La porte des mondes (fantastique avec personnages gays, terminé)

[KLO7514]

Hé bien, c'est du "vite fait" mais, moralement,"très mal fait"! Je ne pensais pas que la rencontre  calculée de Franck avec son amour conduirait ce dernier dans les pattes malsaines de ce Maadi ni que Jacques, lui aussi, change si rapidement de tactique sous l'influence de la même drogue inhibitrice de la volonté.

[inny-2]

13 - Préparatifs

J'ai commencé mon entraînement (tant aux armes qu'en magie) et je dois dire que c'est très éprouvant. J'en ressors épuisé et je m'abats comme une souche sur mon lit. J'en ai pour des années... quelle misère ! Mais je m'acharne, parce que mon maître m'a dit de me donner à fond, et moi, en bon esclave que je suis, j'obéis, même si j'imagine que toutes ces cibles sur lesquelles je porte mes coups sont ce maudit manipulateur, tout en sachant que je ne pourrai pas lever la main sur le vrai...
L'étude de la magie, au sein du cercle, est très théorique au début, on me bourre le crâne d'informations, on me fait boire des potions bizarres, on me fait un tatouage sur le bras, un truc magique qui augmente mes capacités, tout en m'expliquant que les tatouages ont un coût, et que celui-ci me prendra cinq années de ma vie. Rien n'est trop bon pour mon maître, hein ?
Mais c'est vrai qu'il est efficace, je me concentre mieux, je vise mieux, je suis plus précis dans ce que je fais, et surtout, j'apprends beaucoup plus vite !

Au bout de quelques temps, des nouvelles nous parviennent de la vallée. Le plan a réussi, et comme prévu, l'armée du roi est incapable de s'emparer de la base, aussi font-ils le siège de la vallée morte.
Tout va bien, donc. J'apprends les bases du lancer de sorts, puis vient le moment où je dois, dans le cercle, réaliser mon premier test. Mais je me sens prêt, j'ai appris à sentir le mana en moi, à le canaliser, à façonner mon esprit, à former des sortilèges, maintenant, il ne me reste plus qu'à passer à la pratique. Moi, Franck, ingénieur sur Terre, je fais de la magie en Outremonde. Merlin n'aura qu'à bien se tenir.
Confiant, je me concentre, façonne la structure du sort dans mon esprit, canalise l'énergie le long de cette structure mentale, la focalise au creux de ma main, et vois apparaître une sphère de lumière, qui éclate en une pluie d'étincelles. Zut, raté !
Des étincelles, j'en fais tomber un paquet, les jours suivants, les sorciers appellent cette période l'allumage, c'est comme de frapper un silex jusqu'à ce que le feu prenne, je ne pourrai rien faire tant que je n'aurai pas réussi.
Et il ne me faut pas moins d'une semaine pour y arriver ! Il faut dire que je continue à m'entraîner à l'épée, et ça me prend du temps. Maadi juge que mon corps doit apprendre à endurer une telle dépense d'énergie, et me fait tatouer une nouvelle fois, sur le cœur cette fois, encore cinq ans en mois, voilà qui fait dix, j'ai beau être son esclave, je lui dis de ne pas trop tirer sur la corde ou je ne pourrai pas le servir longtemps. Il se contente de me sourire, ce qui me fait froid dans le dos.

Toute l'attention étant portée là-bas, les Veilleurs s'activent. Ils vont m'envoyer par un portail (magique cette fois) vers le continent nord, où je pourrai suivre des études plus poussées et surtout plus librement, sans la crainte de la détection.
Je n'ai plus de nouvelles de Jacques, j'ignore ce qu'ils en ont fait, et Maadi se contente de me dire que ce n'est pas ma priorité. Ça m'inquiète...
- Où est Jacques ?
- Je l'ai envoyé dans le sud, accomplir une mission pour moi.
- Je vois.
- Il te manque ?
- Évidemment.
- Au point que ça te pose problème pour me servir ?
- Non, tu passes toujours en premier.
Comme je me maudis de devoir dire une telle phrase ! Ce petit sadique joue avec moi.
- Bien, allez, pour te changer les idées, tu me rejoindras dans ma chambre cette nuit.
Voilà comment ça se passe, maintenant...

Ils font de moi une arme de guerre, c'est évident. Dans quelle mesure mon Don est-il puissant ? Ils n'auraient pas déployé tant d'énergie si je n'en valais pas la peine. Les autres Veilleurs ne se doutent aucunement du double jeu qui se joue sous leur nez. Ils se félicitent de l'avancement du plan, et viennent m'observer de temps en temps lors de mon entraînement. Je les soupçonne d'être eux-mêmes très puissants, et dans ce cas, Maadi m'utilisera pour les tuer. Mais comment fera-t-il, ici où toute magie est détectée de très loin ?

Les jours s'écoulent et Maadi devient impatient, tiraillé entre la crainte de voir l'attention du roi se détourner de la vallée, et la nécessité d'attendre que je sois prêt. Prêt à quoi ? Il ne daigne pas m'en informer. Enfin, le jour venu, ils me font descendre dans la cave, mais cette fois, le cercle est la seule source de lumière. Ils me disent qu'ils vont ouvrir un chemin d'ombre, que seuls ceux qui savent manier le Don peuvent traverser. C'est une magie plus discrète, un vrai portail ne saurait être masqué par le cercle. Ils me donnent leurs instructions, que j'écoute avec attention, me concentre, puis leur indique que je suis prêt. Les mages commencent leur rituel, qui dure de longues minutes, et je vois faiblir la lueur du cercle, disparaître toute lumière, jusqu'à ce que je sente un souffle venu d'ailleurs qui m'indique que j'ai franchi la barrière entre le monde matériel et celui des ombres. Je reste concentré, tâchant de trouver mon chemin grâce au Don, de suivre la piste magique envoyée par les sorciers pour me guider, une tâche difficile pour un débutant, mais mon premier tatouage m'aide à rester concentré et je m'avance en espérant ne pas tomber sur un des êtres natifs de cette dimension, qui serait trop heureux de boire toute lumière en moi, m'a-t-on expliqué.
J'ignore ce que ça veut dire, mais je me doute que ce ne serait pas bien plaisant.

