Deux mondes (fantastique avec personnages gays, terminé)

[KLO7514]

Ouf, Marc est sauf, bien qu'en état de faiblesse. Il va se remettre quand même. Nous voyons l'intervention d'un "ténébreux" auquel nous ne nous attendions pas. Apparemment, il serait plutôt amical pour le moment. Sera-ce toujours le cas?
D'un certain côté, ce serait bien pour nos trois loulous qu'ils laissent les trois entités «s'expliquer» entre elles et se contenter, comme pour nos frères British, de «wait and see»...mais je pense que l'histoire  s'arrêterait trop tôt!
Bien à vous et merci Inny-2.
KLO.

[KLO7514]

Tiens, un nouveau personnage qui serait plus "aidant" qu'opposant? Monsieur le baron est bien bon : l'âge qu'il ne montre pas lui a quand même permis d'accumuler des connaissances certainement très utiles et lui offrir la genèse des luttes actuelles entre les trois entités concurrentes, surtout entre "protecteurs" et "destructeurs". Mais au fait, à quel « Monde» appartiennent réellement ces deux factions opposées dont les chefs veulent chacun la même chose : terriens ou bien outremondistes? (ou les 2??)

[inny-2]

Le nouveau personnage n'est peut être pas si désintéressé que ça, mais ce qui l'intéresse est assez spécial.

Quel est le bit des protecteur et des destructeurs ? C'est un peu tôt de savoir ce qu'ils veulent faire. Il y a un titre de récit qui donne un indice, mais pour l'instant seuls les rêveurs agissent dans les 2 mondes à la fois.

[inny-2]

6 - Cavaliers pressés

Le soleil s'est levé depuis peu. Nous avons raconté tout ce que nous avons appris chacun de notre côté, puis avons planifié notre mouvement suivant. Cédric m'en avait parlé sur le chemin de Fillian, mais j'ai eu droit cette fois-ci à tous les détails.
Il prévoit que nous nous rendions au Sanctuaire de la Lumière en Ordan, à l'extrême sud-est du continent, ce qui va nous obliger à traverser bien des contrées qui nous sont totalement inconnues. Même Marc ne s'est pas rendu au-delà de la Muraille, grande chaîne de montagnes qui longe le pays à l'est, mais il s'est déjà rendu au col des ombres pour voir de ses yeux les terres de ténèbres qui s'étendent au-delà.
Là, nous pourrions entrer en contact avec le serviteur de la Lumière, savoir ce qu'il en est de nos familles, et comprendre ce que nous pouvons faire pour faire cesser cette folie - si nous pouvons y faire quelque chose. Mais j'y compte bien, en tout cas. Ils ont osé menacer mon Marc. Ils vont le regretter.

Grâce au sort d'énergie de Cédric, nous sommes en pleine forme lorsque nous descendons dans la grande salle de l'auberge. Malgré l'heure très matinale, Finnadan est déjà installée à table. À croire qu'elle a deviné que nous caressions l'idée de partir sans elle.
- Bonjour.
- Bonjour, Finnadan.
- Vous avez un plan ?
- Plus ou moins.
- Alors, où va-t-on ?
Nous nous regardons, hésitants.
- Vous ne me faites pas confiance. Tant mieux. Je déteste les inconscients. Mais que vous le vouliez ou non, je suis avec vous. Donc... quelle est notre destination ?
- Connais-tu le pays sans ciel ?
- Je l'ai traversé plusieurs fois.
- Bonne nouvelle, car nous ne le connaissons pas du tout.
- Que cherchez-vous là-bas ?
- La route pour rejoindre Ordan.
- Très bien. Notez bien, avant de quitter la vallée des merveilles, stockez des provisions de route, la nourriture coûte très cher dans le pays sans ciel - et elle n'a absolument aucun rapport avec le mot qualité. Prenez de quoi vous éclairer - à moins que nous ayons un magicien parmi nous ?
- Moi, mais je préfère que nous restions discrets.
- Très bien, approuve-t-elle.

- Combien de temps nous faudra-t-il ?
- En sortant d'ici, nous en avons pour une semaine avant d'atteindre la vallée des merveilles, deux jours pour la remonter jusqu'au col des ombres, puis deux semaines avant de ressortir du pays sans ciel à la frontière d'Ordan.
- C'est beaucoup trop long.
- Tu saurais ouvrir un portail, Cédric ?
- Hors de question. Nos ennemis peuvent détecter l'utilisation d'un portail, savoir qui l'emprunte et où il va.
- Alors, il nous faut des chevaux... Ce qui coûte une fortune.
- Pas un problème, dit Ludvik, je vais négocier ça. Cédric ? Tu as toujours ma plaque ?
- Oui. Le temps d'annuler le sort antivol... voilà.
- Merci.
Je range la précieuse plaque de commerce dans mon sac.
- Marc, tu dois savoir où je pourrais acheter des chevaux, ici ? Il faut que je trouve un apothicaire, aussi... Mon stock de potions est à revoir.
- Pas de problème. Mais, tu as déjà monté ?
- Euh, non, pas vraiment...
- Tu vas souffrir mon pauvre, dit-il en souriant.
Je vois Cédric faire la grimace en même temps que moi.
- Bien, nous nous retrouverons à la Porte Maricane, au sud-est, conclut Finnadan. Tu viens, Cédric ?

Marc a l'air de s'y connaître en chevaux, une bonne nouvelle étant donné que mes connaissances se résument au fait qu'ils existent et que ça peut se monter. Je n'ai jamais vu l'utilité d'en avoir un en Valnar, où ils sont d'ailleurs peu nombreux. Il me donne nombre de conseils avant de me laisser monter celui qu'il a choisi pour moi, et nous rejoignons tranquillement notre point de rendez-vous. Cédric a droit à son tour à son petit cours, qu'il écoute attentivement avant d'attacher un ruban de soie à chaque bride.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Un focus qui me permettra de canaliser mes sorts sur eux sans avoir à les toucher. Nous avons besoin de faire vite, et je compte bien faire en sorte que ces chevaux puissent tenir le coup. Mais ça va prendre pas mal de mes ressources, ne comptez pas trop sur moi en cas de coup dur.
- Très bien... C'est parti. Nous te suivons, Finnadan.

