement monter et descendre, et plus bas, dans son boxer ample, une troisième érection nocturne déforme le relief de son corps, dont ce que j’en ai vu me plait beaucoup. Mais je vais lui laisser le temps de se déclarer, et à moi, de peut-être découvrir le charme d’une vie tranquille, et monogame. Quelque chose me dit qu’il en vaut la peine.
(*) Messe (all.) = foire
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