Malheureusement, je n'ai pas de chance, car je sens une présence alors que je suis encore loin de ma destination. Quelque chose renifle non loin, cachée par l'obscurité impénétrable de ce monde. Je poursuis ma route, inquiet, mais la chose me suit, sans tenter de me rattraper, pour le moment. Mon arsenal de sorts est très limité, et mon épée me servira peu dans ces ténèbres. Et de toute façon, si je combats, je perdrai le lien avec le guide et je serai perdu à jamais ici. Mon voyage se poursuit de façon inquiétante, mais étrangement, la chose ne m'attaque pas, elle se contente de me suivre. Peut-être que les sorciers ont posé une protection sur moi. Finalement, j'arrive à discerner un point d'énergie sur lequel je me concentre à pleine force, c'est la sortie, le monde bascule, j'ai parcouru en une demi-heure éprouvante des milliers de kilomètres !

Une fois que mes yeux se sont adaptés au retour brusque de la lumière, je savoure la vue qui s'offre à moi, la couleur de l'herbe, les forêts, la température douce, l'humidité, l'odeur des fleurs, le bruit des insectes... Je suis de retour dans le monde réel, en pleine santé. Je regarde autour de moi mais je suis seul. Je suis au sommet d'une colline qui descend en pente douce vers la mer. En contrebas se trouve une ville côtière, Vilnar.
- C'est dingue... Tout en ce monde est dingue.
Je suis sur le continent Sandrosi, et je devrai prendre un bateau pour rejoindre l'île d'Uldrain, où se trouve l'Université des Arcanes. Ma vie est ici désormais, pour de longues années, pendant lesquelles je serai toujours en quête d'un secours qui ne viendra probablement jamais. Mais si jamais ça arrivait, il me faudra alors repartir en quête de Jacques.
J'espère que cette fois, ce sera la bonne.

Fin du Livre I

[KLO7514]

Ah, ça y est : le "petit étudiant" arrive enfin à l'Université des Sorciers. Deviendra-t-il un «Super Mage Hystère»? (Pas ..."Hic", j'espère pour lui, s'il ne boit pas trop de boissons alcoolisées! Il y a déjà Cedr-Hic" comme Grand Maître Mage*).
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*Dans la rue principale de ma ville, il y a eu, fixée sur l'entourage de pierre de taille d'un bel immeuble, la plaque en cuivre suivante avec les mots en relief et sur trois lignes : « Charles FROT--MAGE-- Passé, Présent, Avenir. Résultats garantis ou frais remboursés si insuccès.»Cet homme mystérieux mais doué m'annonça un jour que je deviendrai indécrochable d'un site qui n'existait pas encore. Il ajouta : «Ce sera Slygame». Il était vraiment doué!
KLO.

[inny-2]

Il s'est quand même écoulé dans environ 150 ans depuis le récit précédent.

Toutefois, on va entendre parler de nouveau de Cédric (et peut-être des autres ...).

Effectivement la mage Frot a fait une prédiction intéressante. Combien d'années avant ?

[bech]

Au passage, en marge du récit d'Inny, une anecdote un peu différente de la prédiction de Charles Frot.

Lors d'un rassemblement en pleine nature (rassemblement rainbow), un homme s'exerçait à la lecture des lignes de la main et cherchait des personnes d'un certain âge pour trouver des éléments de leur passé et se les faire confirmer (la main gauche concernerait le passé de la personne, la droite son avenir).

Il m'a donc dit entre autres qu'à 15 ans, j'ai fait un choix dans ma vie.

J'ai répondu que c'est plutôt vers 24 ans qu'une fois au service militaire comme fusilier commando, j'ai choisi de cacher mon avis pendant un an (sachant qu'un autre, quelques mois auparavant s'était déclaré objecteur une fois à la caserne et retrouvé en prison) avec l'intention une fois sorti de demander le statut d'objecteur par principe.
http://chansonbech.tuxfamily.org/voir.php?page=je-suis
Par la suite, j'ai milité au sein du groupe toulousain du Mouvement pour une Alternative Non Violente, et également du MOC, entrepris une procédure jusqu'en commission européenne des droits de l'homme sur le droit au statut d'objecteur à tout moment, soutenu les réfractaires lors de procès dont je publiais des comptes rendus dans le JO (Journal des Objecteurs) etc...
Un peu plus de 15 ans de militance après avoir choisi de m'auto-censurer pendant un an.

Mais après mes explication sur ce "choix dans ma vie", lui insistait : à 15 ans, 16 ans maximum.

Finalement, après y avoir réfléchi, j'ai fini par lui dire qu'à 15 ans, j'ai changé de religion. La réponse l'a satisfait. Et effectivement, c'est ce qui a conditionné le reste.

[inny-2]

Livre II - La Garde Bleue

14 - La Crypte des Archimages

Loin sous l'Université des Arcanes, en Outremonde

Je m'appelle Farden, et celui qui m'accompagne, Illiek. Nous sommes frères, et partageons une passion commune : la chasse aux trésors. Les autres préfèrent désigner cette activité d'une façon plus prosaïque : le pillage de tombes.
Je suis un combattant émérite et un acrobate, et Illiek un enchanteur, qui sait également bien manier l'épée. Nos talents se combinent à merveille pour passer toutes les protections que les puissants ont posé sur leurs biens. Nous, nous considérons qu'il était vaniteux d'enterrer ainsi des trésors pour l'éternité : à quoi servent-ils, prenant la poussière dans une tombe ? Ils sont bien mieux chez nous.
Avec ce que nous avions déjà trouvé, nous menions grand train, et nous aurions pu le faire pour le restant de nos jours, mais l'excitation nous est aussi nécessaire que l'air que nous respirons, et c'est pourquoi nous nous retrouvons ici sous l'Université des Arcanes, cheminant dans les ruines ensevelies de la vieille ville, guidés par une boussole magique qui nous aide à aller dans la bonne direction. Vers le nord-est, où se trouve le bâtiment principal de l'université, sous lequel se cache la grande crypte où sont enterrés les archimages.