La première étape de notre voyage nous permet de nous habituer à nos montures. Marc veille sur nous, réitérant régulièrement ses recommandations afin qu'elles se gravent dans nos mémoires. Je commence à me détendre peu à peu et à apprécier le voyage. La contrée est très riche, et la route est très fréquentée. Après avoir mangé dans une auberge-relais, Finnadan nous guide sur une route nettement plus dégagée et nous décidons de forcer l'allure.
- Combien de temps tu peux tenir le sort, Cédric ?
- Très longtemps, d'autant que mes sort affecteront aussi les cavaliers.
- Excellent !
Il sourit.
- Je peux aussi pousser leur vitesse.
- Je ne préfère pas, dit Marc. Ils risqueraient de faire un faux pas ou de ne pas réagir à temps à un éventuel obstacle.
- Pas avec le sort que j'ai en tête, crois-moi. Il développe autant la vitesse que l'agilité, les réflexes et les perceptions. C'est ce que j'avais en tête quand je disais que je ne pourrai pas faire grand-chose d'autre.
- Je vois... Commence doucement, alors, puis...
Mes doigts se crispent sur les rênes alors que les chevaux acquièrent une vitesse terrifiante. Je me sens... étrange. Malgré la vitesse, je peux voir chaque caillou, chaque trou de la route longtemps avant d'arriver dessus. Ce n'est pas fait pour me rassurer. Je baisse la tête pour essayer d'échapper au vent. Il n'a pas pensé à ce problème, notre petit génie. Impossible de communiquer autrement qu'en criant, et encore, j'ai des doutes.

- J'avais dit doucement ! Hurle Marc.
- J'y ai été doucement ! Je suis loin de la pleine force, là !
- Quoi ?!
- Là... voilà !
- Noooon !
J'ai une envie irrésistible de fermer les yeux et de ne plus rien voir de la route qui défile à toute vitesse. Mais ce ne serait pas une bonne idée. Les chevaux n'ont pas l'air de s'inquiéter outre mesure, je suppose que le sortilège de Cédric les rend totalement indifférents à la peur. J'aurais aimé qu'il s'applique aussi à nous.
Il m'est bien sûr arrivé de pousser ma moto sur l'autoroute mais ça n'a absolument rien à voir avec ce que je vis en ce moment. Sans le surcroît d'agilité que nous confère le sort de Cédric, j'aurais vidé les étriers depuis belle lurette.
Marc crie encore quelque chose mais je n'arrive pas à entendre quoi que ce soit.
Cédric, dès qu'on s'arrête, je t'étrangle.

[KLO7514]

Zzziii comme ça file dans l'espace! ils doivent provoquer un grand courant d'air en allant comme ça. Ils vont bientôt se heurter au mur du son, à l'allure où ils vont! . Bah, ils seront plus vite arrivés avec des chevaux ailés qui doivent se prendre au minimum pour des zèbres*, au mieux pour des Licornes (avec Li mais sans corne!).
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*Le célèbre Alphonse Allais expliquait ainsi l'origine de ce nom "chevalin" : il se promenait un jour au zoo avec la petite Mimi, sa copine. Ils virent ces étranges animaux aux bandes noires, ressemblant à des chevaux et qui couraient très vite dans leur parc.«Oh, regarde dit Mimi à Alphonse ; ils courent comme des zèbres!» "ZÈBRE" Et voilà, le nom leur est resté!

[inny-2]

7 - Tensions

Près de Tamalyn, royaume Signari, Outremonde

Lorsque les chevaux finissent par ralentir à l'approche d'une ville, je demande un arrêt qui est unanimement accepté. Je descends et laisse Marc s'occuper des montures. Moi, je m'effondre dans l'herbe.
Physiquement, je suis dans un état pitoyable. Nerveusement, c'est encore pire. Alors même que je me sens débordant d'énergie.
- Cédric... espèce de... malade... plus jamais ça !
- Allons... avoue... que t'as... aimé.
– Non !
– Non !
– Non !
- Pfff... Me suis pas autant... amusé depuis... bien longtemps.
- J'ai pas la tête... à ça en ce moment.
Le silence s'installe pendant que nous récupérons - plus ou moins.

- T'es complètement frappé ma parole, qu'est-ce qui t'a pris ?
- On est pressés par le temps... D'une part, nous devons absolument réagir avant qu'ils ne nous trouvent. D'autre part, les protecteurs nous avaient déjà repérés et ils n'auraient pas tardé à envoyer des renforts.
- Mouais, d'accord avec ça, mais tu te rends compte de la vitesse à laquelle nous allions ? Le moindre pépin aurait été fatal.
- Je savais ce que je faisais ! J'étais avec vous moi aussi, non ? Je ne suis pas suicidaire.
- On se le demande. Enfin, c'est clair qu'ils ne risquent pas de nous rattraper, et pour ouvrir un portail, il faut savoir où nous nous trouvons.
- Exactement.
- Où sommes-nous ?
Finnadan tend le bras vers l'est.
- La ville, là-haut, c'est Tamalyn. C'est le seul accès à la vallée des merveilles, à moins que vous ne vouliez escalader la muraille. Mais je doute que les gardes apprécient.
- Elle est immense ! Je n'aurais pas cru qu'il y ait une ville aussi grande en Outremonde.
- Non, ce que vous voyez là, c'est la grande muraille qui bloque tout accès vers l'est, d'une falaise à l'autre.
- Pourquoi ont-ils fait une chose pareille ?
- Comme ça, ils contrôlent efficacement la seule route entre le pays sans terre et le reste du royaume. Les taxes sont élevées, ici... et la ville, très riche. D'autre part, des cultures précieuses sont faites au-delà, et ils tiennent à protéger leurs récoltes des pillards.

