28-07-2020, 05:28 PM
CHAPITRE XXXVIII
''In vino veritas''
Après plusieurs jours de chevauchée, Burydan arriva à Denderah. Il prit une chambre dans la seule et unique auberge du village et alla directement à la taverne. Il savait que son oncle y passait le plus clair de son temps. Il balaya la salle du regard mais ne le vit pas. Mais il avait sa petite idée sur comment glaner des informations sur lui. Il s’installa à une table et commanda une bouteille de picrate bouchée. Un homme, qui semblait déjà un peu ivre, lorgna la bouteille avec envie.
- Veux-tu te joindre à moi, l'ami, je déteste boire seul, dit Burydan.
- Merci à toi, l'étranger. Je meurs de soif...
L'homme s'assit et Burydan remplit son gobelet.
- Je me nomme Berticot, dit l'homme.
- Et moi Kadosh, mentit Burydan ?
- Alors, Kadosh, que viens-tu faire à Denderah.
- Je suis juste de passage. Je me rends à Dun Morogh. Ami, dis-moi, mon père connaissait un homme qui habitait ici, il me semble. Un certain... Anet... Anet Versatus... il habite toujours ici ?
- Le vieil Anet ? Pour sûr qu'il habite ici... on le voit même souvent écluser quelques chopines...
Berticot regarda avec tristesse son gobelet vide, mais sourit quand Burydan le remplit de nouveau...
- Le pauvre Anet... c'est une triste histoire...
- Ah bon ?
- Oui. Il y a de ça quelques années... six ans, je crois... son neveu à tuer le fils d'Anet...
Burydan blêmit.
- ...une histoire de fille, à ce qu'il paraît...
- Et... il a été arrêté ?
- Non, il s'est enfuit. Il est sans doute mort, à l'heure qu'il est...
''L'ordure, se dit Burydan, m'accuser moi d'avoir tué Darren''.
- Sa femme en est morte de chagrin...
- Ah, il est veuf alors...
- Oui et non. Il s'est remarié avec Ninon... un beau brin de fille, beaucoup plus jeune que lui... et elle n'est pas à la noce, la pauvre...
- Pourquoi ça ?
- Parce que le vieil Anet est jaloux comme c'est pas permis... dés qu'un homme la regarde, et il faut dire qu'elle est plutôt jolie, il l'accuse de l'avoir aguiché et elle reçoit une danse...
Burydan avait les informations qu’il voulait. Il paya l'aubergiste et sortit. Il emprunta le chemin qui menait à la ferme de son oncle et, arrivé devant, il démonta. Il frappa trois coups secs à la porte.
Une femme lui ouvrit. Elle aurait été très belle si elle n'avait pas eu un œil au beurre noir et des ecchymoses sur les joues.
- Qui c'est ? demanda la voix de son oncle depuis la cuisine.
- C'est un homme...
- Un homme ?! rugit son oncle. Encore une de tes amants traînée !
Son oncle apparut, et la haine de Burydan ressurgit.
- Va dans la chambre, catin, je m’occuperai de toi plus tard.
Ninon blêmit et se précipita dans sa chambre.
- Qui es-tu, toi ? Tu veux baiser ma femme, hein, c'est ça ? Tu es un...
Burydan ne le laissa pas finir. Il lui asséna un grand coup de poing dans l'estomac. Son oncle beugla et se plia en deux. Burydan appuya sur sa tête en relevant son genou. Le nez de Anet explosa et il cria de nouveau. Burydan l'attrapa par ses cheveux gras et lui asséna un crochet du droit qui l'envoya s'écraser contre le mur.
- C'est moins facile qu'avec une femme, hein ?!
Il lui asséna un crochet du gauche.
- Ou qu'avec un gosse, hein ?!
Burydan se lâcha. Il frappa encore et encore. Son oncle essaya bien de riposter, mais il était trop lent, il essaya de se protéger comme il pouvait, mais Burydan trouvait toujours la faille. Son oncle chuta à terre et Burydan lui asséna une volée de coups de pieds dans les côtes.
- Mais qui es tu... réussit à dire Anet.
Burydan mit un genou sur son ventre et planta ses yeux dans les siens.
- Regarde moi, pourriture, regarde moi bien...
Son oncle le regarda, et, au bout de quelques secondes :
- Bu... Bury... Burydan... mais non... tu es... tu es mort... tu es...
Burydan lui cracha au visage, comme il l'avait fait au corps de son fils, sortit une dague effilée et la lui plongea dans le cœur. Son oncle glapit, un peu de sang coula à la commissure de ses lèvres, et il poussa un dernier soupir rauque avant de mourir.
Burydan se releva, rangea sa dague et se dirigea vers la chambre. La porte était fermée. Il la défonça d'un coup de pied. Ninon hurla et se recroquevilla dans un coin.
- N'aies pas peur. Je ne te ferai pas de mal... sors... sors, te dis-je !
Ninon, trémulante, suivit Burydan dans la cuisine. Elle poussa un glapissement en voyant son mari, sur le sol.
- Il est... il est...
- Mort ? Oui. Ne me dis pas que tu le regrettes...
Elle ne répondit pas. Elle s’approcha du cadavre, le toqua du pied et, voyant qu'il ne bougeait pas, elle lui cracha au visage.
- Le regretter ? dit-elle. Il me battait tous les jours, me forçait à faire des choses dégoûtantes et dégradantes au lit, même quand je n'en avais pas envie, m'a même obligée à jouer la chienne lubrique dans le lit d'autres hommes pour payer ses dettes, après quoi il me battait en me traitant de ''putain cramante'' et en me disant qu'il était sûr que j'avais aimé ça... alors, le regretter, sûrement pas...
- Pourquoi l'avoir épousé ?
- Il m'a... touchée... il avait l'air tellement triste... la mort de son fils, qu'il chérissait, puis de sa femme...
- Son fils qu'il chérissait ?!?! cette ordure à craché sur son visage expirant !
- Co... comment ?
- Il a craché au visage de son fils alors qu'il mourait...
- Co... comment le sais-tu ?
- Ce n'est pas important. Il a eu ce qu'il méritait...
- Oui... mais... qu'est-ce que je vais devenir maintenant ?
Burydan prit une barrette d'astrium dans son escarcelle et la posa sur la table. Ninon écarquilla les yeux.
- Ça, c'est pour te permettre de vivre quelques temps. Vends la ferme et les terres et pars. Tu es très jolie et tu pourras, dans une grande ville, trouver un bon mari. Un vrai gentil cette fois.
Ninon acquiesça.
- Mais il y a une condition. Attends deux heures avant de prévenir la milice. Tu leur diras qu'un homme est venu et que ton mari t'as ordonné de t'enfermer dans ta chambre. Tu as entendu une dispute et, quand enfin tu es sortie, tu as retrouvé ton mari mort. Tu n'as pas vu le visage de l'homme et tu ne sais pas qui c'est... nous sommes d’accord ?
Ninon opina. Burydan lui fit répéter sa petite histoire et lui fit un petit bisou sur les lèvres.
- Prends soin de toi, jolie Ninon...
- Attends... qui es-tu ?
- Personne. Juste un... fantôme...
Burydan remonta sur son cheval et prit la route qui menait à El'Amarna.