C'est notre ultime défi, le plus gros coup de notre carrière, voler les biens des archimages eux-mêmes. Nous nous étions munis grâce à notre argent d'objets magiques puissants qui nous aideraient à passer outre les protections magiques qui ne manqueront pas de se trouver sur place.
Nous progressons dans un tunnel antique, oublié depuis des milliers d'années. Le temps avait fait jouer la roche malgré la grande stabilité de l'île, et le sol était en pente. Nous dûmes franchir une faille étroite, nous demandant quels mystères pouvaient se trouver au fond. Nous sommes d'insatiables curieux, mais nous ne pouvons résoudre tous les mystères du monde !
La crypte n'est plus bien loin maintenant, mais le couloir ne s'y dirige pas directement, il nous faudra trouver un embranchement, ou...
La lueur de nos lampes s'interrompt droit devant nous, et nous ralentissons pour examiner l'obstacle. Une nouvelle faille, et celle-ci est de taille ! Nous n'en voyons pas l'autre extrémité. Je m'allonge pour examiner les parois dans toutes les directions, et découvre l'entrée d'un autre corridor parallèle au nôtre, qui pourrait nous mettre sur le bon chemin. La paroi est irrégulière, fissurée, et il me semble possible d'y accéder.

Je fixe un piton et y attache ma corde, avant de franchir le coin, accroché par les doigts au-dessus d'un vide insondable, les pieds se soutenant comme ils le peuvent aux aspérités de la paroi. J'avance péniblement, lâchant des exclamations sous l'effort imposé à mon corps, progressant jusqu'au bout de la fissure, et cherchant une autre prise. Il n'y en a pas, je vais devoir me lancer pour attraper la prochaine. Je libère une main et prends un piton gravé de runes, qui s'enfonce en sifflant dans la roche. J'y passe ma corde, et réclame quelques mètres de mou. Je contracte mes muscles, puis me jette sur le bout de roche qui dépasse là-bas, refermant mes mains sur lui, soufflant tandis que mes pieds dérapent sur la paroi avant que le gauche trouve un soutien.
Je finis par poser le droit sur un rebord, et reprends ma progression, je dois monter un peu maintenant, hisser mon corps, poser un pied puis l'autre, une main après l'autre, me dirigeant vers l'ouverture là-haut, en espérant que celle-ci nous conduira à destination. Mon frère envoie toujours plus de corde à mesure de ma progression, il a l'habitude, sachant ce qu'il doit donner en fonction des vibrations qu'il ressent. Envoyer trop de corde signifie ajouter au poids qui me tire en arrière, mais s'il n'y en a pas assez, je risque la chute.

Je prends le temps de souffler, continuant à planter des pitons. Mon frère n'est pas aussi bon que moi à l'escalade, mais tant qu'il y a une corde, il peut aller n'importe où. Et j'ai trop besoin de lui, et lui de moi. Nous formons une bonne équipe, il y a pas à dire.
Ma main atteint enfin l'ouverture, et je me hisse avec soulagement pour retomber sur le sol, soulagé et fier. Un dernier piton, et j'appelle mon frère, qui me rejoint bientôt. Nous nous reposons un moment avant de reprendre notre route dans l'obscurité.
- L'Université aura des problèmes un jour, si cette faille continue de s'étendre, dis-je.
- La structure du plateau rocheux est préservée par des esprits élémentaires, elle ne risque rien.
- Et les écrans anti-magie ?
- Ils ne s'étendent pas en profondeur, ils sont là pour éviter que les étudiants règlent leurs problèmes à coups de boules de feu.
- D'accord.

Nous remontons le nouveau chemin jusqu'à ce que la boussole nous indique clairement que nous sommes très proches (nous l'avions calée sur le bâtiment situé au-dessus des cryptes).
Nous examinons la paroi vers laquelle pointe la flèche, et décidons que le moment est venu. Illiek sort de son sac une amulette qu'il pose contre le mur en prononçant un mot, et nous nous éloignons en courant tandis qu'elle commence à siffler. Lorsque nous revenons un moment plus tard, il y a un grand trou dans le mur, et une ouverture au-delà. C'est gagné !
Maintenant, nous redoublons de prudence, sachant que les tombes sont rarement sans protections. C'est mon frère qui ouvre la marche maintenant, sondant à la recherche de pièges magiques ou physiques, déjouant des sortilèges tendus en travers de notre route. Nous parvenons à une grande salle circulaire, dans laquelle une statue gardienne s'anime à notre arrivée.  Illiek lui lance une sphère de verre qui éclate à son contact, répandant un gaz jaunâtre qui est mortel pour les êtres de pierre. La statue s'immobilise à jamais.

Une rampe descend en hélice vers les profondeurs, et monte au-dessus de nous vers la surface. Des ouvertures sont régulièrement disposées tout le long de la rampe, chacune étant l'entrée d'une crypte. Nous y voilà !
La grande salle, qui est un palier parmi d'autres, nous sert de camp de base pour notre pillage. Nous forçons les portes l'une après l'autre, ouvrons les sarcophages, récupérant les objets magiques, de grande puissance (et de grande valeur) et les déposant au centre de la salle, d'où nous ouvrirons un portail pour tout ramener d'un coup. Nous devons faire attention, certains tombeaux ont leurs propres pièges, mais nous en venons à bout. Nous sommes des professionnels.
Tous ces gens ayant été convenablement préparés, nous n'avons pas à craindre de morts-vivants, et c'est tant mieux, car je les déteste. Je m'approche d'une nouvelle porte. Archimage Thibault, lis-je, et force le sceau qui la ferme. Illiek me dit qu'il n'y a rien d'anormal, et j'entre, utilise mon pied-de-biche pour ouvrir le sarcophage, et, protégé par un tissu contre les vapeurs nocives des corps, me penche sur le squelette pour le dépouiller de ses bagues, bracelets, bijoux et objets en tout genre. Il y a un autre cercueil dans la salle, un certain Stephan, et je lui fais subir le même sort.