- Pourquoi la vallée au-delà porte-t-elle ce nom ?
- Elle a subi le contrecoup du déchaînement de pouvoirs de la grande guerre des sorciers. Des choses bizarres se produisent parfois, mais le plus intéressant, c'est que des plantes au fort potentiel alchimique se sont mises à pousser comme du chiendent. Certaines, d'ailleurs, sont entièrement nouvelles et ne poussent que dans cette vallée.
- Je vois. Cette guerre, c'était il y a longtemps, j'imagine ?
- Des milliers d'années. Tout le monde a dû oublier de quoi il s'agissait.
- Non, dit Cédric. Tous les sorciers connaissent cette histoire.
- Raconte.
- Il y a très longtemps, les sorciers étaient organisés et nombreux.
- Ils dominaient le monde, en fait, précise Marc, et régnaient en tyrans sur la population.
- Pas du tout ! Ils assuraient la sécurité et la prospérité du...
- Mais bien sûr. J'oubliais que l'histoire est écrite par les vainqueurs.
- Pfff. C'est triste de voir l'histoire aussi déformée.
- Tu peux parler !
- Bon, on pourrait avoir la suite de l'histoire ? Intervient Finnadan.
- Et donc, un jour, un certain Magnos, assoiffé de pouvoir...
- ... épris de liberté...
- ... a formé un groupe de rebelles qui s'est mis à utiliser un pouvoir corrompu...
- ... bien sûr...
- ... et a transmis ce savoir à d'autres, et de plus en plus de gens se sont mis à...
- ... à utiliser la magie sans avoir le don, ce qui a rendu les sorciers fous de rage.
- ... fous de rage de voir des gens corrompus se mettre à massacrer...
- ... les troupes des tyrans et même certains sorciers...
- ... mettant à feu et à sang...
- ... les palais dans lesquels vivaient les sorciers pendant que le peuple crevait de misère.

- Bordel, Marc, c'est quoi ton problème ?
- Je pourrais te retourner la question. Tu pourrais faire l'effort de regarder l'histoire d'un point de vue neutre, plutôt que de prendre parti comme tu le fais.
- Ça suffit, dis-je. On va pas s'engueuler pour une guerre qui s'est terminée il y a des milliers d'années.
- Hum.
- Que s'est-il passé ensuite, Marc ?
- Les disciples de Magnos ont renversé les tyrans et ont libéré leur pays. Mais la plupart des sorciers s'étaient enfuis. Ils ont regroupé leurs forces à l'extérieur, s'unissant aux autres mages, et un jour, ils ont lancé un assaut terrifiant. Le pays de Chernim a été entièrement anéanti.
- Comment ça ?
- Ils ont usé d'une magie interdite pour massacrer la population entière. Dans tout le pays qui avait osé se rebeller contre eux et les chasser, les gens mourraient sous l'assaut des sortilèges qui se déchaînaient tandis qu'ils avançaient. Comprenant que tout espoir était perdu, les disciples ont uni leurs pouvoirs pour lancer un seul et unique sort, porté par la volonté de tous les disciples présents dans le pays. Le pays entier s'est soulevé et a jailli dans le ciel, pour ne plus jamais retomber. Les sorciers ont vu leur concentration ruinée, et leurs sortilèges se sont retournés contre eux avant de ravager le pays. Rien n'aurait pu empêcher la mort de tous ces gens, mais dans cette défaite, ils ont entraîné des milliers de sorciers. Ce fut la fin d'une époque, d'une ère où la magie était toute-puissante. Maintenant, ceux qui ont le don sont rares, et heureusement.

- Les sorciers n'auraient jamais usé de pareils sortilèges ! Ce sont les disciples qui ont exterminé leur population en usant de terrifiants pouvoirs alors qu'ils ne les maîtrisaient pas !
- Si tu le dis.
- J'ai dit ça suffit ! Qu'est-ce qu'il y a, Cédric, ces gens sont mort depuis belle lurette et ils ne reviendront pas, quoi qu'on puisse faire ou dire. Quelle que fut la véritable histoire, ces temps ne reviendront plus. Cette guerre est finie. Alors arrêtez de vous chamailler.
- La guerre dure toujours.
- Pardon ?
- Chaque apprenti fait le serment de tuer à vue tout disciple de Magnos dont il aurait connaissance, cela fait partie de son initiation. Ces serments forment l'identité du sorcier, il les prononce juste avant l'éveil de son don, et ils le définissent. Sans eux, il n'est plus rien. Certains sont choisis par l'apprenti, d'autres sont imposés et se transmettent de sorcier en sorcier.
- Des milliers d'années de haine et de persécution. Il faut croire que leur perte fut amère, hein ? Perdre leur domination sur le monde, quelle tristesse.
- Stop ! En selle, tout le monde, et je ne veux plus entendre parler de cette histoire, ni maintenant, ni jamais. C'est clair ?

[KLO7514]

Hé, les gars, va falloir calmer les ardeurs! il y a autre chose à faire que de s'envoyer des piques (Des "piques English"... ). Le temps presse.

[inny-2]

8 - Tamalyn

Nous passons la grande porte de Tamalyn après un court trajet effectué dans un silence pesant.
J'ai bien l'intention d'avoir une discussion seul à seul avec Marc. Qu'est-ce qui lui prend, tout à coup ? Cédric lui a sauvé la vie et c'est limite si ils n'en viennent pas aux mains.
- Bon, je n'ai pas trouvé les potions que je cherchais à Fillian mais je pense qu'ici, ça ne devrais pas poser de problème.
- Oui, confirme Finnadan. Il y a une guilde bien implantée ici, dans le quartier nord.
- Très bien, j'irai voir ça dès qu'on aura trouvé une auberge.
Il y en a à la pelle, des auberges, mais elles sont pleines de monde en ce moment. Après une longue recherche, nous finissons par trouver deux chambres.
- Bon, Céd et Finnadan, vous prenez une chambre et...
- Pas question, et puis quoi encore ? Il met un pied dans ma chambre et je le cloue au mur.
- Hum. Désolé, mais je crois que je vais dormir avec vous.
- Tu veux tenir la chandelle, Céd ?
- J'y crois pas... Vous allez pas faire ça ce soir ?
- On a passé beaucoup trop de temps loin de l'autre, et j'ai failli le perdre... désolé.
- Bon, je vais voir s'il y a de la place dans l'écurie... Pfff.  Me faites pas ce coup-là à chaque fois, hein.
- Bah... pourquoi pas ?
- Ou je vous jette un charme d'impuissance.
- Aargh.