Je dépose mon butin au centre (le tas commence à devenir conséquent) et passe à la porte suivante. Archimage Cédric. Le sceau est protégé par magie, et Illiek passe un bon moment à le faire sauter. Ça, ça veut dire qu'il y a du butin ! La porte finit par céder, et nous entrons prudemment. Illiek se met à faire de grands gestes, il doit contrer un piège magique puissant, et je le vois suer à grosses gouttes. Dans un effort héroïque, il finit par le neutraliser, et me dit que la voie est libre. Je force le sarcophage, et me penche sur le... corps parfaitement conservé de l'archimage, qui me semble d'ailleurs fort jeune. Curieux, l'embaumement n'est pas une tradition par ici. Soupçonnant un nouveau piège, je demande à mon frère de le sonder. Il se concentre, puis pâlit.
- Il... il n'est pas mort !
Effectivement, le corps se relève, et nous adresse un regard furieux. Je veux prendre mon épée, mais elle rouille à toute vitesse et tombe en poussière sur le sol. Je prends la fuite, devancé par mon frère, mais la porte de pierre se referme avec violence. Impossible de l'ouvrir, et pendant que mon frère tente de contrer le sort, je me retourne vers l'homme, qui sort du sarcophage et nous fait face.
C'est peine perdue. Cédric ne nous laisse aucune chance.

[KLO7514]

"Houuuu", comme répondait la grand mère quand l'un des petits-fils lui demandait depuis combien de temps  elle n'avait pas "fait l'amour"(Le fameux pari de l'un d'eux à son cousin : « Tu vas entendre mamie faire le loup»... ) Pour moi aussi "ça fait bin du temps!"
Nous allons avoir affaire au Grand archimage Cédric, réveillé dans son sommeil pas vraiment éternel.

[inny-2]

15 - Rentrée des classes

Les hauts piliers blancs défilent tandis que je remonte l'allée couverte. Les architectes avaient vu grand, pas de doute. Il s'agissait d'inspirer étonnement, révérence et respect, et je dois avouer que l'effet est plutôt réussi.
Je me demande quel aspect devait avoir l'université d'origine, avant les troubles qui avaient vu sa destruction il y a près de six siècles. Toujours est-il qu'elle fut rebâtie, plus solide, plus protégée qu'auparavant. La magie y est extrêmement restreinte, ce qui est paradoxal quand on sait qu'il s'agit d'un des plus hauts lieux d'apprentissage et d'étude de toutes les voies des arcanes.
Mais c'est le prix à payer pour la sécurité des lieux : aucun intrus ne peut user de magie pour contrer les puissants enchantements de défense qui protègent toute l'ile. En outre, ça soulage grandement les surveillants qui ont déjà suffisamment à faire avec les élèves dans le monde physique sans devoir y ajouter des problèmes magiques.
Passant près d'un groupe d'élèves qui révise en plein air, je m'arrête afin de les écouter.
- Qui a refondé l'université après la guerre du troisième cercle ?
- Arinar de Nordel.

Je m'éloigne. L'histoire de la magie ne m'a jamais vraiment passionné. Je m'écarte pour laisser passer deux jeunes de mon âge qui se poursuivent en riant, croise des couples enlacés qui profitent du beau temps, mais surtout l'un de l'autre, salue des amis qui me font signe de les rejoindre.
- Salut les gars, désolé, j'ai été convoqué, on se revoit ce soir !
Je repars sous leurs salutations et encouragements, ils savent ce qui m'attend car ils sont logés à la même enseigne : à partir de la troisième année, tout étudiant doit prendre en charge une poignée de nouveaux pour les guider et les aider. Cela soulage grandement l'administration de l'université qui a ainsi plus de temps à nous consacrer. Nos cours sont de toute façon moins lourds en troisième année, moins de théorie et plus de pratique : ça devient vraiment intéressant ! J'entre dans le hall d'accueil, enfin, et me dirige vers l'estrade où se massent déjà professeurs et tuteurs.
L'Archimage est en train de terminer son discours d'introduction et souhaite la bienvenue aux nouveaux élèves. Il se retire alors, laissant à ses assistants le soin de procéder à la répartition.

Je lis la liste qu'on m'a confié et regarde le groupe qui m'est attribué se constituer peu à peu, saluant les jeunes gens au fur et à mesure. Falan et Ysmar, du royaume Sandrosi, et visiblement en couple, Uria, une solide femme des territoires nordiques, sans plus de précision. Ces terres n'ont aucun nom, et n'ont jamais été civilisées. Voir quelqu'un en venir est surprenant, surtout une femme seule. Enfin un sujet de curiosité dans cette journée qui s'annonçait fade. Frank, du continent sud, décidément le groupe que j'ai est plus que varié ! Je regarde le jeune homme avec une égale curiosité que pour Uria. Et enfin, Frédrick, de Valsein, dans le royaume Valnari. Mon groupe est au complet.
- Bonjour, je me présente, je suis Aluun, je suis votre tuteur pour cette année. Je vais vous faire découvrir l'université, vous guider dans votre inscription, vous faire comprendre comment tout fonctionne, et je suivrai votre première année d'études. Je suis votre lien avec l'administration, aussi, si vous avez besoin de quoi que ce soit ou des questions, vous passez par moi.
Hochements de tête. Bon, c'est parti.

- Bien, on va commencer par votre inscription, vous avez déjà passé la première étape, la validation de votre recommandation, maintenant on va passer aux choses sérieuses, suivez-moi.
Je les emmène dans un des petits halls annexes, et nous attendons que les étudiants arrivés avant nous en aient fini. Je reprends :
- Ici, on va étudier votre potentiel pour vérifier que vous êtes bien les initiés que vous prétendez être, puis on va sceller une gemme dans votre paume, dis-je en levant la main, montrant une petite gemme de la taille d'un œil de chat. Ce qui fait toujours son petit effet. Rassurez-vous, elle n'a pas d'existence physique et elle vous est indispensable. C'est totalement indolore, et elle disparaîtra au bout d'un an. Si vous refusez, vous pouvez retourner d'où vous venez. C'est compris ?
Ils acquiescent, pas trop rassurés tout de même, mais leur entraînement à la magie les a préparés à affronter des épreuves en tout genre. La magie a un prix, ce qui implique qu'il faut faire des sacrifices.

Ça y est, c'est à notre tour, ils passent un par un devant les examinateurs. Un premier cristal s'illumine sous l'effet de leur concentration, indiquant par sa brillance le potentiel de l'élève. L'enchantement est assez subtil pour pousser à se concentrer de toutes ses forces, afin de ne pas pouvoir tricher. Et là, je suis assez surpris du résultat ! Ils sont tous très doués, et le petit gars de Valsein (je jette un coup d'œil à ma fiche) Frédrick, a en outre été initié au pouvoir de Magnos. Seuls de rares élus connaissent encore cette technique à l'état pur, datant de l'ère de l'ancienne magie. Et, même si je n'aime pas l'histoire de la magie, je sais quand même quelques trucs sur les anciens héros et compagnons des archimages Cédric et Thibault. Le seul parmi eux dont la descendance a perduré, avais-lu un jour où j'avais eu la curiosité de creuser le sujet, est Philippe, le frère de Ludvik. Je parie que j'ai un de ses descendants en face de moi.

Les deux amoureux font briller la gemme de mille feux, mais c'est Frank qui stupéfie tout le monde, la gemme s'éteignant après avoir éclairé toute la pièce. Elle a grillé...
Mais d'où sort-il, celui-là ? Le seul qui ait jamais fait griller une gemme depuis un siècle et demi, c'est l'archimage Cédric ! Tous les examinateurs sont effarés, comme moi, puis sourient, voyant en lui de la graine d'archimage. Le pauvre, ils ne vont plus le lâcher, ils vont lui farcir la tête jour et nuit... Mais c'est vrai que ce serait dommage de gâcher un tel talent.
Le temps qu'une nouvelle gemme soit installée, je fais passer mon groupe à l'étape suivante, la fusion de la gemme, et les regarde poser un par un leur main à plat sur un socle gravé de runes et examiner leur main désormais ornée d'une petite gemme rouge (chaque année d'étude, la gemme change de couleur : la mienne est orange). Je termine avec Uria et nous passons au dernier test : l'affinité magique. Les deux sandrosiens se voient conseiller l'élémentalisme, ce qu'ils acceptent, puis le valseinien qui a une affinité avec la magie spirituelle accepte avec un sourire la voie proposée. Frank... il n'a aucune affinité : avec un don aussi fort, toutes les voies lui sont ouvertes ! Il demande à recevoir l'enseignement d'un sorcelame, ce qui est accepté. Il se voit proposer des cursus de renfort pour l'aider à développer son potentiel. Qu'est-ce que je disais. Il accepte. Uria a une très forte affinité avec l'enchantement, et sourit largement à cette nouvelle. Elle dit être également intéressée par l'alchimie.

- Voilà, dis-je alors que nous sortons sur l'esplanade. La gemme qui est dans votre paume vous aide à vous guider dans l'université, qui est très vaste, elle englobe toute l'île d'Uldrain. Concentrez-vous sur votre chambre maintenant.
Je les regarde fixer leur paume (geste inutile, mais ils l'ignorent encore) puis relever la tête alors qu'un sens du chemin à prendre se fait jour dans leur esprit.
- Allons à votre dortoir, vous y déposerez vos affaires puis je vous ferai la visite. Vos gemmes ont plusieurs capacités que vous découvrirez au fur et à mesure, notamment celle d'ouvrir la porte de votre chambre en la plaquant dessus. Maintenant...
Je continue mon laïus, tout en me disant que je m'en tire pas trop mal, et que cette année promet d'être intéressante. Je suis tombé sur une bande de petits génies et j'ai le sentiment qu'ils feront parler d'eux. Je crois que je ne vais pas m'ennuyer.
Je leur explique les diverses commodités des chambres, avant de changer à leur demande leur répartition. Ils sont en effet à deux par chambre, et bien sûr, les deux amoureux veulent être ensemble. C'est dans mes cordes pour cette année et ces chambres-là, aussi le problème est vite réglé. J'espère qu'il en sera de même pour tous ceux que nous rencontrerons.

[KLO7514]

Ah bon : le "frangin de Ludo serait donc le seul de la "tribu des Anciens" à avoir  contribué à donner le jour, par sa "petite graine", à un ou plusieurs enfants dont l'un des descendants serait dans le même groupe que Frank.
Mais alors, si l'aventure des deux "pilleurs-récupérateurs" évoqués dans le précédent épisode est concomitant du présent chapitre, il va y avoir du sport d'abord dans le sous-sol de l'Université et certainement, par ricochet, dans cette dernière! Ce serait drôle qu'un chemin secret débouchât dans la chambre de Frank et son "coloc"( Frédrick sans doute) et par où sortiraient les deux "explorateurs" quelque peu poussés dehors par un Cédric remis sur ses jambes!

[inny-2]

Pour les pilleurs-récupérateurs, Cédric dira plus tard ce qu'il en a fait.

Pour le manque des descendance des héros des récits 1 et 2, l'explication est assez simple.

Ludvick et Marc sont homos. Donc, pas de descendance directe, mais ils adoptent Stephan.