Nous ressortons, Marc et moi, et partons vers le nord de la ville. La foule est dense et nous devons parfois jouer des coudes pour progresser.
- Que se passe-t-il pour qu'il y ait tant de monde ?
- C'est la grande foire, nous dit un vieil homme qui fait une pause contre un mur. On vient de loin pour acheter, vendre et troquer tout et n'importe quoi. On trouve même des denrées venues de Valnar.
- Vraiment ? Intéressant. C'est bien par là, pour la guilde des apothicaires ?
- Oui, tout à fait, continuez tout droit maintenant jusqu'à la place des arts, il y a une grande fontaine au milieu, traversez-là, le grand bâtiment ocre est votre destination.
- Merci bien. Puisse la Lumière éclairer votre demeure.
- Puisse-t-elle éclairer votre route.

Nous trouvons facilement le bâtiment indiqué, la foule est bien moins dense dans cette partie de la ville, remplacée par des chariots chargés de caisses. Nous passons une grande arche de pierre ornée de sculptures dont le thème tourne autour de l'alchimie, et entrons dans une cour intérieure. Plusieurs autres entrées y mènent, et des symboles peints indiquent leur intérêt. Celui de la vente au détail attire mon regard, et nous nous y dirigeons. Là aussi, il y a beaucoup d'activité. Nous attendons qu'un vendeur se libère et avançons.
- Bien le bonjour.
- Je vous salue, que vous faut-il ?
- Je voudrais quatre potions de sang de dragon et une fiole d'antidote universel, ainsi que...

Le vendeur prend des notes, son sourire s'élargissant à mesure que je passe ma commande.
- Diantre, vous n'y allez pas de main morte ! Ça va vous coûter cher. Voyons voir... Cent quatre-vingt couronnes du roy.
- Voilà, dis-je en lui tendant une plaque de commerce de deux cent.
- Une minute.
Il s'éloigne avec ma plaque, et revient avec un coffret.
Il l'ouvre et me montre chaque fiole, soigneusement rangée dans un tissu.
Je les examine et me déclare satisfait. Il me reverse les vingt couronnes de différence.
Je donne quelques fioles à Marc et repars avec le reste.
- Tu n'y vas pas de main morte, toi.
- Si je suis encore en vie, c'est grâce à ce genre d'investissements.
- Je vois.
- Et toi ? Comment as-tu survécu tous ce temps ? Tu as fait pas mal de voyages toi aussi, m'as-tu dit.
- Le pays est bien plus civilisé que l'île perdue où tu as échoué. Il est rare qu'on entende parler d'une quelconque créature sauvage, et la garde s'en occupe alors rapidement.
- Je vois...
- Le reste, je t'en parlerai sur Terre.

La nuit est tombée pendant que nous faisions affaire, mais la foule a à peine diminué. Torches et lanternes éclairent les rues, parfois un éclairage magique vient donner une ambiance particulière à une maison ou une rue. J'apprécie un moment le spectacle d'un palais de marbre auréolé de lueurs bleues et jaunes tourbillonnant le long de ses murs.
- Que s'est-il passé avec Cédric ? Il ne méritait pas ça, après t'avoir sauvé des ténèbres.
Marc s'arrête et prend une expression gênée.
- C'est vrai... Je me suis énervé pour un rien, en fait... Je lui présenterai des excuses.
- On était tous sur les nerfs après cette chevauchée infernale. Bon, hâtons-nous de rentrer, j'ai l'estomac dans les talons.

Plus tard ce soir...

Je regarde misérablement la paille qui va me servir de lit ce soir.
Super, le sorcier qui a le bâton le plus précieux du monde dort au-dessus d'une écurie, où n'importe quel mage de pacotille pourrait le dénicher. Bien, autant faire en sorte qu'aucune visite imprévue ne se fasse sans que je le sache.
J'écarte la paille devant l'échelle et j'ai la surprise de voir une série de runes gravée sur les planches. Apparemment, je ne suis pas le premier sorcier à dormir ici. Bah. Au moins, cela va me faire gagner du temps. J'ai pu récupérer un peu de magie depuis mon arrivée, ce sera suffisant.
J'ai juste à laisser couler un flot d'énergie magique à travers les runes et une barrière se dresse devant moi, scintillant doucement avant de disparaître. Malheur à qui voudrait s'introduire ici pendant mon sommeil.
Je m'allonge dans la paille après avoir éteint mon globe de lumière et me dis que si je n'avais pas été Rêveur, je n'aurais peut-être pas trouvé le sommeil cette nuit. Au moins, un sort anti-vermine est tissé dans mes vêtements.
Sur cette pensée réconfortante, je ferme les yeux et... les rouvre en entendant grincer l'échelle.
Quoi, déjà ? Ils perdent pas de temps, par ici.
Je raffermis ma prise sur mon bâton et attends.
L'intrus s'arrête en haut de l'échelle, et, à ma grande surprise, fait surgir un globe de lumière.
- Pourriez-vous abaisser votre barrière, que nous puissions discuter ?
- Vous ?!