Jean et Finadan ont deux fils : Thibault et Thomas.

Thibault, tout comme Stephan sont homos et se mettent ensemble. Donc, pas de descendance. en plus, Thibault devenu archimage devait être pas mal occupé.

Il reste Thomas dont on ne sait pas trop pour la suite, mais il n'était pas contre les câlins entre garçons.

Pour ce qui est de Philippe, qu'il ait eu une descendance en Outremonde montre que finalement, les choses se sont arrangées par rapport à son conditionnement.

[inny-2]

16 - Repères

Je m'installe sur mon lit après cette longue journée de présentation. Frédrick, lui, s'est littéralement effondré dessus.
- Ouah ! C'était bien mais ça n'en finissait plus, j'ai les jambes en compote, dit-il.
- Repose-toi, je vais me laver.
Les fondateurs de l'université n'ont pas été avares de merveilles, et je remercie ceux qui ont mis en place des salles d'eau aussi bien faites, une pour chaque chambre d'étudiant. Je repense à la salle de bain commune, sur le palier de ma résidence étudiante, sur Terre, si loin... mais ça ne sert à rien de regretter, j'en ai déjà trop sur le cœur. Partir comme un fou à la recherche de mon amour, devenant un fugitif et un traître aux yeux des miens, puis tombant dans le piège de Maadi et trahissant mon homme avant de le perdre de nouveau... comme j'ai été fou ! Mais comme je ne peux pas revenir dans le temps, et que je ne peux pas lutter contre les chaînes magiques qui me lient, je ne peux qu'espérer qu'un incident quelconque me libèrera, tout en sachant que je m'y opposerai de toutes mes forces... Cette prison mentale est diabolique.

L'eau chaude qui coule sur mon corps me détend, et lorsque je ressors de la salle d'eau, Frédrick se lève à son tour, m'adressant un sourire en me croisant. Je me couche et ferme les yeux. J'ai décidé que, ne pouvant rien faire, je tâcherai de ne pas trop me faire de souci, de me laisser aller, sans toutefois perdre espoir. Lutter contre ma situation finirait par me rendre fou. Je me contenterai d'attendre.
Lorsque Frédrick ressort, il me dit qu'il est épuisé et propose qu'on dorme dès maintenant, si je le veux bien. J'approuve, je ne suis pas si fatigué mais je tiens à me faire des amis ici, et il me paraît plutôt sympathique, autant commencer par lui, d'autant que je le verrai souvent.
- Pas de souci, je vois bien que tu es épuisé. Bonne nuit !
- Merci, toi aussi ! Fait-il, reconnaissant.
Je m'endors rapidement, et fais un rêve étrange dans lequel je marche sur une plaine grise qui s'étend à perte de vue. Il n'y a personne, sauf derrière mon dos, mais je ne peux pas me retourner.
Je me réveille au matin, alerté par ma gemme, tiens, Aluun ne nous avait pas prévenu qu'elle faisait réveil.
Après un nettoyage rapide, nous sortons et nous nous rendons au réfectoire, guidés par un chemin lumineux que nous voyons dans notre esprit. Je suis épaté par cette gemme implantée dans ma main, c'est absolument incroyable. Comme tous les mystères de ce monde, d'ailleurs.

Les cours sont intéressants, bien que très intenses. Je n'ai eu droit qu'à un apprentissage accéléré de la magie, et je dois me concentrer à fond pour pouvoir suivre, d'autant qu'on m'en donne beaucoup à apprendre ! S'il est simple de jouer avec la lumière, pour faire jaillir des étincelles ou créer une boule de lumière, c'est autre chose quand on veut créer un effet plus concret. D'abord, faire de son corps une réserve de mana en attirant constamment en soi cette énergie qui baigne toute chose. C'est un travail constant, qui n'est pas contraignant mais il faut constamment penser à drainer cette énergie, ou on se retrouve avec de piètres réserves. La méditation permet de reconstituer ses réserves plus vite, heureusement. J'apprends donc à me changer en pile tout en m'efforçant de retenir ce qu'on m'apprend. Mes professeurs ont été surpris d'apprendre que je ne sais pas lire, et on m'a aussitôt rajouté cet apprentissage en plus de tous mes cours. Pitié !
Oui, pitié ! Car je trouve plus facile d'apprendre la magie que de comprendre la langue écrite de ce monde. Et quand on m'a expliqué que chaque phrase pouvait être interprétée de six façons différentes et qu'il est rarement indiqué le sens à utiliser, j'ai regretté d'être né.

Heureusement, je m'entends bien avec le groupe dans lequel je suis, ce ne doit pas être pour rien qu'ils créent ces petits groupes d'étudiants, et c'est vrai que c'est agréable d'avoir des potes pour souffler entre les cours, et retrouver la bonne humeur qui nous manquait. Nous allons sur l'une des plages de l'île, où tout le monde laisse tomber tous ses vêtements pour piquer une tête. Je fais comme eux et savoure cette sensation de liberté qu'on éprouve quand on peut se baigner nu alors qu'on en a pas l'habitude. Nous nous allongeons alors pour offrir nos corps au soleil, m'est avis que lorsque je reviendrai dans le sud, je ne ferai plus tâche par mon teint pâle.

Une ombre se porte sur moi, c'est Uria. Je trouve troublant d'être nu et examiné avec autant d'intensité par une fille, qui plus est toute aussi nue. Pas un trouble sexuel, comprenons-nous bien.
- Qu'y a-t-il, Uria ?
- Tes tatouages.
Elle s'accroupit, passe une main au-dessus d'eux, à deux centimètres de ma peau.
- Ils sont magiques. Je peux le sentir. Comment as-tu pu te faire tatouer ainsi ? Il y a un prix à payer, un prix de sang.
- Je sais... mais la voie que j'ai choisie est difficile, et...
- Certains prix sont trop lourds à payer, m'interrompt-elle.
Si tu savais...
- Oui, mais...
- J'en apprendrai beaucoup là-dessus en tant qu'enchanteresse. Si je peux t'aider, je le ferai.
- Euh, merci, Uria.
Elle se lève et retourne s'allonger. Étrange fille...
Remarquant que je suis devenu le centre de l'attention, je me retourne pour faire bronzer mon dos et cacher mes tatouage, avant de fermer les yeux.