- J'ai des choses à vous dire, et il est dans votre intérêt de les connaître.
- Mais... mais comment avez-vous fait pour...
- Allons... dès lors que j'ai senti votre aura, je peux ouvrir un portail non loin de vous, où que vous soyez en Outremonde.
- Quoi ?!
- L'un des nombreux talents dont je dispose... et qui pourrait être vôtre. Cela ne tient qu'à vous.
- Une minute ! On m'a déjà fait ce coup-là !
- Vraiment ?
- Vous êtes un sembleur... vous essayez de me pousser à rejoindre les ténèbres !
- Je devrais me sentir insulté, mais je suis satisfait de voir qu'un brin de prudence fait partie de votre personnalité. Mais, les sembleurs ne jettent pas de sorts, dit-il en désignant le globe de lumière.
- Mais ils peuvent utiliser un objet magique, comme un anneau de lumière. Brisez ma barrière, si vous êtes le sorcier que vous prétendez être. Et sans la toucher !
- Qu'il en soit ainsi.
Il ferme les yeux et je vois ma barrière s'illuminer, trembloter, et s'effondrer.
- Satisfait ?
- Plus ou moins... de quoi vouliez-vous me parler ?
- De vous, des Rêveurs, des protecteurs et des destructeurs, de la Lame de Lumière et de la prochaine guerre des ténèbres, cela vous intéresse ?
- Mais... mais... comment êtes- vous au courant de tout ça ?!
- Je vais vous le dire aussi...

[inny-2]

9 - Baron Alkarn de Valden

Le baron s'assoit sur une botte de paille. Ce personnage étrange m'inquiète fortement, mais je ne peux en même temps m'empêcher d'être fasciné par lui. Il a énormément de charisme, c'est indéniable, et j'imagine que ses sujets doivent beaucoup l'apprécier. Je demanderai à Finnadan si elle sait quelque chose sur lui.
- Lorsque vous m'avez ouvert votre porte, la nuit dernière, vous n'aviez dressé aucune défense, et vous êtes instantanément tombé sous le coup de mon charme hypnotique.
- Ce n'est pas ce que je...
- Je vous ai ordonné de l'oublier, car je voulais me laisser le temps de réfléchir à ce que vous m'avez appris. C'est-à-dire, tout ce que vous saviez.
- Je n'arrive pas à y croire, de telles méthodes...
- Je fais ce qui est dans l'intérêt de mes gens, et dans le mien, aussi. Il n'était pas prévu que vous tombiez aussi facilement, mais j'aurais été bien stupide de ne pas en profiter. Si notre rencontre a été le fruit du hasard, c'est une chance inespérée que de telles informations me soient parvenues. Le plan de ces gens est effrayant. Je ne connais rien de ton monde, Rêveur, mais l'idée même que quelqu'un soit prêt à sacrifier toute vie sur ce monde pour devenir un dieu... Pouvez-vous imaginer quel genre de dieu pourrait être un individu aussi dénué de scrupules ?
- Non, mais je suis effrayé aussi, croyez bien.

- D'autre part, l'annonce d'une nouvelle guerre des ténèbres ne me plaît pas du tout, mais alors vraiment pas. Le pays sans ciel risque de devenir l'une des principales cibles des princes, et je devrai alors me battre contre un terrible adversaire.
- Moi aussi... l'un des princes m'a imposé un défi...
- Que dites-vous ? Vous n'avez tout de même pas relevé ce défi tout de même ?
- Il s'est gravé dans mon âme comme une rune ténébreuse au moment même où j'ai accepté l'accord que...
- Fou ! Ne saviez-vous pas que le moindre accord, le moindre contact avec les ténèbres souille votre âme ?
- Si... je n'avais pas le choix. Je devais sauver quelqu'un, et obtenir une trêve. La priorité, c'est empêcher la destruction de toute vie sur mon monde, et le début d'un règne de cauchemar en Outremonde.
- Elles savent amener leurs adversaires là où elles le veulent...
- Oui...
- Il faut à tout prix effacer cette marque, ou elle s'emparera de votre âme toute entière et vous la leur offrirez. Je ne peux accepter de voir cela arriver.
- Il y a un moyen ?
- Oui... mais vous devrez avoir une pleine confiance en moi, car ce moyen est terrible. Mais on n'a rien sans rien, n'est-ce pas ? Toute magie a un prix, et il ne tient qu'à vous de décider de celui de votre âme et de votre liberté.
- Ça n'a pas de prix, vous le savez bien. Que dois-je faire ?
Il me regarde pendant un long moment, silencieux, semblant jauger ma détermination.
- Qu'est-ce qui brise tous les pactes, tous les liens, tous les serments ?
- La mort... Hein ? Vous ne me proposez tout de même pas de me suicider ?
- Sur votre monde sans magie, vous allez devoir le faire. Ou vous deviendrez contraint et forcé un agent des ténèbres qui travaillera avec les princes à la domination d'un nouveau monde.
- Non ! Ce n'est pas possible, il doit y avoir un autre moyen !
- Dites « s'il vous plaît » au prince des ténèbres pour qu'il ôte votre marque, ça marchera peut-être ? Ou préférez-vous vous voir en train de détruire tout ce que vous chérissez ? Oui, le prix est terrifiant, et ce n'est que le début, car il restera à accomplir une part ici, où la magie permet d'éviter d'en arriver à une telle extrémité. Réfléchissez bien, mais vite ! Car la corruption va bientôt commencer, si ce n'est déjà fait... et alors, y mettre fin sera la dernière chose que vous voudrez faire, car au contraire, vous vous réjouirez de devenir de plus en plus maléfique.
- Arrêtez ! Partez, laissez-moi !
- Mon départ ne fera pas disparaître votre souillure. Vous ne pourrez pas vous fuir vous-même.

C'en est trop, l'horreur de ma situation me fait m'effondrer en larmes. J'en sais assez sur les règles de la magie et sur les ténèbres pour comprendre qu'il dit la vérité. La corruption de mon âme a déjà commencé, et elle m'a empêché de réfléchir au prix que m'a coûté cet accord passé avec un prince.
Maudit sois-tu, Marc ! Te rends-tu seulement compte du prix que m'a coûté ton sauvetage ? Pour les remerciements que j'en ai eu ! Tu peux ranger les pathétiques excuses que tu m'as faites tout à l'heure ! Je... Aaah, c'est trop horrible, devenir un jouet au mains des ténèbres ou mourir sur Terre et me condamner à ne vivre qu'en Outremonde ?
Devrais-je infliger la nouvelle de ma mort à mes parents, mes amis ? Jamais ils ne pourraient comprendre pourquoi je me serais suicidé... Mais d'un autre côté, devenir un monstre... Voir l'horreur et le dégoût dans leurs yeux, et m'en moquer... Et pour finir, travailler à faire de la Terre un monde de ténèbres et de terreur...
- Marc ! Lui est resté prisonnier des royaumes des ténèbres ! Il doit être corrompu lui aussi, non ?
- C'est un sorcier lui aussi ?
- Non.
- Dans ce cas, il en faudrait plus pour le corrompre. Il aurait fallu qu'il choisisse volontairement de servir les ténèbres. Je vais toutefois le sonder quand j'en aurai fini avec vous.
- Laissez-moi... laissez-moi... je vous en prie...
Alkarn me regarde un court moment, puis redescend par l'échelle et s'éloigne. Je redresse d'une pensée ma barrière puis m'effondre en larmes.

Dans la chambre de Ludvik et Marc...

- Qu'est-ce qui se passe, Marc ? Tu ne m'as pas habitué à ce genre d'attitude.
- C'est compliqué, Lud, et je n'ai pas vraiment envie d'en parler.
- Euh... tu n'es quand même pas jaloux, rassure-moi ?
- Mais non, pas du tout ! J'ai confiance en toi, Lud.
- Et moi en toi. Mais tu m'inquiètes.
- Je t'expliquerai quand nous serons sur Terre.
- Allons-y alors.

On frappe à la porte, et je me lève après avoir pris mon épée. Nous sommes encore nus après le moment intense que nous avons partagé tout à l'heure, mais ça ne pose problème à personne en Outremonde, ce qui me simplifie la vie.
- Oui ? Dis-je à travers la porte.
- Ludvik et Marc ? Je suis le Baron Alkarn de Valden. J'ai à vous parler.
Je regarde mon homme qui est aussi perplexe que moi.
- Une minute.
On ne se présente pas nu devant un baron, même au saut du lit. Le contraire ne me viendrait même pas à l'esprit.
Une fois habillés, j'ouvre la porte et me retrouve face au plus bel homme des deux mondes réunis.

La suite des évènements est assez confuse dans mon esprit. Il y a eu de l'agitation, des cris, mais quand j'essaie de me rappeler de ce qui s'est passé, tout s'enfuit. Il faut que je demande à Marc... Où est-il ? Où suis-je ? Je... rêve ? Je n'ai plus rêvé depuis dix ans. Comment est-ce possible ? Serais-je mort ?

[KLO7514]

Hou-là ! Il se passe des choses bien compliquées et parfois l'on peut s'y perdre. Le Baron se propose d'aider Cédric puis Ludo et Marc. C'est déjà une bonne chose. mais au prix de la "mort terrestre" de Cédric si j'ai bien compris. De ce fait, il ne deviendrait qu' «Outremondiste», c'est bien cela?
Merci, cher Inny-2.
KLO.

[inny-2]

En effet. Avec des particularités.

[inny-2]

10 - Le paria des deux mondes

Je fais un effort pour me réveiller et finis par y parvenir. J'ouvre les yeux sur Terre, dans le salon de Cédric, au pied du canapé où dort... où dormait Marc.
- Marc ? Où es-tu ?
- Je suis là.
Je le vois s'approcher de moi.
- J'étais dans la cuisine. Tu vas bien ?
- Je ne comprends rien, mes souvenirs sont confus depuis que j'ai ouvert la porte...
- Chut. Plus tard. Habille-toi, on va faire un tour.
- Cédric...
- Il dort encore, profitons-en.
Je suis assez intrigué mais je décide de le suivre. S'il y a quelque chose qu'il veut me dire sans que Cédric le sache, pas de problème, quand bien même je suis assez déçu de ses réactions envers mon ami.

Nous prenons un petit déjeuner dans un café puis nous cherchons un endroit tranquille. Confortablement installés, je regarde Marc réfléchir un moment, puis relever la tête vers moi.
- Cédric risque de nous poser un problème.
- Tu plaisantes ou quoi ? Il m'a sauvé la vie deux fois, et il t'a sauvé des ténèbres, je te signale. Qu'est-ce que tu as contre lui ?
- C'est un sorcier, voilà ce que j'ai.
- Pardon ? Mais je rêve ou quoi ? Depuis quand les sorciers sont-ils un problème ?
Il passe la main dans son col et en ressort son médaillon, un cristal vert dans un treillage d'or assez complexe. Je dois dire que je le trouve très beau, et savoir qu'il l'a fait lui-même m'emplit d'admiration.
- Ce n'est pas seulement un joli médaillon, c'est un focalisateur spirituel, façonné selon les instructions du Livre de Magnos.
- Attends... Tu veux dire que tu es un disciple de Magnos ?
- Oui. Je n'ai pas choisi la facilité, hein ? Ici, sur Terre, il y a encore bien des gens qui regardent les gay de travers, les assimilant à des monstres pervers. En Outremonde où ce n'est absolument pas le cas, il a fallu que je devienne ce que les sorciers abominent, et me voilà là aussi obligé de me cacher. Pas de bol.