Après nous être bien grillés au soleil, nous retournons à nos chambres et prenons une douche avant d'aller dîner. La routine de cette université est plus que supportable, et je sens que je vais me plaire ici. Je passe en revue mes camarades, Frédrick tout d'abord, dont le nom ne me semble pas très Outremondien... Ça me fait furieusement penser à Frédéric, viendrait-il de la Terre ? Serait-ce un Protecteur ou un Veilleur ? Difficile à dire, et poser les mauvaises questions me mettrait en danger. Je vais me contenter de le surveiller. Pour ce qui est des deux amoureux, Falan et Ysmar, ils sont vraiment mignons tous les deux, très tendres, plus que Jacques et moi, mais notre relation était assez différente, j'aimais le militaire en lui, l'homme viril...
Et pour finir, Uria, femme forte et mystérieuse. Et si l'incident libérateur venait d'elle ? Non, je n'espère pas que ce soit le cas, car je devrai alors la tuer avant qu'elle me libère, contraint par la magie.
Il est regrettable que les boucliers qui protègent l'université ne puissent rien contre les sorts déjà actifs, ainsi, s'il est impossible de lancer un sort, les enchantements et objets magiques sont toujours opérationnels.

Lorsque je rejoins les autres à la table, nous discutons de l'université en elle-même et j'apprends qu'elle a connu une véritable révolution il y a un siècle et demi, quand tout le conseil a mystérieusement disparu sans laisser de traces. Je manque de laisser tomber mon verre quand j'entends Fredrick raconter la passation de pouvoir entre l'ancien archimage, Cédric, et le nouveau, Thibault. Ces noms ! Je décide de le questionner prudemment.
- Ces noms ont une curieuse consonance, viendraient-ils comme toi de Valsein ?
- Oui, un de mes ancêtres était d'ailleurs un grand ami de ces deux-là. Il a laissé des chroniques familiales assez passionnantes.
- Vraiment ? Du genre ?
- Ils ont lutté à leur époque contre des groupes puissants qui menaçaient de s'emparer du monde, les Destructeurs et les Protecteurs. Ils ont mené de grandes batailles contre eux et leur ont flaqué une sacrée raclée !
- Arrête de te vanter, Fredrick ! Dit Ysmar en riant.
- Oh, mais c'est facile à prouver, tout doit être dans les archives de l'université.
- Ah, vraiment, dis-je. Je suis bien curieux de voir ça...

[KLO7514]

D'où l'importance, mon petit Franky, de bien apprendre à lire...et à écrire, les deux principes de base d'un bon enseignement...primaire, même pour un jeune ingénieur terrien qui se faisait passer pour un descendant des "Protecteurs"...!
Donc, "Fédo" est bien le "coloc" de Frank et le digne arrière-arrière-(arrière?)- petit-fils de Philippe. Ça va faire drôle lorsque arrière-arrière-Grand-Tonton Cédric va montrer le bout de son nez.

[inny-2]

17 - Jeux d'Ado

- Tu dois pouvoir en consulter une copie à la bibliothèque je pense.
- Hum... ça risque de poser problème, je ne sais pas lire.
Ça me fait tout drôle de dire ça.
- Hein ? Comment ça ?
C'est le moment d'improviser...
- La magie est interdite dans le Royaume Immortel. Ceux qui ont le Don sont exécutés, ou enlevés s'ils sont très jeunes. J'ai eu la chance de naître dans un village reculé, et quand mon père s'est aperçu que j'avais le Don, nous avons fui le royaume et erré pendant des années, il m'appris la magie de façon très théorique, nous étions surtout préoccupés par notre survie. Après sa mort, j'ai continué à voyager et à vivoter jusqu'à trouver un mage qui accepte de compléter ma formation, puis m'a envoyé ici.
Je suis assez fier de moi sur ce coup-là. Mes camarades sont surpris par mon histoire et me font part de leur compassion.
- Pas de problème, on va t'aider, dit Falan, aussitôt suivi par Ysmar. Les autres approuvent. Seule Uria reste songeuse, me regardant pensivement.
- Comment as-tu eu tes tatouages ? Me demande-t-elle.
- C'est ma décision, dis-je. J'ai trop dépendu des autres avant, je voulais être fort par moi-même. Je sais que le prix est élevé, mais de toute façon la vie ne m'a jamais fait de cadeau.
- Tu as dû payer bien plus que le prix du sang, dit-elle. Ce n'est pas n'importe qui qui fait ça, et la pratique est assez mal vue...
Je détourne la tête.
- Je préfère ne pas en parler...
Cette fille est diabolique, elle met le doigt dans toutes les failles de mon histoire. Je dois faire vraiment attention avec elle.
Aluun, notre tuteur, semble comprendre ma gêne et détourne la conversation.
- La bibliothèque n'est pas accessible aux étudiants de première année, dit-il, sauf dérogation.
- Oh ? dit Fredrick. Il s'agit de l'histoire de ma famille, et non un traité de magie, pourrai-je avoir cette dérogation ?
- Je pense que c'est envisageable. Je verrai avec le responsable de la bibliothèque.
- Merci !
Je reste songeur, pensant à ce que j'ai appris. Apprendre l'histoire de ce qui est arrivé ici dans la lutte contre les Protecteurs est plus qu'intéressant, et pourrait répondre à certaines questions.
- Je suis très curieux moi aussi, j'aimerais mieux connaître cette part de l'histoire d'Outremonde.
- Je verrai ça, je ne promets rien mais je demanderai.
- Merci.