- Mais comment est-ce arrivé ?
- Un peu comme toi, j'ai été recueilli par des gens qui m'ont aidé, fourni logement et nourriture, et ils m'ont enseigné la voie de Magnos. Ils ne m'ont pas caché que c'était un chemin dangereux, mais j'étais si fasciné par tout ce que ce monde contenait... C'était comme... comme traverser l'armoire magique menant en Narnia, comme passer de Stark à Arcadia, comme... je retrouvais ce que je cherchais dans mes lectures favorites, et plus encore ! Et j'avais l'opportunité de devenir un magicien ? Tu aurais fait quoi à ma place, hein ?
- Je crois que j'aurais signé des deux mains.
- Tu vois ? Et si je dois vivre avec crainte dans les deux mondes, j'ai eu droit à des compensations plus que satisfaisantes, tu ne crois pas ?
- Mmmm... pour ce qui est de notre homosexualité, pour ma part, je suis plus que satisfait de la tienne, lui dis-je en souriant.
Il me rend ce sourire, mon homme que j'aime tant.
- Pour ce qui est de Cédric, eh bien, je ne sais pas... Nous verrons bien le moment venu, mais s'il devait y avoir un problème, je compte bien m'interposer. Mince alors, il est pas le moins du monde homophobe et il fait une fixation sur les disciples de Magnos ? Il y a un truc qui ne tourne pas rond dans sa tête.

- J'espère que tu ne te trompes pas sur lui.
- Le mieux, ce serait de lui en parler dès maintenant, sur Terre, dans notre monde de, hum, raison.
- Tu es sûr ?
- Mieux vaut régler ça maintenant qu'au beau milieu d'un combat.
- Ouais... Mais je le sens mal, là.
- T'en fais pas. Je serai là.
- D'accord. Merci.
- On croirait presque parler d'un coming-out.
- Oui ! Dit-il en riant.
- Au fait, pourquoi as-tu recréé le médaillon dans notre monde ?
Il ferme les yeux et je vois la gemme s'illuminer. Quand il rouvre les yeux, je constate que ses iris brillent du même vert. Un petit éclair jaillit de son index et va frapper le mur.
- Ouah ! C'est pas vrai ?! Je croyais que la magie n'existait pas ici ?
- Ce n'est pas de la magie, en fait. Comme je le disais, c'est un focalisateur psy qui est entièrement basé sur des principes physiques naturels, bien que totalement incompris dans notre monde. Je pense sincèrement que la magie a aidé à la toute première réalisation de cet objet, par le biais de la divination. Magnos devaut avoir le don sans le savoir.
- Ce serait très ironique.
- Oui.
- C'est donc ce qui explique ta résistance face au prince des ténèbres.
- Oui, il a essayé de savoir quelle en était l'origine, mais quand il m'a envoyé dans son royaume, je me suis forgé un sanctuaire et m'y suis isolé. La pression à l'extérieur était terrible, je n'aurais pas pu résister plus longtemps sans l'intervention de Cédric. Là aussi, c'est très ironique, s'il avait su, il m'aurait laissé là où j'étais.

- Je ne sais pas... Nous verrons bien. Au fait, que s'est-il passé avec ce type, dans l'auberge ?
- Il nous a lancé un sort dès qu'il est entré, et j'ai réagi en le brisant. Tu étais tombé sous un charme hypnotique, et j'ai lutté contre lui pendant un moment. Lud, ce type était puissant. Il aurait facilement pu me tuer, mais il s'est contenté de briser mes défenses et de me sonder, puis il est parti.
- Il a dû voir que tu étais un disciple, non ? Et il t'a laissé en vie.
- C'est vrai... Je ne comprends pas ce qui s'est passé, ni qui était ce type.

Nous décidons de rentrer et de parler à Cédric. Arrivé devant chez lui, j'utilise la clé qu'il m'a prêté et entre.
- Cédric ?
Pas de réponse.
- C'est pas vrai, il dort toujours ? Il doit se passer quelque chose en Outremonde.
- Il a eu maille à partir avec le soi-disant baron ?
- Peut-être... Allons le voir.
Je frappe à la porte de sa chambre. Pas de réponse. Haussant les épaules, j'ouvre et entre dans la pièce.
- Cédric ? Tu vas b... Cédric ?!

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Qu'est-il donc arrivé "au" Cédric? Il aurait soupçonné quelque chose et se serait évanoui dans la nature ou bien...sa vie s'est éteinte "sur Terre"?

[inny-2]

11 – Terrible décision

Marseille, France.

La chambre est vide. Je m'apprête à ressortir lorsque j'avise une feuille de papier sur le lit. Je m'en empare et commence à lire.

Mes amis, j'ai fait une chose terrible et je dois en payer les conséquences.
Je n'ai pas d'explications à fournir en ce monde. Nous nous reverrons dans l'autre.
Ce n'est donc pas un adieu mais un au revoir.
Je regrette de vous causer tant de problèmes, mais je n'ai pas le choix.

L'enveloppe sur la table de chevet est pour mes parents.

Cédric.

– Merde... c'est pas vrai ! Où est-il ?
– Je vais voir dans la salle de bains.
Je cherche pour ma part dans la cuisine, puis le reste de la maison, mais il n'y est pas.
Marc revient avec une mèche de cheveux dans la main.
– Je vais le localiser...
Ses yeux s'illuminent de nouveau. Je dois bien avouer que cette lueur verte est bien inquiétante, ça m'épate quand même de voir un tel artefact fonctionner dans notre monde. Les plans en auraient été conçus par le biais de la divination ? Une quelconque entité en est donc responsable. Je me demande si c'est vraiment prudent...
– Il... lutte... mais pas contre moi. D'où sort-il un tel pouvoir ? Ah !
Son visage se crispe, je le vois se concentrer intensément sur un homme qui a su plier à sa volonté un prince ifrit.
– Il y a... quelque chose... je sens... les ténèbres. Il lutte contre elles... mais elles ont prise sur lui. Il est en train d'y succomber... Non !
– Quoi ?
– Il... il s'est tué...
– Oh, non, c'est pas vrai !
– Je suis désolé... je... oh non... je ne voulais pas que l'on paie un tel prix pour me sauver...
– De quoi tu parles ?
– Sa résistance s'est effondré à la fin, j'ai pu lire en lui. Il a souillé son âme au contact des ténèbres en me sauvant. Pour échapper à leur emprise, il a mis fin à ses jours.
– Alors basculons en Outremonde avant qu'il ne fasse la même chose là-bas !
– Nous ne pouvons pas le sauver, Lud. Si nous l'empêchons, il sera corrompu de manière irréversible.
– Non ! Il doit forcément y avoir quelque chose à faire !
– En tant que sorcier, il sait très bien que non, sinon il n'aurait pas été poussé à une telle extrémité.

Je reste silencieux un moment, tandis qu'une myriade de pensées douloureuses me traversent l'esprit. Mais certaines d'entre elles me ramènent à la réalité.
– Bon, je vais raconter une série de boniments aux destructeurs. Plus tard ils comprendront que je ne travaille plus pour eux, mieux ça vaudra pour nous. Tant que je peux profiter d'eux, je le ferai.
Je rallume mon portable et passe outre les dizaines de messages que j'ai reçu.
– Allô, Johann ? C'est Ludovic... non, pas le temps. J'ai pu sauver Marc juste à temps, car vos hommes... Oui, encore eux. Ça vous étonne ? ... non, hors de question. Mais vous avez bien joué en vous emparant de mes parents, hein, salauds ?... oui, hein ? Bon, j'en viens à ce dont je voulais vous dire. J'ai trouvé un autre rêveur et je l'ai poussé au suicide sur Terre. Oui. Sauf que Marc et moi avons dormi chez lui, donc j'aimerais que votre équipe fasse le ménage... exactement, ou je ne réponds de rien. Oui, je l'ai localisé en Outremonde, mais il devrait là aussi s'occuper de lui par lui-même. Oui, j'y veillerai. Bon, notez bien. Cédric...


Lorsque je raccroche, Marc me regarde, totalement effaré.
– Je n'imaginais pas que tu puisses être aussi... froid.
– Non ! Je joue un rôle avec eux, mais ne va pas croire que la mort de Cédric m'indiffère. Mais j'ai appris à me concentrer sur ce qui est important, à force de lutter pour ma survie en Valnar. Je sais que je peux paraître insensible, mais il faut bien que ces choses soient faites. Autant je regrette de perdre Cédric, autant je pense à nous deux. Et puis... Je ne parviens pas à le considérer comme vraiment mort... pas encore. Il vit encore, à Tamalyn. Fonçons à un hôtel quelque part en banlieue et retournons en Outremonde.
– D'accord.

Tamalyn, royaume Signari, Outremonde

Aussitôt réveillé, je me redresse si vite que j'ai un voile d'obscurité devant les yeux. J'attends que mon sang daigne revenir irriguer convenablement ma cervelle et m'habille avant de foncer avec Marc vers l'écurie.
J'arrive le premier et grimpe à l'échelle à toute vitesse, mets la main sur le plancher, et tout mon corps se met alors à crépiter d'éclairs.
– Wow ! Fait Marc plus bas, qui a dégringolé les quelques échelons qu'il avait déjà monté. Lud ! Ça va ?
– Oui, ma garde élémentale a absorbé le choc. Pas de bobo.
– Il est là ?
– Oui... Reste en bas.
Je touche son cou et constate que son cœur bat.
– Il est toujours vivant.
Je le secoue fortement.
– Cédric ! Réveille-toi !
– Hein ? Quoi ? Qui est là ?
– Ludvik.
– Ah...
Un globe de lumière apparaît.

– Cédric... pourquoi, mais pourquoi ?
– Les ténèbres m'ont corrompu lorsque j'ai passé un accord avec leur prince. Lorsqu'elles ont compris que je ne les laisserai pas s'emparer de moi, elles me dévoraient... mais j'ai fait ce qu'il fallait pour les tenir à l'écart. Temporairement, du moins. Je vous accompagnerai autant que je le pourrai... Mais je devrai vous quitter bientôt.
– Je suis désolé, Cédric, vraiment désolé, dit Marc d'en bas.
– Laisse tomber... J'ai fait ça pour Ludvik, c'est tout. Restons-en là, vous ne pouvez rien faire pour moi, autant continuer notre route et faire ce que nous pouvons.
– Je n'ai jamais voulu une chose pareille...
– Je sais bien. Mais c'est ainsi, et on ne peut pas revenir sur ce qui a été fait. Maintenant, laissez-moi dormir... si j'arrive à me rendormir.
– Cédric...
– Laissez... moi...
Il éclate en sanglots, libérant enfin sa tristesse devant la perte terrible qu'il vient de vivre. Plus jamais il ne verra sa famille, ses amis, son monde natal...
Je le serre dans mes bras, lui offrant un peu de chaleur humaine, de compassion, le soutenant autant que je peux le faire.
– C'était horrible, Lud... J'ai failli succomber aux ténèbres... devenir un monstre sans âme, un esclave voué au mal. J'étais à deux doigts de céder... Je n'avais plus le choix, j'ai... activé mon... bâton...
– Chut, c'est fini.
Il continue de pleurer pendant un long moment, je continue à le serrer dans mes bras en le berçant. Mes propres joues sont baignées de larmes elles aussi.

– Là, tâche de dormir un peu, dis-je alors qu'il se calme.
– Merci Ludvik d'être avec moi. Merci... je...
Il s'endort bien plus vite que je ne l'aurais imaginé, je redescend doucement le long de l'échelle et rejoins Marc.
– Je l'ai aidé à dormir, chuchote-t-il.
– Tu as bien fait. Préparons nos affaires, plus tôt nous serons partis demain matin, mieux cela vaudra.
– Une journée à rien faire sur Terre...
– Réjouis-toi de pouvoir bénéficier de ce genre de répit.

[KLO7514]

Cette solution de "demi-disparition" n'a rien de réjouissant. Ced. ne pourra donc plus jamais quitter Outremonde! Il sera donc "enterré" sur Terre. Cependant, y aura-t-il possibilité pour lui d'entrer en relation avec les siens "terrestres"?