Je n'ai aucune raison de m'impatienter vu que j'en suis encore à peiner sur les bases de la langue écrite d'Outremonde. Il y a des millénaires de cela, les guildes principales ont jeté les bases de l'écriture moderne, en faisant en sorte de pouvoir y glisser subtilement un sens différent de celui qu'on pourrait y lire au premier abord. Chaque guilde a ensuite tenu secrète sa façon d'interpréter un texte. Le sens magique pour les magiciens, le sens poétique pour les ménestrels, qui formaient une guilde puissante et influente à l'époque, le sens étendu pour les érudits, etc. Le secret du sens étendu a été percé par les mages, qui enseignent désormais les deux qu'ils maîtrisent à leurs élèves. Merci du cadeau !
L'étude de la magie m'intéresse beaucoup plus, je découvre de plus en plus clairement ce qu'est un sorcelame, et ça devient passionnant ! Croisement entre un épéiste et un enchanteur, entre un sorcier et un élémentaliste, il canalise ses sorts à travers ses armes en une combinaison mortelle. L'un de mes professeurs est un maître dans ce domaine, et il m'a fait une démonstration de ses talents après m'avoir emmené dans le désert par un portail. Je suis bien conscient qu'il me faudra des années pour en arriver là, mais j'ai hâte ! Mais j'ai moins hâte de découvrir ce que Maadi veut faire de moi...

Le soir, Fredrick m'aide à progresser en lecture, et je l'en remercie chaleureusement à chaque fois. Un peu encouragé par l'ouverture d'esprit propre à Outremonde, je décide de me lancer.
- Fredrick, tu est un gars génial, et je dois bien avouer que tu me plais beaucoup. Je me demandais si...
Il secoue la tête négativement.
- Je n'ai plus été avec un homme depuis mes jeux d'ado, dit-il mystérieusement. Maintenant, c'est une fille que je veux !
Je donnerais bien mon âme pour un dictionnaire ! Je décide de jouer sur mon vécu imaginaire.
- Euh... dans le sud, à fuir sans cesse, il y a des choses qui vous paraissent évidentes mais que je n'ai jamais connues. C'est quoi ces jeux d'ado ?
Il ouvre de grands yeux, comme si j'avais dit vouloir aller sur la Lune. Ai-je été trop loin ?
Puis son regard se fait plein de compassion, et il m'explique :
- Les parents protègent leurs filles à l'adolescence comme un dragon son trésor, pas question qu'un garçon y touche avant qu'elle ait fait son annonce à la Lumière ! Alors les garçons, qui aimeraient bien connaître certains plaisirs, les découvrent entre eux.

Il m'explique ça le plus simplement du monde, à moi qui suis abasourdi. Parlez-moi de choc culturel !
Une fois remis de ma surprise, je réfléchis. Ce monde n'a jamais connu le moindre tabou concernant l'homosexualité. Pour eux, c'est une chose aussi naturelle que l'hétérosexualité. Une telle coutume a donc pu naitre sans que ça surprenne quiconque, à part un malheureux Terrien égaré.
- Je regrette de n'avoir pas connu ça...
À ma grande surprise, Fredrick s'approche de moi et m'embrasse doucement.
- Si tu veux, on dira qu'on est ados rien que pour cette nuit, je veux que tu connaisses cette part de notre vie.
- Oh, Fredrick, c'est gentil !
- Non, moi aussi je te trouve sympa, et tu as eu une vie si triste que je veux t'apporter un peu de bonheur. Mais comprends bien que c'est juste pour cette nuit !
- C'est bien compris.

Nous ne jouons pas juste à des jeux sexuels, finalement, car il s'échauffe au point de vouloir y aller franc-jeu, ce qui se fait parfois lors des jeux réels entre ados, me dit-il.
Je réalise alors mon plus grand fantasme : faire l'amour avec un hétéro. Même si cette notion est un peu moins stricte ici que sur Terre, ce n'en est pas moins un moment inoubliable. Fredrick est très tendre et me fait passer une nuit merveilleuse. Rien à voir avec Maadi ou Jacques, c'est très différent. Lorsque nous terminons, épuisés, je le remercie et lui dit que la femme qu'il connaîtra sera la plus heureuse du monde dans ses bras. Il sourit, rougissant un peu sous le compliment. Nous nous endormons l'un contre l'autre, prolongeant plus sagement cette nuit, ou du moins, ce qu'il en reste.
Je suis hagard lorsque je me réveille, et le petit déjeuner ne me requinque pas. Fredrick est dans le même état, et nous nous faisons bien charrier par nos camarades.

Notre professeur du jour le remarque aussi et, une fois entrés dans la salle d'entraînement qui est hors du bouclier, nous lance un sort d'énergie qui nous requinque.
- Bien, dit-il, maintenant que j'ai toute votre attention, je vais vous parler des dangers de la magie. Vos maîtres qui vous ont initiés vous les ont décrit, j'espère, mais il n'est pas inutile de vous le rabâcher jusqu'à ce que ça rentre. Car vous allez peu à peu utiliser des pouvoirs de plus en plus grands, et si vous ne voulez pas finir en petit tas de cendres, vous avez intérêt à apprendre cette leçon.
La journée commence... et, pour faire avancer mes projets et ceux de mon maître, j'ai séduit Fredrick. Je ne sais pas encore lire correctement, mais lui le fera volontiers pour moi.

[KLO7514]

Un bon copain, "le" Frédrick. Il a de bons ascendants. Le voilà prêt à raconter les événements d'un siècle-et-demi en arrière. Je crois me souvenir que Cédric parlait de «s'occuper du Conseil des mages». C'est sans doute cela qui s'est produit quand ce dernier a mystérieusement disparu...pour laisser le champ libre à notre archimage mort mais pas vraiment puis à Thibault qui lui a succédé. Ai-je tout bon?

[inny-2]

On va en savoir plus au sujet de Cédric ce soir.